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Interprétation par un modèle de mélange de lois log-normales

V. Distributions des tailles et vitesses des gouttes

V.5 Discussion sur les distributions de tailles des gouttes

V.5.2 Interprétation par un modèle de mélange de lois log-normales

L

a théorie du mélange de lois (log-)normales de variances et moyennes distribuées est décrite, entre autres, par Barndorff-Nielsen (1977 ) et Barndorff-Nielsen et al. (1982 ). Ces derniers notent que les pdf résultantes sont souvent obtenues comme formes limites asymptotiques lorsque les variables aléatoires considérées ne sont pas indépendantes. En particulier, ce processus est à l’origine de la famille des distributions hyperboliques géné- ralisées. Il est basé sur les considérations suivantes : soit une variable aléatoire 𝑑 (i.e. le diamètre des gouttes dans notre cas) suivant une loi log-normale dont la moyenne ln 𝑑 est reliée à sa variance 𝜎2 par une relation linéaire de la forme :

ln 𝑑 = 𝜇 + 𝛽𝜎2 (V.17)

où 𝜇 est un paramètre de position, représentant le logarithme du diamètre moyen d’une distribution de variance nulle (i.e. une distribution monodispersée), et 𝛽 un paramètre de dérive.

Si 𝜎2 est elle-même distribuée selon une certaine loi, la pdf conditionnelle de 𝑑 (i.e. la

somme pondérée, par les probabilités de 𝜎2, de l’infinité de log-normales définies par la

distribution de 𝜎2) est alors l’une des distributions hyperboliques généralisées : si 𝜎2 suit

une loi gamma, on obtient une distribution normale-gamma, si elle suit une loi inverse- gaussienne, on obtient une distribution normale-inverse-gaussienne, si elle suit la loi pro- posée par Barndorff-Nielsen (1977 ), on obtient une distribution log-hyperbolique, etc... En pratique, ce processus peut être appliqué à n’importe quelle distribution de variancei (i.e.

la distribution du mélange). La pdf ainsi obtenue peut alors être représentée comme le résultat d’un mouvement Brownien de dérive 𝛽, commencé à 𝜇, et observé à des moments aléatoires (Barndorff-Nielsen et al. 1982 ).

D’après les observations de la section V.4.7, on peut donc se demander si, une fois la bonne distribution des variances déterminée pour les pdf des diamètres de gouttes par classes de vitesses axiales, ce processus pourrait permettre de retrouver la distribution totale des diamètres expérimentaux. On peut pour cela commencer par remarquer que malgré la dis- persion importante des données expérimentales due à un nombre insuffisant de gouttes dans chaque classe (notamment pour les faibles vitesses), la relation V.17 semble approximati- vement vérifiée dans notre cas, comme illustré sur la figure V.31ii. Les diamètres moyens

de chaque classe 𝑖, 𝑑(𝑖), paraissent également décroître lorsque la vitesse augmente (cf fi- gure V.30). On peut constater sur la figure V.32 que le logarithme des diamètres moyens

i. Notons également que ce principe de mélange de pdf peut être utilisé avec des distributions de base autres que la loi log-normale.

ii. Dans cette exemple, les vitesses axiales des gouttes ont été reparties en classes de 0, 25 m/s de largeur, prises entre 10 m/s et 20, 5 m/s. En effet, au-delà de ces bornes, le nombre de gouttes devient trop faible pour obtenir des résultats satisfaisants

V.5 Discussion sur les distributions de tailles des gouttes

Figure V.31

Comparaison entre la variance et le logarithme du diamètre moyen de chaque classe de vitesses axiales, pour 𝑈𝑙𝑠= 0, 091 m/s et 𝑈𝑔𝑠= 13 m/s.

Figure V.32

Comparaison entre la vitesse médiane et le logarithme du diamètre moyen de chaque classe de vitesses axiales, pour 𝑈𝑙𝑠= 0, 091 m/s et 𝑈𝑔𝑠= 13 m/s.

Figure V.33

Comparaison entre les variances mesurées de chaque classe de vitesses axiales, la distribution déduite de celle des vitesses par l’équation V.19, et la loi gamma, pour

𝑈𝑙𝑠= 0, 091 m/s et 𝑈𝑔𝑠 = 13 m/s.

semble, comme pour 𝜎2, dépendre linéairement de 𝑉

𝑥(𝑖) :

ln 𝑑(𝑖) = ln 𝑑0− 𝛾𝑉𝑥(𝑖) (V.18)

où 𝑑0 représente le diamètre moyen des gouttes possédant une vitesse nullei, et 𝛾 a une

dimension homogène à l’inverse d’une vitesse. Dans cette relation, les vitesses 𝑉𝑥(𝑖) utili-

sées sont les valeurs médianes de chaque classe.

Des équations V.17 et V.18, on peut déduire la variance de chaque classe à partir de leur vitesse. La relation obtenue peut s’écrire sous la forme :

𝜎2(𝑖) = 𝑉𝑚𝑎𝑥− 𝑉𝑥(𝑖)

𝜖 (V.19)

où 𝑉𝑚𝑎𝑥 = 𝜇−ln(𝑑𝛾 0) représente la vitesse pour laquelle la variance devient nulle, et 𝜖 = 𝛽𝛾

a la dimension d’une vitesse. Grâce à l’équation V.19, il est possible de déterminer la distribution des 𝜎2 à partir de celle des vitesses axiales. On peut alors remarquer que le

paramètre 𝑉𝑚𝑎𝑥 sert à "inverser" les pdf (comparer les figures V.33 et V.12) et 𝜖 est un

paramètre d’"écartement" de la distribution. Si les classes ont été définies de largeur égale, la probabilité expérimentale des variances de chacune peut être déterminée en divisant le nombre de gouttes qu’elles contiennent par leur nombre total. La figure V.33 montre un exemple de comparaison entre les probabilités expérimentales de 𝜎2 ainsi obtenues et leur

distribution f (𝜎2)déduite de f (𝑉

𝑥) (cf section V.3.1) par l’équation V.19. Etant donné la

dispersion des mesures, l’accord constaté est raisonnablement bon.

i. Il s’agit donc ici d’un diamètre "virtuel" : en effet, les gouttes se déplacent déjà à la vitesse des vagues lorsqu’elles sont arrachées.

V.5 Discussion sur les distributions de tailles des gouttes

Figure V.34

Comparaison entre la distribution expérimentale des diamètres et le résultat du modèle de mélange de lois log-normales, pour 𝑈𝑙𝑠= 0, 091 m/s et 𝑈𝑔𝑠 = 13 m/s.

Figure V.35

Comparaison entre la distribution expérimentale des volumes et le résultat du modèle de mélange de lois log-normales, pour 𝑈𝑙𝑠= 0, 091 m/s et 𝑈𝑔𝑠 = 13 m/s.

L

a distribution des 𝜎2 est donc dans notre cas étroitement liée à celle des vitesses

axiales des gouttes. Cette dernière ne semble pas pouvoir être décrite par une loi théo- rique "simple", mais plutôt comme la somme de différentes composantes (cf section V.3.1). En conséquence, f (𝜎2) ne suit pas l’une des lois proposées dans les différents travaux de

Barndorff-Nielsen et ses co-auteurs. Cependant, comme illustré sur la figure V.33, la loi gamma n’est pas trop éloignée de la distribution expérimentale de 𝜎2, ce qui explique que

la pdf expérimentale totale des diamètres des gouttes soit relativement bien décrite par une loi normale-gamma (cf section V.2.3), bien que celle-ci tende à sur-estimer la queue de la distribution.

En utilisant les équations V.17 et V.19, on peut donc maintenant "reconstruire" la pdf totale des diamètres des gouttes du spray n(𝑑), qui se calcule par la formule :

n (𝑑) = ∫ 𝑉𝑚𝑖𝑛 𝑉𝑚𝑎𝑥 1 𝑑𝜎√2𝜋𝑒 − 1 2𝜎2 ( ln 𝑑 𝑑 )2 f (𝜎2) d𝜎2 (V.20)

La borne inférieure 𝑉𝑚𝑖𝑛est ici introduite car le nombre de gouttes se déplaçant à de faibles

vitesses est trop petit pour nous permettre de vérifier que les équations V.17 et V.19 sont également valables dans ces conditions. Cela pourrait ne pas être le cas, car il a été constaté que les résultats obtenus étaient moins bons lorsque cette borne n’était pas utiliséei.

Ne disposant pas d’expression analytique pour f (𝜎2), celle-ci est ici déduite de la pdf ex-

périmentale de 𝑉𝑥, et on procède par sommation numérique. La comparaison entre les

résultats obtenus par cette procédure et les distributions expérimentales des diamètres et des volumes des gouttes sont respectivement présentés sur les figures V.34 et V.35. Dans ces deux exemples, l’accord constaté est excellent. C’est également le cas pour les autres conditions expérimentales. La valeur des paramètres utilisés pour ajuster ce modèle aux pdf expérimentales pour les différents points de mesure est résumée dans le tableau V.6.

Point de mesure 1 2 4 5 𝑉𝑚𝑎𝑥 (m/s) 20,4 21,45 26,15 27,3 𝑉𝑚𝑖𝑛 (m/s) 8,5 8,5 10 10,5 𝑑0 (mm) 0,745 0,498 0,586 0,468 𝜖(m/s) 14,9 15,9 25,3 28,95 𝛾 (s/m) 0,138 0,105 0,097 0,079 Tableau V.6

Résumé des différents paramètres utilisés pour le modèle de "mélange" de lois log-normales en fonction des conditions expérimentales.

Il est donc possible de déterminer la pdf totale des tailles de gouttes du spray uniquement à partir de celle de leurs vitesses axiales, à condition de connaître celle-ci ainsi que les

i. Dans l’exemple des figures V.34 et V.35, 𝑉𝑚𝑖𝑛est fixé à 8, 5 m/s. Seulement 6% des gouttes possèdent dans ce cas une vitesse inférieure.

V.6 Synthèse et perspectives paramètres 𝑉𝑚𝑎𝑥, 𝜖 , 𝑑0 et 𝛾. Une étude plus approfondie de la manière dont sont trans-

portées les gouttes devrait permettre de les modéliser en fonction des propriétés physiques pertinentes de l’écoulement.