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Influence des paramètres de la formulation de la suspension

IV.2 Influence des conditions de dispersion de la suspension

IV.3.3 Etude des interactions Ibuprofène – Silice par RMN du solide

Des analyses complémentaires ont été réalisées par Résonance Magnétique Nucléaire du solide afin de mieux comprendre les interactions entre l’ibuprofène et la silice.

135 Les analyses effectuées sur l’atome de silicium (29Si MAS et 29Si CP/MAS) dont les spectres sont présentés sur la Figure IV.16 ne montrent pas de différence significative quel que soit le ratio, ce qui confirme le fait qu’en SAXS et en MET on a observé que la structure des MSN n’était pas modifiée.

Figure IV.16 : Spectres RMN 29Si (gauche) et spectre RMN 29Si CP (droite) du solide de poudre atomisée à différents ratios

RIbu:Si (les MSN viennent du Lot01)

Les atomes de carbone ont été sondés à l’aide de RMN 13C MAS (Figure IV.17) et 13C CP MAS (Figure IV.18) pour plusieurs ratios. L’ibuprofène solide (cristallin) ainsi que l’ibuprofène dissout dans l’éthanol serviront de référence.

Concernant les ratios RIbu:Si=20:80 et RIbu:Si=25:75, les observations sont exactement les mêmes que celles réalisées au chapitre précédent dans le cas de l’expérience de référence (RIbu:Si=35:65). En effet on peut conclure que pour tous ces ratios, l’ibuprofène présente un comportement pseudo-liquide au sein des mésopores puisque les spectres RMN du carbone sont similaires à ceux obtenus avec l’ibuprofène dissout en solution (Figure IV.17). De plus, le décalage du pic caractéristique du carbone de la fonction carbonyle de la molécule d’ibuprofène est similaire pour RIbu:Si allant de 20:80 à 35:65. Pour rappel, ce décalage de déplacement chimique est lié à l’environnement différent dans lequel se trouve le carbone lié à la fonction carbonyle (différents types de liaisons hydrogène, formation éventuelle de dimères d’ibuprofène, interaction avec les groupements OH de l’éthanol et/ou de la silice, etc.).

136 Figure IV.17 : Spectres RMN 13C du solide d’ibuprofène solide et dissout dans l’éthanol, et de poudre atomisée à

différents ratios RIbu:Si (* : Ethanol ; les MSN viennent du Lot01)

En RMN 13C CP du solide, on peut observer d’autres résultats. Quand la quantité d’ibuprofène est faible (RIbu:Si=20:80), on n’observe que très peu de pics, et de très faibles intensités. Ces pics correspondent aux carbones les plus rigides dans la molécule (fonction phényle, et carbones plus proches voisins de cette fonction). Les spectres sont similaires jusqu’à RIbu:Si=35:65, puis à partir de 40:60, les pics correspondants aux autres carbones sont présents. Pour rappel, la RMN CP permet d’observer les atomes des molécules se trouvant à un état rigide ; la présence continuelle des pics de la fonction phényle montre que ces atomes de la molécule d’ibuprofène sont constamment dans un état rigide, ce qui est intrinsèquement lié à la molécule. En revanche, l’absence de pics pour les autres carbones pour RIbu:Si allant de 20:80 à 35:65 induit une non rigidité de la molécule, ou plutôt une mobilité de l’ibuprofène pour ces ratios.

Figure IV.18 : Spectres RMN 13C CP du solide d'ibuprofène solide et dissout dans l'éthanol, et de poudre atomisée à

137 De nouvelles considérations peuvent être faites à partir du ratio RIbu:Si=40:60. Les spectres 13C CP MAS montrent effectivement la présence de nouveaux pics intenses liés à l’ibuprofène sur la Figure IV.18. Ces pics correspondent à l’apparition de molécules d’ibuprofène sous forme cristalline, comme observé précédemment en DRX. En parallèle, la RMN 13C du solide montre un décalage de signal du carbone 3 (d’une fonction méthyle) selon les poudres analysées, comme on peut le voir sur la Figure IV.19. Le déplacement chimique pour la phase solide est de 14,7 ppm tandis qu’il est de 17,5 ppm pour la phase « liquid-like ». Ce décalage de signal permet de calculer une quantité d’ibuprofène cristallin pour chaque échantillon, en comparant les aires de ces deux pics dans le même spectre. On peut ainsi en déduire que l’ibuprofène cristallin représente environ 7±2 % de l’ibuprofène total dans le ratio RIbu:Si=40:60. Une augmentation importante de la proportion d’ibuprofène solide a lieu quand on augmente la quantité initiale d’ibuprofène, comme le montre les spectres RMN du solide 13C et 13C CP des ratios RIbu:Si=50:50 et 80:20 (Figure IV.17 et Figure IV.18). Pour ces ratios, les signaux liés aux carbones aromatiques et carbonyles sont plus complexes, car ils résultent d’une superposition entre les pics de résonance fins (forme cristalline), et plus larges (forme amorphe). L’apparition de cette phase amorphe est nouvelle par rapport aux autres ratios, et sa proportion relative est plus importante pour RIbu:Si=80:20 que pour RIbu:Si=50:50 (60 % contre 45 % respectivement ; les valeurs sont déterminées par déconvolution du signal). Cette apparition de phase amorphe peut être significative d’une structuration partielle de molécules d’ibuprofène confinées au sein des mésopores, quand la quantité d’ibuprofène est augmentée.

Figure IV.19 : Spectres RMN 13C du solide de la Figure IV.17 ; zoom de la zone correspondant au signal du Carbone

Méthyle n°3

Pour confirmer cette hypothèse, des spectres RMN du solide effectués en 13C INEPT (qui détectent la présence de molécules très mobiles) sont présentés sur la Figure IV.20. L’intensité des signaux en INEPT est très importante pour RIbu:Si=20:80 et 25:75. En revanche, les pics diminuent d’intensité entre 35:65 et 80:20, ce qui signifie que de moins en moins de molécules mobiles sont présentes. Ainsi, la diminution de la mobilité de l’ibuprofène semble correspondre à l’apparition d’une phase amorphe. On peut donc supposer que cette diminution de mobilité est liée à une quantité de plus en plus importante de molécules dans les pores. On peut corréler cette possibilité aux hypothèses décrites précédemment suite aux analyses en SAXS et en adsorption d’azote, où l’apparition d’une phase amorphe peut résulter d’une densification de l’ibuprofène dans les pores. Cette phase amorphe est la phase la plus dense qui peut se trouver dans les réseaux poreux. Rappelons en effet que la condition nécessaire en termes de dimensions pour former des cristaux dans le milieu confiné n’est pas respectée (Sliwinska-Bartkowiak et al. 2001).

138 Figure IV.20 : Spectre RMN 13C INEPT du solide de poudre atomisée à différents ratios R

Ibu:Si (* : Ethanol ; les MSN

viennent du Lot01))

En combinant les observations en RMN du carbone avec les résultats obtenus en ATG, il est possible d’en déduire un ratio entre l’ibuprofène « interne », c’est-à-dire dans les pores (liquid-like et amorphe), et la silice. On peut également obtenir une quantité d’ibuprofène théorique maximale qui peut se placer au sein du réseau de la manière suivante :

- Le volume poreux des MSN, obtenu par adsorption d’azote, vaut Vporeux= 0,754 cm3.g-1 (valeur obtenue par adsorption d’azote, dans le cas des MSN du Lot01).

- On considère la densité de l’ibuprofène dans le réseau comme étant la densité de l’ibuprofène cristallin, soit dibu = 1,076 g.cm-3 (Shen et al. 2011). Bien que l’ibuprofène ne soit pas sous cette forme ici, on fait le choix de prendre cette densité car elle est la seul tabulée.

- On peut en déduire une quantité d’ibuprofène maximale théorique qui vaut

𝑞

𝐼𝑏𝑢 𝑡ℎé𝑜𝑟𝑖𝑞𝑢𝑒

= 𝑉

𝑝𝑜𝑟𝑒𝑢𝑥

. 𝑑

𝑖𝑏𝑢

= 0,811 𝑔

𝑖𝑏𝑢

/𝑔

𝑠𝑖𝑙𝑖𝑐𝑒

On peut ainsi estimer un taux de remplissage relatif en comparant ce ratio au ratio réel, comme on peut le voir dans le Tableau IV.8. Les résultats obtenus montrent que le taux de remplissage des pores augmente assez rapidement dans un premier temps, entre un ratio RIbu:Si de 20:80 et 40:60. Cette augmentation est moins rapide après l’apparition de la phase solide de l’ibuprofène (amorphe et cristallin), avec un taux de remplissage qui atteint environ 60 % pour RIbu:Si=50:50. On peut souligner que les taux de remplissage des pores, déduits des ratios réels calculés, sont plus importants que les valeurs obtenues dans la littérature lors de charges par imprégnation. En particulier, pour la charge par imprégnation de MSN en suspension dans l’hexane au ratio RIbu:Si=50:50, Vallet-Regi et al. 2001 trouvent une valeur du taux de remplissage d’environ 30 %. On arrive donc à obtenir un taux de charge quasiment deux fois plus important en effectuant la charge avec de l’éthanol, par co-atomisation séchage.

139 Tableau IV.8 : Quantification des différents états de l'ibuprofène par spectroscopie RMN du solide. Le taux de

remplissage des pores a été calculé en combinant les résultats d'adsorption d'azote, d'ATG et de RMN

Ratio RIbu:Si théorique 20:80 25:75 40:60 50:50

Ratio RATG=Ibu:Si calculé par ATG 14:86 23:77 30:70 35:65

Interne Liquid-like (%)

a 14 23 28 23

Amorphe (%)b

n.d. n.d. n.d. 5

Externe Cristallin (%)b 2 7

Ratio RINT=« Ibu interne »:Si 4:96 8:92 10:90 11:89

Taux de remplissage des pores 21 % 42 % 53 % 58 %

n.d. : Non détecté. a Mesuré par intégration de l’aire du pic de résonance du méthyle 3 en RMN 13C MAS. b Déterminé par déconvolution du signal de résonance du carbonyle 1 en RMN 13C CP MAS ; les deux états incluant de l’ibuprofène solide.

Enfin, la RMN 1H du solide apporte des informations complémentaires sur le système MSN / Ibuprofène (voir Figure IV.21). Comme pour les résultats discutés précédemment en 13C, les spectres RMN 1H du solide où R

Ibu:Si va de 20:80 à 40:60 sont semblables à celui de l’ibuprofène en solution. A partir de RIbu:Si=35:65, un élargissement des pics de résonance est observé et augmente lorsque la quantité d’ibuprofène est de plus en plus importante (cet élargissement est notamment visible sur le pic représentant les hydrogènes liés au carbone n°10). Ceci confirme la diminution de la mobilité de l’ibuprofène quand le ratio augmente.

Figure IV.21 : Spectres RMN 1H du solide d'ibuprofène solide et dissout dans l'éthanol, et de poudre atomisée à différents

ratios RIbu:Si (▼ : Signal OH labile, * : Ethanol ; les MSN viennent du Lot01)

De plus, le signal des hydrogènes des groupes silanols Si-OH présents en surface des MSN a un déplacement chimique qui varie de manière importante, allant de 5,2 ppm à 6,5 ppm quand RIbu:Si passe de 20:80 à 50:50. Comme nous l’avons vu dans le Chapitre III, ce signal englobe plusieurs protons OH labiles, ce qui peut justifier de telles variations de déplacement chimique. Les hypothèses qui peuvent justifier ces variations sont : de la présence ou non de solvant physisorbé dans les pores, de la présence ou non de liaisons hydrogène entre l’ibuprofène (avec la fonction COOH) et la silice (par les silanols SiOH), ou encore d’un possible effet du cycle aromatique de l’ibuprofène. Dans tous les cas, l’augmentation du δ du signal de protons OH labiles confirme une nouvelle fois l’augmentation de la quantité d’ibuprofène dans les mésopores. On peut également noter que son déplacement chimique diminue à 6,4 ppm pour RIbu:Si=80:20, ce qui peut être dû à une contamination d’eau ou d’éthanol dans la poudre, liée à l’atomisation qui laisserait des traces de solvant, et/ou durant la conservation de l’échantillon.

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IV.3.4

Etapes de la charge de MSN en ibuprofène selon le ratio R

Ibu:Si