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Au cours du XVIIe siècle, les offices connaissent dans un premier temps un apogée qui se traduit par leur importance dans le RFF, puis différents éléments vont contrecarrer cette position centrale. Cette dynamique sociale ascendante du pouvoir des officiers se réalise dans le cadre de la vénalité étatique. Nous verrons d’abord (3.1) les effets de cette forme de vénalité sur le nombre d’offices, le prix des offices, ainsi que sur la manière dont les offices circulent. Puis, nous verrons dans la sous- section suivante (3.2) que cette centralité amène les officiers à jouer un rôle politique de premier plan, se manifestant notamment lors de la Fronde (1648-1653). Cet épisode historique a eu des répercussions historiques de grande ampleur qui se matérialisent par la reprise en main du pouvoir central à travers la figure de Colbert, et par l’affaiblissement du poids politique des offices. Colbert décide en effet de modifier le cadre institutionnel en supprimant la vénalité étatique qui avait permis le renforcement des officiers. Un travail d’archives des mémoires de Colbert (1863) a été réalisé, dans l’optique de connaître précisément ses motivations, ainsi que les tenants et les aboutissants des dynamiques marquant la période.

3.1 L’âge d’or des offices

Dans le dessein de rendre compte du triomphe des offices dans le RFF, plusieurs dimensions seront abordées. La première d’entre elles est l’évolution à la hausse du nombre d’offices en circulation (3.1.1). À cet accroissement du nombre d’offices s’associe une appréciation de leur prix que nous documenterons ensuite (3.2.2). Enfin, nous mettrons en exergue l’effet de l’édit de la paulette sur la durée de détention des offices (3.2.3). Une réduction de la durée de possession révèle une transformation de la nature de cette organisation.

3.1.1 Accroissement du nombre d’offices

Le XVIIe siècle peut être considéré comme le siècle des offices. Chaunu (1993) parle à cet égard d’« État d’offices » pour caractériser cette forme d’État qui se met en place à partir de la vénalité

étatique. Si l’on se place du point de vue de la croissance du nombre d’officiers en poste, et donc de l’extension de cette organisation étatique, ce mode d’allocation des offices a été efficace.

Le graphique n° 7 met en exergue la hausse du nombre d’officiers à partir de la mise en place de la vénalité étatique. En 1515, il y avait 4 141 officiers. En 1610, leur nombre croît à environ 25 000. Une augmentation de 503,72 % du nombre d’officiers se produit entre 1515 et 1610. Le passage de la vénalité coutumière à la vénalité étatique, en tant que modes d’allocation des offices, se traduit par une croissance importante du nombre d’officiers. Si l’on compare le nombre d’officiers en 1665 à celui de 1515, le fossé est encore plus grand. En effet, en 1665, le royaume comprend 46 047 officiers représentant une évolution positive de 1001, 98 %, comparativement à 1515. À partir de cette date, entre 3 et 3,5 % de la population du royaume travaille en tant qu’officiers et fait partie de l’organisation étatique principale de l’État (Chaunu, 1993)233.

Le mode d’allocation des offices reposant sur la vénalité étatique a donc permis une croissance des offices comme organisation étatique. Il a ainsi participé au renforcement du pouvoir de l’État à travers la croissance du nombre de ces organisations qui matérialisent concrètement ce pouvoir, et qui constituent l’une des dimensions fondamentales du RFF. Ce processus de renforcement a pu se

233 À titre de comparaison, en 2015, le gouvernement central en France employait approximativement 3,57 % de la population française en tant que fonctionnaire.

1515 1610 1665 0 5 000 10 000 15 000 20 000 25 000 30 000 35 000 40 000 45 000 50 000 0 5 000 10 000 15 000 20 000 25 000 30 000 35 000 40 000 45 000 50 000 Nombre d’officiers

Graphique 7 : Évolution du nombre d'officiers entre le mode d’allocation des offices de la vénalité coutumière avec les nobles-courtiers, et le mode d’allocation des offices fonctionnant

dans le cadre de vénalité étatique jusqu’à son déclin en 1665. Sources : Le Roy Ladurie (1987) et Chaunu (1993b)

réaliser à travers la constitution d’une réelle demande pour les offices. C’est à la suite de l’édit du droit annuel et de la transformation des offices en actif, figurant dans le patrimoine du propriétaire, que cette demande forte s’est formée.

3.1.2 Appréciation du prix des offices

À partir de 1604 et de l’édit du droit annuel, les offices deviennent pleinement des actifs qui permettent l’enrichissement de leurs propriétaires. La seule contrainte, à laquelle faisaient face les officiers, était le renouvellement du droit annuel. Le roi se laissait la possibilité de ne pas le renouveler et de remettre ainsi en cause la configuration institutionnelle, telle qu’elle a été fixée par l’édit de la paulette. Une forme d’hybridation s’instaure dans laquelle la libéralité du roi – s’exprimant par le renouvellement de l’édit – croise la propriété privée des offices. Alors que la première dimension renvoie foncièrement au fonctionnement féodal, reposant sur une logique de don et contre-don dans le cadre d’une relation personnelle, la seconde s’inscrit dans une logique reposant sur l’accumulation de richesses et sur des rapports impersonnels, puisque le rapport monétaire sert de médiation à ces rapports.

Dans un premier temps, le droit annuel était renouvelé tous les six ans, puis à partir de 1620, le roi le renouvelait tous les neuf ans (Janczukiewick, 2002). Le roi renouvelait néanmoins quasiment à chaque fois le droit annuel, au regard des bénéfices monétaires que cela engendrait pour les revenus royaux234. Ce phénomène de renouvellement automatique se comprend si l’on analyse le prix des

offices. À partir du début du XVIIe siècle, les offices connaissent une appréciation du niveau de leur prix. La période couvrant le début du XVIIe siècle jusqu’en 1635 se caractérise particulièrement par la hausse du prix des offices qui va par la suite se réduire, mais tout en conservant une évolution positive jusqu’en 1665, au moment de la fixation des prix de manière administrative (Descimon, 2006 ; Mousnier, 1979 ;Chaunu, 1993). « C’est la période 1604-1665 qui voit l’apogée du système, période marquée par une inflation fantastique [du prix de l’office] » (Bennini et Descimon, 2010, p. 38).

Le graphique n° 8 ci-dessous révèle la hausse du prix de l’office de conseillers du parlement de Paris entre 1597 et 1637. De 1597 à 1637, l’appréciation du prix de l’office est de 990,91 %. De 1597 à 1617, l’évolution est positive de 513,64 %. Puis, de 1617 à 1637, la hausse est de 77,78 %.

234 La seule fois où le droit annuel ne fut pas renouvelé est en 1648, ce qui provoqua l’épisode de la Fronde, nous y reviendrons dans la suite de ce chapitre.

La hausse généralisée du prix des offices se traduit pour le pouvoir royal par un accroissement de ses revenus, mettant ainsi en lumière la raison pour laquelle le droit annuel est renouvelé. Sachant que le prix des offices nouvellement créés est déterminé par le prix auquel les offices sont vendus sur le marché des offices, dans le cadre de la vénalité étatique, cette appréciation des prix produit des gains supplémentaires pour les parties casuelles. Le graphique n° 9 ci-dessous illustre cet état de fait.

1 597 1 600 1 606 1 614 1 616 1 617 1 635 1 637 0 20 000 40 000 60 000 80 000 100 000 120 000 140 000 0 20 000 40 000 60 000 80 000 100 000 120 000 140 000 Evolution du prix de l’office

Graphique 8 : Évolution du prix de l'office de conseillers du parlement de Paris entre 1597 et 1637 en livres tournois. Source : Mousnier (1979)

Enfin, la hausse du prix des offices nouvellement créés et des revenus provenant des parties casuelles engendre un accroissement du poids financier des parties casuelles dans le RFF de l’époque. Le graphique n° 10 ci-dessous met en évidence cette tendance. La part des revenus des parties casuelles dans les revenus totaux de 1600 à 1657 représente en moyenne 19,07 %. La création d’offices constitue près d’un cinquième des revenus de l’État. La vénalité étatique est à cet égard un succès pour les revenus du pouvoir royal, en plus de renforcer son assise organisationnelle sur son territoire. Trois périodes peuvent être distinguées à l’aune de ce graphique.

1600 1603 1606 1609 1612 1615 1618 1621 1624 1627 1630 1633 163616391642164516481651 0 5 000 000 10 000 000 15 000 000 20 000 000 25 000 000 30 000 000 35 000 000 40 000 000 0 5 000 000 10 000 000 15 000 000 20 000 000 25 000 000 30 000 000 35 000 000 40 000 000 Evolution des revenus des parties casuelles

Graphique 9 : Évolution des revenus des parties casuelles en livres tournois à la suite de créations d'offices dans la première moitié du XVIIe siècle. Source : Bayard (1989)

La première période correspond à celle qui recouvre les années 1600 à 1619. Durant cette période, les revenus des parties casuelles représentent en moyenne 10,10 % des revenus totaux. La part de ces revenus s’accroît progressivement durant cette période, avec cependant quelques fortes augmentations ponctuelles pour lesquelles le ratio dépasse les 10 % comme pour les années 1608, 1613, 1614, 1616 et 1617, avec l’année 1616 comme année de pointe où la part s’élève à 31,74 %.

La deuxième période (1620-1633) est la période de l’apogée de la part des revenus des parties casuelles dans les revenus totaux. En effet, durant cette période, ils représentent en moyenne 36,62 % des revenus totaux. Pour plusieurs années, le pourcentage tourne autour des 50 %, comme pour l’année 1623 (46,34%), l’année 1632 (49,31%) et pour l’année 1633 (51,32%) qui dépasse les 50 %.

Enfin, la dernière période est celle qui correspond au déclin de la part des revenus des parties casuelles dans les revenus totaux. Elle recouvre les années 1634 à 1653. En moyenne, durant cette période, la part de ces revenus représente 14,40 % des revenus totaux.

La vénalité étatique est donc un succès pour le pouvoir royal, car à travers ce mode d’allocation des offices il est en mesure d’accroître ses revenus via la création de nouveaux offices.

1600 1603 1606 1609 1612 1615 1618 1621 1624 1627 1630 1633 1636 1639 1642 1645 1648 1651 0,00 % 10,00 % 20,00 % 30,00 % 40,00 % 50,00 % 60,00 %

Ratio des revenus des parties casuelles dans les revenus totaux

Graphique 10 : Pourcentage des revenus provenant des parties casuelles par rapport aux revenus totaux entre 1600 et 1653. Source : Bayard (1989)

3.1.3 Accélération de la vitesse de circulation des offices

L’édit de la paulette a eu pour effet de transformer les offices en bien immeuble. En acquérant ce statut, les offices sont officiellement devenus un actif au sein du patrimoine de l’officier. En ce sens, une réelle propriété privée se met en place dans laquelle l’usus, l’abusus et le fructus sont des dimensions présentes, dans ce cadre juridique. Les offices étaient ainsi « producteurs d’un statut social, d’une sorte d’assurance de domination, un peu à l’instar des fiefs et seigneuries » (Bennini et Descimon, 2010, p. 35).

L’un des effets immédiats de l’édit de la paulette est la réduction de la durée de possession des offices. Cummings (1980) relate ce phénomène pour l’office de maître des requêtes au parlement de Paris. Il s’agissait de l’un des offices de justice les plus prestigieux de la période. Pour obtenir cet office, d’importantes sommes d’argent devaient ainsi être déboursées. Cummings (1980) a répertorié 162 cas sur 170 cas observables pour lesquels la durée de possession de l’office a pu être déterminée. Parmi ces 162 cas, 83 cas se déroulent avant l’édit de la paulette, et 79 autres après cet édit. La répartition de l’échantillon est donc bien garantie, permettant dès lors une comparaison relativement représentative et une compréhension des effets de l’édit de la paulette sur la durée de possession. Tableau 1 : Réduction de la durée de possession de l'office de maître des requêtes au parlement de Paris à la suite de l'édit de la paulette. Source : Cummings (1980)

Années de possession 1-4 5-8 9-12 13-16 17-20 21-24 25+ Avant la paulette 9,6 % 9,6 % 13,3 % 20,5 % 21,7 % 9,6 % 15,7 % Après la paulette 22,8 % 20,3 % 13,9 % 17,7 % 11,4 % 8,9 % 5,1 % Alors qu’avant la paulette, la durée de possession de cet office était principalement entre 17 et 20 ans, à partir de 1604 la durée de possession principale se situe entre 1 et 4 ans. Plus généralement, on constate une réduction du temps de possession de cet office, puisqu’à partir de l’édit de la paulette 57 % des possessions se font pour une durée comprise entre 1 et 12 ans. Auparavant, pour cette même tranche de durées de possession, 32,5 % des offices étaient concernés. À l’inverse, avant 1604, les officiers restaient propriétaires de cet office sur le long terme, puisque dans 47 % des cas la durée de possession était comprise entre 17 et plus de 25 ans.

La conséquence de l’édit de la paulette est de transformer une charge qui était possédée sur le long terme en un actif possédé sur le court terme. L’un des offices les plus prestigieux de la société de l’époque a donc changé de nature, à la suite de l’édit du droit annuel. Il est devenu un actif que l’on possède temporairement pour le transmettre relativement rapidement par la suite. On peut supposer

que la réduction de la durée de possession se traduit par un accroissement du nombre d’échanges monétaires des offices. En ce qui concerne le pouvoir royal, la réduction du nombre d’années de possession des offices engendre un accroissement des revenus. En effet, pour chaque transmission, le pouvoir royal percevait une taxe de résignation égale à un quart de la valeur estimée de l’office.

L’édit de la paulette a transformé en profondeur la société de l’époque, à travers l’une des organisations principales qui structuraient le fonctionnement de l’État. L’édit de la paulette, et plus généralement la vénalité étatique comme mode d’allocation des offices, a représenté une occasion sans précédent, et sans comparaison avec les autres pays européens, pour accroître les revenus de l’État. Mais cette configuration institutionnelle a pour effet de mettre l’État dans une position de dépendance vis-à-vis de cette organisation et de ce mode d’allocation des offices. Des rapports contradictoires surgissent dès lors dans la société de l’époque. Nous verrons dans la sous-section suivante que le renforcement des officiers s’est matérialisé par une guerre civile à travers l’épisode de la Fronde, durant lequel les officiers contestent au roi la notion de « chose publique ». Puis, nous verrons qu’à la suite de la défaite relative des frondeurs, le pouvoir central, à travers la figure de Colbert, va supprimer le mode d’allocation des offices et va réduire le pouvoir des officiers. Il en sera terminé de l’âge d’or des offices.

3.2 De la Fronde à l’administration des prix

Au sein de cette section, nous examinerons la Fronde, en tant qu’évènement historique fondamental du XVIIe siècle, nous permettant de révéler les forces en présence. Dans l’historiographie traditionnelle, plusieurs moments peuvent être distingués durant la Fronde, tels que la Fronde parlementaire (de janvier 1648 à mars 1649), la Fronde des princes (de janvier à décembre 1650), l’union des deux Frondes (de décembre 1650 à février 1651), et la Fronde condéenne (d’octobre 1650 à février 1653). Nous ne traiterons que de la Fronde parlementaire, afin de mettre en exergue le poids politique des officiers acquis au cours des siècles (3.2.1). Cet épisode historique est relativement paradoxal en raison d’un double mouvement. D’une part, les officiers réussissent à obtenir certaines de leurs revendications, après avoir contesté ouvertement le pouvoir du roi. Et d’autre part, la Fronde reste dans les mémoires des membres du pouvoir royal, et en particulier dans celle de Colbert. Ce dernier fera cesser le renforcement de pouvoir des officiers à travers la suppression de la vénalité étatique qui prolonge et voit aboutir une tentative du pouvoir royal de réduire l’autonomie des officiers à travers l’envoi des intendants (3.2.2).

3.2.1 La Fronde et la chose publique

Le contexte dans lequel se déroule la Fronde est celui de l’affermissement du pouvoir des officiers, à la suite de l’instauration de l’édit de la paulette. Le renforcement des officiers était tel que Chaunu (1993, p. 203) décrit cette dynamique sociale de la façon suivante : « tout cela constitue le commencement d’une menace pour l’institution monarchique ». Le droit annuel devait néanmoins être renouvelé par le roi tous les six ans, puis neuf ans à partir de 1620, rendant ce renforcement institutionnellement incertain. Ne pas renouveler le droit annuel reviendrait à porter préjudice aux officiers et aux différents accords financiers réalisés dans lesquels les offices étaient mis en collatéral. Certains officiers voyaient au demeurant avec une certaine inquiétude l’arrivée de financiers et de leurs fortunes dans les affaires de l’État. Si la présence de financiers avait l’avantage de faire augmenter le prix des offices pour les propriétaires qui souhaitaient les vendre et réaliser par là même occasion des bénéfices monétaires, elle impliquait un renchérissement pour les achats d’offices. Pithon, un officier « conseiller parlementaire », s’en inquiétait par cette formule : « ils offraient tant que personne ne pouvait surenchérir » (Mousnier, 2005, p. 1159). C’est donc dans ce contexte de renforcement, certes fragile, du pouvoir des officiers et de concurrence avec les financiers que la Fronde apparut.

Le droit annuel arrivait à échéance le 31 décembre 1647. Son renouvellement cristallisa d’importants conflits. Le pouvoir royal tardait à renouveler le droit annuel dans le dessein de contraindre les officiers et d’obtenir d’eux des réductions sur le paiement de gages, ou à l’inverse obtenir d’eux un paiement supplémentaire pour conserver leurs offices. La politique de Mazarin235

était de jouer la division entre les officiers, dans le but d’obtenir le plus de revenus possibles. Par exemple, à partir du 1er janvier 1648, Mazarin accorda des privilèges à certains officiers, à travers des

arrêts en commandement236 décidés dans le Conseil du roi, tels que la conservation du caractère

patrimonial des offices en attendant que le roi renouvelle le droit annuel (Janczukiewick, 2002). Puis, il accorda ce privilège à d’autres officiers comme ceux des trésoriers des parties casuelles. Un jeu de dupes se mit en place dans lequel chaque protagoniste campait sur ses positions: les officiers voulaient le renouvellement du droit annuel ; le Conseil du roi, à travers la figure de Mazarin, souhaitait négocier le paiement d’une certaine somme pour le renouvellement du droit annuel237. Le

Parlement de Paris obtint l’accord du Conseil du roi de ne rien payer en contrepartie du renouvellement du droit annuel. En revanche, pour les autres Cours souveraines238, le Conseil

attendait d’elles un paiement pour le renouvellement du droit annuel, alors que, sous Louis XIII,

235 Il était le Premier ministre d’État de 1642 (à la mort de Richelieu) à 1661 – année de sa mort.

236 Les arrêts en commandement étaient des arrêts décidés en Conseil du roi qui étaient « expédiés par les secrétaires qui avaient la signature en commandement du roi » (Dumas, 1956, p. 266).

237 Cette tentative de négociation d’un paiement n’est pas nouvelle, car des cas similaires se sont déjà produits dans le passé en 1620 sous Louis XIII quand il avait demandé aux officiers de payer le vingtième-denier (5 % de la valeur des offices) plus un montant égal à 1 % de la valeur de leurs offices. En 1630 et en 1638, les officiers aussi ont payé un montant dans le cadre de la négociation de renouvellement du droit annuel.

238 Il s’agissait des offices les plus importants dans la société de l’époque, soit « les parlements, le grand conseil des chambres des comptes, les cours des aides, la cour des monnaies, les conseils souverains » (Bluche, 1993, p. 185).

elles en avaient été exemptées. Ces cours souveraines s’offusquèrent et envoyèrent dans chacune d’entre elles des députations. Un basculement dans le rapport de forces vit le jour lorsque le Parlement de Paris se solidarisa avec les autres Cours souveraines. L’arrêt du 13 mai 1648 du Parlement de Paris matérialisa cette solidarité en indiquant que les quatre compagnies souveraines de Paris, à savoir le Parlement, la Chambre des Comptes, la Cour des Aides et le Grand Conseil devaient se réunir pour débattre de la suite dans la chambre Saint-Louis (Mousnier, 2005). L’arrêt du 13 mai 1648 est connu sous le nom d’« arrêt d’union » par lequel ces quatre compagnies se fédèrent pour devenir la chambre Saint-Louis. La réponse du Conseil du roi ne se fit pas attendre, et le 18 mai, il supprima le droit annuel. Le conseil saisit rapidement la dangerosité que représentait l’agrégation des quatre compagnies d’officiers les plus puissantes du royaume. La reine déclara alors qu’établir la chambre Saint-Louis et que « faire de quatre compagnies souveraines une cinquième sans ordre du roi et sans autorité légitime […], c’[était] une espèce de république dans la monarchie, l’introduction d’une puissance nouvelle, dont les conséquences [pouvaient] être dangereuses et préjudiciables à l’ordre du gouvernement public » (Pernot, 2012, p. 73). Cette citation se comprend si on la met en parallèle avec les évènements outre-Manche, durant lesquels le parlement anglais remettait en cause au même moment, en avril-mai 1648, le pouvoir monarchique anglais239.