• Aucun résultat trouvé

Les gestes posés

DE LA CONVENTION COLLECTIVE

1.4. LA GESTION DYNAMIQUE DES RELATIONS DE TRAVAIL

1.4.5. Les gestes posés

Les gestes posés dans un établissement donné manifestent la volonté de chaque partie et représentent la suite logique de l’interaction des éléments mentionnés précédemment :

• le pouvoir réel ou apparent de chaque partie ;

• leur argumentation respective ou leurs motifs ;

• les dispositions personnelles de leurs représentants l’un à l’égard de l’autre ;

• la forme et le contenu des renseignements qu’elles veulent bien se transmettre.

Cette action, qui détermine les résultats qu’on peut espérer obtenir des rapports collectifs, est en outre hautement tributaire de la valeur éthique accordée par l’une des parties aux actions de l’autre. Elle peut donner lieu à un ensemble d’événements parfois difficiles à vivre, mais dont le caractère dramatique peut s’estomper lorsque examinés dans une perspective historique. C’est en somme à travers l’action patronale-syndicale que s’exercent les droits conférés par les règles élaborées par les parties ou le pouvoir formel qu’elles se sont attribué.

1.4.5.1. L’ÉTHIQUE

Le caractère moral, c’est-à-dire correct ou incorrect, de ce tourbillon d’acti-vités préoccupent les intervenants dans le régime de rapports collectifs.

Signalons que la perception de l’éthique peut varier selon les circonstances.

Ainsi, des organisations de travailleurs ont réclamé, au début du syndi-calisme et lors des premières luttes syndicales, le droit de se faire justice eux-mêmes conformément à une forme d’éthique philosophique ; l’exer-cice de ce droit pouvait se réaliser par une action de grève soudaine et des démonstrations parfois violentes.

L’éthique sociologique, quant à elle, renvoie davantage au choix d’une majorité de travailleurs. Il s’agit d’une forme d’éthique profon-dément ancrée dans les traditions démocratiques que traduit bien l’expres-sion latine vox populi vox dei(voix du peuple, voix de Dieu). Ce principe,

fort louable, se révèle cependant limité pour décider de la condition des groupes minoritaires dans les milieux de travail, notamment lorsqu’on doit tenir compte des diverses cultures et religions.

Finalement, l’éthique réglementaire ou juridique concerne le domaine du raisonnable et implique que chaque partie doit motiver adéquatement les positions qu’elle adopte ou les décisions qu’elle prend.

Une action est alors éthique si elle ne choque pas l’autre partie outre mesure, si elle est argumentée, si elle présente une logique interne appropriée ou démontre un lien évident entre les motifs invoqués et les résultats recherchés.

1.4.5.2. LES PRINCIPES D’ACTION

Une gestion dynamique des relations de travail passe au premier chef par une gestion quotidienne des détails au plan de la communication verbale ou écrite entre un employeur, les employés et leurs représentants.

Les parties expriment des attentes l’une à l’égard de l’autre, ce qui peut les disposer favorablement ou défavorablement. Elles justifent leur action puis, selon le pouvoir qu’elles détiennent, agissent. Pour avoir une convention collective de qualité, il essentiel que cette action soit proactive plutôt que réactive.

Nous énumérons ci-après les principes d’action liés à la dynamique des relations de travail dans une organisation.

• Lors d’un conflit collectif, la loyauté à l’égard du groupe prime sur la logique. On peut partager les visions de l’administration locale et recourir tout de même à des moyens de pression par solidarité nationale.

• Dans un climat tendu, la ligne qui sépare un comportement docile d’un comportement agressif est très mince. Un fait mineur peut dégénérer en affrontement majeur surtout en présence d’une situa-tion de tension déjà établie.

• Lorsque les parties possèdent un pouvoir réciproque équivalent, c’est souvent la plus revendicatrice qui impose le style de la rela-tion. Selon l’adage, « on met de l’huile sur la roue qui grince ».

• La partie qui anticipe sa victoire est portée à adopter une stratégie haute, c’est-à-dire une position objective, rationnelle et éthique. En revanche, une partie vaincue et réduite à l’impuissance sera encline à adopter une stratégie basse (pamphlets et parfois saccage ou inti-midation). Il s’agit d’une position négative, irrationnelle et norma-lement jugée faible sur le plan éthique.

• En situation de conflit intense, une stratégie basse peut être rentable à court terme pour celui qui la pratique, mais elle l’est moins à long terme. Une position extrême consisterait à chercher à réduire un adversaire à l’impuissance.

• Par sécurité et pour mieux assurer l’accomplissement de son projet, chaque partie cherche à accroître sa réserve de pouvoir. Par exemple, au Québec, une disposition législative réduisant l’ancien-neté des employés publics fut adoptée en vitesse à la fin d’un conflit, vers la fin des années quatre-vingt, virtuellement pour empêcher toute autre grève dans les services de santé. Puis, le gouvernement, à la suite de pourparlers avec les organismes syndicaux concernés, annula cette perte d’ancienneté.

• L’acquisition de pouvoir supplémentaire se fait couramment au détriment des adversaires. Un incident de parcours peut être uti-lisé par une partie. Par exemple, un gouvernement employeur peut profiter d’un conflit ouvrier lors duquel les citoyens ont perçu les services menacés. Il utilisera alors son pouvoir de légiférer pour adopter une loi empêchant la répétition d’une telle grève, augmen-tant du coup son pouvoir de négociation futur face à l’autre partie.

De même, un employeur multisite pourrait annoncer la fermeture d’une usine en début de négociation afin de réduire le régime d’attentes du syndicat concerné.

• Dans le bilan énergétique d’une situation, tout conflit est déficitaire s’il ne donne pas lieu à un réajustement comportemental. Le conflit épuise et les gens doivent réapprendre à vivre ensemble en chan-geant leurs attitudes afin d’éviter que réapparaissent les litiges qui les ont affaiblis.

• Une partie démunie de pouvoir peut être malgré tout efficace si elle est bon stratège.

• En cas d’impasse, faire jouer le temps est la stratégie la plus utilisée, avec pour résultat des négociations collectives qui traînent parfois en longueur.

• La négociation est efficace si les parties ont la volonté de mar-chander ce qu’elles donnent et ce qu’elles réclament sous la pres-sion de pouvoirs équivalents. Il n’y a pas de négociation possible si une partie a le pouvoir d’écraser l’autre.

• Dans les relations conflictuelles, ce qu’un partenaire ne peut pas obtenir en pouvoir, il doit l’investir en attitudes. En d’autres termes, face à un adversaire ayant plus de pouvoir que soi, il faut com-penser cette difficulté en démontrant davantage d’habiletés rela-tionnelles.

• L’équité et la justice étant insaisissables objectivement, leur représentation par quiconque est toujours contestable et contestée.

Ainsi, par rapport à d’autres individus, une personne croit faci-lement qu’elle est désavantagée.

• En relations de travail, un conflit d’intérêts est toujours présent entre les parties malgré leur bonne foi respective. Suivant l’ordre des choses, l’employeur maximise ses profits et l’employé loue ses services moyennant rémunération.

Les principes mentionnés précédemment représentent des phéno-mènes observés maintes fois par les praticiens. Ils n’ont pas, a priori, fait l’objet d’une validation empirique.

1.5. LES EXIGENCES DES RELATIONS DE TRAVAIL CONTEMPORAINES