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le développement des grandes surfaces

2. CINQUANTE ANS DE POLITIQUES DE PROTECTION DU PETIT COMMERCE EN

2.2. De l’urbanisme commercial au commerce dans l’urbanisme

2.2.4. Dé inir la localisation du commerce dans les PLU

Aujourd’hui, l’urbanisme commercial, ou plutôt la question commerciale, est intégré au sein des règlements d’urbanisme et constitue plus un outil destiné à favoriser des localisations préférentielles ou l’implantation de nouveaux commerces qu’un outil d’interdiction (qui se heurterait au droit de la concurrence commerciale), ou de maintien d’un commerce en déclin dans des zones tendues. En 2015, plus de 20 000 communes françaises (soit environ 60 % d’entre-elles) ne disposent d’aucun commerce alimentaire (source INSEE BPE 2015, 10 Les données sont issues de la base SCOT de la MEEM — DGALN, décembre 2016

exploitation Damien Delaville 2016), l’objectif politique français aiché est de promouvoir un maillage in des commerces, qui relève d’usages quotidiens ou fréquents, pour renforcer l’attractivité des territoires et créer des emplois.

Alors que depuis les années 1970, les préceptes de l’urbanisme commercial visent principalement les demandes d’autorisation de construire, ils sont intégrés en amont dans le code de l’urbanisme à partir des années 1990. Il s’agit d’encadrer la planiication urbaine autant de manière quantitative que qualitative. Ces modiications de la règle sont directement prises en compte dans les plans d’occupation des sols (POS), puis des plans locaux d’urbanisme (PLU) partout en France.

Le PLU

Le Plan Local d’Urbanisme (PLU) est un document juridique de planiication de l’urbanisme à l’échelle communale ou intercommunale (PLUi). Composé d’un diagnostic du territoire, d’un projet politique, d’un règlement et d’un plan de zonage, il vient encadrer les demandes de permis de construire et orienter l’évolution du territoire. Il ixe les enjeux à tenir en matière de développement de l’ofre de logements, d’emplois, d’activités économiques et commerciales de mobilités et d’espaces verts. Il doit être compatible avec les documents d’aménagements d’échelle supérieure, tels que la trame verte et bleue, le schéma de cohérence territorial, le plan local de déplacement, ou encore le plan local de l’habitat. Depuis la loi ALUR de 2014, la compétence des PLU est transférée aux intercommunalités et les PLU doivent être intercommunaux (PLU intercommunaux).

Ainsi, la loi du 2 février 1995 portant sur le « renforcement de la protection de l’environnement » précise qu’« en dehors des espaces urbanisés des communes, les constructions ou installations sont interdites dans une bande de cent mètres de part et d’autre de l’axe des autoroutes, des routes express et des déviations au sens du code de la voirie routière et de soixante-quinze mètres de part et d’autre de l’axe des autres routes classées à grande circulation. [...] Les dispositions des alinéas précédents ne s’appliquent pas dès lors que les règles concernant ces zones [...] sont justiiées et motivées au regard notamment des nuisances, de la sécurité, de la qualité architecturale, ainsi que de la qualité de l’urbanisme et des paysages » (Article

52-I). Cet article visant les nouveaux secteurs d’urbanisation a pour objectifs de freiner le développement de surfaces commerciales ex nihilo le long de grandes infrastructures de transports, de favoriser des formes urbaines mêlant commerces et habitat dans des formes d’organisation plus classiques, et aussi de renforcer la qualité architecturale des projets urbains en ixant comme condition dérogatoire le respect d’une qualité architecturale et urbaine. Le cahier des charges ixé aux acteurs de la grande distribution se complexiie donc, tendant vers une localisation et des formes plus urbaines mieux intégrées au tissu existant.

La mutation du code de l’urbanisme comme outil permettant d’encadrer la distribution des commerces sur le territoire et de favoriser les formes de commerce de proximité s’est accélérée lors des débats portant sur la recodiication du livre 1er du code de l’urbanisme. La promulgation des décrets du 28 décembre 2015 a factualisé cette mutation en permettant de moderniser le contenu des documents d’urbanisme et notamment celui des PLU. L’objectif est de favoriser un urbanisme de projets en encourageant les interactions entre les porteurs de projets et les collectivités compétentes. Des règles spéciiques aux commerces ont été ajoutées ; il est désormais possible d’indiquer au plan graphique (c’est-à-dire de déinir sur le plan de zonage du PLU), des secteurs au sein desquels les commerces sont interdits, autorisés ou autorisés sous condition. Cela permet ainsi aux collectivités d’encadrer leur ofre de commerce et de déinir les secteurs de leur territoire sur lesquels elles souhaitent voir se développer ou perdurer des polarités commerciales. Les règles écrites peuvent également autoriser une certaine souplesse dans la réalisation des projets ou, au contraire, permettre à la collectivité d’orienter la programmation des futurs projets en obligeant la construction de commerces en rez-de-chaussée des bâtiments, ou en l’encourageant par le recours à une dérégulation des règles d’urbanisme (hauteur, implantation, surface). Ces nouvelles dispositions autorisent donc à planiier en amont l’image et les fonctions que les élus souhaitent donner à leur territoire et de ixer le cadre de réalisation des projets.

L’analyse de ces réglementations montre que les intercommunalités sont les nouveaux acteurs de la planiication en France et que les outils mis à leur disposition (l’ensemble des documents d’urbanisme) leur donnent la possibilité d’orienter l’évolution économique et commerciale de leur territoire au même titre que celle du logement ou des réseaux. Bien que les réglementations évoluent en ce sens, notamment avec les Dac (Document d’aménagement commercial) et les nouveaux codes de l’urbanisme, l’urbanisme commercial reste aujourd’hui écartelé entre le droit de l’urbanisme et celui du commerce. Il apparaît dans les débats et la

pratique toute la diiculté pour un élu de refuser une implantation commerciale au simple nom de l’urbanisme. Aussi, l’analyse des évolutions de l’ofre commerciale observées en France tend à montrer que les politiques menées semblent avoir eu pour efet d’encadrer un mouvement déjà enclenché sans pour autant le résorber.

Comme nous l’avons développé dans la première section de ce chapitre, le paysage commercial de la France a été marqué, durant les cinquante dernières années, par un fort accroissement du nombre des grandes surfaces (notamment celles périphériques des espaces périurbains), et la diminution concomitante de celui de petits commerces indépendants. Bien que ces mutations soient contraires aux objectifs ixés par le législateur, il est diicile d’imaginer et de savoir comment l’activité commerciale aurait évolué sans urbanisme commercial. Les nouveaux modes de prise en compte du commerce dans l’urbanisme au cours des dernières années s’accompagnent d’un retournement des dynamiques commerciales antérieurement observées, marquées par un renouveau du commerce de proximité comme nous allons le voir. S’ils ne sont pas la seule raison de cette dynamique, on peut toutefois poser l’hypothèse qu’ils permettent de la renforcer.

3. LE RENOUVEAU DE LA PROXIMITÉ DANS LES