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Ce premier chapitre a montré que les travaux portant sur les nouveaux secteurs d’urbanisation, qu’ils soient désignés sous les vocables de périurbains, rurbains ou encore suburbain se sont longtemps inscrits dans une approche binaire centre/périphérie de l’espace. Or, le renouvellement et l’évolution des approches mises à l’œuvre depuis une vingtaine d’années a permis de s’extraire de cette dualité. La multiplicité des terrains d’études et des objets analysés (mobilités, morphologie, gouvernance, dynamiques démographiques...) ont conduit à une multiplication des concepts et des façons de les aborder. Bien qu’il n’existe pas une unicité des travaux de recherche, des caractéristiques communes émergent comme le fait d’analyser ces espaces par eux-mêmes, en les considérant comme des espaces à part entière possédant des logiques propres, et non à partir des villes.

Aujourd’hui, le terme de périurbain est assez connoté dans la littérature généraliste. Il renvoie à des espaces et à des modes d’organisations et fonctionnements contrastés et parfois opposés et n’est peut-être plus vraiment un révélateur des réalités de ces espaces. Il apparaît nécessaire de se détacher de cette notion ain de s’inscrire dans un cadre d’analyse renouvelé permettant de mettre en valeur ces nouvelles approches. Dans le sillage de ces travaux, cette thèse s’est emparée de la notion d’espaces d’urbanisation dispersée (Barattucci 2006) qui permet de les analyser à partir de leurs caractéristiques morphologiques et de repenser l’analyse de ces espaces hybrides. Cette notion est englobante et les espaces d’urbanisation dispersée peuvent ainsi être constitués aussi bien d’espaces dits ruraux que d’espaces dits périurbains qui sont des espaces bâtis en cours d’urbanisation hérités de l’organisation rurale du territoire. Ils sont composés d’espaces bâtis discontinus, de taille petite et moyenne, insérés dans un tissu urbain lâche.

Le champ de la géographie du commerce, jusqu’alors peu étudiés dans ces espaces, sont également mobilisés ain d’analyser les méthodologies permettant de caractériser la structuration des territoires et l’intégration des pratiques de consommation existant dans les territorialités des usagers. Ces éléments pris en compte ouvrent la voie de la contextualisation de cette thèse et permettent de déinir son cadre théorique. Ils appellent maintenant à des recherches plus approfondies des espaces d’urbanisation dispersée, à la déinition et à l’exploration de nouveaux terrains d’études.

CHAPITRE 2 : LE COMMERCE DE

PROXIMITÉ DANS LA LITTÉRATURE

ET LES POLITIQUES PUBLIQUES.

QUELLE SPÉCIFICITÉ DES ESPACES

D’URBANISATION DISPERSÉE ?

Figure 7 | Scénario d’aménagement territorial et commercial du SCOT de la communauté de communes du Pays Neslois

Cet exemple de document de planiication montre les intentions aichées par les politiques locales dans le développement de leur territoire et le maintien d’une ofre commerciale

Le commerce de proximité est aujourd’hui l’une des principales formes de commerce qui perdure dans les espaces d’urbanisation dispersée. « Le commerce de proximité désigne diférents types de commerces : boutiques, marchés, halles, galeries commerciales, petits centres commerciaux, situés dans ou proches de zones résidentielles et dont la fréquentation peut se faire à pied ou en voiture lors d’un déplacement inférieur à dix minutes » (Fournié, 2008). Depuis de nombreuses années, le commerce de proximité est un enjeu central des politiques publiques. Le maintien de ce type de commerce, notamment dans les espaces d’urbanisation dispersée répond à un besoin de préservation d’activités économiques dans des espaces qui en manquent généralement.

À partir d’une étude approfondie de la littérature et des politiques publiques, l’objectif de ce chapitre est de replacer les dynamiques des espaces d’urbanisation dispersée dans les grandes mutations du commerce de proximité en France. Tout d’abord,une synthèse de l’évolution quantitative de l’ofre commerciale de proximité en France est réalisée. À la lumière de ces grandes mutations, les efets liés au développement de la grande distribution et à ses implications spatiales sont mis en avant. Ces éléments sont abordés, d’une part sous l’angle du rééquilibrage de l’ofre dans la périphérie des grandes villes, et d’autre part sous celui de la disparition de points de vente de petits commerces alimentaires, principalement dans les bourgs et villages. Puis dans un deuxième temps, ce chapitre analyse les stratégies développées par les acteurs des politiques publiques et économiques depuis plus de cinquante ans et met en évidence leurs impacts dans les espaces d’urbanisation dispersée. Il permet ainsi d’observer les réponses politiques et les moyens mis en œuvre pour encadrer ces mutations et d’appréhender les objectifs poursuivis par chacune des réformes et leurs résultats. Enin, ce chapitre exame les mutations récentes de l’ofre commerciale marquées par un développement des commerces de petite taille, qu’elles soient l’œuvre de la grande distribution ou la conséquence d’initiatives individuelles ou associatives, ou encore d’actions politiques locales.

1. LES ÉVOLUTIONS DE L’OFFRE COMMERCIALE

DE PROXIMITÉ EN FRANCE : UN ESSOR DE LA

GRANDE DISTRIBUTION AU DÉTRIMENT DU

PETIT COMMERCE

Dans cette section, nous nous intéressons spéciiquement aux mutations de la structure commerciale opérées en France durant la seconde révolution commerciale. Cette analyse s’inscrit globalement dans l’objectif de la thèse de faire émerger la structure spatiale des espaces d’urbanisation dispersée et leur fonctionnement. Parallèlement au développement de la grande distribution, qui a permis la création de commerces aux périphéries des grandes villes qui en étaient dépourvues, l’ofre (que l’on peut qualiier de proximité, car inement répartie sur le territoire et située à proximité des lieux d’habitation), a eu tendance à diminuer en nombre de magasins dans les petites villes et les espaces d’urbanisation dispersée. Les secteurs de tensions et d’enjeux commerciaux y sont mis en lumière. Il s’agit donc d’analyser ces composantes et d’observer ses conséquences, notamment en matière de recomposition spatiale de l’ofre commerciale, et plus particulièrement dans les espaces d’urbanisation dispersée.

Depuis plus de deux siècles, le commerce traverse de profondes mutations généralement qualiiées de révolutions commerciales (Marseille 1997, Desse, 2001, Moati, 2001 et 2011, Péron, 2004). L’évolution de l’ofre commerciale de proximité quelle que soit sa forme ou sa localisation est intimement liée à la transformation du territoire et à son fonctionnement (déplacements à réaliser pour accéder aux commerces, évolution des polarités, attractivité…). Cette notion de révolution commerciale permet d’aborder la mutation du commerce sous le prisme de son insertion urbaine et de ses dynamiques spatiales. La théorie de la base économique a traditionnellement considéré les commerces comme étant des activités induites, peu motrices pour le développement territorial. Cependant, certains auteurs comme Laurent Davezies ont proposé une réinterprétation de cette théorie en élargissant la base économique à l’ensemble des fonctions urbaines incluant le tourisme, la fonction publique, ainsi que la simple résidence (Davezies 2008, Chaze 2009, Soumagne 2012). Les activités liées aux commerces de proximité jouent un rôle moteur dans nombre de territoires, où les fonctions productives sont peu présentes et l’existence d’activités commerciales y représente un atout indéniablement favorable à leur vitalité. Aujourd’hui, en France, nous nous situons dans une période transitoire entre la seconde révolution (qui a débuté au milieu du vingtième siècle

avec l’arrivée de la grande distribution et la recomposition des centres-villes et prend in au début des années 2000), et la troisième révolution (qui commence au début des années 2000) dont le développement est lié à la généralisation des nouvelles technologies.

1.1. Les mutations liées à « la seconde révolution commerciale »: