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Interprétation des résultats

4. Discussion

4.3. Interprétation des résultats

L’analyse des résultats réalisée dans la section précédente, nous permet, désormais, d’avancer que nos données ne sont pas en mesure de confirmer pleinement certaines hypothèses initialement formulées. C’est ce que nous allons expliciter dans la suite de notre travail.

Tout d’abord, dans notre première hypothèse théorique, nous prédisions un effet de l’âge sur l’amélioration des capacités d’inhibition entre 4 et 6 ans.

L’ANOVA effectuée sur les moyennes des scores au Stroop Fruits et au Go/No-Go entre les groupes d’âge, nous permet de confirmer partiellement notre première hypothèse. En effet, l’analyse révèle un effet significatif de l’âge dans la réalisation des quatre parties du Stroop Fruits. Avec l’âge, Les enfants deviennent de plus en plus en performants dans la condition contrôle (Stroop II) et également dans la condition interférente (Stroop IV). Cet effet est d’autant plus marqué entre 5 et 6 ans. Ces résultats vont dans le sens de l’étude menée par Diamond (2001). En effet, cette recherche démontre que les performances à trois tâches (Stroop « Jour/Nuit », « Tapping », « Trois chevilles de couleurs ») suivent un développement progressif entre 3 ans et demi et 7 ans. Prevor et Diamond (2005) ont utilisé une tâche de Stroop de type couleur/objet chez des enfants de 3 ans et demi à 6 ans et demi, ils soulignent également que les enfants deviennent plus rapides dans la dénomination des couleurs. Epsy et al. (2001) ont aussi mis en évidence un effet significatif de l’âge à l’épreuve Shape School relevant une augmentation des stimuli correctement identifiés aux conditions de contrôle et d’inhibition entre 42 mois et les enfants plus âgés. Les capacités d’inhibition continuent donc de croître au cours de la période préscolaire comme l’atteste l’amélioration rapide des performances des enfants entre 3 et 6 ans à l’épreuve de la Statue (NEPSY) (Klenberg et al., 2001, cités par Roy, 2007). Concernant l’amélioration plus marquée des performances entre 5 et 6 ans, ce résultat corrobore les données obtenues par Mischel et Mischel (1983). En effet, les auteurs indiquent que c’est surtout entre 5 et 6 ans que les enfants sont capables d’inhiber un comportement prédominant.

L’analyse des corrélations met également en évidence une relation négative significative entre l’âge en mois et les scores d’interférence en [%] au Stroop Fruits, indiquant une amélioration de la capacité à résister à l’interférence avec l’âge. Ce résultat va dans le sens de Dempster (1993) qui suggère que l’enfant de 2 à 8 ans devient de moins en moins sensible aux trois formes d’interférence suivantes : motrice, perceptive et linguistique.

Ce sont surtout les résultats obtenus au Go/No-Go qui ne nous permettent pas de confirmer pleinement notre hypothèse. En effet, les données issues de l’ANOVA ne relèvent pas d’effet significatif de l’âge à cette épreuve, ce qui est contraire à ce que Monette et Bigras (2008) suggèrent. Les auteurs précisent que les tests de type Go/No-Go sont sensibles à l’âge et démontrent de bons indices de fidélité. Ils auraient aussi l’avantage de donner un score continu et plafonneraient à un âge plus avancé que 4 ans. Sur le plan descriptif, nous observons que les scores plafonnent quasiment dès 4 ans (voir Tableau 2). De plus, nos résultats ne corroborent pas les études ayant obtenu des résultats significatifs à ce type d’épreuve, notamment Schirlin (2001), Bell et Livesey (1985) et Livesey et Morgan (1991) qui ont mis en évidence les nets progrès réalisés à ce type de tâche entre 3 et 6 ans et plus particulièrement entre 5 et 6 ans. Notons que ces études portaient plus particulièrement sur l’inhibition motrice, tandis que notre tâche faisait appel à l’inhibition verbale. Cela expliquerait en partie cette discrépance au sujet de la significativité des données. Néanmoins, les résultats de notre recherche contredisent les propos de Levin et al. (1991), ceux-ci suggèrent que c’est surtout entre 7 et 9 ans que les plus grands progrès sont réalisés par les enfants pour ce type de tâche.

Précisons également que l’intracorrélation aux épreuves Go/No-Go et Stroop Fruits s’est avérée non significative. Il est pourtant important que les épreuves corrèlent entre elles et cela dans le but de disposer d’épreuves qui permettent de mesurer un même construit (l’inhibition). Nos résultats ne vont d’ailleurs pas dans le sens de Diamond (2001) qui relève de fortes corrélations entre les 3 épreuves d’inhibition utilisées dans son étude.

A partir de ces considérations, diverses critiques peuvent être formulées à l’encontre de augmente sensiblement de 4 à 6 ans. Ce qui nous permet de supposer qu’un traitement plus efficace et rapide de l’information serait associé à des progrès significatifs aux tests mesurant l’inhibition.

Les indices statistiques issus de l’ANOVA mettent en évidence un effet significatif de l’âge sur les performances en VdT entre 4 et 6 ans. Les enfants sont de plus en plus rapides dans le traitement de l’information, ce qui se traduit par une diminution des temps de réalisation avec l’âge à l’épreuve du Corkum. Ces résultats vont dans le sens des données obtenues

par Kail (1991), Kail et Ferrer (2007). En effet, les auteurs ont mis en évidence que la VdT augmente sensiblement au cours de la petite enfance et à l’âge scolaire. Kail et Ferrer (ibid) insistent d’ailleurs sur le fait que le pattern développemental le plus évident est que la performance en VdT s’améliore à travers l’enfance et l’adolescence, mais plus rapidement encore au cours de l’enfance. Nos résultats corroborent également les données de Miller et Vernon (1997) chez les enfants d’âge préscolaire. Les auteurs indiquent que déjà entre 4 et 6 ans des gains substantiels en VdT apparaissent. Par contre, notre analyse de Contrastes révèle que c’est surtout entre 5 et 6 ans que les progrès sont les plus significatifs, ce que Miller et Vernon (ibid) ne mettent pas en évidence dans leur étude. En effet, ils soulignent que le taux de changement en VdT est plus rapide chez les jeunes enfants de 4-5 ans qu’à 6 ans. La première partie de notre seconde hypothèse théorique est donc vérifiée.

Enfin, si l’on analyse attentivement le lien entre VdT et capacités d’inhibition, nous observons l’existence d’une relation significative entre VdT et les quatre parties du Stroop Fruits. Ce lien indique que plus l’enfant est rapide dans la réalisation de l’épreuve plus ses scores au Stroop Fruits (en condition contrôle et interférente) sont meilleurs. Ces résultats confirment ce que McAuley et White (2011) ainsi que Christ et al. (2001) ont mis en évidence dans leurs études respectives. Les chercheurs ont démontré que de nettes améliorations en VdT liées à l’âge menaient à des progrès importants au niveau des capacités d’inhibition. En d’autres termes, les améliorations liées à l’âge dans l’inhibition de la réponse sont largement médiatisées par des progrès concomitants en VdT. Toutefois, la relation entre le Score d’interférence en [%] au Stroop Fruits et la VdT s’est avérée non significative, il en est de même pour le Go/No-Go et la VdT.

Ces résultats ne vont donc pas complètement dans le sens des considérations de McAuley et White (ibid) et de Christ et al. (ibid) et, par conséquent, ne nous permettent pas de confirmer pleinement la seconde partie de notre hypothèse.

Pour notre troisième hypothèse théorique, nous postulions que les ressources attentionnelles augmenteraient sensiblement de 4 à 6 ans. Cette supposition nous permettrait de mettre en évidence une association entre de meilleures capacités attentionnelles et une amélioration des performances en matière d’inhibition.

Les indices statistiques relatifs à l’ANOVA sur les moyennes des scores aux trois parties du Corkum entre les trois groupes d’âge mettent effectivement en évidence un effet significatif de l’âge sur les performances des enfants de 4 à 6 ans. Il en est de même pour le score composite « Attention ». On note donc un effet significatif de l’âge sur les capacités attentionnelles des enfants de cette tranche d’âge. Cet effet sur les performances des enfants serait plus marqué entre 5 et 6 ans. Ces résultats vont dans le sens d’Epsy et al.

(1999), les auteurs soulignent que les enfants d’âge préscolaire montrent un développement rapide et stable de leurs capacités attentionnelles entre 3 et 6 ans incluant le développement de l’habileté à « shifter » leur attention de manière plus fluente et à inhiber des comportements moteurs non pertinents pour la réponse à donner. Nos résultats confirment également ce que Corkum et al. (1995) relèvent dans leur étude. Ils observent une augmentation des performances pour les 4-5 ans par rapport aux 3 ans aussi bien au niveau du temps de réalisation de la tâche qu’au niveau de la précision. La première partie de notre hypothèse se trouve donc vérifiée.

Au niveau de la relation entre capacités attentionnelles et inhibition, nous constatons que les résultats abondent dans le sens de notre hypothèse. En effet, l’amélioration des capacités attentionnelles est associée positivement à une augmentation significative des performances aux quatre parties du Stroop Fruits ainsi qu’à l’épreuve Go/No-Go. Seule la corrélation entre la variable « Attention » et la variable Stroop interférence en [%] s’est avérée non significative. Ces résultats, dans leur ensemble, corroborent les constats de Bastin et Deroux (2007) qui insistent sur le fait que le développement des capacités attentionnelles soit lié à l’acquisition des capacités d’inhibition. En effet, ils précisent que « l’installation progressive d’une meilleure inhibition permettrait une sélection plus efficace des stimuli cibles par la suppression des distracteurs » (p. 99). On retrouve également l’observation faite par Monette et Bigras (2008) selon laquelle « les tests d’inhibition devraient corréler avec des indicateurs de comportements d’inattention, d’impulsivité et avec les tests d’attention, étant donné l’importance des processus attentionnels lors de la réalisation de tests de FE » (p. 330). Nos données vont dans le sens de Akshoomoff (2002) et Passler et al. (1985), les chercheurs relèvent qu’une amélioration de l’habileté à ignorer les distracteurs potentiels et la diminution de l’impulsivité joueraient un rôle clé chez les jeunes enfants dans le fait de porter sélectivement leur attention sur les sources d’information dans l’environnement pour maximiser l’apprentissage. En définitive, nos résultats laissent supposer, tout comme le relèvent Miyake et al. (2000), qu’il existerait un mécanisme commun aux FE qui se caractériserait par un système central inhibiteur ou par l’attention. Les auteurs insistent sur le rôle clé de l’attention dans le développement des FE, constat que Garon et al. (2008) soutiennent en indiquant que la maturation de la capacité attentionnelle forme une fondation pour le développement des FE au cours de la période préscolaire.

Au vu des résultats obtenus avec notre échantillon, nous sommes en mesure de confirmer partiellement notre hypothèse de départ.