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2.1 Le modèle bioécologique de Bronfenbrenner

2.1.1 Fondements et principes du modèle

Urie Bronfenbrenner était un psychologue du développement et un chercheur d’origine russe qui fit ses études et sa carrière aux États-Unis (Absil, Vandoorne et Demarteau, 2012). En 1948, alors qu’il était professeur en psychologie à l’Université Cornell, il commença à développer sa théorie de l’écologie du développement humain qui fut publiée, en 1979, dans un livre largement cité depuis : The Ecology of human development (Absil et coll., 2012). Lors du développement de cette théorie, Bronfenbrenner a été particulièrement inspiré par les travaux de deux théoriciens, soit Liev Vygotsky et Kurt Lewin (Absil et coll., 2012). Selon Vygotsky, « les interactions sociales sont essentielles pour le développement de l’intelligence » (Absil et coll., 2012, p. 4). Bronfenbrenner s’inspire de Vygotsky lorsqu’il attribue une influence de la culture, des interactions sociales et de l’accompagnement sur le développement de l’enfant (Absil et coll., 2012). Quant à Lewin, Bronfenbrenner retient que le comportement est influencé par les interactions entre les personnes et leur environnement (Absil et coll., 2012).

Le modèle bioécologique de Bronfenbrenner s’inscrit dans les courants de pensée socioconstructiviste et systémique (Absil et coll., 2012). Il s’inscrit dans plusieurs disciplines comme « l’écologie, la théorie générale des systèmes, les théories des organisations »

(Drapeau, 2008, p. 13). Cette théorie est l’étude de l’interaction entre les humains et leur environnement (Drapeau, 2008; Rosa et Tudge, 2013). Ce modèle permet d’étudier et de comprendre le développement humain, et ce, dans une perspective systémique et relationnelle (Bronfenbrenner, 1979, 1986).

L’un des principes de base de cette théorie est qu’elle analyse les situations à l’aide de l’interaction entre la personne et son environnement (Bronfenbrenner, 1979, 1986). Selon cette théorie, le comportement humain est le résultat de l’adaptation « progressive et mutuelle » entre la personne et son environnement (Drapeau, 2008, p. 13). Le développement humain est un phénomène de continuité et de changement par rapport aux caractéristiques biopsychologiques des humains individuellement et collectivement (Bronfenbrenner et Morris, 2006, cités dans Drapeau, 2008). Ainsi, l’interaction entre la personne et son environnement évolue. Par exemple, le nourrisson interagit avec sa mère et l’influence en fonction des comportements et des attitudes de celle-ci (Drapeau, 2008). Plus la personne grandit, plus elle a des interactions avec d’autres personnes, et ce, dans divers milieux. L’individu a ses propres caractéristiques, mais celles-ci ne sont pas indépendantes de l’environnement dans lequel il vit. L’individu et son environnement s’influencent et s’adaptent réciproquement à travers le temps (Drapeau, 2008). Il est également important de mentionner que chaque personne réagit différemment aux pressions environnementales « selon ses ressources, son niveau de développement et ses attributs » (Drapeau, 2008, p. 14). Chaque individu n’a pas la même réaction face à un même environnement (Drapeau, 2008).

Un autre principe de cette théorie est l’importance de considérer l’environnement immédiat ainsi que l’environnement éloigné d’une personne dans l’étude de son comportement (Drapeau, 2008). L’environnement est donc compris dans un sens plus large que seulement la famille ou l’environnement immédiat d’une personne (Drapeau, 2008). Cet environnement comprend également les conditions de vie, les normes, les valeurs d’une société, etc. (Drapeau, 2008).

Ce modèle est décrit comme une « modélisation d’emboitement de milieux » qui interagissent entre eux (Absil et coll., 2012, p. 2). L’idée centrale au cœur de cette théorie est que l’environnement influence le développement de l’enfant (Absil et coll., 2012; Bronfenbrenner, 1979, 1986). Bronfenbrenner insiste sur l’idée d’interaction, on parle alors

de l’interdépendance des systèmes entre eux (Bronfenbrenner, 1979, 1986). Lorsque Bronfenbrenner définit l’interaction de l’environnement, il parle alors de différentes niches environnementales ou encore de différents systèmes qui s’imbriquent les uns dans les autres et s’interinfluencent. Quand on parle du modèle de Bronfenbrenner, on l’associe souvent à l’image d’une poupée russe. La Figure 1 présente le modèle bioécologique de Bronfenbrenner.

Figure 1. Schéma du modèle bioécologique de Bronfenbrenner (1986)

On peut compter six différentes niches environnementales : le macrosystème, l’exosystème, le mésosystème, le microsystème, l’ontosystème et le chronosystème (Bronfenbrenner, 1979, 1986). Chacune d’entre elles a une influence sur les autres. Plusieurs niches peuvent s’interinfluencer en même temps et avoir une influence, non pas seulement sur les systèmes d’un seul individu, mais aussi sur les systèmes des autres individus qui gravitent autour de la personne (Absil et coll., 2012; Bouchard, 1987; Bronfenbrenner, 1979, 1986).

L’ontosystème est l’individu lui-même. Cet individu est un organisme qui vient avec « [ses] caractéristiques, [ses] compétences, [ses] vulnérabilités et [ses] déficits innés ou acquis sur les plans physique, émotionnel, intellectuel et comportemental » (Hage et Reynaud, 2014, p. 9). Ce système comprend donc les interrelations entre les aspects de la personnalité d’un individu au plan physique, biologique, cognitif et socioaffectif (Bronfenbrenner, 1979; Hage et Reynaud, 2014). L’individu est un système ayant la capacité d’avoir une influence sur les autres systèmes, il n’est pas seulement sous l’influence des autres systèmes (Bouchard, 1987).

Le microsystème est un lieu physique ou un contexte où l’individu gravite. Un enfant commence sa vie avec un seul microsystème, sa famille, et lorsqu’il grandit, d’autres microsystèmes s’ajoutent (Absil et coll., 2012), par exemple la garderie, l’école et autres. Le premier microsystème du développement humain est celui de l’enfant et de sa famille. À l’intérieur d’un microsystème, on peut reconnaître trois facteurs qui sont les patterns d’activités qu’on observe par le langage verbal et non verbal, et les interactions (Absil et coll., 2012; Bronfenbrenner, 1979, 1986).

Le mésosystème est l’ensemble des liens qui s’établissent entre différents microsystèmes (Bronfenbrenner, 1979, 1986); ce sont les relations intermicrosystémiques. Donnons l’exemple des interactions entre les parents d’un enfant et l’école que ce dernier fréquente. Il s’agit d’un groupe de microsystèmes qui entre eux interagissent et communiquent (Absil et coll., 2012). Selon Bronfenbrenner (1979), le mésosystème est un système en soi comportant un ensemble d’autres systèmes, les microsystèmes.

L’exosystème consiste en des lieux ou des contextes qui influencent indirectement l’individu (Absil et coll., 2012; Bronfenbrenner, 1979). Ce type de système influence le développement de l’individu selon Bronfenbrenner (1979) par la mise en place de règles, de normes ou par leurs effets sur la qualité de vie de la famille (Absil et coll., 2012). De plus, l’exosystème intègre également les programmes sociaux, les services et les interventions des travailleurs sociaux et des autres professionnels de la relation d’aide.

Le macrosystème est l’ensemble des règles, des normes, des valeurs, des croyances et des façons de faire qui régissent et définissent les modes de vie en société (Absil et coll., 2012; Bronfenbrenner, 1979). On parle alors des systèmes politiques, économiques, moraux, culturels, etc.

Finalement, le chronosystème est le système régissant le temps et la succession d’évènements dans la vie (Hage et Reynaud, 2014). Ce système comprend également les évènements développementaux et l’influence des changements développementaux sur l’individu (Hage et Reynaud, 2014). On parle alors de temporalité de la vie qu’il s’agisse « du temps biologique, du temps de la famille, du temps de l’histoire ou du temps perçu et reconstruit par la personne » (Absil et coll., 2012; Bronfenbrenner, 1986).

Pour terminer, il est important de comprendre que Bronfenbrenner avait réfléchi à la mouvance d’un individu, des évènements vécus et de l’environnement dans sa globalité qui entoure l’individu. Les changements vécus par un individu dans son environnement au sens large sont appelés, par Bronfenbrenner, des transitions écologiques (Bronfenbrenner, 2005). Cette théorie est très complète et utile dans l’analyse de ce mémoire. La prochaine section présentera l’application du modèle bioécologique de Bronfenbrenner au sujet de ce mémoire.

2.1.2 Application du modèle bioécologique de Bronfenbrenner à l’objet de ce