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et atomisés Atomisation de référence

III.2 Atomisation des matériaux seuls

III.2.2 Atomisation d’une solution d’ibuprofène

Ayant identifié le comportement de la matrice d’accueil lors de son atomisation, intéressons- nous maintenant à celui du principe actif que l’on souhaite charger à l’intérieur des MSN. Les molécules d’ibuprofène sont seules, dissoutes dans le solvant, et on va donc analyser l’atomisation de cette solution.

Nous nous sommes placés une nouvelle fois dans les conditions de référence, mais n’ayant pas de MSN dans la solution, nous avons atomisé un volume bien plus grand de liquide (600 mL par rapport à environ 80 mL lorsqu’une suspension de MSN est traitée), contenant une concentration d’ibuprofène également très importante (20 g.L-1). Ces conditions découlent du fait que le rendement de récupération de la poudre d’ibuprofène est très faible (28 %), le produit ayant fortement tendance à coller sur les parois de l’atomiseur. Seule une telle quantité initiale d’ibuprofène à atomiser a permis de récupérer sur l’électrode de collecte une quantité de poudre suffisante pour les analyses. La solution a été atomisée à un débit de 5,7 mL.min-1, ce qui est plus important que pour la suspension de MSN car la pulvérisation à travers la membrane de la solution d’ibuprofène se fait plus facilement que pour une suspension (différences de viscosité, tension de surface, bouchage des orifices de la buse par la présence ou non de particules).

III.2.2.1 Morphologie et composition de la poudre atomisée

La poudre récupérée sur l’électrode de collecte est observée au MEB, et la morphologie du solide obtenu est extrêmement différente de celle des particules récupérées dans le cas de l’atomisation de MSN. En effet, ici la poudre est constituée de formes solides rugueuses, bien plus grandes que les agglomérats de MSN obtenus précédemment. On obtient des agglomérats allant

95 jusqu’à plusieurs centaines de micromètres, comme on peut le voir sur la Figure III.23. Or, lors d’essais d’atomisation de divers produits avec un nano spray dryer dans des conditions similaires, la taille des particules ou des agglomérats obtenus n’excède généralement pas 100 µm, ce qui est lié à la taille des gouttelettes atomisées (Bürki et al. 2011). Durant le séchage, il y a une étape d’évaporation qui peut altérer l’état de surface de l’agrégat d’ibuprofène ; ainsi, la rugosité peut être expliquée par la présence de molécules de solvant éthanolique, mélangées à la poudre durant sa récupération. De plus dans notre cas, les agglomérats d’ibuprofène, relativement plats, sont récupérés à la surface de l’électrode de collecte, dont ils ont épousé la forme. La poudre sèche, très légère, s’est écrasée sur l’électrode de collecte ; les agglomérats ont alors pu continuer à se former sur l’électrode de collecte, ce qui pourrait ainsi justifier la taille observée au microscope.

Figure III.23 : Cliché MEB FEI de poudre obtenue par ibuprofène seul atomisé (x100)

Le diffractogramme de cette poudre, que l’on peut retrouver sur la Figure III.24, présente des pics fins et intenses (reflétant la présence d’un matériau avec de la cristallinité), et sont aux mêmes angles que les pics du diffractogramme de l’ibuprofène cristallin. Ainsi, on peut en conclure que l’atomisation d’une solution d’ibuprofène a conduit à l’obtention d’ibuprofène à l’état cristallin avec une organisation des cristaux similaire, à savoir une symétrie P21/c (Dudognon et al. 2008). On peut par ailleurs supposer que l’échelle de taille de ces cristaux est nanométrique, vu la largeur des pics cristallins liés à l’ibuprofène, résultant d’un domaine cristallin de petite taille. A partir de l’équation de Scherrer appliquée au pic correspondant au plan cristallin [200], nous avons pu déterminer une taille de cristaux autour de 40 nm. La présence de nanocristaux d’ibuprofène est cohérente avec l’utilisation du procédé d’atomisation. En effet, l’évaporation de l’éthanol est très rapide, ce qui promeut la nucléation de cristaux par rapport à leur croissance.

96 L’ibuprofène atomisé a également été analysé thermiquement en ATG et ATD. On peut voir en Figure III.25 que la totalité de l’échantillon est éliminé à la fin de l’analyse, car la perte de masse s’élève à 100 % dès 500 °C. L’analyse thermogravimétrique permet d’identifier deux phases distinctes : l’une entre 136 et 280 °C, et l’autre entre 280 et 345 °C environ. Ces valeurs des températures correspondent aux points de changement de pente de la dérivée de la perte de masse. Parallèlement, l’évolution du flux thermique en fonction de la température permet de relever deux pics endothermiques intenses, à 80 et 259 °C, ainsi qu’un pic exothermique à 288 °C. D’après la littérature, ces trois pics pourraient coïncider respectivement au point de fusion (76 °C), au point d’ébullition (255 °C) et à la dégradation par oxydation de la molécule d’ibuprofène (vers 288 °C) (Ramukutty et Ramachandran 2012). Le faible pic exothermique présent entre 400 et 500 °C n’est pas significatif car la quantité de produit restant est quasi nulle à cet instant de l’analyse. En résumé, on peut attribuer les pertes de masse aux phénomènes suivants :

- Entre 136 et 280 °C, la perte de masse est due à l’évaporation de l’ibuprofène ; - Entre 280 et 345 °C, la molécule se dégrade par réaction d’oxydation ;

- Le pic lié à la fusion du principe actif ne provoque pas de perte de masse, puisqu’il passe à l’état liquide.

Figure III.25 : Analyses ATG (en noir) et ATD (en rouge) d'ibuprofène seul atomisé

La combinaison de ces informations et de celles obtenues avec l’analyse thermogravimétrique des MSN atomisées (voir Figure III.15) permet de proposer des plages de température remarquables, qui correspondent à chacun des matériaux :

1) Entre 25 et 150 °C : la masse perdue correspond à l’éthanol ou l’eau physisorbé en surface des nanoparticules

2) De 150 °C jusqu’à 800 °C : toute la masse perdue est reliée à l’élimination de l’ibuprofène (que ce soit par évaporation et/ou par dégradation)

3) La matière qu’il reste en fin d’analyse, à 800 °C, est de la silice dé-hydroxylée.

Toutes ces hypothèses pourront nous permettre d’identifier le pourcentage massique de chaque entité dans un échantillon mixte composé de MSN et d’ibuprofène (qui peut se trouver sous différents états physiques).

L’analyse par adsorption d’azote révèle, elle-aussi, des informations très différentes par rapport à l’atomisation de MSN. En effet, l’ibuprofène pur atomisé possède des propriétés de surface

97 très différentes, avec une surface spécifique inférieure au m2.g-1 alors qu’elle est de plusieurs centaines pour les MSN. Les agglomérats de nanocristaux d’ibuprofène obtenus après l’atomisation sont non- poreux, ce qui justifie des valeurs de surface spécifique et de volume poreux aussi faibles.

Tableau III.8 : Propriétés de surface de l’ibuprofène atomisé, obtenues par les théories BET et BJH, suite à l’analyse par adsorption d’azote

Label expérience Sspé (m2.g-1) Vporeux (cm3.g-1)

Ibuprofène atomisé 0,43 0,006

III.2.2.2 Etude de l’ibuprofène atomisé par RMN

Enfin, cette poudre a également été caractérisée en RMN du solide. Les atomes de carbones ont été sondés à l’aide de RMN 13C MAS et 13C CP MAS (Figure III.26-(a) et (b) respectivement). Les deux spectres RMN du carbone de l’ibuprofène atomisé présentent des allures semblables au spectre obtenu pour l’ibuprofène solide, prouvant une nouvelle fois la cristallinité du matériau après atomisation, comme cela a déjà été démontré en DRX. Cependant, les pics sont légèrement plus larges (notamment pour les carbones aromatiques, notés 5 à 8), et les intensités relatives de ces signaux sont un peu plus importantes, en 13C MAS notamment. Cette dernière observation, liée à un temps de relaxation plus court pour l’ibuprofène solide, implique donc que la poudre atomisée semble contenir des cristaux d’ibuprofène moins bien cristallisés et donc plus petits que l’ibuprofène solide initial.

Figure III.26 : Spectres RMN 13C et 13C CP du solide d’ibuprofène solide, dissout dans l’éthanol, et d’ibuprofène atomisé

L’atomisation d’une solution de molécules d’ibuprofène génère donc des cristaux d’ibuprofène, de même structure que l’ibuprofène solide fourni par BASF et utilisé dans ces travaux. De plus, on peut souligner que le séchage du solvant éthanolique est complet durant cette atomisation, vu l’absence de traces d’éthanol en RMN. Les propriétés de la poudre obtenue sont très différentes lorsque l’on atomise des MSN ou de l’ibuprofène seuls ; nous nous appuierons sur ces écarts pour identifier les phénomènes qui peuvent avoir lieu quand on atomise une suspension contenant les deux constituants.

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III.3 Co-atomisation d’une suspension de MSN et d’ibuprofène :