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Une fierté pour son corps et ses accomplissements très présente

CHAPITRE 6 : Accoucher avec une sage-femme pour réparer déceptions, blessures ou traumatismes

7.1 Le rapport au corps : bâtir sa confiance autour du choix éclairé

7.1.3 Une fierté pour son corps et ses accomplissements très présente

La fierté pour son corps et pour l’accomplissement que représente l’accouchement physiologique est un sentiment qui revient chez l’ensemble des participantes de ce groupe. Marie- Soleil, par exemple, se dit fière de son accomplissement qui a été somme toute difficile à concrétiser et serait prête à réitérer l’expérience tellement ç'a été positif pour elle : « Oui! Très [fière]. Oui, oui, je suis contente d’avoir survécu à ça parce que c’était pénible. Chaque seconde était dure. Ce n’était pas facile […] [C]e qui me fait de la peine, [c'est] de ne pas avoir d’autres enfants, c’est de ne pas revivre l’accouchement. J’ai adoré ça! J’ai adoré ça! Donner la vie, là, et sentir… quand il passe… […] Sur le coup, ce n’est pas le fun, tu n’as pas le goût, mais une semaine après, j’étais prête! » (Marie-Soleil).

Florence, sage-femme, a témoigné de cette fierté immense chez les mères, comme si elles avaient gravi le mont Everest, selon ses dires. Il semble que cette fierté soit d’autant plus présente quand la mère a vécu un accouchement vaginal après césarienne (AVAC), un cas de figure qui ne s’est pas présenté parmi les répondantes, toutefois. Cassandre, de son côté, partage sa fierté pour son corps qui a accompli le travail de mettre au monde ses enfants ; on peut comprendre qu’elle est satisfaite de sa « performance ». Voir ses enfants en santé implique que son propre corps a « bien fait son travail » dans les débuts de la vie de chacun de ses fils : « Bien c’est sûr que je suis contente que mon corps ait trouvé la force et la capacité de faire tout ça par lui-même et que finalement, le bébé ait

99 trouvé le bon chemin et que tout ait bien été. Et c’est ça, maintenant j’aime mes enfants, c’est le produit de ma chair et tout ça c’est lié à mon corps, donc oui, une certaine fierté » (Cassandre). Elle est en quelque sorte impressionnée du processus de l’accouchement, que celui-ci soit si simple et si complexe à la fois et qu’elle ait réussi cela par elle-même. Corinne, pour sa part, exprime très clairement être fière de son accouchement physiologique et considérer ce moment comme un évènement de référence où elle a su aller puiser dans toutes ses capacités, toutes ses forces, pour réussir, cela lui offrant une forme d’assurance pour les défis subséquents. Elle est satisfaite du fait qu’elle était totalement présente à son bébé pour l’aider à vivre la transition de milieu de vie : l’inconfort de la naissance où le petit corps passe d’un milieu aquatique chaud à un milieu aérien froid et hostile.

Dans la construction de leur confiance en leurs propres capacités, les références réconfortantes transmises par d’autres femmes semblent importantes pour les mères de ce groupe. Elles sont réceptives aux expériences positives autour d’elles, les mettant en confiance et générant, a

posteriori, un sentiment positif d’avoir elles aussi réussi ce « défi » de la maternité. Laure fait référence

à sa famille, expliquant que sa propre mère était une pionnière de l’éducation à l’accouchement dans sa région et fervente de l’accouchement physiologique. Elle utilisait des diapositives de la naissance de Laure, venue au monde « naturellement » alors que sa mère était accroupie, soutenue par les aisselles par son conjoint, pour enseigner aux femmes de son entourage la préparation à la naissance. Laure a donc toujours vu des images d’accouchement et en a entendu parler de façon très simple, l’évènement fait donc partie de sa vie et de ses expériences familiales depuis sa plus tendre enfance. Elle considère que ce vécu particulier a influencé sa croyance en la compétence de son corps à accoucher. Elle se savait capable de réussir.

Dans la famille de Rosemarie, les femmes disent qu’elles accouchent avec facilité. Cette idée bien présente chez les femmes de sa famille s’est ancrée chez elle aussi, la mettant davantage en confiance quant à l’issu de son propre accouchement, lui offrant un « plus » dans sa préparation prénatale. En effet, Rosemarie avait confiance en son corps. Elle savait, déjà pendant la grossesse et encore plus maintenant que c’est chose faite, qu’il pouvait faire grandir et mettre au monde un enfant : « […] je sais que mon corps est capable de faire ça [accoucher]. Donc, je crois mille fois plus en mon corps. Déjà, j’essayais d’y croire avant d’accoucher, mais là j’ai accouché, donc j’y crois encore plus. Donc je sais que je réussis. […] [E]t c’est mon lait qui la fait grandir. […] [Ç]a change la perspective face à mon corps qu’il n’a pas juste une fonction de corps pour moi, mais qu’il peut aider quelqu’un d’autre à grandir. […] J’accepte peut-être plus mon corps aussi. Je suis bien » (Rosemarie). Ces nouvelles capacités qu’elle a découvertes chez-elle ont renforcé sa confiance en elle-même et son sentiment de bien-être dans ce corps qui a porté la vie. Ce corps féminin et ses capacités impressionnent les mères, mais aussi les sages-femmes comme Florence : « Ben, le corps des

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femmes, en fait, c’est comme un temple. Un temple qui donne la vie. Un autel. Il est super puissant et en même temps super vulnérable. […] D’avoir vu ces femmes-là – que leur corps puisse porter, donner la vie et nourrir leur bébé –, c’est incroyable! » (Florence)

En résumé, les femmes de ce groupe ont eu la possibilité de bâtir la confiance en leur corps par le biais d’une information riche et juste menant à un choix éclairé qui leur correspondait : l’accouchement auprès d’une sage-femme. Éloïse rapporte les propos généraux de plusieurs de ses clientes ainsi : « “C’est un choix que j’ai réfléchi. Il y a aussi de ça dans la fierté. Je me suis posé la question, je me suis documentée, j’ai réfléchi, j’ai investigué aussi intérieurement si c’était quelque chose qui me convenait.” Ce qui amène une fierté qui va avec faire des choix de vie qu’on assume profondément. Être actrice de sa vie. » (Éloïse) Les mères ont pu prendre du pouvoir sur leur vécu périnatal, se sentir libres de leur corps au fil de l’expérience. Enfin, elles démontrent une grande fierté face à leur « exploit » qu’est l’accouchement physiologique, un peu comme une athlète qui serait heureuse de sa réussite personnelle.

7.2 Le rapport à la douleur ambivalent