• Aucun résultat trouvé

Proposition d'une méthodologie

4.1 Données et outils : MobiSim

4.1.1 Historique et spécicités

MobiSim s'est vu porté par deux acteurs depuis sa création en 1999 : la société ATN, jusqu'en en 2007, puis le laboratoire ThéMA, depuis 2008, avec des nance- ments réguliers de la part de l'Etat (Ministère de l'écologie, ADEME, PREDIT). 4.1.1.1 Philosophie et évolutions d'un modèle LUTI

Le modèle MobiSim a été fondé au début des années 2000 par la société ATN1,

pilotée par P. Casanova, avec comme objectif l'étude des interactions entre transport et aménagement urbains, dans le cadre de la diusion des modèles LUTI. Intégrant la logique systémique, MobiSim avait pour objet  l'étude de l'évolution complexe du système de façon macroscopique, au travers de boucles de rétroactions (Casa- nova et al., 2005). Nous trouvons ainsi dès le départ la volonté de fonder un modèle de prospective pour l'aide à la décision fondé sur l'analyse de la complexité et des dynamiques du système urbain, intégrée dans le programme de modélisation (An- toni, 2011 ; Hirtzel, 2015). Conçu sur la base de données de plus en plus désagrégées (passage d'une ville découpée en trois zones à un découpage par IRIS, individua- lisation de tous les agents), sa première évolution majeure, au sein d'ATN, sera de débaucher sur une modélisation de type multi-agent (MobiSim SMA) permet- tant l'étude des comportements démographiques et des mobilités des ménages et entreprises du territoire étudié. MobiSim s'inscrit ainsi dans la gamme des modèles fondés sur la micro-simulation et l'approche individu-centrée (Casanova et al, 2005 ; Hirtzel, 2015). Les simulations s'appuient sur une population synthétique d'agents, caractérisés par des attributs, dont les déplacements sont générés par le recours au modèle à quatre étapes que nous avons évoqué plus haut, combiné à diérents mo- dèles d'évolution de l'occupation des sols.

En 2008, le modèle MobiSim change de main et se voit porté au sein du labora- toire de recherche ThéMA. La philosophie reste la même : il s'agit de donner au projet MobiSim deux dimension complémentaires (Antoni et al., 2009) :

 Une dimension  théorique , par la mise en place d'une plate-forme générique, permettant la réexion quant à l'évolution des formes urbaines, l'impact des politiques de transport et d'urbanisme et les interactions pouvant être identi- ées entre les diérents leviers de décisions

 Une dimension  appliquée , en créant un outil d'aide à la décision capable de modéliser et d'analyser diérents scénarios d'aménagement, en prise avec les problématiques locales.

La phase d'appropriation du modèle par le laboratoire ThéMA a permis de mettre en avant les principaux écueils du modèle. En particulier, le temps de calcul im- portant dû à la masse de données, et l'architecture mixte entre données agrégées et désagrégées selon les diérents modèles utilisés, faisant en fait osciller le modèle entre démarche agrégée et démarche individu-centrée, empêchant celui-ci d'être un véritable SMA (Antoni et al., 2009). Une refonte théorique du modèle a ainsi permis de déboucher vers une uniformisation de l'approche individu-centrée, simpliée par le fait qu'un seul type d'agent fut conservé, celui des individus regroupés dans des ménages. MobiSim était alors caractérisé par :

 une approche multiscalaire, représentant 3 niveaux de l'espace géographique (global, zonal, cellulaire), permettant la prise en compte des divers processus pouvant intervenir à diérentes échelles.

 un couplage entre système multi-agent pour les activités des ménages et auto- mates cellulaires pour les mobilités résidentielles et les dynamiques d'occupa- tion des sols.

 une architecture modulaire détaillée, chaque module répondant à une problé- matique qui lui est propre.

MobiSim a par la suite connu un certain nombre d'évolutions, notamment en ce qui concerne les modèles de mobilités et de développement résidentiel. Le processus de décision des ménages prend mieux en compte la complexité d'un choix pouvant être contraint par un scénario élaboré en amont. Des scénarios d'aménagement tra- duisant une volonté d'application d'une politique publique, exogène à la simulation elle-même, peuvent désormais être implémentés dans le modèle et mieux satisfaire les attentes actuelles des aménageurs et décideurs. Le modèle à quatre étapes a été amélioré pour intégrer la modélisation du coût généralisé des déplacements (notion sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir) et le découpage temporel des activités dans la journée, selon un planning déni. Enn, la génération de la population syn- thétique a été repensée pour mieux intégrer les dynamiques géographiques (Hirtzel, 2015).

MobiSim est ainsi aujourd'hui fondé sur une plateforme regroupant diérents mo- dèles permettant la simulation des évolutions des processus d'urbanisation, en appré- hendant leur dimension spatiale, économique, environnementale et démographique. Grâce à la prise en compte de la complexité et de l'aspect systémique des espaces urbains, ses évolutions successives conduisent aujourd'hui à la possibilité d' élaborer des scénarios d'aménagement en simulant les mobilités (quotidiennes ou résiden- tielles) des individus composant un territoire urbain. MobiSim se présente donc comme un modèle LUTI dont les caractéristiques principales sont sa forte intégra- tion et son haut niveau de désagrégation, sur lesquelles nous allons nous arrêter pour étudier son architecture.

4.1.1.2 Un modèle fortement intégré et désagrégé

MobiSim peut en eet être identié comme un modèle LUTI pleinement inté- gré : il intègre sept des huit sous-systèmes du système urbain identiés par Wegener (à l'exception du sous-système des transports de marchandises)(cf chapitre 2). Le modèle de transport, qui se base sur un modèle à quatre étapes  amélioré , est pleinement intégré au modèle, sans nécessiter de recourir à une connexion externe. De plus, MobiSim présente une structure  uniée , c'est à dire que la structure de données est accessible à tous les sous-modèles, présentant ainsi une cohérence théo- rique et organisationnelle. Si l'on s'en réfère au tableau descriptif présenté plus haut, nous pouvons ainsi classer MobiSim dans la catégorie des modèles LUTI intégrés et

uniés, de type quasi-dynamique s'appuyant sur une forte désagrégation des don- nées, ce qui en fait un modèle de simulation performant et pertinent pour simuler les évolutions d'un système urbain, tant d'un point de vue temporel (processus itératif permettant la prise en compte des dynamiques urbaines) que structurel (possibilité de recours à des données fortement désagrégées). Il peut d'ailleurs se caractériser par une triple désagrégation (Antoni et al., 2016) :

 Au niveau de l'agent (individu), permettant une modélisation précise et ne des évolutions démographiques, des choix de modes de transport et de locali- sations résidentielles.

 Au niveau de l'entité spatiale (échelle du bâtiment), permettant l'analyse des mobilités sur de courtes distances (mobilités piétonnes notamment) et l'étude ne de diérents scénarios de développement résidentiel.

 Au niveau de l'échelle temporelle, permettant le détail précis des plannings d'activités des individus durant une journée.

Cette triple désagrégation rend possible l'élaboration d'un nombre important de va- riables, pouvant d'ailleurs par la suite être réagrégées selon les caractéristiques des entités de référence. Ainsi, cela multiplie les champs d'analyses possibles des résul- tats.

Le processus de simulation consiste ensuite à modéliser deux systèmes spatiaux en interaction : le système résidentiel et celui des mobilités quotidiennes. Compo- sés chacun de plusieurs modules, ils sont calibrés à partir de données adéquates et intereliés les uns aux autres. Ils s'appuient sur la génération d'une population syn- thétique, représentant de manière réaliste des individus regroupés dans des ménages et localisés dans des logements. Ce cadre agent/espace va permettre la modélisa- tion des mobilités quotidiennes à partir d'un modèle dont les quatre étapes sont regroupées deux à deux2. Fondé sur diérents types de données3, ce processus ité-

2. ((1)Génération des plannings d'activités et génération des déplacements qui en découlent, (2) aectation sur le réseau rétroagissant sur le choix du mode de transport), puis des mobilités résidentielles (choix de déplacements des ménages fondés sur leur satisfaction résidentielle, leur mobilité intrinsèque à leur mode de vie et leur intérêt global à migrer au sein de la zone d'étude)

3. Base de données socio-économiques et géographiques, PLU et documents de prospective, don- nées locales fournies par les collectivitées quant aux comportements spéciques à la zone d'études, enquêtes ad hoc permettant de mieux calibrer le modèle.

ratif de simulation va produire des résultats à diérentes étapes temporelles (t+n) qui permettront d'analyser l'évolution de l'espace en s'appuyant sur diérents in- dicateurs élaborés à partir des données de sorties du modèle an de caractériser l'espace et d'en tirer des conclusions quant aux mesures à envisager à l'aune des choix d'aménagement eectués.

Figure 4.1  Connexion et interdépendance des étapes de modélisation dans Mo- biSim, d'après Antoni, 2010

Ce processus est formalisé dans la gure 4.1 qui permet d'identier les inter- actions existantes entre les diérentes étapes et les diérents modèles composant MobiSim4

4. Notons que MobiSim, modèle LUTI, peut s'appuyer sur des logiciels de simulation plus spéciques permettant la simulation de milieux urbains : nous pouvons citer entre autres Mup-city, Morpholim (simulation du développement de l'urbanisation à partir du principe de fractalité des structures urbaines) ou encore LucSim (automate cellulaire analysant l'évolution de l'occupation des sols)

MobiSim ore ainsi la possibilité d'une modélisation ne des processus d'évolu- tion urbains, grâce à une architecture intégrée et uniée permettant, grâce à une forte désagrégation, de générer des simulations précises donnant de vastes possibi- lités d'analyses de résultats. En se penchant sur l'impact des choix de localisation résidentiels et l'étude des mobilités, il permet de simuler l'évolution de la structure urbaine et de son environnement en fonction des scénarios d'aménagement envisagés. Il ore en outre une orientation socio-démographique et environnementale originale qui tranche avec la plupart des modèles LUTI davantage focalisés sur les aspects économiques.