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le développement des grandes surfaces

1.2. Face au déclin des petits commerces : quels enjeux pour les

espaces d’urbanisation dispersée ?

Les mutations spatiales de l’organisation des commerces et des services sont en partie liées aux transformations structurelles de l’appareil commercial (spécialisation, développement de grandes surfaces), aux évolutions des modes de consommation (Barczak et Hilal 2016), et au fonctionnement du petit commerce largement dominé par des structures précaires sans salarié (Grimmeau et Wayens 2016). Depuis une centaine d’années, le commerce a connu de grandes évolutions, tant dans ses formats (Allain et Chambolle 2003) que dans sa distribution. Le nombre de commerces a régressé, passant de 1,8 million en 1920 (Albert 2014) à 830 000 en 2008 (données issues de la base Insee BPE 2008). La fermeture et la diminution du nombre de petits commerces, notamment alimentaires, conjuguées au développement de la grande distribution, ont participé à l’émergence de nouveaux territoires dynamiques et, à l’inverse, à l’afaiblissement économique des espaces d’urbanisation dispersée.

Figure 8 | Un petit supermarché intégré aux extensions pavillonnaires dans le bourg de Mont-Prés-Chambord (41)

1.2.1. La diminution du nombre de points de vente

Entre les années 1960 et 2000, deux processus se développent parallèlement avec, d’un côté la diminution du nombre de petits commerces indépendants, à l’ofre limitée (comparée à celle des supermarchés), mais inement répartie sur le territoire, et de l’autre le développement d’une ofre de plus grande taille concentrée en quelques lieux. Ce double processus participe d’une mise à distance progressive des commerces avec leurs usagers, et pose des questions de mobilités, notamment celle des ménages dépendants. (Barczak et Hilal 2016, Pouzenc 1998). Avec l’émergence des supermarchés, la proximité, dans ses formes traditionnelles, construite autour de magasins indépendants de petite taille, devient en quelque sorte le parent pauvre du commerce. Cette nouvelle situation contribue à donner un statut « vieillot » aux petits commerces de proximité, à participer à la disparition progressive de ce format de commerce (Dupré 2014) et à recomposer l’ofre commerciale des centres-villes.

Les petits commerces alimentaires (supérette, boulangerie, boucherie) et les commerces spécialisés (électroménager, chaussures, meubles, droguerie) ont ainsi connu une importante diminution du nombre d’établissements, le nombre de petits commerces alimentaires indépendants étant passé pour sa part de 129 880 à 80 740 entre 1962 et 1975 (Daumas 2006).

1.2.2. Une « désertiication commerciale des campagnes » en débat

Ces mutations ont eu pour conséquence d’entraîner la dévitalisation des rues commerçantes des centres-villes, centres-bourgs et hameaux et l’accroissement concomitant de la vacance commerciale de ces lieux qui connaissent alors une baisse de fréquentation en même temps que s’engage un processus de dégradation accéléré de leur bâti et de leurs espaces publics. La diminution du nombre de petits commerces frappe particulièrement les villages et les bourgs qui ont perdu la plupart, voire la totalité, de leur infrastructure commerciale (Taulelle 2012). Ainsi, comme le montrent Stéphane Blancard, Nicolas Renahy, et Cécile Détang-Dessendre, en France, dans les espaces ruraux entre 1980 et 2013, le dernier magasin a disparu dans 20 à 40 % des communes où il était implanté (Stéphane Blancard et al. 2016). De nombreux élus locaux s’alarment aujourd’hui de l’absence ou de la disparition de ces commerces dans leur commune et des conséquences induites, telles que la perte d’attractivité, la question d’accessibilité des personnes isolées, la hausse des besoins en mobilités. Ces inquiétudes sont

souvent relayées dans les articles de presse (« centres-villes à vendre » (Le Monde, 11/01/16) mettant en avant le double processus de disparition de commerces et d’augmentation de la vacance commerciale qui afecte une grande partie des petites villes (Motte 2006). Comme il l’a été vu sous le prisme des politiques publiques mises en œuvre, la recherche d’une équité territoriale dans la distribution des commerces, et celle d’une proximité maximale entre le commerce et les habitants, constituent des objectifs forts. Malgré les outils mis en œuvre, les logiques de répartition de l’ofre commerciale restent liées aux capacités de maintien des commerces et aux stratégies des acteurs économiques.

Si la question du maintien de l’ofre commerciale est porteuse d’enjeux de taille, notamment dans les espaces d’urbanisation dispersée, ces derniers ne sont pas seuls concernés. Les villes petites et moyennes sont également afectées par la désertiication commerciale qui impacte les conditions de vie des habitants. Dans le domaine de la santé, les villes petites et moyennes enregistrent une récente détérioration de leurs indicateurs sanitaires (Delas, 2011), et dans le même temps, on observe également une dévitalisation des linéaires commerciaux des centres-villes et des centres-bourgs marqués par l’accroissement de la vacance de locaux au proit de supermarchés et d’hypermarchés situés en périphérie. Les études réalisées par la Fédération Procos (Fédération pour l’urbanisme et le développement du commerce spécialisé) montrent que la vacance commerciale touche plus fortement les villes petites et moyennes que les grandes villes7. Si le mouvement de déclin du petit commerce est généralisé et de grande ampleur, il est particulièrement marqué dans les petites villes, spécialement dans leurs centres où les logiques de réorganisation des services de proximité et de déclin des commerces se conjuguent et se renforcent mutuellement (Soumagne, 2003), là où convergent le déclin démographique, la baisse des revenus de la population et la vacance des logements. À partir de ces constats et des grandes tendances observées, une analyse plus spéciique de l’évolution du nombre de points de vente dans notre périmètre d’étude sera menée dans le chapitre 4 de cette thèse.

7 Alors qu’elle plafonne à 7% dans les grandes villes, la vacance commerciale dépasse 9% dans les villes de moins de 50 000 habitants et 10% dans les villes de 50 à 100 000 habitants. Certaines villes sont particulièrement afectées, comme Béziers (24%), Vierzon (23%) et Calais (21%). Seules les villes touristiques sont épargnées (Site de Villes de France : http://www.villesdefrance.fr/popuponde. php?id=2708).

1.3. Une transformation de l’ofre commerciale dans l’urbain