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Etude d’un système moins hydrophile : le PHEMA

Chapitre 5 - Variations sur le Système :

2. Modification des gels macroscopiques

2.2. Etude d’un système moins hydrophile : le PHEMA

Le poly(hydroxyéthylméthacrylate) (PHEMA) est utilisé dans le domaine biomédical notamment pour l’élaboration de dispositifs de correction visuelle, comme les lentilles de contact. Le PHEMA est nettement moins hydrophile que le PDMA. Pour obtenir un système parfaitement homogène, le pourcentage massique en eau maximal dans le gel est de l’ordre de 45 wt% [2]. A ce titre, le PHEMA est un système très concentré en polymère. Cette particularité a deux conséquences intéressantes au regard de notre problématique. D’une part, le gel présente un nombre important de fonctions chimiques susceptibles d’interagir par liaison hydrogène et par interaction hydrophobe avec la surface modèle. D’autre part, la présence d’eau dans le réseau est limitée donc la compétition entre les interactions polymère/polymère et polymère/eau est moins forte.

Par ailleurs, le matériau est connu pour être viscoélastique [3]. Contrairement au système de référence, la rupture de l’interface gel/brosse dans le cas du PHEMA devrait entraîner, en raison de la friction des chaînes polymères, une dissipation visqueuse contribuant à l’énergie d’adhésion du système. Ainsi Baït et al. ont mesuré par contact plan-plan, une énergie d’adhésion de l’ordre

de 25 J.m-2 dans l’air entre un copolymère P(AAm-co-HEMA) et une surface mimant la peau humaine [4].

L’équilibre entre propriétés hydrophiles et hydrophobes et la contribution viscoélastique à l’énergie d’adhésion sont autant d’atouts qui expliquent que nous ayons étudié les propriétés d’adhésion de PHEMA en conditions immergées avec notre dispositif.

Synthèse et caractérisation

La synthèse des hydrogels de PHEMA par polymérisation radicalaire à partir de monomères en solution aqueuse a été décrite pour la première fois par Wichterle et Lim en 1960 [5]. Selon le protocole décrit plus récemment par Zainuddin et al., le monomère HEMA à 60 wt% est dans un

premier temps dissous dans l’eau Milli-Q [6]. L’éthylène glycol diméthacrylate (EGDMA) à 0,5 mol%, utilisé comme réticulant, et les deux composants du système d’amorçage, le KPS (0,08 mol%) et l’acide ascorbique (0,1 mol%), sont ajoutés au mélange. Après homogénéisation par agitation à l’air, la solution est coulée dans les moules adaptés qui sont ensuite placés à l’étuve à 50°C pendant 10h.

175 Les résultats de caractérisation par compression du PHEMA_P60-R0,5_prep révèlent un module

de cisaillement de l’ordre de 117 kPa, ce qui est comparable aux propriétés élastiques du PDMA_P20-R3_prep. Par ailleurs, la courbe de suivi cinétique de gonflement, présentée en Figure

5.6, met en évidence une particularité intéressante du gel, son faible gonflement.

Figure 5.6 Gonflement massique de PHEMA_P60-R0,5 en fonction du temps d’immersion en solution aqueuse acide (𝒑𝑯 = 2) pour les paramètres de mesure de référence.

Le gonflement massique du PHEMA est de 1,65 à l’état de préparation et augmente à 1,82 à l’équilibre de gonflement. Cette dilution, par absorption d’une faible quantité d’eau, aboutit à une concentration massique en polymère dans le réseau à l’équilibre 𝐶𝑒𝑞 = 54 wt%. A partir de son module de cisaillement et de son gonflement initial, le pourcentage de réticulation est calculé 𝑅𝑒𝑓𝑓 = 0,89 mol%. Cette valeur, presque deux fois plus élevée que la valeur maximale théorique, peut s’expliquer par la superposition au réseau covalent d’une structure secondaire non covalente (contribution non négligeable des enchevêtrements à cette concentration, liaisons hydrogène entre les groupements pendants hydroxyles et les groupements carbonyles) [2].

Comparée à la concentration maximale obtenue pour les gels de PDMA étudiés, de l’ordre de 18 wt% pour les plus concentrés, le PHEMA reste malgré la dilution, un hydrogel particulièrement concentré à l’état d’équilibre.

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Résultats du suivi cinétique

La mesure de suivi d’adhésion du PHEMA_P60-R0,5, au contact d’une brosse de PAAc, en solution acide (𝑝𝐻 = 2) dans les conditions de mesures de référence, montre comme pour le système [PDMA/Brosse de PAAc/Milieu 𝑝𝐻 = 2] une décroissance de l’énergie d’adhésion au cours du temps d’immersion (Figure 5.7). Toutefois contrairement aux hydrogels de PDMA, les niveaux d’adhésion mesurés sont particulièrement élevés hors équilibre mais aussi à l’équilibre de gonflement. Après 3 minutes d’immersion en solution, 𝑊𝑎𝑑ℎ = 1,82 J.m-2 contre 270 mJ.m-2 à l’équilibre de gonflement, après une semaine d’immersion dans le milieu d’intérêt. La valeur d’adhésion relative au gonflement proche de celui de l’état de préparation est assez exceptionnelle pour une mesure faite dans l’eau.

Figure 5.7 Suivi cinétique d’adhésion de PHEMA_P60-R0,5 au contact d’une brosse de PAAc en solution aqueuse acide dans les conditions de mesure de référence.

La concentration en polymère dans le gel à l’état de préparation est responsable de ces valeurs élevées d’énergies. En raison de la concentration en polymère jusqu’à 6 fois plus grande, la probabilité de former des liaisons hydrogène multiples entre le gel de PHEMA et la brosse est nettement supérieure au cas des gels de PDMA. D’après la description en fonction de la vitesse de gonflement caractéristique, développée pour le PDMA dans le chapitre 4, l’énergie d’adhésion pour un gel de concentration 60 wt% en DMA au cours du 1e régime linéaire (Λ̇ > 𝑉Λ𝑐) est 𝑊𝑎𝑑ℎ𝑟é𝑔𝑖𝑚𝑒_1 = 1,73 J.m-2. Cette valeur est très proche de celle mesurée pour le gel de PHEMA_P60-R0,5, l’écart est de 90 mJ.m-2. A l’équilibre de gonflement (absence de flux), l’hydratation des chaînes de polymères par une couche d’eau liée autour des fonctions

177 hydrophiles du gel et de la brosse, entrainent une diminution importante de la probabilité de former des interactions favorables entre les deux surfaces. L’équation de 𝑊𝑎𝑑ℎ en fonction de 𝐶 relative au 2e régime linéaire pour les gels de PDMA (Λ̇ ≈ 0), prévoit théoriquement une énergie de 150 mJ.m-2 pour un gel à la concentration 55 wt%. Expérimentalement, la valeur mesurée pour le PHEMA_P60-R0,5_eq est supérieure à la valeur prévue d’environ 120 mJ.m-2.

Indépendamment de l’état de gonflement, les valeurs d’adhésion expérimentales de PHEMA et celle prévues par la description de l’évolution de 𝑊𝑎𝑑ℎ en fonction du temps pour le système de référence sont en bonne adéquation. Cela peut s’expliquer notamment par la similitude des interactions mises en jeu entre dans les deux systèmes gel/brosse étudiés. Toutefois, la légère différence entre expérience et théorie constatée pour les deux états de gonflement du PHEMA (~100 mJ.m-2), peut être attribuée aux interactions hydrophobes (insensibles à l’hydratation) entre le PHEMA et la brosse de PAAc, probablement plus nombreuses qu’au contact avec un gel de PDMA et à la dissipation viscoélastique lors de la rupture des liaisons.