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Inexistence ou non-respect des normes d’urbanisme

DEUXIEME PARTIE : UN ETAT IMPUISSANT FACE AUX INONDATIONS

SECTION 1 : ETAT DES LIEU DU CADRE INSTITUTIONNEL ET RÈGLEMENTAIRE RÈGLEMENTAIRE

1. Inexistence ou non-respect des normes d’urbanisme

Parmi les causes des inondations, l’absence de planification urbaine rigoureuse est citée en première ligne. Si les populations ont pu s’installer dans les zones non aedificandi sans être délogé, cela était encouragé par l’absence de normes d’urbanisme claires et précises. Cela est d’autant plus vrai que les quantités de pluies reçues à Dakar sont moins importantes que dans les régions du Sud, ou dans d’autres pays. Ces derniers ne connaissent pas autant de problèmes d’inondation.

Il est important de faire part d’une remarque faite par un ancien émigré B. THIOUNE, qui vivaient au Gabon et qui est rentré au pays, après sa retraite. Sa réflexion est troublante. P 11 : « Comment se fait-il que les pays de l’Afrique équatoriale reçoivent deux, voire trois fois plus de pluies que le Sénégal, mais cette eau, par un cheminement naturel à travers des ravins, des bassins naturels, des forêts arrive à s’écouler pour se retrouver dans le fleuve, la rivière ou simplement dans la nature, mais sans gêner personne. Moi, j’ai acheté cette maison avec mes économies, et si l’Etat m’avait dit que la zone était inondable, je n’aurai pas investi autant d’argent dans le terrain et le bâtiment ».

Des cas identiques à l’expérience de B. Thioune, il y en a beaucoup au niveau de la banlieue. Et toutes ces victimes pointent du doigt la légèreté de la gestion foncière et urbanistique de la région de Dakar.

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En revenant sur sa remarque en rapport avec la pluviométrie faible, comparée à l’Afrique centrale, il convient de remarquer qu’il pleut beaucoup plus qu’à Dakar et, pourtant, on n’entend pas parler d’inondations aussi récurrentes. Mais aussi beaucoup de villes se trouvent sous des latitudes particulièrement pluvieuses et ne souffrent nullement des inondations du fait de ruissellement naturel.

Nous verrons dans cette partie comment les multiples interventions des Ministères de l’Urbanisme, de l’Économie et des Finances, de l’assainissement et de l’équipement, des gouverneurs, des maires des communes d’arrondissement contribuent à exacerber le phénomène des inondations. Ce faisant, il serait impossible de déterminer les responsabilités de chaque acteur dans les inondations. Pour résoudre ces questions, concevoir et appliquer un plan directeur d’urbanisme de Dakar avec des lois et des règlements d’urbanisme opposables à tous les utilisateurs de la ville deviennent urgents. Avec la création du Ministère en charge des inondations, les habitants de la banlieue pensaient que cela allait résoudre le problème, mais tel n’est pas l’avis des populations.

A Yeumbeul, A. MBENGUE, Président du MEYS, indique que :

P 3 « Même si on sent des efforts de la part du nouveau Ministère, il n’y a pas eu de changement considérable. Les Autorités de cette nouvelle création parlent toujours de manque de moyens. Pire, les populations ne sont pas impliquées dans les prises de décision. Au début, on les voyait quand il y avait des inondations, aujourd’hui ils viennent rarement ». La mise en place des plans directeurs, pour les différentes villes et chefs-lieux, devrait s’inscrire dans un plan plus global d’aménagement du territoire national. Les potentialités de chaque terroir seront ainsi, identifiées et exploitées au bénéfice des populations locales minimisant ainsi l’exode rural. Et pour l’habitat non planifié en zone inondable, la puissance publique devrait procéder à des relogements de populations, suivi à une requalification et une réhabilitation des quartiers concernés.

Quelle que soit la position, si un minimum d’aménagement n’est pas effectué et un certain nombre de règles respectées en matière d’urbanisation, on risque de subir continuellement des inondations. Même située sur une pente naturelle et bénéficiant d’un réceptacle naturel, une ville doit aménager son espace, en se débarrassant de tous les obstacles physiques ou

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artificiels qui peuvent faire entrave à l’écoulement des eaux de ruissellement. Il en est ainsi des occupations anarchiques sans aménagements préalables, sans système d’assainissement adéquat et dimensionné pour évacuer les eaux. Les conclusions des rapports du PROGED recommandent à l’État sénégalais de construire très rapidement des canaux d’évacuation entre la route Nationale 1 et la mer pour qu’en cas d’inondations exceptionnelles, que les eaux de pluie soient drainées facilement. Les consultants avaient aussi préconisé, de façon urgente, l’arrêt de toute nouvelle construction dans la zone naturelle de captage, afin que les eaux en provenance des anciens quartiers puissent être évacuées par le canal de Front de Terre. De même, ils avaient recommandé la démolition des immeubles se situant dans la zone limitrophe du Technopole de Pikine notamment entre la Patte-D’Oie et Pikine. Concernant la Niaye de Pikine, les consultants ont fortement exhorté le reboisement de cette zone humide pour lui redonner sa vocation première d’infiltration et de régulation des eaux de drainage. Aucune de ces recommandations n’a été suivie d’effet (PROGED, 2010 ; GEOVILLE, 2013). A ce titre, M. MBAYE de la SAABA explique que :

P 7 : « l’Etat sait bien ce qu’il doit faire, mais ne s’attaque jamais aux priorités ».

L’instauration et l’application d’un programme écologique et de sauvegarde des Niayes constituent l’une des solutions incontournables, pour lutter contre les inondations. Désengorger Dakar et l’urbaniser véritablement pourraient constituer un début de solution. Au contraire, elle s’est « rurbanisée » faute de volonté politique et de vision concrète à court, moyen et long terme. En réalité, il n’y a pas de logique à vouloir densifier davantage la ville de Dakar qui est déjà pleine.

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