• Aucun résultat trouvé

Formation d’une assembl´ee temporelle et liage temporel

12.4 Dynamique

12.4.4 Formation d’une assembl´ee temporelle et liage temporel

L’ensemble des r´esultats que nous venons de discuter permet de revenir `a la probl´ematique du liage temporel. Nous proposons une explication qui permet de relier les activit´es fr´equentielles observ´ees au niveau de l’ensemble des exp´eriences `a la formation d’une assembl´ee temporelle. Cette explication se base principalement sur l’hypoth`ese que la r´epartition fr´equentielle de l’activit´e des neurones est li´ee `a la taille du r´eseau dans lequel ils sont impliqu´es (voir la section 3.3.2).

Fig. 12.1 – Diff´erents r´egimes de fonctionnement des neurones en l’absence de stimulus

(`a gauche) et en pr´esence de stimulus (`a droite).

En l’absence de stimulus, l’activit´e suit un r´egime li´e `a la topologie du r´eseau (figure 12.1, `a gauche). Les ´emissions des neurones suivent un ordre causal, comme dans une synfire chain (voir section 4.2.2), et les neurones agissent en d´etecteurs de synchronie (voir section 2.1.2). Dans ce cas, le r´egime de d´echarge des neurones est li´e `a la longueur des boucles du r´eseau. Du fait de l’existence d’un grand nombre de longueurs diff´erentes au sein du r´eseau, le comportement dynamique des neurones est tr`es h´et´erog`ene.

Cependant, les ´emissions de PA des neurones sont corr´el´ees. Cette corr´elation est vi-sible sur les diagrammes de la section 11.3, lors de la phase de repos. Mais dans ce cas, la corr´elation provient avant tout des projections directes entre les groupes de neurones. A la section 12.4.2, on a vu que certains auteurs faisaient l’hypoth`ese que l’activit´e de fond mesur´ee correspondait aux connexions anatomiques entre les aires. Cette hypoth`ese reste `a confirmer, mais l’hypoth`ese de fonctionnement que nous proposons ici permet d’expliquer ces r´esultats.

En pr´esence d’un stimulus, ce sont les param`etres du neurone, notamment sa p´eriode r´efractaire, et la constante de fuite du potentiel de membrane, qui vont d´eterminer le r´egime de d´echarge du neurone (figure 12.1, `a droite). Dans ce cas, la topologie perd son importance pr´epond´erante. N´eanmoins, les neurones qui vont recevoir suffisamment de PA corr´el´es en provenance d’autres neurones de l’assembl´ee temporelle vont eux-mˆeme faire partie de cette assembl´ee. Lors de la formation de cette assembl´ee, ces neurones vont pouvoir `a leur tour impliquer d’autres neurones dans l’assembl´ee, et ainsi de suite. Les neurones agissent alors en int´egrateurs (voir section 2.1.2), en comptant le nombre de PSP re¸cus depuis les autres neurones de l’assembl´ee temporelle. Nous ne repr´esentons ici que les neurones appartenant `a l’assembl´ee temporelle. Les neurones n’en faisant pas partie vont avoir une activit´e plus faible que dans leur ´etat de base et, surtout, ils vont se d´esynchroniser des neurones de l’assembl´ee temporelle.

Ce mode de fonctionnement des neurones, lors de la pr´esentation du stimulus, per-met de justifier l’existence d’une bande de fr´equences sp´ecifique, aussi bien au niveau des r´esultats obtenus avec le mod`ele, que dans la litt´erature en neurosciences. Il per-met ´egalement de justifier l’impossibilit´e de la co´existence des bandes de fr´equences interm´ediaires et de bandes des hautes fr´equences (que nous assimilons `a la bande de fr´equences γ) : comme ce sont les mˆemes neurones qui sont impliqu´es dans le deux pro-cessus, mais que c’est leur mode de fonctionnement qui change, la r´epartition fr´equentielle observ´ee lors de l’activit´e de fond ne se retrouve plus lors de l’injection d’un stimulus. Les neurones modifient leurs interactions, la corr´elation des activit´es ´etant renforc´ee entre certains groupes de neurones et diminu´ee entre certains autres.

Le fait de ne pas voir de diff´erence au niveau macroscopique entre diff´erents stimuli de mˆeme nature trouve l`a aussi une justification : comme la fr´equence de l’oscillation qui lie les diff´erents neurones de l’assembl´ee est impos´ee par des contraintes de nature physiologique, elle est identique pour tous les processus de perception. En revanche, les trains de PA des neurones directement li´es aux groupes d’entr´ee ´etant diff´erents, le motif temporel des neurones de l’assembl´ee va ˆetre diff´erent. De mˆeme, le motif spatio-temporel des neurones n’appartenant pas `a l’assembl´ee est ´egalement modifi´e.

Ainsi, vis-`a-vis de l’hypoth`ese du liage temporel, deux points sont tout particuli`erement `a mettre en valeur : d’une part, la distinction faite entre corr´elation et synchronisation, d’autre part, l’importance de la d´esynchronisation.

Contrairement `a l’appellation consacr´ee dans la litt´erature, nous ne parlons plus de “liage temporel par synchronie”, puisque, selon l’hypoth`ese de fonctionnement pro-pos´ee, la formation d’une assembl´ee temporelle est bas´ee sur une corr´elation des instants d’´emission des PA et non pas sur leur synchronisation `a des instants d’´emission rigoureu-sement identiques.

La d´esynchronisation joue aussi un rˆole important puisqu’elle induit une rupture avec l’activit´e de fond du syst`eme au repos. Ainsi, l’activit´e de fond devrait ˆetre l’objet d’´etudes plus approfondies, notamment pour ´etablir des liens topologiques existant entre les diff´erentes zones du cerveau. Certes, les corr´elations que l’on mesure lors cette activit´e ne jouent pas de rˆole fondamental dans le liage temporel, en revanche la suppression de ces corr´elations, induite par la pr´esence d’un stimulus, pourrait en jouer un.

Chapitre 13

Conclusion

Nous avons pr´esent´e un mod`ele de r´eseau de neurones, le mod`ele EvoSNN, permettant de faire fonctionner un syst`eme articifiel sur le principe de l’hypoth`ese du liage tempo-rel. Dans le mod`ele, cette propri´et´e ´emerge sous l’effet de deux facteurs : l’utilisation de mod`eles temporels pour les neurones et les synapses, et l’optimisation de la topologie par un algorithme ´evolutionniste.

Nous montrons que l’´evolution permet d’adapter les individus `a un environnement virtuel, quelle que soit la complexit´e de la topologie et de la dynamique des r´eseaux de neurones qui les contrˆolent. L’originalit´e du mod`ele tient au fait que nous conservons un point de vue biologique pour la conception des r´eseaux. En effet, la s´election naturelle n’est bas´ee que sur les performances comportementales de l’individu dans son environne-ment, les propri´et´es topologiques et dynamiques du r´eseau n’´etant qu’un produit d´eriv´e de l’´evolution. Le liage temporel est ainsi vu comme un m´ecanisme qui ´emerge, et qui agit d’un point de vue global.

L’´etude des propri´et´es des r´eseaux peut se faire a posteriori, une fois que les simula-tions sont termin´ees. Pour cela, nous avons emprunt´es des m´ethodes d’analyse tant au domaine des neurosciences qu’`a celui des r´eseaux complexes, et nous avons souvent ´et´e amen´es `a les ´etendre ou `a les adapter pour qu’elles soient applicables `a l’´etude sp´ecifique du mod`ele. En retour, ces m´ethodes et algorithmes pourront ˆetre mis au service de ces domaines de recherche.

Nous avons ´etudi´e les propri´et´es topologiques et dynamiques des r´eseaux obtenus apr`es ´evolution. Nous montrons qu’un certain nombre de propri´et´es observ´ees au ni-veau biologique sont pr´esentes dans les r´eseaux ´evolu´es. Nous proposons un m´ecanisme, au niveau du fonctionnement des neurones, qui permet d’expliquer la formation d’une assembl´ee temporelle sp´ecifique `a la pr´esentation d’un stimulus. Ce m´ecanisme permet d’expliquer comment le liage temporel sous-tend une repr´esentation interne du stimu-lus, repr´esentation qui est coh´erente avec les observations et les mesures r´ealis´ees en ´electrophysiologie et en neuro-imagerie.

Chapitre 14

Perspectives

14.1 Am´eliorations du mod`ele

Un certain nombre de caract´eristiques du mod`ele ont ´et´e pr´esuppos´es n´ecessaires pour aboutir `a l’´emergence des propri´et´es souhait´ees dans le mod`ele. Certaines de ces ca-ract´eristiques se sont r´ev´el´ees pertinentes, d’autres ont montr´e leurs limites. Ainsi, le fait d’avoir une probalit´e de connexion identique pour tous les groupes de neurones, quelle que soit leur position g´eographique dans le r´eseau, a effectivement permis d’aboutir `a l’´emergence de propri´et´es de synchronisation large-´echelle. En revanche, certaines pro-pri´et´es topologiques du r´eseau r´esultant, comme la pr´esence de liens longue-port´ee plus nombreux que les liens `a courte-port´ee, ne trouvent pas d’´echos dans les r´eseaux de neu-rones naturels, tout au moins dans l’´etat actuel des connaissances en neurosciences. Nous supposons que cette propri´et´e ne retrouve pas dans le mod`ele, du fait de la n´ecessit´e de prise en compte d’un cout m´etabolique diff´erent selon la longueur des connexions.