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INONDATIONS SUR LES POPULATIONS ET LE MILIEU NATUREL

SECTION 4 : LES LIMITES DE LA PLANIFICATION URBAINE AU SENEGAL SENEGAL

2. Le déguerpissement, seul moyen

En matière de lutte contre les occupations irrégulières, l’administration sénégalaise ne dispose que d’une arme unique, simple et brutale : le déguerpissement. Ce n’est qu’une mise en œuvre des textes qui ne donne lieu à aucun dédommagement ni relogement et traduit, en même temps, l’exercice de la maîtrise étatique du sol. Le déguerpissement peut donc être la conséquence d’une décision de justice, quand existe une emprise illicite du domaine de l’État. L’article 20 du Code du domaine de l’État prévoit une répression pénale en cas d’occupation irrégulière d’une dépendance du domaine public ou en cas d’emprise d’un bien grevé d’une servitude d’utilité publique. L’article 423 du Code pénal prévoit des sanctions en cas d’occupations irrégulières de terrains immatriculés. Cette répression s’accompagne de sanctions civiles (Caverivière, 1988).

De même, l’article 12 du Code de l’urbanisme informe que, lorsque l’autorisation de construire fait défaut, le tribunal doit prescrire, aux frais du constructeur, la démolition et la remise en état des lieux. Le déguerpissement peut également être le résultat d’une décision administrative et peut être prononcé par les autorités administratives avant même toute intervention judiciaire. Cette mesure administrative est, en effet, possible si les constructions en cause ont été édifiées sur un terrain occupé sans titre ni droit. Et la décision administrative sera prise par le service des domaines, si le terrain fait partie du patrimoine de l’État. La demande émane des services de l’urbanisme, mais la décision est prise au plus haut niveau politique. Les conséquences des déguerpissements sont, en principe, très dures pour le déguerpi, qui en situation irrégulière soit à l’égard du sol, soit à l’égard du bâti, n’a droit à aucune indemnisation ni à aucun relogement.

A cela il s’ajoute que des quartiers spontanés ont été créés en catastrophe. Ils n’étaient pas viabilisés, les statistiques n’étaient pas connues de l’État. Comme exemple, le quartier de Fass qui était un ensemble de taudis en plein centre-ville a été délocalisé à Fass Mbao.

L’emplacement de l’ancien quartier Kip coco, un taudis a été démantelé, il est occupé aujourd’hui par le lycée Kennedy. Les HLM 5 ont remplacé le quartier Angle Mouss pendant que les HLM Gibraltar ont remplacé le quartier Figue Micc. L’année 1996 marque le début des derniers déguerpissements qui se sont échelonnés sur dix ans. Dans la gestion de l’espace,

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ces déguerpissements sont de grande envergure. Autour de l’Autoroute, des bidonvilles se sont déplacés vers Guédiawaye, un site d’extension de Pikine. La mutation spectaculaire de l’espace urbain dakarois n’est, donc, que le résultat du déguerpissement à l’extérieur de la ville de citadins expulsés des îlots insalubres progressivement rasés. La naissance de Pikine en 1952, à 12 km de la capitale a été rendue possible grâce à une politique de déguerpissement. Un terrain appartenant à l’État et découpé en parcelles est devenu l’espace d’accueil des exclus de Dakar. Pikine et Guédiawaye : le lotissement voisin similaire a servi d’éponge à l’urbanisme du bulldozer. Cette ville de déguerpis s’est transformée à une ville inégale avec la multiplication d’implantations non contrôlées, et ceci après 1964. C’est dans ce cadre que la Banque Mondiale a lancé en 1972, le programme des Parcelles assainies lotissement localisé à côté de Cambérène. En plus des lotissements de Pikine, d’autres se sont développés le long de la route de Rufisque et le front d’urbanisation a atteint la forêt classée de Mbao.

Des campagnes de sensibilisation et d’information pour les populations sur le régime des immeubles bâtis ou non seraient un moyen efficace de limiter sinon de supprimer les opérations de déguerpissements. Et les pouvoirs publics avaient, dès 1972, mis en place un comité de surveillance chargé du contrôle des constructions et des occupations irrégulières dans la région du Cap-Vert. Leur objectif était d’éviter les déguerpissements et surtout de réduire les conséquences. Malheureusement, la création de ce comité de surveillance n’a pas été accompagnée de moyens réels. Les déguerpissements seront parfois inévitables et les pouvoirs publics tenteront d’offrir souvent, aux déguerpis, des indemnités ou des possibilités de relogement. La population dakaroise a en mémoire les grandes opérations de déguerpissement des années 1984-1985. Les populations qui, avec difficulté, ont eu à obtenir une parcelle dans cette zone urbaine ont vu leurs constructions s’effondrer sous les bulldozers. Les pouvoirs publics sont concernés d’abord par l’utilisation optimale du sol.

Dans l’ensemble, les conditions géographiques et économiques du Sénégal ont poussé les populations à se concentrer dans les centres urbains, entraînant une surpopulation urbaine. Ainsi, dans le cadre de la décentralisation, quelques quartiers irréguliers sont même érigés en communes d'arrondissement. C'est ainsi que les autorités ont adopté maintenant les opérations de restructuration et de régularisation foncière afin de conformer ces installations aux normes d'urbanisme. Pour lutter contre ce fléau, l’administration a élaboré une politique

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d’aménagement du territoire basée sur le développement de centres secondaires et le contrôle des investissements. Le futur de la métropole est déterminé par ces villes secondaires.

Conclusion du Chapitre 1

A la lumière des faits constatés, il convient de rappeler que l’installation des populations dans la zone des Niayes surtout à Pikine s’est déroulée de manière incontrolée et complètement modifiée l’ecosystème de la zone. Cette urbanisation s’est effectuée parallèlement au développement de l’agriculture périurbaine ainsi que d’autres activités économiques moins importantes. Ce terme d’agriculture périurbaine est apparu durant les dernières décennies. C’est une des expressions utilisées pour qualifier l’agriculture que l’on fait dans la ville ou dans sa périphérie qui se compose de maraîchage, d’horticulture et de l’arboriculture. Les premiers jardins maraîchers, dans la région de Dakar, auraient fait leur apparition, il y a de cela plus de 150 ans et depuis ils n’ont cessé de s’amplifier au point de faire de cette partie du pays, une des grandes zones de production de légumes et de fruits.

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CHAPITRE 2 : DE LA VARIABILITE CLIMATIQUE AUX