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Formation de pyrrolidines par réaction d’addition-carbocyclisation

2) Accès à des pyrrolidines et pipéridines chirales par formation de liaisons carbone-carbone

2.5. Formation de pyrrolidines par réaction d’addition-carbocyclisation

Depuis les travaux de Suzuki et Miyaura,216 les acides boroniques sont devenus des partenaires idéaux dans les réactions métallo-catalysées pour introduire de la diversité. Aujourd’hui un très grand nombre de ces dérivés du bore sont disponibles commercialement. Dans ce contexte, nous avons évalué la généralité de la réaction d’addition-carbocyclisation dans les conditions réactionnelles préalablement optimisées à partir de l’ényne 3 et de divers acides boroniques.

2.5.1. Généralisation de la réaction en version racémique

Dans un premier temps, les conditions précédemment optimisées pour accéder aux pyrrolidines racémiques (cf paragraphe 2.2.1., page 101) ont été appliquées à la réaction de cyclisation de l’ényne-1,6 3en présence d’acides boroniques diversement substitués (Tableau 14).

Tableau 14. Évaluation d’acides boroniques dans la réaction d’addition-carbocyclisation de 3(a) Entrée Ar Rdt(b) (%) Entrée Ar Rdt(b) (%) 1 C6H5 (12) 41 10 2-Np (27) 31 2 4-MeOC6H4 (19) 31 11 2-Me (28) 21 3 4-CF3C6H4 (20) 37 12 (29) 29 4 4-BrC6H4 (21) 36 13 (30) 34 5 4-CF3OC6H4 (22) 33 14 (31) 22 6 4-FC6H4 (23) 32 15 (32) - 7 4-tBuC6H4 (24) 31 16 (33) - 8 3-FC6H4 (25) 37 9 3-AcC6H4 (26) 48

(a) Réactions conduites avec l’ényne-1,6 3 (0,15 mmol), ArB(OH)2 (0,3 mmol), [Rh(cod)OH]2 (0,0023 mmol, 3 mol% de Rh) et KOH (0,075 mmol) dans le système dioxane/eau 10:1 (0,55 mL) à 60°C. (b) Rendement en produit isolé.

A notre satisfaction, les conditions réactionnelles se sont montrées générale en présence de nombreux acides boroniques, riche en électrons (entrée 3), pauvre en électrons (entrées 3) et substitués par des atomes d’halogènes en position para et meta (entrées 4, 6, 8). Bien que modérés, les rendements sont similaires pour la plupart des acides boroniques testés, compris entre 30% et 40%. Seul l’acide 2-méthylphénylboronique encombré a conduit à la pyrrolidine correspondante 28 avec 21% de rendement (entrée 11). Des acides boroniques hétérocycliques ont également été évalués (entrées 12 à 15), fournissant les produits de cyclisation avec des rendements satisfaisants. Néanmoins, aucune réaction de cyclisation n’a été observée à partir de l’acide benzo[b]thiophèn-2-ylboronique (entrée 15). De même, l’emploi de l’acide (E)-styrylboronique n’a pas permis de former la pyrrolidine

correspondante 33 (entrée 16). Ces dernières observations sont probablement dues à l’instabilité des acides boroniques dans le milieu réactionnel.

2.5.2. Généralisation de la réaction en version asymétrique

Après avoir étudié la réaction d’addition-carbocyclisation de l’ényne 3 en version racémique, la généralité de la réaction en version asymétrique dans les conditions précédemment optimisées a été évaluée (Tableau 15).

Tableau 15. Réaction d’addition-carbocyclisationen présence de l’ényne 3(a)

Entrée Ar Rdt(b) (%) ee(c) (%) 1 C6H5 (12) 63 93 2 4-MeOC6H4 (19) 61 93 3 4-CF3C6H4 (20) 74 93 4 4-BrC6H4 (21) 61 91 5 4-CF3OC6H4 (22) 70 93 6 4-FC6H4 (23) 64 95 7 4-tBuC6H4 (24) 61 92 8 3-FC6H4 (25) 66 93 9 3-AcC6H4 (26) 58 89 10 2-Np (27) 70 90 11 2-Me C6H4 (28) < 10 n.d.(d) 12 (29) 42 70 13 (30) 56 92 14 (31) 57 89

(a) Réactions conduites avec l’ényne-1,6 3 (0,3 mmol), ArB(OH)2 (0,6 mmol), [Rh(C2H4)2Cl]2 (0,0045 mmol, 3 mol% Rh), diène chiral (0,01 mmol, 3.3 mol%) dans un mélange MeOH/eau 10:1 (1,1 mL) à 60°C. (b) Rendement en produit isolé. (c) Excès énantiomériques déterminés par HPLC chirale. (d) n.d. = non déterminé.

Comme observé précédemment, les rendements et les excès énantiomériques ne sont que faiblement influencés par les propriétés électroniques des substituants présents sur le noyau aromatique. La

réaction tolère les acides boroniques substitués en position para par des groupements électrodonneurs (entrée 2) et des groupements électroattracteurs (entrées 3). Néanmoins, le rendement en produit isolé est supérieur avec un noyau aromatique appauvri (entrée 3) plutôt qu’enrichi (entrée 2). Des noyaux aromatiques possédant des atomes d’halogènes en positions para et méta (entrées 4, 6 et 8) ont pu être également introduit avec de bons rendement, compris entre 61% et 66%, avec des excès énantiomériques de 91% à 95%; l’introduction d’un atome de brome (entrée 4) peut permettre la post-fonctionnalisation par couplage de Suzuki, permettant ainsi d’accéder à des structures plus complexes. Le substituant –OCF3 en para du noyau aromatique, combinant à la fois l’effet inductif électroattracteur avec les trois atomes de fluor et l’effet mésomère donneur d’un méthoxy,217 conduit à la pyrrolidine 22 avec 70% de rendement et 93% ee (entrée 5). Outre l’acide 3-fluorophénylboronique, d’autres acides boroniques substitués en position méta participent à la réaction et fournissent les pyrrolidines désirées avec des rendements et sélectivités proches de ceux observés précédemment (entrées 8 à 10). En revanche, la substitution en ortho est néfaste à la réaction de cyclisation, comme le montre l’emploi de l’acide 2-méthylphénylboronique conduisant seulement à des traces de produit de cyclisation (entrée 11). Des acides boroniques hétérocycliques ont été évalués dans la réaction d’addition-carbocyclisation (entrées 12-15). Lorsque l’acide 3-furylboronique est additionné (entrée 12), une baisse du rendement et de l’énantiosélectivité est observée, fournissant le produit de cyclisation 29 avec 42% de rendement et seulement 70% d’excès énantiomérique. L’instabilité de cet acide boronique dans le milieu réactionnel peut expliquer la baisse du rendement. La chute de la sélectivité peut s’expliquer quant à elle par la petite taille du furanyle par rapport aux autres noyaux aromatiques, ou par la possible coordination de l’oxygène avec le métal. L’acide 5-méthylbenzo[d][1,3]dioxolboronique (entrée 13) et l’acide 5-méthyl-1H-indoleboronique (entrée 14) ont conduit aux pyrrolidines correspondantes 30 et 31 avec des rendements et des sélectivités similaires à celles obtenues précédemment.

De nombreuses pyrrolidines ont été préparées efficacement via la réaction d’addition-carbocyclisation à partir de l’ényne-1,6 3, avec des excès énantiomériques généralement supérieurs à 90%. Divers acides boroniques ont pu être employés avec succès, la réaction n’étant que faiblement influencée par leurs propriétés électroniques. Toutefois les rendements en produits isolés restent modérés malgré la disparition du produit de départ au bout de 2-3 heures de réaction. La présence de la benzoazépine à hauteur de 5% à 10% dans certains cas selon les acides boroniques explique en partie ces résultats (Schéma 138, page 100). Cependant aucun autre sous-produit issu de la dégradation de l’ényne-1,6 n’a pas pu être identifié par RMN 1H.

Afin de valoriser la méthodologie développée, une légère montée en échelle a été réalisée à partir de 2 mmol (645 mg de substrat), soit environ 6,5 fois la réaction standard (Schéma 141).

Schéma 141. Montée en échelle à partir de l’ényne 3

À notre satisfaction, la réaction de cyclisation est adaptée pour être conduite sur des quantités de matières plus importantes, la pyrrolidine ayant été isolée avec un rendement de 60% et 92% d’excès énantiomérique après de deux heures de réaction.

La majorité des pyrrolidines formées sont des solides cristallins, ce qui rend l’enrichissement de ces composés envisageable. Au début du projet, au cours des premiers dosages de l’excès énantiomérique de la pyrrolidine 12, nous nous sommes aperçus que la molécule n’était pas totalement soluble dans le système n-hexane/isopropanol. Il a pu être mis en évidence que dans les échantillons précipitait le mélange racémique, et non l’énantiomère majoritaire, conduisant à l’enrichissement des échantillons. Cette observation nous a permis d’énantioenrichir une fraction du lot synthétisé en grosse quantité grâce à deux recristallisations successives dans de grands volumes de méthanol (Schéma 142).

Schéma 142. Enrichissement de la pyrrolidine 12dans le méthanol

Après une seconde recristallisation de 244 mg de produit dans 25 mL de méthanol, les cristaux formés, enrichis en mélange racémique, ont été éliminés par filtration et le filtrat évaporé pour conduire à la pyrrolidine 12 avec 84% de rendement et 99,6% d’excès énantiomérique.