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Chapitre 3 Estimation d’une surface d’onde morcelée à partir d’un pistilogramme

3.4 Méthode d’intégration des différences de phase

3.4.2 Incertitude sur les valeurs reconstruites

Comme cela est décrit dans l’équation (3-47), la méthode des moindres carrés tente au mieux de faire correspondre le résultat aux mesures. Il faut néanmoins se poser la question de la propagation d’une erreur de mesure sur les valeurs reconstruites. En effet, les mesures ne sont pas parfaites, et il peut être intéressant d’analyser dans quelle proportion une erreur de mesure d’un pétale se retrouve sur les valeurs reconstruites.

Une étude a été menée dans le cas cartésien (Figure 3-60) par Freischlad et Koliopoulos (Freischlad, 1986). Les auteurs se sont intéressés à décrire les différents modèles existants pour calculer une surface d’onde à partir de géométries différentes des mesures des gradients (valeurs relatives).

Figure 3-60 : Schéma de mesure d’une surface d’onde (W(m,n)), représenté par les petits ronds (Freischlad, 1986). Chaque configuration (A, A’, B et B’) représente une manière différente de calculer les gradients Sx(m,n) et

Sy(m,n).

Pour le cas cartésien, les mesures effectuées par l’interféromètre PISTIL sont équivalentes à la configuration A de la référence (Freischlad, 1986), rappelée ici Figure 3-61 avec un exemple à Nsp×Nsp

sous-pupilles :

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Figure 3-61 : Exemple d’un pistilogramme à maillage cartésien contenant Nsp×Nsp sous-pupilles avec Nsp = 3.

L’exemple est pris sur les pistons, mais le même raisonnement peut être effectué avec les tips ou les tilts. Les pistons relatifs dPij sont équivalents aux gradients Sx(m,n) et Sy(m,n) de la configuration A de la Figure 3-60, tandis que les pistons absolus AN sont les équivalents des points du front d’onde W(m,n). Afin de calculer la propagation de l’erreur, nous avons supposé une surface d’onde plane avec des pistons absolus nuls, et donc des pistons relatifs nuls. Une erreur aléatoire 𝜀(𝑑𝑃), de type gaussien et de moyenne nulle, est appliquée sur les pistons relatifs puis l’erreur 𝜀(𝐴̂) associée est mesurée sur les pistons reconstruits via l’équation suivante, obtenue à partir de l’équation (3-48) :

𝜀(𝐴̂) = ( 𝐷𝑡 𝐵𝐷𝐵)−1𝑡𝐷𝐵𝜀(𝑑𝑃) (3-49)

Dans la référence (Freischlad, 1986), le terme de propagation de l’erreur perr, qui permet de calculer l’incertitude sur les valeurs reconstruites à partir de l’incertitude des valeurs mesurées, est calculée par la quantité suivante :

𝑝𝑒𝑟𝑟 = 𝑠𝑡𝑑(𝜀(𝐴̂))

𝑠𝑡𝑑(𝜀(𝑑𝑃)) (3-50)

Où std est la fonction écart-type tel que :

𝑠𝑡𝑑(𝑥) = √ 1

𝑁 − 1∑𝑁 (𝑥𝑖− 𝑥̅)2

𝑖=1

(3-51)

La quantité perr nous dit que si la résolution sur la mesure du piston relatif est de λ/20, alors la résolution sur le piston reconstruit 𝜀(𝐴̂) vaudra perr×λ/20.

Dans un mode cartésien où la surface d’onde est découpée en Ncart×Ncart points, l’auteur montre que la propagation de l’erreur prend la forme :

89 𝑝𝑒𝑟𝑟 = 𝐶1+ 𝐶2× 𝑙𝑛(𝑁𝑐𝑎𝑟𝑡) (3-52)

Où C1 et C2 sont deux constantes déterminées par simulation. La propagation de l’erreur évolue donc de manière logarithmique en fonction du nombre de rangées de sous-pupilles du front d’onde.

Dans la configuration A (Figure 3-60), identique au cas du pistilogramme en mode cartésien (Figure 3-61), les simulations effectuées dans la référence (Freischlad, 1986) fournissent une valeur de C2 = 1/π (la valeur de C1 n’est pas précisée, une estimation grossière à partir d’un graphique de l’article donne une valeur de C1 ≈ 0,08).

Nous avons alors suivi le même raisonnement pour déterminer la propagation de l’erreur pour un maillage hexagonal. Dans ce cas, une analogie a été appliquée pour faire correspondre le nombre Ncart, non plus au nombre de rangées mais, au nombre de couronnes de sous-pupilles Nhexa. Un exemple de maillage hexagonal avec Nhexa = 3 couronnes est présenté Figure 3-62.

Figure 3-62 : Exemple d’un pistilogramme à maillage hexagonal contenant Nhexa = 3 couronnes de sous-pupilles.

Une simulation a été accomplie en suivant une méthode Monte-Carlo avec 100000 tirages aléatoires de 𝜀(𝑑𝑃) pour différentes valeurs de Nhexa. La quantité perr est alors estimée grâce à :

𝑝𝑒𝑟𝑟 =1

𝑇∑ 𝑠𝑡𝑑 (𝜀(𝐴̂𝑡)) 𝑠𝑡𝑑(𝜀(𝑑𝑃𝑡))

𝑇 𝑡=1

(3-53)

T étant le nombre de tirages aléatoires, 𝜀(𝑑𝑃𝑡) l’erreur aléatoire du tirage t sur les pistons relatifs et 𝜀(𝐴̂𝑡) l’erreur associée aux pistons reconstruits du tirage t.

Nous avons effectué des simulations jusqu’à 35 couronnes, puis comparé l’évolution de perr avec un modèle de la même forme que (3-52). Les deux courbes sont présentées dans le graphique Figure 3-63 :

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Figure 3-63 : Evolution de la propagation de l’erreur selon le nombre de couronnes suivant un modèle (en rouge) et des simulations (en bleu).

Les simulations épousent parfaitement le modèle de propagation de l’erreur avec C1 = 0,5259 et C2 = 0,0624 entre 1 et 35 couronnes (soit entre 7 et 3781 sous-pupilles). Une simulation avec N = 40 couronnes (non représentée) confirme également le modèle.

Par exemple, dans le cadre du projet ICAN, l’objectif est d’effectuer la combinaison cohérente d’environ 10000 fibres lasers, supposément disposées suivant un maillage hexagonal pour optimiser le taux de remplissage, soit 57 couronnes. Si nous souhaitons avoir une précision de mesure sur le piston des fibres de λ/100 rms, la précision de mesure des pétales des pistilogrammes fournis par notre analyseur devra être alors inférieure à λ/78 rms.

Pour l’utilisateur intéressé seulement par les valeurs relatives, il peut néanmoins être intéressant de recalculer les valeurs relatives après intégration, cette dernière pouvant jouer le rôle de débruitage. Si nous recalculons les valeurs relatives à partir des valeurs reconstruites, nous obtenons :

𝐴̂ − 𝐴𝑖 ̂ = 𝑑𝑃𝑗 ̂𝑖𝑗 (3-54)

En supposant que les incertitudes 𝜀(𝐴̂ ) et 𝑖 𝜀(𝐴̂ ) sont identiques, l’incertitude sur le piston 𝑗 relatif estimé 𝛿𝑑𝑃̂𝑖𝑗, qui accumule deux fois l’erreur du piston reconstruit, est alors égal à :

𝜀(𝑑𝑃̂ ) = √2𝜀(𝐴𝑖𝑗 ̂ ) 𝑖 (3-55)

En combinant les équations (3-50) et (3-55), nous obtenons finalement :

𝜀(𝑑𝑃̂ ) = √2𝑝𝑖𝑗 𝑒𝑟𝑟𝜀(𝑑𝑃) (3-56)

91 Cette dernière équation signifie que si la quantité √2𝑝𝑒𝑟𝑟 est inférieure à 1, il vaut mieux passer par une étape d’intégration pour réduire l’incertitude sur les valeurs relatives, si la quantité est supérieure à 1, alors il vaut mieux utiliser directement les valeurs relatives mesurées. Dans le cas de mesures hexagonales, où perr dépend du nombre de couronnes de sous-pupilles, il vaut mieux passer par une étape d’intégration lorsqu’il y a moins de 18 couronnes, soit environ 1000 sous-pupilles.

Nous disposons maintenant d’un algorithme d’intégration basé sur les moindres carrés permettant d’estimer les pistons, tips et tilt absolus des sous-pupilles. Une étude de la propagation de l’erreur a montré que celle-ci était logarithmique avec le nombre de couronnes ; l’augmentation du nombre de fibres dans les systèmes laser à base de recombinaison cohérente ne posera donc pas de problème pour la mesure avec l’interféromètre PISTIL, puisque l’incertitude sur les pistons, tips et tilts reconstruits augmentera seulement de manière logarithmique en fonction de l’incertitude de mesures des pistons, tips et tilts relatifs.

Cet algorithme présente l’avantage d’utiliser une redondance d’information pour retrouver les valeurs absolues. Un moyen intrinsèque d’estimer les performances de l’interféromètre consiste à calculer les relations de clôtures.