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4.   Les parcours des familles au prisme des dossiers 41

4.1.   Les parcours des familles avant l’entrée en centre parental 42

4.1.2.   Evénements de vie antérieurs 45

Plus de la moitié des couples ont vécu des situations d’errance et de logement inadéquat avant leur entrée en centre parental (23/40). Cela concerne 16 mères et 17 pères. 10 couples ont vécu la situation d’errance ensemble, ces situations sont présentes dans tous les centres parentaux investigués. Cependant, au-delà de la situation d’errance ou d’absence de logement, par construction (il a fallu convaincre les services de l’Aide sociale à l’enfance de prendre en charge le séjour), les éléments liés à des difficultés familiales antérieures, lorsqu’ils sont connus des professionnel.le.s, sont fréquemment mis en avant. Les éléments présentés ci- dessous rendent compte des parcours des familles tels que les professionnel.le.s les reconstruisent à destination de l’Aide sociale à l’enfance, ce qui explique la centration de cette présentation sur des difficultés, des éléments qui, dans le parcours antérieur des personnes accueillies, suggèrent une fragilité, des ruptures des liens et donc un besoin de soutien.

En particulier, la prise en charge par l’Aide sociale à l’enfance en tant qu’enfant, l’orphelinage, la reconnaissance par la Maison départementale des personnes handicapées, l’existence de violences intrafamiliales dans l’enfance des parents, et parfois l’existence d’addictions sont présentés comme des marqueurs du besoin de soutien spécifique de ces parents dans la transition à la parentalité. Si les éléments liés à une prise en charge institutionnelle (dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance ou des services à destination des personnes en situation de handicap) sont mentionnés de manière systématique, l’exposition à la violence intrafamiliale et les addictions semblent faire l’objet de stratégies discursives différentes d’une structure à l’autre. Les éléments présentés dans le tableau 2, en page suivante, correspondent donc à des minima, et ne rendent sans doute pas compte de la totalité des situations. Ils permettent cependant de souligner la spécificité des parcours des couples accueillis en centre parental.

Accueil de couples de 18 à 25 ans, primipares, jusqu'aux 3 ans de l'enfant Accueil de couples jusqu'aux 3 ans de l'enfant Accueil de couples et de mères isolées jusqu'aux 3 ans de l'enfant Accueil de couples et de parents isolés jusqu'aux 6 ans de l'enfant Total

Prise en charge par l'ASE en tant qu'enfant

Nombre de mères concernées 5 5 4 3 17 Nombre de pères concernés 7 3 1 1 12 Nombre de couples concernés 8 5 5 4 22 Orphelinage Nombre de mères concernées 1 2 1 0 4 Nombre de pères concernés 2 0 3 1 6 Nombre de couples concernés 3 2 4 1 10 Reconnaissance par la MDPH Nombre de mères concernées 1 1 5 1 8 Nombre de pères concernés 1 0 3 0 4 Nombre de couples concernés 1 1 7 1 10

Exposition à des violences intrafamiliales en tant qu'enfant

Nombre de mères concernées 6 4 2 0 12 Nombre de pères concernés 5 1 0 1 7 Nombre de couples concernés 8 4 2 1 15

Au moins l'une de ces quatre expériences

Nombre de mères concernées 7 6 8 4 25 Nombre de pères concernés 8 3 5 3 19 Nombre de couples concernés 10 7 9 6 32

Tableau 2 – Evénements de vie antérieurs des parents mentionnés dans les rapports sociaux (n=40)

Prise en charge en protection de l’enfance en tant qu’enfant

17 mères ont fait l’objet de mesure de protection de l’enfance en tant qu’enfant (placement ou suivi en milieu ouvert), soit près de la moitié. C’est également le cas de 12 pères sur 40. 22 couples sur 40 ont une expérience antérieure de la protection de l’enfance en tant qu’enfant, ce qui sera à relier aux situations de crainte du placement, et 7 couples sont constitués de deux adultes ayant fait l’objet de mesure de protection de l’enfance. Ces situations concernent l’ensemble des structures étudiées.

Orphelinage

Quatre mères au moins ont perdu un de leur parent avant l’entrée en centre parental : deux sont orphelines de mère, une de son père, et une de ses deux parents. Ces situations d’orphelinage ont toutes été accompagnées de mesure de protection de l’enfance (avant ou après le décès). Au moins six pères sont également dans cette situation : un a perdu sa mère, deux leurs deux parents, et trois leurs pères. Les pères orphelins double ou orphelin de mère ont été pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, mais pas les pères orphelins de père. Au total, au moins 10 couples sur 40 sont constitués d’un parent déjà orphelin, au moment de sa propre transition à la parentalité.

Reconnaissance par la Maison départementale des personnes handicapées

Sept mères font l’objet d’une reconnaissance par la Maison départementale des personnes handicapées (et une huitième est en cours de procédure au moment de l’admission). Cette situation est beaucoup plus fréquente dans l’une des structures investiguées, qui concentre cinq des huit situations. C’est également le cas pour quatre pères, dont trois dans cette même structure. Au total, 10 couples sur 40 sont concernés. Si c’est une réalité marginale dans la plupart des structures, dans l’une d’entre elles, cela concerne 7 couples sur 10 (soit la mère, soit le père, soit les deux). Au total, 28 couples sur 40 comprennent au moins un parent, fréquemment les deux, qui a eu une expérience antérieure de l’Aide sociale et des travailleurs/euses sociaux/ales, dans le cadre de l’Aide sociale à l’enfance ou de l’action en faveur des personnes en situation de handicap.

Vécu de violences intrafamiliales durant l’enfance

Des antécédents d’exposition à des violences intrafamiliales durant l’enfance du parent sont mentionnés dans les dossiers pour 12 mères et 7 pères. Cette catégorie peut sembler large, elle regroupe l’ensemble des formulations qui renvoient à des maltraitances physiques sur les enfants ou à l’exposition à la violence conjugale, car souvent, les expressions employées restent vagues, et souligne la violence d’un parent, sans spécifier le type et le destinataire des violences (par exemple : « le père de Madame était très violent. »). Au total, 15 couples sur 40 sont constitués d’au moins un parent ayant vécu des violences intrafamiliales durant son enfance, et quatre couples sont composés de deux parents concernés. Ces situations sont inégalement réparties en fonction des centres parentaux (un, deux, quatre ou huit couples sur dix), mais les modalités d’écriture des rapports semblent jouer un rôle important dans ces différences.

En croisant les mesures de protection et les situations de violence intrafamiliale, on peut constater que 27 couples sur 40, soit plus des deux tiers, sont composés d’au moins un adulte ayant vécu des violences intrafamiliales dans son enfance ou ayant bénéficié d’une mesure de

protection. Près de la moitié de ces couples (13/27), soit un tiers des couples accueillis, sont constitués de deux adultes concernés.

Un cumul de fragilités

Au total, seuls les dossiers de 8 couples sur 40 ne rapportent pas au moins l’une des quatre expériences (prise en charge à l’ASE en tant qu’enfant, orphelinage, reconnaissance comme personne en situation de handicap, expérience de violences intrafamiliales en tant qu’enfant) pour au moins l’un des membres du couple. Ainsi, quatre couples sur cinq accueillis en centre parental présentent au moins l’une de ces expériences, souvent combinées entre elles. Ces éléments montrent bien le repérage des situations de grande vulnérabilité dans l’orientation en centre parental, et de la proximité des expériences de vie du public accompagné avec les parcours des femmes accueillies en centre maternel (Ganne & Bergonnier-Dupuy, 2012). Ces situations concernent 25 mères sur 40, soit près des deux tiers, et 19 pères sur 40, soit près de la moitié. Il est difficile de dire si la plus faible proportion de pères ayant vécu ces expériences est liées à un effet d’écriture et de connaissance par les travailleurs/euses sociaux/ales de leur parcours, ou à un repérage plus important des femmes ayant un parcours marqué par ces expériences par les professionnel.le.s de la périnatalité, comme semblent le suggérer les résultats des entretiens qui seront développés par la suite.

Parcours migratoires

Enfin, environ un quart des parents (13 pères et 8 mères) ont connu un parcours migratoire. Sans que cela ne soit présenté comme un facteur de risque concernant la transition à la parentalité dans les rapports, ces parcours sont présentés comme générateurs de rupture de lien avec la famille d’origine, et donc nécessitant parfois un soutien spécifique dans cette transition.

16 couples sur 40 (soit quatre sur dix) sont composés d’au moins un parent ayant un parcours migratoire : 5 couples sont composés de deux parents ayant un parcours migratoire, 3 couples d’une femme migrante avec un compagnon né en France, et 8 couples d’un homme migrant avec une compagne née en France. Dans deux structures, les couples constitués d’un homme né à l’étranger et d’une femme née en France sont davantage représentés (4/10 et 3/10).  

Les pays d’origine sont multiples mais montrent une diversité en fonction des territoires d’implantation des centres parentaux : 5 parents sont originaires d’Afrique subsaharienne francophone dans une structure ; 5 parents sont originaires de Turquie ou d’Arménie dans une autre ; 10 parents sont originaires d’Algérie et de Tunisie, dans trois structures sur quatre ; et une mère est originaire de Colombie.