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145 La prévision des revenus autonomes du gouvernement concernant les impôts des sociétés est issue de quatre sources différentes :

„ l’impôt sur le revenu des sociétés (IRS) ;

„ la taxe sur le capital des sociétés d’assurance ;

„ la taxe compensatoire des institutions financières ;

„ la taxe sur les services publics.

146 Les impôts des sociétés sont principalement comptabilisés sur une base d’encaissement et de décaissement. Il en est de même pour les prévisions.

Voici le libellé de la convention comptable des états financiers consolidés du gouvernement en ce qui concerne ces revenus :

« Les revenus provenant de l’impôt des sociétés sont comptabilisés au moment de la réception des fonds, car les sommes à recevoir ou à rembourser ne peuvent être estimées avec précision. En effet, les revenus imposables des sociétés sont très variables d’une année à l’autre et le délai de production des déclarations des sociétés ne permet pas d’obtenir l’information complète et à temps pour établir les ajustements à l’égard des revenus à la date de clôture des états financiers du gouvernement. Un ajustement est fait pour tenir compte des avis de cotisation émis avant la fin de l’année financière. » 147 Les encaissements réguliers provenant de l’IRS ainsi que les rembourse-ments d’acomptes provisionnels versés en trop et les pertes reportées revêtent une grande importance en ce qui a trait à la prévision des revenus.

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Modèle de prévision des revenus

148 Le modèle de prévision du ministère utilisé pour estimer les impôts des sociétés tient compte de certaines variables faisant partie du scénario écono-mique. Parmi ces variables, la plus importante est l’excédent d’exploitation net des sociétés (anciennement appelé « les bénéfices des sociétés avant impôts »).

149 Le gouvernement effectue une prévision du revenu imposable qui est notamment basée sur un facteur d’élasticité représentant la relation entre la croissance des excédents nets et la croissance des revenus imposables.

150 En se basant sur les données historiques, le MFEQ établit cette relation à 0,6. À titre d’exemple, pour l’année civile 2014, la croissance prévue de 4,5 % des excédents d’exploitation nets se traduit en une prévision de hausse des revenus imposables de 2,7 %. Par la suite, les taux d’imposition statutaires sont appliqués à la prévision du revenu imposable ; ce qui donne lieu à la prévision des revenus d’impôts.

Caractère raisonnable de la prévision des revenus

151 À l’examen des procédés utilisés par le MFEQ pour effectuer la prévision des revenus d’impôts des sociétés, il nous apparaît qu’il effectue un travail sérieux. Toutefois, dans le temps qui nous a été imparti pour accomplir notre travail, il nous a été impossible d’approfondir nos analyses davantage. Nous constatons que la prévision relative à l’impôt des sociétés comporte un niveau d’incertitude important. En effet, plusieurs facteurs économiques influencent le niveau de bénéfice des sociétés. De plus, selon leur secteur d’activités (construction, vente au détail, entreprise de services, etc.) et la présence d’activités ayant trait au commerce extérieur (importations et exportations), ces facteurs peuvent avoir plus ou moins d’incidence sur leurs bénéfices.

152 Compte tenu de la volatilité historique des bénéfices des sociétés, de la difficulté à prévoir le comportement des sociétés en matière de stratégie fiscale dont l’utilisation de leurs pertes fiscales reportées et du risque associé au taux de recouvrement des créances découlant des activités de récupération fiscale, nous ne sommes pas en mesure de nous prononcer sur le caractère raisonnable de la prévision faite par le MFEQ relativement aux impôts des sociétés pour les années 2013-2014, 2014-2015 et 2015-2016.

153 Les tendances récentes démontrent que l’excédent d’exploitation net des sociétés fluctue de façon importante au fil des années. Ainsi, il est difficile d’apprécier le caractère raisonnable de cette prévision qui, rappelons-le, est fondamentale pour établir la prévision des revenus d’IRS.

154 D’ailleurs, dans Le Point de novembre 2013, le gouvernement a significati-vement révisé à la baisse le taux de croissance prévu pour cette variable, le faisant passer de 4,9 % à -6,0 %, soit un écart de près de 11 points de pourcentage depuis Le Point de mars 2013.

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155 Selon l’analyse de sensibilité publiée dans la mise à jour économique et financière de l’automne, la variation d’un point de pourcentage de l’excédent d’exploitation net des sociétés, prise isolément, modifie les revenus de l’IRS de près de 30 millions de dollars pour l’année financière de 2013-2014.

156 En conséquence, la réduction de 11 points de pourcentage de la croissance prévue pour cette variable compte pour environ 330 millions de dollars dans la baisse des revenus de 741 millions de l’IRS de l’année financière 2013-2014 par rapport au dernier Point de mars 2013. Le Point est peu explicite quant aux autres facteurs justifiant les 400 millions supplémentaires de baisses des revenus.

157 Notons que dans la section du Point traitant de l’économie, le MFEQ explique qualitativement certaines causes du recul de la croissance des bénéfices des sociétés en 2013 par rapport à 2012 (de -0,6 % à -6,0 %), soit :

„ la lente reprise des exportations ;

„ la croissance modérée de la consommation ;

„ la croissance modérée des prix.

158 Tous ces facteurs sont inclus dans le concept de l’excédent d’exploitation net des sociétés et ne permettent pas d’expliquer en totalité la sensibilité des revenus de l’IRS aux autres facteurs.

Report rétrospectif et prospectif de pertes

159 Les règles fiscales en vigueur au Québec permettent aux sociétés de déduire du revenu imposable d’un exercice donné certaines pertes encourues au cours d’autres exercices. Ainsi, une perte fiscale peut être reportée contre un revenu gagné au cours des trois exercices antérieurs ou être utilisée pour réduire l’impôt à payer au cours des 20 exercices futurs.

160 Au cours des cinq dernières années, Revenu Québec estime que la production de déclarations amendées résultant d’une demande de report de pertes par les sociétés a coûté au gouvernement entre 245 et 370 millions de dollars annuellement en remboursements d’impôt.

161 Bien entendu, la conjoncture économique influence les choix fiscaux des sociétés. Le MFEQ effectue des prévisions quant à l’utilisation des reports de pertes par les sociétés en se basant sur les tendances historiques. Cet exercice présente toutefois un risque lié à la prévision.

162 En effet, seulement pour l’année 2012-2013, les statistiques de Revenu Québec en matière fiscale font état de plus de 6,2 milliards de dollars de pertes reportées déclarées et non utilisées par les sociétés. À ces pertes, s’ajoutent celles des années antérieures qui peuvent être utilisées, rappelons-le, sur une période future de 20 ans. Revenu Québec nous a confirmé que le

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passif fiscal total du gouvernement n’est pas une information disponible.

Toutefois, son ampleur, conjuguée avec la situation financière future des sociétés est susceptible d’influencer le niveau de revenu du gouvernement.

Récupération fiscale et crédits d’impôt remboursés

163 La récupération fiscale constitue l’ensemble des activités de contrôle fiscal que Revenu Québec mènent pour lutter contre le travail au noir et l’évasion fiscale. Selon l’intensité de ces activités, elles permettent de récupérer des revenus fiscaux. Des cibles de récupération fiscales sont établies par le gouver-nement et Revenu Québec intensifie ses activités à cet égard. Toutefois, il est difficile de prévoir les retombées précises de ces activités.

164 Les crédits d’impôt remboursés sont de natures diverses. Selon les tendances observées dans les années passées, les plus significatifs sont les crédits suivants :

„ recherche scientifique et développement expérimental ;

„ affaires électroniques ;

„ production cinématographique ;

„ construction de chemins d’accès et de ponts d’intérêt public.

165 La plupart de ces crédits sont remboursés par Revenu Québec lors du traitement de la déclaration d’impôts. Une petite partie seulement est déduite des acomptes provisionnels versés par les sociétés. Cette situation fait en sorte qu’il peut y avoir un décalage entre le moment où les sociétés posent les gestes donnant droit à ces crédits et le moment où le gouvernement les inscrit dans ses états financiers.

166 En effet, d’une part, les sociétés disposent d’un délai de six mois après la fin de leur exercice financier pour produire leur déclaration. D’autre part, le délai de traitement des déclarations d’impôts varie généralement entre quatre et six mois. L’inscription aux livres du gouvernement se fait donc avec un retard d’environ un an. De plus, selon la vigueur économique des secteurs admissibles aux différents crédits, ces derniers peuvent être plus ou moins importants.

Tendances historiques

167 Nous avons comparé les prévisions historiques de l’impôt sur le revenu des sociétés effectuées par le MFEQ avec les données réelles. L’exercice a consisté à comparer les prévisions pour l’année à venir, et ce, pour toutes les publications déposées au cours des 10 dernières années (budget ou mise à jour économique et financière). La figure 3 présente le résultat de cette comparaison.

L’évasion fiscale consiste à ignorer délibérément une partie précise des lois sous l’administration de Revenu Québec.Une source importante d’évasion fiscale est la dissimulation d’activités économiques à l’État par des citoyens et des entreprises, qui agissent ainsi afin de remettre moins d’argent qu’ils ne le devraient au fisc.

Certains domaines, dont ceux de la construction et de la restau-ration, sont particulièrement touchés par l’évasion fiscale et le travail au noir. La vente illicite de produits, dont ceux du tabac, les transactions immobilières de même que les placements et les investissements constituent également des sources impor-tantes d’évasion fiscale.

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Figure 3 Comparaison des prévisions de revenus d’IRS du fonds général avec les données réelles pour les années financières du 31 mars 2003 au 31 mars 2013

En millions de dollars

Prévision du fonds général Données réelles du fonds général 3 729 3 729 3 892

2003 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2010 2011 2011 2012 2012 2013 2013

168 À l’examen de cette figure, on peut faire les constats suivants :

„ L’écart moyen sur 10 ans est très faible entre la prévision établie pour l’année à venir et la donnée réelle, soit 62 millions de dollars.

„ L’écart type est de 453 millions de dollars.

„ Sur 16 prévisions, 9 présentent des surévaluations alors que 7 présentent des sous-évaluations, il n’y a donc pas de biais dans celles-ci.

169 Il découle de ces constats que, sur une longue période, en moyenne, les prévisions se rapprochent de la donnée réelle. Cela signifie qu’il y a un équilibre entre les risques positifs et négatifs pris en considération par le MFEQ. Toutefois, la prévision faite pour une année donnée à l’intérieur d’une longue période est sujette à une grande dispersion (453 millions de dollars en moyenne au cours des 10 dernières années).

170 Par ailleurs, nous avons analysé la tendance récente concernant les revenus de l’impôt des sociétés, autant pour le fonds général que pour les revenus consolidés. Nous les avons également mis en perspective avec les prévisions du Point. Le tableau 11 détaille cette comparaison.

L’écart type est une mesure de dispersion utilisée dans le domaine des statistiques.

Elle mesure l’étalement ou la dispersion par rapport à la moyenne d’un ensemble de données.

1. Certaines données réelles du fonds général pour les années 2008-2009 à 2012-2013 ne concordent pas avec celles présentées au tableau 11. Dans la présente figure, l’incidence de la création du FRAF a été considérée uniquement à partir de l’année 2011-2012.

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Tableau 11 Revenus d’impôts des sociétés (en millions de dollars)

États financiers consolidés du gouvernement Le Point Novembre 2013

Fonds spéciaux2 116 115 119 160 170 136 175 192 204 213 223 201

Organismes

1. La prévision du fonds général et celle relative aux transferts financés par le régime fiscal excluent l’incidence des créances douteuses alors que Le Point l’inclut.

2. Les entités concernées sont : la Commission des normes du Travail, le Fonds du développement nordique et le Fonds relatif à l’administration fiscale (FRAF). En ce qui a trait au FRAF, lequel a été créé le 1er avril 2011, nous avons utilisé les données du MFEQ pour les années 2008-2009 à 2010-2011 afin de rendre les données comparables avec les prévisions.

3. Il s’agit de la variation par rapport à l’année civile, soit la période de 12 mois se terminant au cours de l’année financière concernée par la prévision. La moyenne des variations annuelles a été calculée selon la méthode à taux annuel composé.

171 À l’examen de ce tableau, nous pouvons faire les constats suivants :

„ En considérant les transferts financés par le régime fiscal, lesquels sont déduits des revenus du fonds général, la moyenne des revenus consolidés des cinq dernières années s’élève à 5 822 millions de dollars (décroissance annuelle moyenne de 0,8 %), alors que celle des cinq prochaines années est de 6 597 millions (croissance annuelle moyenne de 3,5 %). Cette situation s’explique principalement par la crise financière de 2008-2009 qui a eu des répercussions importantes sur la croissance des revenus de cette période.

„ Les transferts financés par le régime fiscal représentent, en moyenne, 29 % des impôts totaux des sociétés. Ces transferts peuvent donc influencer de façon significative la croissance des impôts des sociétés inscrits au fonds général qui sont présentés au net.

„ Il est difficile de tirer des conclusions en comparant la variation de l’excédent d’exploitation net des sociétés et les impôts des sociétés pour les raisons déjà énoncées, à savoir : les reports de pertes peuvent permettre de lisser l’effet des années déficitaires sur les revenus d’impôts et l’inscription tardive des revenus réels aux états financiers du gouvernement.

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172 Nos travaux nous ont permis de constater que la relation qui existe entre la variation de l’excédent d’exploitation net des sociétés et celle des impôts des sociétés (incluant les taxes) est également influencée par certaines mesures fiscales annoncées lors de budgets précédents. Citons notamment les suivantes qui contribuent à la hausse des revenus du gouvernement :

„ la fin de l’amortissement accéléré pour le matériel de fabrication et de transformation ;

„ la fin de l’allègement fiscal concernant la taxe sur les services publics pour le secteur des télécommunications.