• Aucun résultat trouvé

Juste ! voilà le nom . Ton mari dit qu'elle a un talent énorme .

MADAME D'AUGEROLLES . S'il le dit , ce doit être ; il s'y connaît .

FERNAND .

Fayel assure que c'est une étoile de première gran deur . Ses yeux aussi sont de première grandeur ; quand elle m'a regardé en passant , j'ai été ébloui . On devrait défendre aux femmes de regarder comme ça ; c'est vrai, on n'est plus en sûreté à sa fenêtre .

UN DOMESTIQUE , annonçant.

M. Fayel !... M. de Laverdac !

MADAME D’AUGEROLLES , à part .

Toujours lui ! (Haut .) Priez M. de Laverdac d'entrer chez mon mari . Fernand , tu recevras M. Fayel .

( Elle sort par la gauche.)

SCÈNE III FERNAND , FAYEL .

FERNAND .

M. Fayel! En voilà une corvéel ( Entre Fayel.) Mon sieur , on me charge de vous recevoir , je vous en de mande pardon .

FAYEL , toisant Fernand .

Vous êtes tout pardonné , jeune homme . Diable ! ... je

53 ne remarquais pas votre nouvel uniforme. Tenue irré prochable . Quand vos professeurs vous rencontrent , ils ne doivent pas vous reconnaître ... Nous sommes donc toujours en froid ? Mais pourquoi m'en voulez - vous , puisque je n'épouse plus mademoiselle de Rochepont ?

FERNAND . Bien vrai,vous avez renoncé ?

FAYEL .

Complétement . Je suis , à cette heure , cuirassé contre sesattaques.

FERNAND .

Ses attaques ? ... Voulez - vous dire que mademoiselle Gabrielle se jette à votre tête ?

FAYEL .

Non ... non ... chère petite ! ... Elle ne se jette pas ...

on la jette.

FERNAND . On sollicite peut- être votre main ?

FAYEL . Cela y ressemble.

FERNAND .

Madame de Rochepont vous veut pour sa fille ? FAYEL .

C'est une femme de tant de goût ! FERNAND . Vous vous vantez .

FAYEL .

En aucune façon ; mais mon heure n'est pas encore venue , jeune homme , les destins ont parlé : je ne dois descendre dans le mariage qu'après avoir troublé le caur de quelque grande dame.

FERNAND .

Ce qu'on m'a dit est donc vrai ? ... Madame de Bar sanne vous occupe ?

FAYEL , avec fatuité, Comment la trouvez - vous ?

FERNAND . Très - belle . On en dit du bien ? FAYEL . A beaucoup de points de vue .

FERNAND .

Bonne chance ! mais n'allez plus chez madame de Ro chepont .

FAYEL .

J'en suis déjà à me demander le nom de sa rue . FERNAND , se frottant les mains .

Et ce n'est pas moi qui vous le dirai . Bravo ! j'ai le champ libre ! ... Vous vous dérobez et je cours tout seul ; si je ne gagne pas le prix , je serai bien maladroit ... Oh ! Gabrielle ! si charmante , si belle , si fraîche , si poétique , si ... si ...

FAYEL .

Vous trouverez l'épithète plus tard , et votre com position sera sans faute .

FERNAND .

Oh ! oui ... je la trouverai ! ... N'est- ce pas , Gabrielle , que tu seras à moi ?

PAYEL La ! La !

FERNAND .

Ne m'arrêtez pas ! ... Quand je sortirai de l'église avec cet ange au bras, moi fier, triomphant, exaltél ...

elle émue , palpitante , baissant ses beaux yeux sous les miens , et se rapprochant de moi pour mieux me faire sentir les battements de son coeur ! ... Ah ! cher ami , comprenez - vous ? ... Son coeur ! ...

FAYEL . Oui , oui ... je m'en fais une idée .

FERNAND . Ce n'est pas tout .

FAYEL . C'est assez .

FERNAND .

Pardon . Nous montons en voiture ; nous partons pour ce beau voyage , pour ce pays enchanté de l'amour d'où nous ne reviendrons jamais ! En deux tours de roue , notre chaise de poste nous dépose à la porte d'un petit cottage ravissant , une main invisible nous ouvre la grille du jardin . Gabrielle a peur , je la rassure ...

FAYEL , exaspéré .

Mais , petit malheureux , vous voulez donc que je re tourne chez madame de Rochepont ?

FERNAND .

Au contraire, je ne le veux pas du tout . FAYEL .

Taisez - vous alors , et faites - moi grâce de vos ta bleaux ... vivants !

FERNAND .

C'est vrai, j'ai tort . Vous n'auriez qu'à ...

FAYEL . Ce serait votre faute .

LE DOMESTIQUE , annonçant.

Madame et mademoiselle de Rochepont!

FERNAND . FAYEL . L'ennemi! tenons - nous bien . FERNAND . J'aurai l'eil sur vous ,

SCÈNE IV

LES MÊMES , MADAME DEROCHEPONT, GABRIELLE * . MADAME DE ROCHEPONT .

On nous avait dit que madame d'Augerolles était chez elle . Elle va aux courses , sans doute , et nous venions la prendre .

FERNAND . Ma soeur est un peu fatiguée.

MADAME DE ROCHEPONT . Ah ! c'est fåcheux !

FAYEL , saluant . Madame ...

MADAME DE ROCHEPONT , se retournant.

Hein ? ( Lorgnant .) Monsieur Fayel, je crois . FAYEL .

Me feriez - vous l'injure d'en douter , madame ? MADAME DE ROCHE PONT.

Il y a si longtemps que je n'ai eu le plaisir de vous voir , que je commençais à oublier votre figure.

* Fayel , madame de Rochepont, Gabrielle , Fernand .

ACTE II 57

11

GABRIELLE .

Oh ! moi , j'ai bien reconnu monsieur tout de suite . MADAME DE ROCHEPONT .

Gabriellel...

GABRIELLE . Oui , maman .

FERNAND , saluant Gabrielle . Mademoiselle ...

GABRIELLE .

Ah ! par exemple , Monsieur Fernand a grandi consi dérablement .

FAYEL . Oui , oui , il a bien vieilli en un mois .

FERNAND . J'ai fait comme vos plaisanteries .

GABRIELLE , se mesurant avec Fernand . A Yport , vous me veniez là .

( Les dames s'asseyent .) MADAME DE ROCHEPONT .

Ainsi , monsieur Fayel , c'est un parti pris de délaisser vos amis ?

FAYEL . Ah ! madame !

compter

MADAME DE ROCHEPONT .

J'ai du monde chez moi jeudi prochain ; il s'agit d'un entretien littéraire, d'une espèce de lecture ; puis - je

sur vous ?

FAYEL * . En douter serait me faire offense ..

Fernand , Fayel, madame de Rochepont , Gabrielle .

FERNAND , bas à Fayel.

Eh bien ! et votre engagement avec moi ? FAYEL , de même.

C'est le bon ; je le tiendrai , celui - là . FERNAND , àpart.

Mais je veux qu'on m'invite aussi . MADAME DE ROCHEPONT .

Il est inutile de vous dire que cette conférence sera de la dernière moralité .

FERNAND . Tant mieux .

FAYEL .

Ne craignez rien , je serai préparé ;je m'entraînerai s'il le faut .

MADAME DE ROCHEPONT . Toujours étincelant .

FERNAND . Je ne trouve pas , moi .

MADAME DE ROCHEPONT .

Si ... si ... ( Se rapprochant de Fayel et souriant finement.) A propos de ces lectures , croiriez - vous que dernièrement , chez la comtesse de Bourqueville ... Gabrielle !

GABRIELLE , s'éloignant . Oui , maman .

MADAME DE ROCHEPONT .

M. du Martroi s'est avisé de nous lire un chapitre des Confessions de Rousseau , dans lequel le mécréant ra conte qu'il a jeté des prunes à deux sottes créatures , du haut d'unarbre .

ACTE II

Non ,maman, c'était des cerises.

Bravo !ma

demoiselle

a le respectdu texte . GABRIELLE , se retournant vivement .

FAYEL , riant * .

MADAME DE ROCHEPONT .

Comment , Gabrielle , vous vous êtes permis d'écouter cette lecture malgré ma défense ?

GABRIELLE . Je ne l'ai pas fait exprès , maman .

FAYEL . On entend souvent malgré soi .

GABRIELLE . Oh ! moi , toujours.

MADAME DE ROCHEPONT , contrariée.

En voilà assez . - Vous allez à cette course , Monsieur Fayel ?

FAYEL . Oui , madame .

MADAME DE ROCHEPONT . Ce sera effrayant, m'a - t - on dit .

FAYEL .

Il est question de barrières à franchir, d'une hauteur insensée .

MADAME DE ROCHEPONT .

Quelqu'un va encore se tuer . On devrait laisser ces exercices aux clowns ; au moins ceux - là ... ils en vivent ...

Fernand, madame de Rochepont, Fayel, Gabrie! le :

FAYEL . C'est un mot ;vous me le donnez ?

MADAME DE ROCHEPONT , flattée . Donne - t - on à plus riche que soi ?

FERNAND . Bravo ! bravo !

FAYEL . Merci.

( On s'assied . ) GABRIELLE .

Oh ! que j'aurai peur , mais comme ce sera amusant ! Vous ne courez jamais , monsieur Fayel ?

FAYEL .

Jamais , mademoiselle ; je ne tiens pas à m'éparpiller sur le turf .

GABRIELLE . Et vous , monsieur Fernand ?

FERNAND . Oh ! moi , je courrai , mademoiselle !

GABRIELLE .

Ce doit être charmant de se sentir emporté par son cheval , de s'élancer , de fendre l'air , de bondir par des sus les obstacles en fermant les yeux ; ah ! j'en devien drais folle de plaisir !

FAYEL .

Peuh ! je me suis senti emporté deux ou trois fois par mon cheval, moi , et le plaisir que j'en éprouvais était bien påle ; et cependant je fermais les yeux .

ACTE II

MADAME DE ROCHEPONT .

Monsieur Fayel, je vous offre une place dans ma ca lèche,

FAYEL , à part . Nous y voilà .

FERNAND , bas * . Refusez.

FAYEL , de même.

Parbleu ! mais le moyen ?

MADAME DE ROCHEPONT . Vous acceptez ?

FAYEL . C'est - à -dire ...

(On se lève .) FERNAND .

Monsieur Fayel est bien embarrassé , madame; il lui faut refuser votre offre.

MADAME DE ROCHEPONT . Ah !

FERNAND .

Il est venu ici accompagné de Monsieur de Laverdac pour régler avec d'Augerolles une affaire importante ...

un pari ... grave , et ces deux messieurs ont besoin de ses conseils .

FAYEL , à part .

Tiens , tiens ! Il mentira très - bien ce garçon - là . FERNAND .

Mais moi , madame , je ne parie pas ... ce ne serait pas de mon âge . N'est - ce pas , cher ami ? Et si vous dai

. Madame de Rochepont , Fayel, Fernand, Gabrielle . Fayel, madame de Rochepont, Fernand , Gabrielle .

4

CHEMIN RETROUVÉ

gniez m'accorder la place que Monsieur Fayel ne peut accepter , je vous en serais très - reconnaissant .

FAYEL , à part.

Il me donnerait envie de monter dans la calèche . MADAME DE ROCHEPONT .

Si effectivement Monsieur de Laverdac , - justement , le voici , - a besoin de conférer avec Monsieur Fayel ...

FERNAND , bas à Fayel.

Diable ! Faites - le mentir aussi , lui . FAYEL , bas.

Cela me regarde . (Haut .) Oui ... oui ... madame , mes lumières sont réclamées par cet excellent ami ... qui ne peut rien faire sans moi ; n'est - ce pas , cher ami , tu ne peux rien faire ...

LAVERDAC . Tout ce que tu voudras .

MADAME DE ROCHEPONT .

Je n'insiste plus ... Vous viendrez avec nous , mon sieur Fernand .

FERNAND , à part.

Allons donc !

MADAME DE ROCHEPONT . Dounez - moi le bras . Gabrielle , passez devant.

FERNAND . Adieu , cher .

FAÏEL , à Fernand , à demi- voix . Est - ce que vous allez louer le cottage ?

$

Fayel, Fernard, madame de Rochepont, Laverdac, Gabrielle.

FERNAND . Peut - être ! - Good bye , dear !

(Madame de Rochepont a pris le bras de Fernand et sort avec lui.

Gabrilele les précède.)

SCÈNE V