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Influence des paramètres de la formulation de la suspension

IV.2 Influence des conditions de dispersion de la suspension

IV.2.1 Agitation de la suspension durant l’atomisation

Afin de réaliser au mieux l’homogénéisation, nous avons utilisé une sonde à ultrasons, qui est la même que celle utilisée pour les analyses DLS. Des essais préliminaires de dispersion des MSN ont permis de montrer que l’application en continu des ultrasons à une puissance de 350 W durant 5 min suffisait largement à disperser les MSN et la suspension restait homogène pendant plusieurs dizaines de minutes. Ainsi, ce traitement sous ultrasons est réalisé avant chaque atomisation.

Cependant, lors des essais réalisés dans ce projet, l’opération d’atomisation dure quelques dizaines de minutes environ selon le volume de suspension traité et les conditions d’atomisation. Aussi, cette étape préalable pourrait ne pas être suffisante pour maintenir une homogénéisation correcte de la suspension pendant toute la durée de fonctionnement de l’atomiseur. De plus, on peut souligner que la température de la suspension atteint environ 45 °C au bout de ces 5 min de dispersion. Réaliser une agitation de la suspension en utilisant constamment la sonde à ultrasons risquerait alors de trop chauffer la suspension, et d’évaporer une partie du solvant avant même qu’il soit atomisé. C’est pour cette raison que différents essais ont été réalisés afin d’observer l’impact du mode de dispersion de la suspension sur le résultat de l’atomisation :

- En maintenant la suspension agitée à l’aide d’un barreau magnétique après l’étape préalable de dispersion de la suspension sous ultrasons (5 min à 350 W). L’atomisation démarre 10 min après la fin de la dispersion sous ultrasons. Ce protocole correspond à celui qui a été utilisé pour l‘expérience de référence décrite au Chapitre III.

- En appliquant des ultrasons en mode pulsé (fonctionnement intermittent de la sonde, comportant des temps de pause) selon différents scénarii : 10 secondes de fonctionnement toutes les 20 secondes, toutes les minutes, ou toutes les 3 minutes. La suspension est maintenue constamment sous agitation magnétique.

Ces essais ont été réalisés avec un rapport massique des concentrations en ibuprofène et silice fixé à RIbu:Si = 35:65.

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IV.2.1.1 Comportement et morphologie des agglomérats

Des observations ont été réalisées au cours des essais, portant essentiellement sur le rendement de récupération de la poudre en fin d’opération. On observe que l’utilisation des ultrasons pulsés pendant l’atomisation a grandement impacté la quantité de poudre récupérée en sortie de procédé. Rappelons que la récupération de la poudre s’effectue par raclage au niveau de l’électrode de collecte une fois l’atomisation terminée. Lors de chaque essai réalisé en appliquant des US en mode pulsé durant l’atomisation, une poudre très volatile et avec des propriétés électrostatiques exacerbées a été obtenue. La volatilité de la poudre a rendu très difficile sa récupération, et donc diminué de manière importante le rendement de récupération de la poudre. En effet, on passe d’un rendement compris entre 50 et 80 % pour une dispersion par agitation magnétique durant l’atomisation, à un rendement voisin de 30 % lorsque l’on utilise les US pendant l’atomisation.

La poudre récupérée après atomisation a été analysée au MEB pour chaque condition de dispersion. Quelques clichés sont présentés sur la Figure IV.1. On observe des agglomérats, qui semblent principalement composés de MSN. Une réelle différence est observée selon si la suspension a été agitée magnétiquement ou avec des US pulsés. En effet, lorsque la dispersion est réalisée par agitation magnétique, les agglomérats obtenus sont de forme relativement homogène et de plusieurs micromètres de diamètre (on peut distinguer quelques sphères creuses parmi les agglomérats). Quand la suspension initiale est dispersée avec des ultrasons pulsés, on peut également observer quelques agglomérats de propriétés similaires. Mais on voit aussi des agglomérats plus déstructurés en termes d‘organisation et de dimension, voire même des MSN isolées. En outre, les clichés montrent la présence d’agglomérats de MSN bien plus petits en taille (inférieurs à 1 µm) et de forme assez hétérogène. Les poudres obtenues sont en revanche très similaires pour tous les essais réalisés avec les dispersions effectuées sous ultrasons, et ce quelle que soit la fréquence des US pulsés. On voit effectivement dans les 3 cas une hétérogénéité de taille et de forme des agglomérats obtenus.

Figure IV.1 : Images MEB d'agglomérats de particules atomisées sous différentes conditions de dispersion de la suspension (les MSN viennent du Lot01)

Les propriétés des poudres sont donc fortement impactées lorsque la suspension est maintenue sous agitation par ultrasons pulsés. L’utilisation d’une sonde qui envoie des ondes de chocs dans la suspension semble être la source de cette difficulté à obtenir des agglomérats homogènes et denses. L’influence de l’utilisation d’ultrasons durant la synthèse de particules de silice (non poreuse) a été analysée par Ramesh et al. 1997, et on peut s’appuyer sur les conclusions tirées par ces auteurs pour discuter de l’effet des ultrasons sur l’agglomération des MSN. Les ondes de chocs engendrées au sein de la suspension placent les particules dans un flux turbulent. L’utilisation des ultrasons induit un effet thermique associé à la cavitation, et cette énergie très importante localement peut causer des ruptures de liaisons faibles. Les particules sèches sont initialement introduites dans la suspension sous forme d’agglomérats formés via des forces électrostatiques de Van der Waals ; ces agglomérats se dispersent lors de la première utilisation des ultrasons (réalisée en continu, pendant 5 min). Cependant, il est possible que l’énergie apportée par les US puisse également modifier la structure des fonctions silanols

119 de surface Si-OH (avec la formation potentielle de radicaux par exemple) (Bang et Suslick 2010). Lorsque la suspension est maintenue sous agitation pendant toute la durée de l’atomisation avec les US pulsés, leur utilisation répétée peut provoquer une modification des silanols plus fréquente. Cette modification en surface pourrait alors générer pour les particules des difficultés à s’agglomérer, et on pourrait donc obtenir des agglomérats plus déstructurés, voire des particules isolées. Le rapport Surface / Volume des agglomérats obtenus est largement modifié par rapport à l’atomisation de référence, et cela devient plus difficile de les récupérer (propriétés électrostatiques exacerbées, agglomérats plus légers), ce qui diminue fortement le rendement de poudre récupérée.

IV.2.1.2 Remplissage du réseau poreux

En plus des observations réalisées précédemment et les différentes conclusions qui peuvent en découler, d’autres techniques ont été utilisées pour en savoir plus sur le remplissage de la porosité des MSN durant l’atomisation. Comme décrit dans le Chapitre III, il est possible d’obtenir des informations sur le remplissage des pores via la Diffusion des Rayons X aux Petits Angles (SAXS), ou encore à l’aide d’analyse de surface par adsorption d’azote.

Figure IV.2 : Isothermes d'adsorption et de désorption d'azote de MSN et de poudres atomisées sous différentes conditions de dispersion (les MSN viennent du Lot01). Encart : Zoom sur les isothermes correspondant aux 4 poudres

atomisées

La Figure IV.2, révélant les isothermes d’adsorption et de désorption d’azote des poudres atomisées sous différentes conditions de dispersion, montre une vraie différence entre ceux-ci et les isothermes des MSN initiales : chaque poudre atomisée possède des isothermes de type II (caractéristique d’un matériau microporeux ou non poreux d’après la classification IUPAC). En comparant toutes les poudres atomisées, on peut voir que les isothermes d’adsorption et de désorption suivent la même allure que celles obtenues pour l’atomisation de référence, qui a été décrite au Chapitre III. A l’aide des théories BET et BJH, les valeurs de surface spécifique, de volume poreux et de diamètre de pores sont calculées et présentées dans le Tableau IV.2. On peut voir que pour toutes les poudres atomisées, les valeurs de Sspé et Vporeux sont très largement inférieures à celles des nanoparticules initiales (MSN Lot01).

120 Tableau IV.2 : Propriétés de surface obtenues par adsorption d'azote des MSN initiales (avant atomisation), et des particules chargées atomisées avec différentes conditions de dispersion de la suspension (les MSN viennent du Lot01)

Label expérience Agitation durant atomisation Sspé (m2.g-1) Vporeux (cm3.g-1) dpores (nm)

MSN MSN Lot 01 806 0,754 3,0

Ref Agitation magnétique 23 0,045 -

US1 US Pulsés : 10’’ chaque 20’’ 28 0,056 -

US2 US Pulsés : 10’’ chaque 1’ 26 0,045 -

US3 US Pulsés : 10’’ chaque 3’ 36 0,057 -

En s’intéressant maintenant uniquement aux échantillons atomisés, d’autres observations peuvent être faites. Tout d’abord, on peut souligner le fait que les conditions de dispersion ne semblent pas modifier la localisation des molécules d’ibuprofène dans les pores ; en effet, les valeurs de surface spécifique et de volume poreux obtenues sont proches pour toutes les poudres atomisées. On peut cependant voir que la surface spécifique et le volume poreux sont sensiblement plus faibles lorsque l’échantillon est dispersé par agitation magnétique durant l’atomisation. Pour les échantillons obtenus en imposant une agitation par ultrasons et en se rapportant aux clichés MEB vus précédemment, on peut relier la légère augmentation de la surface spécifique au fait que les agglomérats soient plus petits et que l’on ait des nanoparticules isolées. Cette tendance est en cohérence avec la littérature, qui relève une surface spécifique plus faible quand les agglomérats de particules sont plus gros (Ramesh et al. 1997).

Figure IV.3 : Distributions de taille de pores (obtenue par adsorption d'azote) de MSN et de poudres atomisées sous différentes conditions de dispersion (les MSN viennent du Lot01)

Enfin, les distributions de taille de pores, obtenues à l’aide de la théorie BJH et tracées en Figure IV.3, suivent également la même allure que l’atomisation de référence ; les valeurs de surface spécifique et de volume poreux obtenues ne présentent pas de pic de volume adsorbé pouvant révéler un diamètre lié à la porosité des nanoparticules. Comme cela a été développé pour le cas de référence au Chapitre III, cela peut traduire soit un remplissage total du réseau par les molécules d’ibuprofène, soit un bouchage des pores par ces mêmes molécules. Au vu de la similarité des courbes obtenues dans différentes conditions de dispersion, on peut supposer que le remplissage du réseau par les molécules d’ibuprofène n’est que peu affecté par ce paramètre.

121 Figure IV.4 : Courbes SAXS de MSN et de poudres atomisées dans différentes conditions d’utilisation d’ultrasons pulsés

(les MSN viennent du Lot01)

Les courbes obtenues par SAXS en faisant varier les conditions de dispersion de la suspension sont présentées sur la Figure IV.4. En se focalisant sur les courbes correspondant aux poudres atomisées dans différentes conditions de dispersion, on peut voir que les courbes sont également très semblables. En effet, les pics principaux de diffraction liés à l’organisation du réseau poreux sont d’intensités quasiment identiques, ce qui implique donc que le remplissage des pores est similaire. On peut tout de même observer que la poudre dispersée par agitation magnétique (expérience de référence) possède un pic de diffraction légèrement plus intense que les échantillons dont la suspension a été dispersée par US pulsés. Pour ces derniers, une faible tendance peut être relevée : l’intensité du pic diminue quand la fréquence des ultrasons pulsés est abaissée. Le contraste (différence de densité entre l’intérieur de la porosité et le mur de silice) est donc de plus en plus faible, ce qui peut indiquer que les pores sont légèrement plus remplis en ibuprofène quand les ultrasons pulsés sont utilisés toutes les 3 minutes. Les différences ne sont cependant pas assez significatives pour conclure quant à une réelle différence de quantité d’ibuprofène chargée.

IV.2.1.3 Effet de l’agitation sur l’encapsulation d’ibuprofène dans les

MSN

Le paramètre modifié ici, à savoir le mode de dispersion de la suspension, joue essentiellement sur le type d’agglomérats obtenus après atomisation. Nous avons pu voir effectivement une différence importante sur les agglomérats entre une suspension agitée magnétiquement et une suspension agitée à l’aide d’ultrasons pulsés. Avec des US pulsés, on a pu trouver tout type de solide, allant de MSN seules à des agglomérats atteignant plusieurs µm, de forme assez variable. Au contraire, une dispersion par agitation magnétique donne une poudre atomisée de propriétés plus homogènes (agglomérats de quelques µm de forme sphérique principalement, pas de particules isolées). Il semble par ailleurs que les pores soient remplis de manière similaire, quel que soit le mode d’agitation. On peut enfin noter que la fréquence d’utilisation des US pulsés (sur la gamme de variation considérée) ne semble pas être un paramètre qui impacte les propriétés finales de la poudre.

Pour conclure, le rôle des ultrasons est primordial dans un premier temps pour désagglomérer les particules et les disperser au sein de la suspension, mais l’agitation magnétique semble être suffisante pour maintenir une homogénéité de la dispersion durant le temps d’atomisation. En outre,

122 la difficulté de réalisation de l’étape d’atomisation du fait de l’obtention d’une poudre très volatile et d’un faible rendement de récupération nous conduisent à conclure que l’utilisation des US pulsés durant l’atomisation n’est pas une méthode de dispersion appropriée. Les conditions d’agitation (agitation magnétique) utilisées lors de l’expérience de référence seront donc reproduites pour tous les essais décrits dans la suite du document.