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La garantie pour un accès minimum aux marchés

Section I L’ouverture des marchés agricoles par homogénéisation et diminution des

Paragraphe 3 La garantie pour un accès minimum aux marchés

282. Comme on l’a montré précédemment dans le présent travail, les données

de référence afin de calculer les équivalents tarifaires ont été fixées à celles des années 1986 à 1988, où l’écart entre les prix intérieurs et extérieurs était le plus important des dernières décennies.583 Une fois que la période de base est fixée, il reste à chaque Membre à effectuer le processus de tarification et à consolider ainsi ses taux plafonds afin d’engager le processus de réduction tarifaire. Chaque Membre a évidemment tout intérêt à recourir à ces données pour fixer ces taux plafonds à un niveau le plus haut possible. Même si les droits de douane effectivement appliqués par les Membres sont souvent inférieurs aux taux plafonds, on peut d’ores et déjà anticiper le risque d’un renchérissement des droits de douane consolidés, qui rendra éventuellement les conditions d’importation plus restrictives que leurs prédécesseurs non tarifaires.584

582 PARENT G., « L’OMC, l’Accord sur l’agriculture et la sécurité alimentaire », in F. Snyder (dir.), Sécurité alimentaire

international et pluralisme juridique mondial , Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 26

583 INGCO M. D., Agricultural Trade Liberalization in the Urug uay Round: One Step Forward, One Step Back? , op. cit., p.

22 ; et TANGERMANN S., Implementation of the Uruguay Round Agreement on Agriculture by Major Developed Countries , UNCTAD/ITD/16, Rapport préparé pour la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, le 3 octobre 1995, p. 5

584 En réalité, le phénomène subséquent de « surtarification » a bien confirmé ce potentiel. Les tarifs douaniers appliqués par

les principaux pays développés à l’issue du processus de tarification sont exorbitant s. Ils se varient entre 100% et 500%, ceux qui étant d’ailleurs très rare dans l’histoire du commerce international. D’autant plus que les droits de douane finalement consolidés sont souvent remarquablement plus élevés que les réels équivalents tarifaires des restrictions non tarifaires. A titre d’exemple, les droits de douane consolidés par l’Union européenne sont 60% plus élevés que les réels

QIN Quan| Thèse de doctorat |Novembre 2017

283. Dans le but d’atténuer les impacts néfastes de cette tendance sur les

échanges internationaux, les Membres se sont engagés à maintenir le niveau existant de l’ouverture du marché. Il s’agit des engagements sur les possibilités courantes d’accès et les possibilités minimales d’accès, celles-ci assurant qu’une certaine quantité minimale de produits agricoles peuvent en tous cas entrer dans les marchés intérieurs.

284. Les engagements d’accès courant visent à garantir que le niveau

historique d’importations résiste aux impacts du processus de tarification.585

Selon le principe prévu dans les Modalités de l’établissement des engagements contraignants et spécifiques, dans les cas où les importations d’un produit spécifique sont supérieures à 5% de sa consommation intérieure correspondante pendant la période de base 1986 – 1988, les possibilités courantes d’accès doivent être maintenues et augmentées pendant la période de mise en œuvre de l’Accord sur l’agriculture.586

Cela signifie que chaque Membre est obligé de créer des conditions d’importations qui soient au moins équivalentes à celles pratiquées pendant la période de base. Du fait que la plupart des possibilités d’accès des marchés agricoles antérieures au Cycle de l’Uruguay étaient établies sur la base des accords bilatéraux à des conditions préférentielles, le maintien d’un accès courant permet aux pays exportateurs de continuer à bénéficier de ces conditions dans le nouveau régime commercial multilatéral, et d’échapper du risque de la dégradation des conditions d’accès découlant de la surestimation des équivalents tarifaires.587

équivalents tarifaires des PAC appliquées dans les dernières années, tandis que les nouveaux droits de douane des Etats-Unis sont 45% supérieurs aux taux pratiqués antérieurement.

Sur ce point, voir DESTA M. G., The Law of International Trade in Agricultural Products: From GATT 1947 to the WTO Agreement on Agriculture, op. cit., p. 75; et ANDERSON K., ERWIDODO et INGCO M., Integrating Agriculture into the WTO : The Next Phase, Rapport présenté à la Conférence de l’OMC et de la Banque mondiale sur les pays en développement dans le Cycle millénium tenue les 20 – 21 septembre 1999 à Genève, pp. 8 – 9

585 En vertu des Modalités de l’établissement d’engagements, « les possibilités d’accès courantes, à des conditions au moins

équivalentes aux conditions existantes, seront maintenues dans le cadre du processus de tarification ». GATT, Groupe de négociation sur l’accès aux marchés, Modalités de l’établissement d’engagements contraignants et spécifiques s’inscrivant dans le cadre du programme de réforme, MTN.GNG/MA/W/24, 20 décembre 1993, Annexe 3, para. 11

586 Ibid., Annexe 3, para. 6 587

285. Lorsque les niveaux historiques d’importations étaient très faibles –

inférieurs à 5% de la consommation intérieure,588 un accès minimal serait établi, pour l’année 1995, qui correspond à 3% de la consommation intérieure du produit visé pendant la période de référence (1986 – 1988). Cet accès devait atteindre 5% à partir de l’année 2000 pour les pays développés et à partir de l’année 2004 pour les pays en développement.589

286. En partique, la mise en œuvre par les Membres de l’OMC de ces

possibilités d’accès courantes et miminales est souvent passée par l’application des contingents tarifaires. Il s’agissait de déterminer, pour chaque produit à importer, un certain volume de contingent et d’appliquer un double niveau de taux de droits de douane aux produits importés – un taux minimal ou faible pour les volumes soumis aux contingents et un taux élevé pour les volumes hors contingents. Si les méthodes utilisées par les pays importateurs afin d’allocation de leurs contingents tarifaires entre pays exportateurs étaient très variées,590 les règles suivantes devaient être toujours respectées :

- pour les contingents établis sur la base de maintien de l’accès courant, les

pays importateurs n’étaient pas tenus de les généraliser sur la base du principe de la nation la plus favorisée (NPF) ;

- en cas d’expansion de l’accès courant, toute expansion de ce type serait

effectuée sur une base NPF ;591

588 FAO, Les négociations commerciales multilatérales sur l’agriculture – Manuel de référence – II – L’Accord sur

l’agriculture, op. cit., para. 5.2.1

589 GATT, Groupe de négociation sur l’accès aux marchés, Modalités de l’établissement d’engagements contraignants et

spécifiques s’inscrivant dans le cadre du programme de réforme, MTN.GNG/MA/W/24, 20 décembre 1993, Annexe 3, para. 5 et 15

590 Les dispositions concernant l’administration des contingents tarifaires se trouvent plutôt dans l’article XIII du GATT de

1994 – Application non discriminatoire des restrictions quantitatives, et non pas dans l’Accord sur l’agriculture. Du f ait que cet article fait surtout office de directive générale et laisse aux Membres un pouvoir discrétionnaire relativement grand pou r l’administration des contingents, diverses méthodes sont utilisées pour allouer les contingents tarifaires. Ces méthodes peuvent être classifiées en catégories suivantes : taxes appliquées, premier arrivé - premier servie, licences sur demande, mise aux enchères, transactions antérieures, importations effectuées par des organismes commerciaux d’Etat, groupements ou associations de producteurs, méthodes d’allocation mixtes, etc. Pour une explication détaillée, voir FAO , Les négociations commerciales multilatérales sur l’agriculture – Manuel de référence – II – L’Accord sur l’agriculture, op. cit., para. 5.3, Tableau 4

591

GATT, Groupe de négociation sur l’accès aux marchés, Modalités de l’établissement d’engagements contraignants et spécifiques s’inscrivant dans le cadre du programme de réforme, MTN.GNG/MA/W/24, 20 décembre 1993, Annexe 3, para. 11

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- les contingents tarifaires mis en œuvre dans le cadre de l’accès m inimal

seraient généralisés sur une base NPF.592

287. En tant qu’instrument supplémentaire pour améliorer l’accès aux

marchés pour les exportateurs, l’accès courant a légitimé les anciens échanges effectués dans le cadre d’arrangements bilatéraux à des taux préférentiels, alors que l’accès minimal a rendu possible le développement des échanges de certains produits, échanges qui étaient auparavant peu dynamiques ou quasi -inexistants. Les engagements en matière d’accès courant et d’accès minimal ont une grande signification pour la sécurité alimentaire des Membres de l’OMC, surtout celle des pays en développement. Ils ont non seulement permis aux pays exportateurs de continuer à bénéficier du même niveau de revenus, mais également ouvert les possibilités de nouvelles recettes d’exportations. La constitution et l’enrichissement des stocks alimentaires sont ainsi assurés.

288. Bien évidemment, l’introduction des contingents tarifaires dans la mise

en œuvre de ces engagements signifie toujours une intervention importante du pouvoir public de chaque Membre. Cela nécessite une bonne administration des contingents tarifaires pour que ceux-ci soient appliqués de manière non discriminatoire, transparente et prévisible.593

289. De manière générale, les disciplines de l’Accord sur l’agriculture en

matière d’accès aux marchés ont parvenu à rendre plus évidents les obstacles commerciaux à la frontière et à les soumettre à un processus de réduction. En plus de faciliter directement l’ouverture des marchés agricoles, elles ont amélioré sensiblement la transparence et la prévisibilité du commerce agricole, et contribué ainsi à la création d’un système d’échanges agricoles « équitables et axés sur le marché », système pouvant favoriser différentes solutions aux problèmes alimentaires. Néanmoins, à cause de la pratique très étendue de toutes sortes de soutiens financiers dans le secteur agricole, l’établissement réel d’un système commercial de ce genre dépend davantage du réaménagement approfondi des

592

Ibid., Annexe 3, para. 14

593 L’administration des contingents tarifaires est souvent critiquée comme discriminatoire, manquant de transparence et de

disciplines applicables dans le domaine de subventions, domaine extrêmement compliqué et sensible.

Section II - La création d’une base assainie de la concurrence