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Le repérage de la crise suicidaire s’articule autour de trois axes :

* L’expression d’idéations suicidaires ou d’intention suicidaire.

* Les manifestations d’une situation de crise psychique

* Le contexte de vulnérabilité

2.1.

La crise suicidaire chez l’enfant et l’adolescent

2.1.1.

La crise suicidaire chez l’enfant

Les enfants expriment rarement des idées et des intentions suicidaires

Certains éléments peuvent témoigner d’une crise psychique comme des plaintes somatiques mal étiquetées, un repli, un isolement, des troubles de la communication, des troubles des apprentis-sages, une hyperactivité, une encoprésie, des blessures à répétition, des préoccupations exagé-rées pour la mort, une tendance à être le souffre-douleur des autres.

Les éléments suivants sont des facteurs de vulnérabilité : un isolement affectif, des bouleverse-ments familiaux, l’entrée au collège, un contexte de maltraitance.

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2.1.2.

La crise suicidaire chez l’adolescent

L’expression d’idées et d’intentions suicidaires n’est plus considérée comme banale et est un motif suffisant d’intervention et de prévention.

Certains éléments peuvent témoigner d’une crise psychique comme une baisse des résultats scolaires, une hyperactivité, une attirance pour la marginalité, des conduites excessives ou déviantes, des conduites ordaliques (le sujet remet sa survie dans les mains du « hasard »), des conduites d’anorexie et de boulimie, des prises de risque inconsidérées (notamment au niveau sexuel), une violence sur soi et sur autrui, des fugues.

Si l’adolescence est en soi une période de vulnérabilité, les éléments suivants le sont aussi : l’isolement affectif, les ruptures sentimentales, les échecs (notamment scolaires), les conflits d’autorité.

2.2.

La crise suicidaire chez l’adulte et l’âgé

2.2.1.

La crise suicidaire chez l’adulte

L’expression d’idées suicidaires est peu fréquente en dehors de la relation avec le médecin ou de façon très manifeste dans la famille.

Certains éléments peuvent témoigner d’une crise psychique comme l’ennui, les sentiments de perte de rôle, d’échec, d’injustice, d’être en décalage, la perte d’investissement au travail, les difficultés relationnelles, les difficultés conjugales, l’incapacité à supporter une hiérarchie, les arrêts de travail à répétition, au contraire le surinvestissement au travail, des consultations répé-tées chez le médecin pour des symptômes aspécifiques (douleurs, sensation de fatigue…).

Les éléments suivants sont des facteurs de vulnérabilité : des statuts conjugal, social et profes-sionnel précaires, une ambiance délétère au travail avec ou sans harcèlement, une toxicomanie, le sida, des situations de violence, une atteinte narcissique, l’émigration.

2.2.2.

La crise suicidaire chez l’âgé

Les âgés n’expriment que rarement des idées suicidaires ou ont plus rarement que d’autres l’oc-casion de les exprimer ; mais ils passent à l’acte. Lorsqu’ils en expriment, elles ne doivent pas être banalisées.

Certains éléments peuvent témoigner de la crise psychique comme un repli sur soi, un refus de s’alimenter, un manque de communication, une perte d’intérêt pour les activités, un refus de soin.

Les éléments suivants sont des facteurs de vulnérabilité : un état dépressif caractérisée, une affection médicale générale potentiellement à l’origine de handicaps et de douleurs, des conflits, un changement d’environnement, le veuvage.

2.3.

La crise suicidaire chez un patient atteint d’une pathologie psychiatrique

Les patients peuvent facilement exprimer des idées suicidaires ou, au contraire, les dissimuler La crise suicidaire est faite de moments à haut risque avec des moments d’accalmie alternants sur un fond de variabilité permanente. Certains signes parmi les signes de la maladie peuvent marquer une augmentation du risque :

93 l’infirmier de secteur, etc.).

* Une réduction et un abandon des activités.

* Une exacerbation des différents signes de la maladie.

La maladie est en soi un facteur de vulnérabilité.

3.

Évaluer la crise suicidaire

Il faut donc être attentif à repérer ces différents signes (assez aspécifiques pris isolément) puisque leur association témoigne d’une crise suicidaire. En tout cas, il ne faut pas hésiter à questionner le patient sur ses idées de suicide Cette attitude, loin de renforcer le risque suicidaire, ne peut que favoriser l’expression des troubles.

Attention

L’évaluation du risque suicidaire est un réflexe à avoir systématiquement en psychiatrie, et donc à l’iECN. Il faut être systématique et le plan à adopter est en trois parties : Risque-Urgence-Dangerosité.

3.1.

Évaluation du risque

Les éléments suivants et leur intrication entre eux permettent l’évaluation du risque :

* Individuels/personnels :

- Antécédents suicidaires personnels

- Diagnostic de trouble mental (troubles affectifs, troubles de la personnalité, psychose), abus ou dépendance à l’alcool ou aux drogues.

- Estime de soi : faible ou fortement ébranlée.

- Tempérament et style cognitif de l’individu (impulsivité, rigidité de la pensée, colère, agressivité).

- Santé physique : problèmes de santé physique qui affectent la qualité de vie.

* Familiaux :

- Antécédents suicidaires familiaux

- Violence, abus physique, psychologique ou sexuel dans la vie de l’individu.

* Événements de vie :

- Élément déclencheur : élément récent qui amène la personne en état de crise.

- Situation économique : difficultés économiques.

- Isolement social : réseau social inexistant ou pauvre, problèmes d’intégration.

- Séparation ou perte récente qui affecte encore le patient.

- Difficultés dans le développement : difficultés scolaires ou professionnelles, placement durant l’enfance/adolescence en foyer d’accueil, en détention.

- « Contagion » suite à un suicide : la personne est affectée par un suicide récent.

- Difficultés avec la loi (infractions, délits).

- Pertes, échecs ou événements humiliants

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passage à l’acte. On peut citer :

- Du point de vue individuel, la résilience peut se définir comme la capacité à fonctionner de manière adaptée en présence d’événements stressants et de faire face à l’adversité, à continuer à se développer et à augmenter ses compétences dans une situation adverse ; - Du point de vue psychosocial, le soutien familial et social, le fait d’avoir des enfants, des

amis sont autant de facteurs protecteurs

3.2.

Évaluation de l’urgence

* Un niveau de souffrance du sujet élevé (désarroi, repli sur soi, isolement relationnel, sentiment de dévalorisation ou d’impuissance ou de culpabilité).

* Un degré d’intentionnalité élevé :

- Le sujet envisage un scénario suicidaire et a pris des dispositions en vue d’un passage à l’acte (préparation du matériel, etc.).

- Le sujet n’envisage pas d’autre alternative que le suicide (idées envahissantes, rumina-tions anxieuses, recherche d’aide et attitudes par rapport aux soins).

- L’intention a pu être communiqué à des tiers soit directement soit indirectement.

* Des éléments d’impulsivité : tension psychique, instabilité comportementale, agitation, attaque de panique, antécédents de passages à l’acte, de fugue ou d’actes violents.

* Un éventuel facteur déclenchant contextuel.

* Un manque de soutien familial.

3.3.

Évaluation de la dangerosité

* La dangerosité létale du moyen considéré.

* L’accessibilité au moyen considéré.

Attention

La conférence de consensus organise l’évaluation de l’urgence et de la dangerosité en une seule étape. Pour être plus clair nous les avons séparés en deux différents paragraphes. Pour être exhaustifs, tous les éléments décrits pour l’évaluation de l’urgence et de la dangerosité dans la conférence de consensus ont été repris, même si certains avaient déjà été décrits dans les facteurs de risque.

95 tion de l’urgence et de la dangerosité en vous donnant une idée sur le degré d’urgence :

Urgence faible Urgence moyenne Urgence élevée

Bonne alliance thérapeutique Est isolé Est très isolé

Veut parler et est à la recherche de communication

A besoin d’aide et exprime directement ou indirectement

son désarroi

Complètement ralenti par la dépres-sion ou au contraire dans un état d’agitation, Avec une souffrance et une douleur omniprésente ou complètement tue Cherche des solutions à ses

problèmes

Ne voit pas d’autre recours que le suicide

A le sentiment d’avoir tout fait et tout essayé Pense au suicide sans scénario

suicidaire précis

Envisage un scénario dont l’exécution est reportée

A un accès direct et immédiat à un moyen de se suicider Envisage encore d’autres moyens

pour surmonter la crise

Envisage le suicide avec une intention claire

Décidé, avec un passage à l’acte planifié et prévu dans les jours

qui viennent

N’est pas anormalement troublé mais psychologiquement souffrant

Présente un équilibre émotionnel fragile

Coupé de ses émotions, rationalisant sa décision ou au contraire, très

émotif, agité ou anxieux

Attention

Certains outils psychométriques peuvent aussi être utilisés pour l’évaluation du risque suicidaire. Ils sont peu utilisés en pratique. On peut citer par exemple l’échelle de désespoir de Beck.

Attention, malgré ces techniques d’évaluation clinique du risque suicidaire, le passage à l’acte reste un geste difficile-ment prévisible.

Attention, il faut être attentif à l’éventualité d’un syndrome présuicidaire de Ringel caractérisé par un calme apparent, une attitude de retrait, une diminution de la réactivité émotionnelle, de la réactivité affective, de l’agressivité et des échanges interpersonnels Ces signes ne sont pas rassurants et cachent un envahissement fantasmatique par des idéations suicidaires

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