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Evolution de la jurisprudence et de la réglementation

Les exceptions pour les constructions et installations non conformes à la zone et situées hors des zones à bâtir étaient réglées par 1' ancien art. 24 aLAT, en deux alinéas. Le premier concernait les constructions et installations nouvel-les ou nouvel-les changement d'affectation qui ne respectent pas l'exigence de con-formité à l'affectation de la zone prévue par l'art. 22 al. 2let. a LAT. L'ex-ception était soumise à la condition que 1 'implantation hors de la zone à bâtir soit imposée par la destination de l'ouvrage (let a), pour autant qu'aucun intérêt prépondérant nes 'y oppose (let. b ). Pour les constructions ou installa-tions existantes, le deuxième alinéa confiait au droit cantonal la compétence d'autoriser leur rénovation, leur transformation partielle ou leur reconstruc-tion, lorsque ces travaux étaient compatibles avec les exigences majeures de 1 'aménagement du territoire.

126 Le maintien de l'activité doit être examiné selon les possibilités données par les art. 24d LAT et 39 nOAT car les activités commerciales ou artisanales ne peuvent en principe être considérées comme imposées par leur destination hors des zones à bâtir au sens de 1' art. 24 LAT.

ERIC BRANDT

Les cantons devaient adapter expressément le droit cantonal en applica-tion de 1 'art. 24 al.2 aLAT pour autoriser les travaux de rénovation, de trans-formation partielle et de reconstruction. Cette délégation de compétence de-vait leur permettre de mieux tenir compte des caractéristiques propres à chaque canton; ils pouvaient ainsi adopter une réglementation plus restrictive ou même ne pas prévoir de dispositions cantonales d'application; à défaut de régle-mentation cantonale, les travaux devaient être examinés uniquement par rap-port aux conditions de l'art. 24 al. 1 LAT127•

1. La notion de transformation partielle

La jurisprudence a ensuite précisé que les notions de rénovation, transforma-tion partielle et reconstructransforma-tion de 1' art. 24 al. 2 LAT relevaient du droit fédé-ral et que les cantons ne pouvaient étendre ces notions selon leurs propres règles, car les travaux plus importants tombaient sous le coup de l'art. 24 al. 1 aLAT. Les définitions de transformation partielle et de reconstruction constituaient en quelque sorte la ligne de partage entre 1' alinéa 1er et le 2ème alinéa de l'ancien art. 24 aLAT128. La jurisprudence fédérale a précisé qu'une interprétation restrictive de ces notions se justifiait en raison du fait que 1 'un des buts essentiels de la LAT était de marquer une nette distinction entre le régime de la zone constructible et celui de la zone inconstructible129 •

C'est ainsi que le Tribunal fédéral a jugé que la création de logements dans la partie rurale d'une ancienne ferme, qui avait pour effet de doubler la partie habitable existante, excédait les limites de la transformation partielle et ne pouvait être admise au titre de l'art. 24 al. 2 aLAT130; il en allait de même pour 1' agrandissement d'une maison de vacances par 1' adjonction d'une pièce de séjour de 17 m2131, ou la transformation d'un chalet d'alpage en maison de vacances132; ces travaux ne pouvaient non plus être admis selon l'art. 24 al. 1er aLAT. En ce qui concerne un projet de transformation d'un fenil en

127 ATF 107 lb 233, 236 consid. 2a; ATF 108 lb 53, 54-55 consid. 3c = JT 1984 I 523.

128 ATF 108 lb 359, 361 consid. 3; 53, 54 consid. 3b = JT 1984 I 522, 523; ATF 110 lb 141, 143 consid. 3b; 264, 265 consid. 3 = JT 1986 I 553, 556; voir aussi ATF 112 lb 94, 97 consid. 3 = JT 1988 1 443; 113 lb 314, 316 consid. 3 = JT 1989 1 455.

129 ATF 112 lb 94, 97 consid. 3 = JT 1988 I 443.

130 ATF 108 lb 53ss = JT 1984 I 523.

131 ATF .112 lb 94 ss. Dans cette affaire, le TF a considéré qu'il ne fallait pas uniquement prendre en considération 1 'agrandissement de la pièce de séjour de 17 m2 , mais

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dortoir avec cuisine; 133 le Tribunal fédéral avait relevé que dans les régions de montagne, «on doit veiller à ce que les hameaux et mayens ne soient pas transformés en complexes de résidences de vacances ou de week-end», et que

«s'il se justifie, dans 1' intérêt du tourisme ou pour la détente, d'autoriser des résidences de vacances ou de week-end, il faut alors prévoir les zones néces-saires à cet effet»134

Cette interprétation claire de l'art. 24 aLAT, voulue par le législateur, n'a cependant pas permis de tenir compte de toutes les situations. Des diffi-cultés sont apparues notamment dans les régions rurales et de montagne, pour les constructions existant hors des zones à bâtir qui ne pouvaient plus ment le local aménagé en dessous. Désignée comme une cave, cette pièce ouvrait de plain-pied du côté est, avec une fenêtre du côté sud et elle pouvait donc être utilisée pour l'habitation. Il convenait d'examiner le projet et son affectation prévisible non seulement d'après les intentions déclarées par le requérant mais aussi en tenant compte des possibilités objectives d'utiliser les volumes projetés pour l'habitation. Dans le projet en cause, l'agrandissement projeté représentait environ le tiers du bâtiment existant et il ne pouvait être considéré comme de minime importance.

132 ATF llO Ib 141 = JT 1986 I 553.

133 ATF 108 Ib 130ss = JT 1984 I 525. Dans cette affaire, le recourant, chauffeur et maga-sinier à Coire, souhaitait transformer un fenil qu'il avait construit en 1975 sur la par-celle de 450 m2 qu'il possédait à Maladers, à 1550 m d'altitude pour les besoins agricole du terrains et d'autres parcelles affermées représentant environ 2,45 ha de prairie sur lesquelles il faisait paître en moyenne 25 moutons en été et en automne. Le Tribunal fédéral n'a pas considéré comme décisif le fait que l'agriculture soit la pro-fession principale du requérant ou une activité accessoire, ni que le but de l'exploita-tion soit essentiellement économique ou encore idéal. En revanche, il fallait que la construction projetée soit liée à son emplacement pour des raisons techniques ou éco-nomiques. Si une construction est édifiée dans une région de montagne à des fins agricoles, elle doit servir aux besoins de l'économie agricole et alpestre et apparaître comme nécessaire à cette exploitation. Les locaux d'habitation sont admis lorsque un séjour prolongé sur place est nécessaire pour exploiter un alpage éloigné des zones d'habitation (ATF 102 Ib 70 consid. Sb). Le TF a cependant considéré que la présence sur place, et donc l'aménagement d'un logement n'était pas nécessaire pour surveiller et soigner 25 moutons durant l'été. Après avoir effectué une inspection locale, le TF en a retiré l'impression que le constructeur entendait bien poursuivre durablement l'ex-ploitation sans chercher à détourner de son but avoué la transformation en cause. Mais il a relevé que la seule intention subjective du propriétaire n'était pas déterminante en raison de l'importance et de la portée des principes d'aménagement du territoire vi-sant à délimiter les zones à bâtir des zones inconstructibles, et que les conditions de l'art. 24 al. !er LAT devaient être remplies objectivement. L'octroi de l'autorisation pouvait en outre créer un précédent et ouvrir la porte à une interprétation laxiste des conditions de l'art. 24 al. 1 LAT, ce que le législateur n'avait pas voulu; de plus, la garde des moutons avait été invoquée à plusieurs reprises, les derniers temps, comme motif à des demandes d'habitation hors des zones à bâtir. Les autorités devaient donc faire preuve de beaucoup de retenue dans ce domaine.

134 Voir aussi l' ATF 115 Ib 508, 513 consid. 6 = JT 1991 I 460.

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être utilisées conformément à leur destination originaire, en raison des modi-fications des structures démographiques et économiques intervenues. Les res-trictions imposées aux changements d'affectation ne permettaient pas une utilisation qui puisse assurer leur conservation; en restant inutilisées, ces cons-tructions étaient vouées à la ruine. Une telle conséquence ne se justifiait pas dans de nombreux cas, notamment pour les constructions qui confèrent un caractère particulier à un paysage ou celles qui sont elles-mêmes dignes d'être conservées, ou encore dans les régions où la sauvegarde d'une certaine struc-ture de l'habitat se justifie135.

2. La première révision de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire de 1989

Une première révision générale de 1 'ordonnance sur 1' aménagement du terri-toire du 2 octobre 1989 a précisé les conditions applicables aux changements d'affectation des bâtiments existants dans les territoires à habitat tradition-nellement dispersé et sujets à une baisse de la population (art. 24 al. 1er OAT-1989)136, ainsi que dans les sites comportant un milieu bâti digne d'être main-tenu (art. 24 al. 2 OAT-1989)137. Il fallait encore que les territoires concernés soient localisés dans le plan directeur cantonal, que l'aspect extérieur et la structure architecturale du bâtiment demeurent pour 1 'essentiel inchangés et que le changement d'affection ne requiert aucun équipement de desserte com-plémentaire (art. 24 al. 3 OAT-1989)138

L'ordonnance de 1989 réglementait aussi une possibilité qui existait déjà par l'art. 18 LAT139 pour maintenir le milieu bâti hors des zones à bâtir.

L'art. 23 OAT-1989 précisait que pour assurer le maintien de petites entités urbanisées hors de la zone à bâtir, des zones spéciales au sens de l'art. 18 LAT,

135 ASPAN, Mémoire n°53b, p. S.

136 Les changements d'affectation admis étaient d'une part l'habitation sans rapport avec l'agriculture de bâtiments comportant déjà des logements si le logement était habité à l'année, d'autre part le petit artisanat et le commerce local pour autant qu'il n'occupe pas plus de la moitié du bâtiment.

137 Le changement d'affectation des bâtiments existants était admis si le bâtiment était classé comme caractéristique du paysage par décision de l'autorité compétente en ma-tière de protection des sites et du paysage et si sa conservation à long terme ne pouvait être assurée d'une autre manière.

138 APSAN, Mémoire n°53b, p. 21 ss.

139 ATF 118 la 446, 451 consid. 2c = JT 1994 I 408.

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telles que les zones de hameaux ou les zones de maintien de 1 'habitat rural, pouvaient être délimitées lorsque cette possibilité était prévue par le plan directeur cantonal. La jurisprudence a précisé ensuite la notion de petite en-tité urbanisée, qui devait former un groupe de cinq à dix maisons formant une unité ou un groupe de constructions bien séparé du noyau du village, la dis-tance entre chaque bâtiment ne devant pas être supérieure à 20 ou 30 m140.

3. La seconde révision de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire de 1996

Les dispositions de 1 'ordonnance de 1989 n'ont cependant pas eu 1' effet es-compté hors des zones à bâtir, en raison notamment de leur complexité et des possibilités d'application restreinte. Une nouvelle modification de l'ordon-nance sur l'aménagement du territoire est entrée en vigueur le 1er juillet 1996.

Le critère de la diminution notable de la population pour les changements d'affectation dans les territoires à l'habitat traditionnellement dispersé a été supprimé, et 1 'exigence visant à délimiter ces territoires dans le plan directeur cantonal a été remplacée par 1 'obligation de les désigner dans le plan direc-teur cantonal sans une localisation précise (art. 24 al. 1 OAT -1996). Pour les exceptions prévues dans les sites comportant des bâtiments ou installations dignes d'être maintenus, 1 'ordonnance ne désigne plus 1 'autorité compétente pour placer le bâtiment sous protection, 1 'octroi de la dérogation étant subor-donné à la mise sous protection préalable; enfin, la condition de la localisa-tion dans le plan directeur cantonal a été remplacée par l'exigence d'un plan d'affectation communal, les critères applicables à la détermination de ces sites devant toutefois être définis dans le plan directeur cantonal (art. 24 al. 2 O.!IT-1996). Une nouvelle possibilité a été introduite à l'art. 24 al. 3 de l'OAT-1996 pour les bâtiments classés qui ne font pas partie d'un site ou d'un pay-. sage rural digne de protection au sens de l'alinéa 2; le changement d'affecta-tion était admis lorsqu'il s'agit du seul moyen d'assurer la sauvegarde durable du bâtiment; le plan directeur cantonal devait également comporter les indi-cations nécessaires à la protection de ces objets (art. 24 al. 3 OAT-1996).

Les autres conditions mentionnées à 1' ancien alinéa 3 de 1' art. 24 OAT -1989 ont été reprises, pour le surplus, à l'art. 24 al. 4 OAT-1996.

140 ATF 119 la 300, 302 consid. 3a = JT 1995 I 425.

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Ces révisions de 1 'ordonnance sur l'aménagement du territoire n'avaient toutefois qu'une portée limitée et n'apportaient que des changements mineurs au régime des autorisations de construire hors de la zone à bâtir, dès lors qu'elles se limitaient à préciser la portée des dispositions de la loi fédérale141

Le nouveau droit maintient à l'art. 24 nLAT les dispositions de l'ancien art. 24 al. 1 aLAT et il réglemente aux nouveaux art. 24a à 24c nLAT la question des bâtiments existants non conformes à la zone, à la place de l'an-cien art. 24 al. 2 aLAT, supprimé. Ces modification sont encore précisées et complétées par la troisième révision de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire, du 28 juin 2000.

D. Les exceptions prévues hors des zones

à

bâtir pour les