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Illicéité et annulabilité comme conséquences de la violation d'une prescription

Chapitre I. La confusion entre pouvoir et devoir

Section 1. Illicéité et annulabilité comme conséquences de la violation d'une prescription

D'après une partie de la doctrine, on peut dire de l'édiction d'une norme interne A qu'elle est interdite si la règle A est nulle ou annulable ou bien si, comme en droit international, l'édiction de la règle A donne naissance à un fait illicite qui engage la responsabilité de son auteur. D'après cette représentation, le juge interne annulant une norme interne et le juge international constatant que son édiction est un fait internationalement illicite appliquent tous les deux une interdiction de légiférer.

Pour une partie de la doctrine administrative française, si l'édiction d'une norme administrative qui a tel contenu, tel but, telle forme, etc., a pour conséquence l'annulabilité de la norme, voire, plus rarement, sa nullité, alors il est interdit d'édicter une norme qui a ce contenu, ce but, cette forme, etc. Citons par exemple un article de J. MOREAU, intitulé « De l'interdiction faite à l'autorité de police d'utiliser une technique contractuelle » : « La nullité de la convention apparaît la sanction logique de l'interdiction opposée aux autorités de police d'utiliser la voie contractuelle »196.

« La règle qui interdit à l'autorité de police d'utiliser toute technique contractuelle et son corollaire, la nullité de l'accord passé en infraction à ce principe, sont l'œuvre d'une politique jurisprudentielle [...] »197. Un contrat de ce genre est « illicite »198.

196 Doctrine, MOREAU (J.), « De l'interdiction faite à l'autorité de police d'utiliser une technique

d'ordre contractuel : contribution à l'étude des rapports entre police administrative et contrat »,

A.J.D.A., 1965, pp. 3-17, p. 8.

197 Doctrine, MOREAU (J.), « De l'interdiction faite à l'autorité de police d'utiliser une technique

d'ordre contractuel : contribution à l'étude des rapports entre police administrative et contrat »,

op. cit., p. 13. Dans un compte rendu de l'évolution du droit positif depuis cet article, le professeur

PETIT décrit également l'existence d'une interdiction dont la sanction est la nullité du contrat : PETIT (J.), « Nouvelles d'une antinomie : contrat et police » in Les collectivités locales : Mélanges en

l'honneur de Jacques Moreau, Paris, Economica, 2003, 491 p., pp. 345-360, passim.

Voici un autre exemple extrait des Cours de droit administratif d'EISENMANN, exemple qui concerne « les règles relatives au but des actes normateurs » de l'Administration : « Certains buts sont admis, d'autres sont, au contraire, condamnés, frappés d'interdit. Et normalement, l'acte [...] ne sera pas valable lorsqu'il aura été accompli en vue d'une fin illicite : les normes posées par l'acte seront susceptibles d'être annulées »199. En conclusion, d'après J. BERTHELEMY : « Le droit public moderne a tracé autour de l'administration de nombreuses règles de compétence, de formes, de but [...] qui sont autant d'obligations de ne pas faire »200. De nombreux

théoriciens du droit décrivent de la même façon le droit positif201.

Cette représentation semble justifiée. Par exemple, l'article 103 de Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne pose une « interdiction des lois pénales rétroactives » dont la violation peut donner lieu à l'annulation de la loi édictée202. Voici un autre exemple : d'après l'article 27 de la Constitution

d'ordre contractuel : contribution à l'étude des rapports entre police administrative et contrat »,

op. cit., p. 8. À propos de la licéité d'une norme comme condition de sa validité voir

aussi : instrument, Code civil français, art. 1108 : « Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une Convention : [...] Une cause licite dans l'obligation ».

199 Doctrine, EISENMANN (Ch.), Cours de droit administratif, t.1, Paris, L.G.D.J., 1982, 786 p.,

p. 508. Voir aussi t. 2., Paris, L.G.D.J., 1983, xxiv-908 p., pp. 275-278, pp. 554-555, pp. 622-624 ainsi que : « Le droit administratif et le principe de légalité », E.D.C.E., 1957, fasc. n° XI, pp. 25-40, p. 30 : « La règle que les actes administratifs doivent être légaux, l'affirmation que l'Administration est liée par la loi, y est soumise, que la loi lui est supérieure, s'impose à elle, signifient certes au minimum qu'aucun organe administratif ne doit faire rien qui soit contraire à une règle en vigueur de la législation, incompatible avec une telle règle. [...] Précisons : si une règle législative prescrit à un agent administratif un certain acte, ou un certain mode d'agir, il doit faire l'acte, ou suivre ce mode; si une règle législative défend à un agent administratif, ou à tous, un certain acte ou une certaine façon d'agir, ils ne doivent pas l'accomplir ou en user, mais s'en abstenir ». La « violation du principe de légalité » par un acte administratif a pour conséquence l'annulabilité de la norme posée par l'acte.

200 Doctrine, BERTHELEMY (J.), « Sur l'obligation de faire ou de ne pas faire et son exécution forcée

dans le droit public », R.D.P., 1912, pp. 505-540, p. 508. Cet exemple est aussi cité par : TUSSEAU (G.), Les normes d'habilitation, op. cit., p. 347. Voir aussi : ALBERTON (G.), « L’applicabilité des normes communautaires en droit interne. Les autorités administratives françaises : obligations de faire et de ne pas faire », R.F.D.A., 2002, pp. 1-19, pp. 6-8 ; JÈZE (G.), Les principes généraux du

droit administratif. T. 1 : La technique juridique du droit public français, 3e éd., Paris, Dalloz, 2005,

xxxi-443 p., p. 18 ; RIVERO (J.), Droit administratif, Paris, Dalloz, 2011, ix-550 p., p. 213.

201 Doctrine, AMSELEK (P.), « Les fonctions normatives ou catégories modales » in L'architecture

du droit : Mélanges en l'honneur de Michel Troper, Paris, Economica, 2006, xlvii-1028 p., pp. 51-77,

pp. 55-56 ; BOBBIO (N.), « La norme » in BOBBIO (N.) Essais de théorie du droit (trad. GUÉRET (M.) et AGOSTINI (C.)), Paris et Bruxelles, L.G.D.J. et Bruylant, 1998, 286 p. pp. 107-139, p. 133. D'après BOBBIO, certaines normes constitutionnelles interdisent, sous peine d'annulation, de poser certains commandements ou certaines interdictions. KELSEN (H.), Théorie pure du

droit : introduction à la science du droit, op. cit., pp. 123-124 et pp. 129-134 ; TROPER

(M.), « Souveraineté de l'État et hiérarchie des normes » in TROPER (M.), La théorie du droit, le

droit, l’État, Paris, PUF, 2001, xi-334 p., pp. 315-325, p. 324 : « On peut ainsi parler de hiérarchie ou

de suprématie d'une norme x sur une norme y dans les cas suivants [...] : [...] 3/ si x a interdit de donner à y un certain contenu ; [...] 5/ si, au cas où y aurait enfreint l'une des trois premières prescriptions, une troisième norme z ordonne l'annulation de y par un juge [...] ».

202 Voir : doctrine, GRASMANN (G.), « La constitutionnalité des règles de droit rétroactives et

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italienne « la peine de mort n'est pas admise », i.e. elle est interdite. Une règle législative prévoyant cette peine serait annulable203.

Les instruments internationaux comprennent un grand nombre de normes internationales qui se présentent également comme des interdictions d'édicter une règle interne. Par exemple, d'après l'article 18 du T.F.U.E. : « [...] est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité ». D'après l'article 34 de ce même traité : « Les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres ». D'après l'article XI, § 1, du GATT de 1947 : « Aucune partie contractante n'instituera [...] à l'importation d'un produit originaire du territoire d'une autre partie contractante [...] de prohibitions ou de restrictions autres que des droits de douane, taxes ou autres impositions [...] »204.

Quand ces interdictions remplissent les conditions posées par un ordre juridique interne pour être « directement applicables », leur violation peut donner lieu, une nouvelle fois, à l'annulation par le juge interne de la règle interdite. En revanche, dans l'ordre juridique international, la violation des interdictions de légiférer n'a pas cette conséquence205. L'édiction de la règle interne interdite donne naissance à un fait

protection des sujets de droit (nationaux et étrangers) et l'intérêt public », R.I.D.C., 1989, n° 4, pp. 1017-1024, spéc. p. 1018.

203 La description de la norme interne sur le fondement de laquelle une autre norme interne est

annulable comme une interdiction apparaît également dans le contentieux international. Arbitrage,

Forêts du Rhodope central (Grèce c. Bulgarie), Fond, 29 mars 1933, R.S.A., vol. III, p. 1406,

pp. 1428-1429. La norme interne suivante est en cause : « À compter du jour de l'occupation il est défendu de conclure d'actes [...] ayant pour objet des biens immobiliers sis dans les territoires occupés. Tous actes conclus depuis le 5 octobre 1912 sont considérés comme nuls de plein droit » (p. 1428). D'après l'arbitre : « La proclamation précitée [...] interdit les cessions de biens immobiliers. Si cette interdiction était juridiquement valide, l'acquisition au mois de mai 1913 des deux forêts dont il s'agit maintenant ne serait pas valable » (p. 1429). Organe de jugement de l'O.M.C., États-Unis – Bois de construction III, groupe spécial, 27 septembre 2002, WT/DS236/R, § 7. 141. L'une des questions en cause est de savoir si d'après le droit des États-Unis il est « interdit » au Department of Commerce de réaliser un certain acte, sous peine d'annulation de la norme posée par l'acte. Le groupe spécial constate que : « Le Canada souhaiterait que nous inférions [...] que la loi interdit au DOC de procéder à des réexamens accélérés [...] ». C.I.J., Affaire de l’Electronica Sicula

S.p.A. (ELSI) (États-Unis d'Amérique c. Italie), 20 juillet 1989, Rec. p. 15, p. 51, § 73. La

C.I.J. qualifie d'« illicites » en droit interne les normes annulables d'après ce dernier. Idem : doctrine, ANZILOTTI (D.), Cours de droit international, op. cit., p. 472.

204 Pour d'autres exemples, voir infra p. 109 et s. et p. 131 et s..

205 À défaut de pouvoir annuler une règle, le juge interne peut rendre celle-ci inexistante seulement

pour la ou les personnes qui l'ont saisi, ce qui permet notamment d'annuler les éventuelles décisions prises sur son fondement. Habituellement, ce pouvoir du juge est présenté comme un pouvoir d'écarter l'application d'une règle. On propose néanmoins de considérer que ce pouvoir est également un pouvoir d'annulation mais une annulation que l'on appellera relative pour la distinguer de la première, annulation absolue en ce qu'elle retire la règle de l'ordre juridique. Comme l'annulation absolue, l'annulation relative d'une règle interne n'existe pas en droit international : le juge international ne peut pas empêcher des sujets internes d'être soumis à une règle interne. Autrement dit, il ne peut pas écarter l'application de la règle à leur égard pour ensuite annuler les décisions les concernant qui auraient pu être prises sur le fondement de la règle.

internationalement illicite continu qui ne prend fin qu'une fois que son auteur aura mis fin à son existence206. Le juge international peut constater l'obligation de retrait voire prescrire lui-même ce dernier. Pour inciter au retrait, des contre-mesures peuvent, dans certains cas, être prises. La C.J.U.E., quant à elle, peut prononcer une astreinte207.

À ce stade, il semblerait que l'on puisse dire d'une norme qu'elle interdit l'existence d'une règle si cette règle est nulle, annulable ou si son édiction constitue une conduite illicite qui engage la responsabilité de son auteur. Et en effet, d'après la première édiction de la Théorie pure du droit : « [...] quand une constitution moderne établit une liste de droits individuels fondamentaux, tels que l'égalité devant la loi ou la liberté de conscience, elle interdit par là-même l'édiction de lois consacrant des inégalités entre les sujets de droit ou portant atteinte à l'une des libertés qui leur sont garanties. La technique juridique permet de rendre une telle interdiction efficace en déclarant personnellement responsable le chef de l'État ou les ministres qui ont pris part à l'édiction d'une loi anticonstitutionnelle, ou en prévoyant l'abrogation ou l'annulation d'une telle loi »208.

Si on retient cette représentation du droit, le juge interne saisi d’un recours en annulation contre une règle interne et le juge international à qui on demande de constater l'illicéité de l'édiction d'une règle interne constatent tous les deux si une

interdiction de légiférer a été ou non violée. En revanche, les conséquences que le

juge peut tirer de ce constat sont différentes selon qu'il est un juge international ou un juge interne. En effet, une partie de la doctrine de droit international, moniste comme dualiste, décrit le droit positif ainsi. Trois exemples sont proposés, du plus explicite au moins explicite.

Le premier auteur est TRIEPEL : la source supérieure peut « [...] interdire de légiférer sur certaines matières ou dans certaines directions. [...] Dans les rapports de

206 À propos de la continuité du fait internationalement illicite, voir infra p. 112 et p. 135.

207 La différence pourtant importance entre, d'une part, nullité et annulabilité et, d'autre part,

obligation de retrait de retrait semble parfois niée, ou en tout cas mal perçue : doctrine, SØRENSEN (M.), « Principes de droit international public : cours général », op. cit., p. 111.

208 Voir justement : doctrine, KELSEN (H.), Théorie pure du droit : introduction à la science du

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l'État fédéral avec l'État-membre, ou de l'État avec la commune, cette interdiction

peut avoir pour conséquence et a le plus souvent pour conséquence la nullité des normes qui la violeraient. Mais ce n'est pas toujours le cas : ce n'est pas le cas, par

exemple, pour les interdictions adressées par l'État suzerain à l'État vassal » (italiques ajoutés)209. Ce n'est pas le cas, non plus, dit TRIEPEL, dans les rapports du droit

international et du droit interne : le droit international « [...] impos[e] [...] le devoir de se créer un droit propre ou de s'abstenir de toute activité législative, sans que

cependant la violation de l'interdiction de créer du droit ait pour conséquence la nullité de l'acte » (italiques ajoutés)210.

Le deuxième auteur est KELSEN : « Le droit international n'oblige les États à accomplir tel ou tel acte, en particulier il ne les oblige à édicter des normes d'un certain fond, qu'en ce sens qu'il attache à l'acte contraire ou à l'édiction d'une norme étatique contraire en son fond ses sanctions spécifiques pour les actes illicites, – la guerre ou les représailles » (italiques ajoutés)211. Les italiques soulignent que chez

KELSEN l'opérateur déontique de l'obligation n'exclut pas ipso jure la nullité ou l'annulabilité d'une norme « contraire à l'obligation »212. En droit interne, il est

interdit à un ministre d'édicter des règlements discriminatoires entre les hommes et les femmes, en ce sens qu'un règlement de cette sorte serait annulable. En droit international, il est interdit à un État d'édicter des règlements discriminatoires entre les hommes et les femmes qu'en ce sens que l'édiction ou le maintien d'un règlement de cette sorte constitue un fait internationalement illicite qui engage la responsabilité internationale de l'État et qui, théoriquement, peut être sanctionné.

209 Doctrine, TRIEPEL (H.), Droit international et droit interne, op. cit., p. 164. Voir aussi : « Les

rapports entre le droit interne et le droit international », op. cit., p. 105 : La source supérieure « [...] peut donner l'ordre de régler certaines matières: elle peut [...] interdire de légiférer dans certaines directions, mais sans que la violation de l'interdiction n'entraine la nullité [...]».

210 Doctrine, TRIEPEL (H.), Droit international et droit interne, op. cit., p. 265.

211 Doctrine, KELSEN (H.), Théorie pure du droit, 2e éd., op. cit., p. 320. Voir aussi : Théorie pure du

droit : introduction à la science du droit, op. cit., pp. 177-178 ; « Les rapports de système entre le

droit interne et le droit international public », op. cit., p. 316 : « Soient par exemple les règles de droit international qui interdisent d'imposer des obligations militaires aux citoyens étrangers [...] ; voici

comment il faut les interpréter : si, en fait ou en vertu d'une loi, un État contraint des citoyens

étrangers au service militaire [...], on peut ou on doit lui appliquer la sanction dernière du droit international » (italiques ajoutés). « Théorie du droit international public », R.C.A.D.I., 1953-III, t. 84, pp. 5-203, p. 194 : « Quand le droit international oblige un État à accomplir tel ou tel acte, par exemple à édicter des normes d'un certain contenu déterminé, cela signifie seulement qu'un acte contraire, tel que l'édiction d'une norme ayant un contenu opposé, est la condition d'un recours aux sanctions spécifiques du droit international (guerre et représailles) » (italiques ajoutés).

Le troisième auteur est ROMANO. Dans L'ordre juridique, on peut lire que : « [...] le principe doit être maintenu que si l'État contrevient à ces dispositions du droit international et donne à son ordre un contenu qui ne leur est pas conforme, il

aura violé un devoir qu'il a dans l'ordre international mais son ordre interne n'en sera pas moins en soi pleinement légitime [il faut comprendre valide]. On ne peut donc qu'en un certain sens parler [...] d'une législation [...] imposée, interdite [...] à l'État par le droit international » (italiques ajoutés)213.

D'après la définition doctrinale de l'interdiction de légiférer que l'on vient d'exposer, l'absence d'annulation des règles internes dans l'ordre juridique international n'est pas imputable au contenu des normes internationales primaires mais aux pouvoirs limités des juridictions internationales chargées de les appliquer. En effet, si le droit international mettait en place des procédures permettant aux juges internationaux d'annuler les normes internes interdites, la violation des interdictions internationales de légiférer aurait pour conséquence, comme la violation des interdictions internes de légiférer, l'annulation par le juge international des règles internes « contraires ». Cette explication est particulièrement présente chez les monistes kelséniens. Par exemple, d'après KELSEN : « [...] les normes du droit étatique qu'un État créerait en violation du droit international demeureraient valables ; cela même du point de vue du droit international, car celui-ci ne prévoit aucune procédure permettant l'annulation des normes de droit étatique " contraires au droit international " [...] »214. D'après KOPELMANAS : « Le droit international d'aujourd'hui se trouve, au point de vue technique, à un niveau qui correspond à

213 Doctrine, ROMANO (S.), L'ordre juridique, op. cit., p. 120. Voir aussi : doctrine, ANZILOTTI

(D.), Cours de droit international, op. cit., pp. 57-58 (spéc.) et pp. 472-475 ; BOURQUIN (M.), « Règles générales du droit de la paix », op. cit., pp. 141-142 et 210-211 ; KOPELMANAS (L.), « Du conflit entre le traité international et la loi interne : Quelques remarques au sujet des rapports du droit interne et du droit international », op. cit., p. 358. Plus indirectement encore : VERDROSS (A.), « Le fondement du droit international », op. cit., pp. 292-294. D'après VERDROSS, TRIEPEL a tord de considérer que les interdictions de légiférer sont propres aux rapports entre droit international et droit interne. En effet, dit VERDROSS, dans un État, les normes « contraires » ne sont pas toujours nulles. Elles sont parfois annulables seulement par certaines juridictions de l'État si ces dernières sont saisies. Donc pour VERDROSS, le juge qui annule une norme applique une interdiction de légiférer.

214 Doctrine, KELSEN (H.), Théorie pure du droit, 2e éd., op. cit., p. 320. Voir aussi : Principles of

International Law, op. cit., p. 423 ; « Théorie du droit international public », op. cit.,

p. 194 ; « Sovereignty » in PAULSON (S.L.) et LITSCHEWSKI-PAULSON (B.) (ed.), Normativity

and Norms : Critical Perspectives on Kelsenian Themes, Oxford, Clarendon Press, 1998, liii-627 p.,

pp. 525-536, p. 532 ; « Droit et compétence : Remarques critiques sur la théorie du droit international de Georges Scelle » in KELSEN (H.), Controverses sur la Théorie pure du droit : Remarques

critiques sur Georges Scelle et Michel Virally, Paris, Éd. Panthéon-Assas, 2005, 186 p., pp. 63-161,

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l'organisation du droit romain antérieure à l'intervention du préteur[215]. L'inobservation des prescriptions de fond d'une règle supérieure ne donne lieu qu'à des mesures dirigées contre les personnes responsables sans que la validité de l'acte ne soit touchée. Le juge international ne possède en principe que la compétence pour contrôler la régularité des actes juridiques. Ses pouvoirs de décision sont fort réduits, ils ne vont en tout cas pas jusqu'à la possibilité d'annuler les actes irréguliers. [...]. Il est possible qu'un jour le juge international réunisse, comme [...] le juge interne, les deux pouvoirs et qu'il puisse annuler les lois internes. L'organisation internationale aurait ainsi atteint le sommet de son évolution [...] »216.

L'explication de l'absence d'annulation des normes internes en droit international par une cause étrangère au contenu des normes internationales primaires n'est pas propre aux monistes kelséniens affirmés. Prenons l'article de VIRALLY « Sur un pont aux ânes : les rapports entre droit international et droits internes ». Dans ce document, le rapport entre droit international et droit interne n'est pas, comme souvent, décrit au moyen d'une norme mais d'un principe, celui de la supériorité ou de la primauté du droit international sur le droit étatique. Le contenu de ce principe est explicité par VIRALLY quand il examine les conséquences de l'existence d'une norme d'un État incompatible avec une norme internationale. En effet : « Au niveau de l'ordre international, la solution sera nécessairement dictée par le principe de la supériorité du droit international »217 ; « [...] les conséquences d'une déclaration d'incompatibilité, lorsqu'elle interviendra, seront normalement [...] : mise

215 Pourquoi cette référence au droit romain ? : « [...] le droit romain de l'époque classique admet en

principe la validité de l'acte contraire à une règle supérieure normative. [...] [L]e dol ou la violence sont à