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COMPORTEMENT PHYSIQUE EN MAGASIN ET ETUDE DE LEURS RELATIONS AVEC LES ACHATS

CHAPITRE 7. DISCUSSION, IMPLICATIONS ET LIMITES

2.1. Implications théoriques

Le comportement physique reflète l’activité cognitive et exploratoire du consommateur en magasin

Nos résultats montrent que les dimensions du comportement physique en magasin correspondent aux dimensions du processus cognitif de recherche d’information et de prise de décision en magasin. La première implication théorique importante de ce résultat est la confirmation du fait que la façon dont l’individu réfléchit, explore et prend ses décisions de façon cognitive se reflète dans son comportement physique en magasin, c’est-à-dire dans ses déplacements et ses actions. Cela confirme la possibilité d’inférer ce qui se passe dans la tête du consommateur en magasin à partir de l’observation de ses déplacements, faits et gestes. Cela était l’hypothèse forte sous-jacente de cette recherche.

Plusieurs recherches avaient déjà fait reposer leur design de recherche sur cette hypothèse forte en étudiant l’activité cognitive à partir des gestes (Wells et LoSciuto 1966 ; Ladwein 1993 ; Areni et Kim 1994 ; Summer et Hebert 2001). Mais ces recherches n’étudiaient que quelques actions isolées, comme par exemple le rapport entre le nombre de produits choisis sur le nombre de produits pris en main (Ladwein 1993). Dans cette recherche, nous nous sommes servis de cette hypothèse sous-jacente pour étudier le comportement physique dans son ensemble en essayant de relever la quasi-totalité des déplacements et gestes effectués par les consommateurs en magasin.

Un nouveau cadre intégrateur du comportement du consommateur en magasin

Une deuxième implication fondamentale de nos résultats réside dans la contribution apportée à une meilleure compréhension du comportement du consommateur en magasin en fournissant un cadre intégrateur, représenté par la figure 7.1. Ce cadre intégrateur tranche avec les typologies classiques (consommateurs fonctionnels / consommateurs hédoniques) importées des recherches sur les motivations pour le shopping. Ici, le comportement est décrit

par son niveau de largeur et de profondeur. Comme nous pouvons le voir, des comportements hédoniques et fonctionnels peuvent se retrouver dans chacune des quatre catégories de comportement.

Le segment en bas à droite contient les individus qui adoptent un comportement peu large et peu profond : ils visitent un nombre limité de zones du magasin, sont seulement intéressés par quelques produits, n’examinent pas profondément les produits et décident rapidement ce qu’ils veulent acheter. Ce segment peut correspondre au stéréotype du consommateur fonctionnel.

A l’opposé, le segment en haut à gauche correspond aux consommateurs adoptant un comportement en magasin large et profond : ils tendent à visiter le magasin en entier, faire de nombreux demi-tours, regarder de nombreux rayons, prendre, examiner et essayer un grand nombre de produits et interagir avec les vendeurs. Ces personnes peuvent refléter le stéréotype du consommateur hédonique, largement discuté dans la littérature (Bellenger et Korgaonkar 1980), ou bien ils peuvent également correspondre à des consommateurs fonctionnels devant acheter un grand nombre de produits disséminés dans tout le magasin et ayant besoin de beaucoup d’informations pour choisir les produits appropriés.

Le segment en haut à gauche pourrait correspondre aux butineurs (Lombard 2003 ; Bloch et al. 1989), qui prennent un grand plaisir à marcher à travers tout le magasin, passant d’un rayon à l’autre sans avoir forcément le désir d’examiner en détail les produits ou les catégories, puisque leur but n’est pas forcément d’acheter quelque chose. Ce segment peut aussi représenter un comportement fonctionnel suivi par un consommateur devant acheter des produits dans un grand nombre de rayons mais ayant prévu à l’avance ses achats et n’ayant donc pas besoin d’un comportement profond pour choisir.

Le dernier segment en bas à droite représente les gens se comportant de façon profonde et peu large : ils se concentrent sur un nombre limité de catégories mais les examinent en détail. Ces consommateurs sont soit des fonctionnels qui recherchent de l’information sur des produits bien ciblés, soit des hédoniques qui explorent les catégories qui les intéressent.

Ce cadre intégrateur semble donc montrer qu’il n’existe pas un comportement physique correspondant aux consommateurs hédoniques et un autre correspondant aux consommateurs fonctionnels ; des motivations hédoniques et fonctionnelles peuvent être trouvées dans chacun des segments de comportements. Bien entendu, beaucoup de ces assertions sont encore à démontrer. Mais nos résultats nous donnent des pistes solides nous

190 Large/Peu Profond

Vont partout et regardent superficiellement un grand nombre de catégories de produits

Fonctionnels avec une grande liste de courses

OU

Hédoniques : butinage

Large/Profond

Vont partout et observent profondément beaucoup de catégories

Hédoniques : Stéréotype OU

Fonctionnels voulant acheter

consciencieusement beaucoup de produits Largeur

Profondeur Peu Large/Peu profond

Se concentrent sur une partie limitée du magasin et décident rapidement

Fonctionnels : Stéréotype OU

Hédoniques qui savent déjà quelles catégories et produits ils veulent acheter

Peu Large/Profond

Se concentrent sur un nombre limité de catégories et les observent en détail

Fonctionnels cherchant de l’information OU

Hédoniques ciblés

permettant de fonder des futures recherches destinées à affiner nos conclusions et notre cadre intégrateur.

Figure 7.1. Segmentation des consommateurs selon leur comportement physique en magasin

Un premier élément de réponse au dilemme circuit long / circuit court

Une troisième contribution théorique importante de notre recherche est l’apport d’une première réponse au dilemme d’aménagement des magasins en circuit court ou circuit long. Nos résultats montrent qu’un circuit long va jouer sur le nombre de produits vendus, en cohérence avec les recherches précédentes sur l’achat d’impulsion (Park et al. 1989), mais pas sur le prix des produits achetés (en discordance avec ces mêmes recherches). Le prix des produits dépend au contraire de la profondeur du comportement et semble ainsi plutôt lié à l’heuristique de décision adoptée par le consommateur (recherche d’information, plaisir pris à l’achat). Cela est cohérent avec les recherches précédentes concernant l’impact de la profondeur de l’exploration du produit sur le prix que le consommateur est prêt à payer pour ce produit (Rao et Sieben 1992).