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Matériels et méthodes

II.2 Co-atomisation séchage

II.2.1 Dispositif d’atomisation : Büchi Nano Spray Dryer B-

Le procédé d’atomisation est très utilisé dans l’industrie ; il permet de produire de très grandes quantités de poudres. Dans les travaux de recherche, les manipulations sont généralement réalisées à l’échelle du laboratoire et nécessitent des équipements adaptés. L’un des principaux fournisseurs des atomiseurs utilisés en travaux de recherche est l’entreprise Büchi.

On peut distinguer deux catégories d’atomiseurs utilisés à l’échelle du laboratoire : les Mini Spray Dryer (B-191, et B-290 actuellement) qui sont très répandus, et le Nano Spray Dryer (B-90). Le principe de fonctionnement de ces deux technologies est basé sur les quatre étapes classiques de l’atomisation : pulvérisation de la solution/suspension, mise en contact du gaz et de l’aérosol, séchage de la solution/suspension et séparation des phases gaz et solide après séchage. Les principales différences résident en trois points :

1. La technologie de pulvérisation de la formulation liquide 2. La technologie de séparation gaz/solide

3. La gamme de température et de pression. Pulvérisation de la formulation liquide

Figure II.4 : Schéma de principe du système de pulvérisation de la buse du Nano Spray Dryer B-90 de Büchi (« Nano Spray Dryer B-90 : Manuel d’utilisation » 2016)

Le Nano Spray-Dryer B-90 est adapté pour la production de fines particules (de 200 nm à 5 microns) et possède pour cela un système de pulvérisation constitué d’une fine membrane en acier inoxydable mise en vibration par un actionneur piézoélectrique à une fréquence ultrasonique (60 kHz). La

49 membrane possède un maillage de pores (qui seront appelés orifices dans ce manuscrit pour ne pas les confondre avec les pores des MSN), ayant un diamètre de l’ordre du micron (mailles de 4,0 µm, 5,5 µm ou 7,0 µm). La nébulisation de la formulation liquide est réalisée grâce aux vibrations et la membrane éjecte alors à grande vitesse des microgouttelettes (Figure II.4). La taille des gouttelettes est contrôlée par la taille des orifices de la membrane : plus cette taille est faible, plus les gouttelettes éjectées sont petites. Il faut toutefois faire attention à ce que la taille des particules ne soit pas trop importante afin qu’elles puissent passer par la buse d’atomisation sans la boucher. De plus, comme la fréquence de vibration est fixe, un plus petit maillage entraînera un plus faible débit à la traversée de la membrane.

Figure II.5 : Distribution de taille des gouttes en sortie de la buse du Nano Spray Dryer B-90 selon le diamètre des orifices de la membrane (« Nano Spray Dryer B-90 : Manuel d’utilisation » 2016)

La société Büchi fournit aux utilisateurs de cet équipement les distributions de taille de gouttes qui ont été mesurées selon le diamètre des orifices de la membrane d’atomisation (Figure II.5 et Tableau II.3). Tableau II.3 : Correspondance entre la taille des orifices de la membrane d’atomisation du Nano Spray Dryer B-90 et la

taille des gouttes expulsées dans le cas de l’eau (« Nano Spray Dryer B-90 : Manuel d’utilisation » 2016)

Diamètre des orifices de la membrane d’atomisation 4,0 μm 5,5 μm 7,0 μm Diamètre moyen d’une gouttelette d’eau (d4,3) 8 μm 15 μm 21 μm

De plus, il est à noter une autre spécificité du Nano Spray-Dryer B-90 concernant la pulvérisation du liquide. En effet, pour contrôler le débit de liquide pulvérisé, l’équipement est muni :

- D’une pompe péristaltique présentant quatre positions (numérotées de 1 à 4) liées à des vitesses de circulation du fluide dans les tuyaux et aux sens de rotations de la pompe,

- De la possibilité de sélectionner un taux d’atomisation (allant de 0 à 100%) agissant directement sur le débit de liquide traversant la buse d’atomisation.

Malheureusement, les discussions avec le fournisseur de l’équipement ne nous ont pas permis de comprendre parfaitement le fonctionnement de ces deux mécanismes menant à la variation du débit de liquide pulvérisé. Cependant, l’expérience en termes d’utilisation de l’appareil nous a permis de comprendre que le choix de la position de la pompe de 1 à 4 était défini par les propriétés de la formulation liquide à atomiser (composition, viscosité, tension de surface probablement) et qu’à chaque manipulation, les premières minutes pouvaient être nécessaires pour trouver la position de pompe adéquate pour obtenir le meilleur spray possible. En ce qui concerne le taux d’atomisation, il est lié au fait qu’il existe une recirculation de la formulation liquide. En effet, celle-ci est pompée dans

50 le bécher d’alimentation puis envoyée à la buse d’atomisation où seulement une partie du liquide est pulvérisé en traversant la membrane de pulvérisation, et le reste est renvoyé vers le bécher d’alimentation. La quantité de liquide pulvérisé en traversant la membrane par rapport à la quantité retournant dans le bécher est fixée par le taux d’atomisation et représente une très faible proportion du débit liquide amené par la pompe jusqu’à la tête d’atomisation (entre 1 et 4 % du débit volumique total, selon la position de la pompe, pour de l’eau si le taux d’atomisation est de 100 %). Cela a entre autres pour conséquence, nous le verrons dans le Chapitre V, de réchauffer la suspension au fur et à mesure du déroulement du procédé jusqu’à atteindre la température de la tête de buse qui est proche de celle du gaz de séchage qui circule autour.

Séparation gaz/liquide

Les atomiseurs classiques, comme les atomiseurs B-290 et B-191 de Büchi et comme la plupart des atomiseurs industriels, possèdent un cyclone permettant de séparer la poudre du gaz de séchage en sortie de procédé. Le principe de fonctionnement repose sur la combinaison de la centrifugation, induite par la géométrie du cyclone, et de la gravité pour les solides, tandis que le gaz est évacué en haut du cyclone à l’aide d’un aspirateur. Ainsi, les particules produites dans ce cas doivent être sujettes à l’attraction gravitationnelle afin de pouvoir être collectées. Pour cela, les orifices des buses d’atomisation mises en jeu dans les atomiseurs B-290 et B-191 (buses de type bi-fluide) sont de 0,7 mm, 1,4 mm ou 2,0 mm, ce qui permet d’obtenir en sortie des poudres de quelques centaines de µm (« Mini Spray Dryer B-290 : Manuel d’utilisation » 2019).

Le Nano Spray-Dryer B-90 possède quant à lui un système électrostatique de collection des particules pour lequel le mécanisme de collecte est indépendant de la masse des particules. La collecte des particules fines peut alors se faire avec un fort rendement allant même jusqu’à plus de 90 % pour les particules submicroniques. Le collecteur de particules se compose d'une électrode centrale en étoile (cathode) mise à la terre et d'une électrode cylindrique collectrice de particules (anode, voir le schéma en Figure II.6). La présence d'une haute tension autour du collecteur de particules crée un champ électrostatique qui accélère le dépôt des particules chargées négativement (quelles que soient leur nature et leur charge initiale) sur la paroi interne de la contre électrode de collecte cylindrique. Après arrêt du champ électrique, lors de la récupération des particules, le dépôt se décharge de son électricité statique.

Figure II.6 : Schéma de principe du système de collection électrostatique de particules du Nano Spray Dryer B-90 de Büchi (Lee et al. 2011)

51 Gammes de température et de pression

Pour fonctionner correctement, la pression interne dans la chambre d’atomisation du Nano Spray Dryer B-90 doit se situer entre 30 et 60 mbars pour un débit de gaz autour de 𝐷𝑣𝑁

2 = 100 L.min -1 ; la pression variant lorsque 𝐷𝑣 𝑁

2 change, cette gamme peut légèrement varier elle aussi. Au sein de la

chambre d’atomisation comportant des parois en verre borosilicaté, le fonctionnement sous vide permet de travailler avec une gamme de températures beaucoup plus basse que dans les atomiseurs usuels, puisque la température de vaporisation, quel que soit le solvant utilisé, est abaissée pour des pressions inférieures à la pression atmosphérique. C’est pour cette raison que la plage de température d’un Mini Spray Dryer B-290 fonctionnant à pression atmosphérique va de 0 à 220°C alors que celle d’un Nano Spray Dryer B-90 fonctionnant sous vide ne va que jusqu’à 120°C, pour des performances de séchage similaires.

Le Mini Spray Dryer B-290 est très couramment utilisé à différentes fins, notamment pour la synthèse de molécules/particules à visée médicale par une approche de type « bottom-up » (Maltesen et al. 2008, Faustini et al. 2019). Celle-ci consiste à synthétiser le matériau en question en partant de molécules ou d’atomes, et en réalisant des assemblages ou des agrégats de ceux-ci. Cet atomiseur a également été utilisé afin de réaliser de l’encapsulation au sein d’une matrice (Grenha et al. 2007). Plusieurs types de matériaux ont été utilisés, comme les polymères (Wan et al. 2013), les particules lipides solides (Wang et al. 2012, Park et al. 2013), mais également des particules solides comme de la silice, où l’approche est de type « top-down » (Shen et al. 2011, Fatnassi et al. 2012).

Les différences entre les deux types d’atomiseur ont également été analysées. Chacun d’eux possède des avantages spécifiques et selon les objectifs visés, peut mieux répondre au cahier des charges. Le B-90 présente notamment l’avantage de pouvoir obtenir des particules de plus petites tailles avec un rendement élevé de récupération de la poudre alors que le B-290 offre une plus grande facilité pour l’extrapolation à plus grande échelle (Sosnik et Seremeta 2015).

Rappelons que l’objectif dans cette thèse est d’utiliser un procédé d’atomisation pour réaliser de l’encapsulation d’actifs. Les molécules que l’on souhaite charger sont de l’ibuprofène, au sein de nanoparticules de silice mésoporeuse de type MCM-41. Au regard des dimensions des objets mis en jeu, il paraît judicieux d’utiliser le Nano Spray Dryer B-90 de Büchi.

La réalisation d’une co-atomisation dans le Nano Spray Dryer est similaire à celle d’une co- atomisation dans un dispositif classique. Les particules de silice sont dispersées au préalable dans une phase liquide constituée des molécules de principe actif dissoutes dans le solvant approprié (Figure II.7-①). Grâce à une pompe péristaltique, le mélange est pompé et amené jusqu’à la buse d’atomisation pour être pulvérisé dans la chambre d’atomisation sous formes de gouttelettes (Figure II.7-③). Le gaz de séchage est chauffé au contact d’une mousse métallique poreuse (système de chauffe permettant de réduire au maximum la durée de montée en température), ce qui permet de générer un flux de gaz chaud laminaire en direction de la section de séchage (Figure II.7-②). Au contact du nuage de gouttelettes, le gaz sécheur permet au solvant de s’évaporer (Figure II.7-④). L’encapsulation a lieu durant cette étape de séchage du solvant. La poudre sèche est collectée à l’aide d’un séparateur électrostatique, comme décrit précédemment (Figure II.7-⑤).

52 Figure II.7 : Schéma de principe du Nano Spray Dryer B-90 de Büchi avec utilisation d’une boucle d’inertage, d’un

déshumidificateur et d’un aspirateur (adapté de Arpagaus 2011)

Par ailleurs, on peut observer sur le schéma de la Figure II.7 que d’autres accessoires que l’atomiseur sont présents. Ils permettent de travailler avec un solvant organique en milieu inerte :

- Une boucle d’inertage (B-295, schéma en Figure II.8) : elle permet de travailler avec des formulations liquides contenant de forts taux de solvants organiques dans des conditions sûres. En effet, elle offre la possibilité de travailler en solvant organique pur grâce à l’utilisation d’un gaz sécheur inerte (N2 ou CO2) et d’éviter les problèmes de sécurité liés à l’existence dans l’air de domaines d’explosivité des solvants organiques utilisés (cf partie II.1.3). De plus, au sein de cette boucle d’inertage, le gaz sécheur est refroidi (à -15°C) et les solvants organiques qu’il contient sont condensés et recueillis dans un bac (accessible afin de les évacuer) pour ne pas concentrer le gaz de séchage, qui circule en boucle fermée. Un contrôle de la pression et du taux d’oxygène sur le courant gazeux de sortie de l’atomiseur est réalisé afin d’éviter tout risque potentiel d’explosion (Schmid et al. 2011, Schafroth et al. 2012).

53 Figure II.8 : Schéma de principe du Nano Spray Dryer B-90 raccordé à la boucle d’inertage B-295 (« Nano Spray Dryer B-

90 : Manuel d’utilisation » 2016)

- Un déshumidificateur (B-296, voir Figure II.9) : son rôle est de sécher le gaz sortant de la boucle d’inertage (principalement dans le cas d’un travail avec des mélanges de solvants organique/eau) dans des conditions d’humidité constantes et reproductibles, avec un point de condensation de 3 à 5 °C. Il conditionne ainsi le gaz sécheur, avant qu’il ne soit réintroduit en tête de l’atomiseur pour un nouveau cycle de séchage. Pour une régulation optimale, la température du gaz est mesurée en sortie du déshumidificateur.

Figure II.9 : Schéma de principe du Nano Spray Dryer B-90 raccordé au déshumidificateur B-296 – utilisation en circuit fermé (« Nano Spray Dryer B-90 : Manuel d’utilisation » 2016)

- Un aspirateur : il permet de générer le débit de gaz sécheur 𝐷𝑣 𝑁

2 requis en réalisant une

aspiration du gaz en sortie et permet aussi son recyclage car après sa sortie de l’atomiseur, le gaz de séchage passe par un filtre, la boucle d’inertage, le déshumidificateur, et retourne en tête de l’atomiseur.

Différents travaux de la littérature mentionnent l’utilisation du Nano Spray-Dryer B-90 pour synthétiser des particules en partant initialement d’une solution ou d’une suspension : on peut par exemple citer des travaux portants sur du chitosan, des protéines, des particules de capréomycine, des nanoparticules polymériques, des particules sphériques de sulfate de salbutamol ou encore des

54 particules « troyennes » (Lee et al. 2011, Bürki et al. 2011, Anton et al. 2012, Littringer et al. 2013, Ngan et al. 2014, Schoubben et al. 2014). L’encapsulation de molécules au sein de particules constitue un autre axe d’étude. Le Nano Spray-Dryer B-90 a ainsi permis de réaliser la charge d’un principe actif au cœur de particules de taille nanométrique, notamment des nanoparticules polymériques (Li et al. 2010, Schafroth et al. 2012, Haggag et Faheem 2015, Pérez-Masiá et al. 2015, Sosnik et Seremeta 2015).