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Conséquences sur la topographie de la surface du gel

Chapitre 1 – Hydrogel et Adhésion : Au Fil de l’Eau

1. Physico-chimie du système

1.3. Caractérisation de la cinétique de gonflement des hydrogels

1.3.3. Conséquences sur la topographie de la surface du gel

Figure 2.15 Modules de compression expérimentaux des gels de P(MAETAC-co-AAm) à l’état de préparation et à l’état d’équilibre. Comparaison par rapport au 𝝁𝒆𝒒𝒕𝒉.

Par comparaison, les comportements des gels I50 et I75 sont très différents car malgré le fort gonflement de ces réseaux (Qeq/Q0 = 4-5), le module de compression varie peu, voir même augmente de manière très importante par rapport aux conditions de préparation. Ce comportement anormal, déjà observé dans le cas des gels polyélectrolytes [20,23] est attribué à l’élasticité non gaussienne des chaînes chargées lorsque celles-ci prennent des conformations très étirées.

1.3.3. Conséquences sur la topographie de la surface du gel

L’état de surface d’un matériau est une donnée importante lorsqu’il s’agit d’étudier ses propriétés d’adhésion. Caractériser une éventuelle rugosité des hydrogels à l’état de préparation et au gonflement à l’équilibre s’avère déterminant pour l’interprétation des résultats des tests de Probe-Tack. Pour analyser leur topographie, des mesures de Microscopie à Force Atomique (AFM)

Formulation 𝝁𝒆𝒒 𝒆𝒙𝒑 (kPa) 𝝁𝒆𝒒𝒕𝒉 (kPa) P20-I25-R2 64 77 P20-I50-R2 85 46 P20-I75-R2 86 29

79 dans l’eau à 25°C sur des gels de PDMA_P20-R3 de 1 mm d’épaisseur dans deux états de gonflement ont été réalisées à l’aide d’un Microscope Dimension Icon Scanning Probe (SPM) équipé d’un controller Nanoscope V (Brucker).

Le principe de la mesure en AFM s’appuie sur l’existence d’une interaction, pouvant être attractive ou répulsive, entre une pointe nanométrique pyramidale, de hauteur 6 nm et de rayon de pointe 20 nm, en nitrure de silicium, et la surface de l’échantillon sondé. Le déplacement de la sonde, positionnée à l’extrémité d’un levier ou cantilever flexible, est contrôlé dans les trois directions de l’espace (X, Y, Z) par un tube piézoélectrique. La surface de l’échantillon est balayée par la pointe et l’analyse de la déflection verticale et latérale du levier par rapport à la surface est mesurée par le déplacement de la réflexion d’un faisceau laser sur une photodiode (Figure 2.l6-a). Une calibration préalable de l’ensemble permet de convertir le signal en tension en une information de force et de déviation du levier.

Par la suite nous utiliserons deux modes différents, le mode contact et le mode PeakForce QNM (Quantitative NanoMechanics).

Figure 2.16 Principe de la mesure AFM par détection laser de la déflection du cantilever au contact avec l’échantillon (a). Conditions de mesures AFM sur un hydrogel gonflé à l’équilibre dans une solution aqueuse à pH = 2 (b) et à l’état de préparation sur un gel dont les bords sont entourés d’huile paraffine et le contact effectué à l’interface formée par une goutte d’eau (c).

Pour la mesure dans les conditions d’équilibre, l’hydrogel préalablement gonflé et supporté par une lame de verre, est immergé en solution aqueuse à pH = 2 dans une boite de Pétri et maintenu à l’aide d’une plaque téflonnée percée en son centre qui prévient le glissement du gel au cours de la mesure (Figure 2.16-b). A l’état de préparation, seuls les bords du gel sont entourés d’huile

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paraffine alors que la surface supérieure est laissée à l’air. Le contact est établi grâce au dépôt d’une goute d’eau Milli-Q à l’interface entre la surface de l’échantillon et la pointe (Figure 2.l6-c). La difficulté majeure des mesures AFM sur les hydrogels macroscopiques est liée à leur grande déformabilité. Par principe, la mesure de topographie par AFM repose sur le fait que la déflection du cantilever est constante au cours du balayage et donc que sa déformation est également constante. Il est admis implicitement que le cantilever est déformé et que l’échantillon est rigide. En d’autres termes, on considère que l’observation de la surface ne modifie pas de façon majeure la surface elle-même. Dans le cas des hydrogels, de très faible module élastique, l’échantillon n’est pas nécessairement plus rigide que le cantilever ; on peut alors craindre que la topographie mesurée soit sous-estimée. Le signal de hauteur obtenu pourrait également dépendre d’autres paramètres que la topographie, comme des variations locales de propriétés élastiques du réseau tridimensionnel. Aussi dans la littérature les mesures d’AFM sont en général effectuées sur des films minces d’hydrogels, plus facilement assimilables à des surfaces dures.

Afin de s’assurer que les images obtenues sur les hydrogels macroscopiques sont effectivement des mesures topographiques, des expériences préliminaires d’approche-retrait dans l’eau à la fréquence de 1 kHz ont été effectuées en faisant varier la raideur de la pointe k entre 0,01 N/m et 0,5 N/m. Les données relatives à PDMA _P20-R3_eq représentant la déflection en fonction du

déplacement du cantilever sont comparées au cas idéal d’un contact entre une pointe et un wafer de silicium (Figure 2.17).

Figure 2.17 Influence de la raideur de la pointe AFM sur la réponse en déflection du cantilever au contact en solution aqueuse avec un hydrogel de PDMA _P20-R3 gonflé à l’équilibre. Comparaison par rapport au cas de référence correspondant au contact de la pointe sur un wafer de silicium. -100 0 100 200 300 400 500 0 50 100 150 distance (nm) def lec tion (nm ) silicium k = 0,01 N/m k = 0,03 N/m k = 0,1 N/m k = 0,5 N/m

81 Dans tous les cas, le comportement obtenu n’est pas linéaire. La déflection est inférieure au déplacement du cantilever dans la direction Z, traduisant un enfoncement de la pointe dans le gel dû à la déformabilité du réseau.

La différence entre le déplacement vertical imposé au cantilever et sa déflection mesurée est appelée la profondeur d’indentation. Elle augmente avec la raideur de la pointe. Par exemple, dans le cas d’une expérience d’approche-retrait effectuée avec un cantilever de raideur 0,5 N/m, on constate que pour un déplacement de 200 nm du cantilever, la profondeur d’indentation est de 190 nm. La rugosité extraite d’une image acquise en mode contact avec un cantilever de raideur k=0,5 N/m risque d’être sous-estimée, le gel étant « écrasé » lors du l’expérience. Aux faibles valeurs de k, la déviation par rapport au cas idéal est relativement faible. Nous supposerons donc que la réponse est quasi linéaire et que la mesure de la topographie déterminée dans ces conditions est juste.

Ce phénomène est amplifié par l’augmentation de la raideur de la pointe : elle écrase le gel lors du contact et dans l’hypothèse de l’existence d’une rugosité en surface, dans le meilleur des cas, cette dernière est sous-estimée. Aux faibles valeurs de k, la déviation par rapport au cas idéal est relativement faible. Nous supposerons donc que la réponse est quasi linéaire et que la topographie déterminée dans ces conditions traduit la réalité.

Les courbes approche-retrait correspondant à une raideur de pointe de 0,01 N/m, effectuées pour des fréquences d’oscillations comprises entre 0,05 et 80 Hz montrent une superposition de la réponse au cours des deux phases ce qui indique un comportement purement élastique de l’hydrogel (Figure 2.18). Le pic obtenu lors de la phase de retrait indique une adhésion entre la pointe AFM et la surface de l’hydrogel.

Figure 2.18 Courbe approche-retrait sur PDMA _P20-R3_eq en solution aqueuse pour une pointe de raideur 0,01 N/m à la fréquence d’oscillation 0,1 Hz.

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Les premières images ont été obtenues en mode contact sur le PDMA_P20-R3_eq pour une

raideur de pointe de 0,01 N/m. La déflection moyenne du cantilever est de 0,5 V, soit 57 nm. La fréquence de balayage de la pointe suivant l’axe X est de 1,5 Hz. Les images, les distributions Gaussiennes ainsi que les profils de hauteur obtenus sont présentés en Figure 2.19 pour une dimension selon l’axe X de 10 et 20 µm.

Figure 2.19 Images AFM en mode contact sur PDMA P20-R3_eq en solution aqueuse obtenu avec une pointe de raideur k = 0,01 N/m à deux endroits différents de la surface.

Les mesures effectuées à deux endroits différents de la surface et pour deux échelles de balayage (selon X) différents montrent des résultats identiques. A l’équilibre de gonflement, la rugosité moyenne de la surface de l’hydrogel est de l’ordre de 4 nm. Ce résultat est en accord avec les mesures d’AFM réalisées sur des films minces d’hydrogels de PNIPAAm dans l’eau pour des épaisseurs de quelques centaines de nanomètres [3].

D’autre part, des motifs de morphologie dite « trou » sont nettement visibles en surface de l’hydrogel de PDMA. Ces motifs, dont la distribution est aléatoire, ont un diamètre moyen de 350 nm et une hauteur comprise entre 12 et 25 nm. Ces structures ont déjà été observées dans le cas de films minces de polymères [24]. L’existence de ces trous à l’état gonflé est principalement attribuée à la dissolution partielle de chaînes de polymères non réticulées présentes en surface du gel [24-26]. La réorganisation du réseau polymère, par ségrégation des motifs hydrophiles, conduisant à la formation de canaux, facilitant les transferts d’eau lors du gonflement, est une autre explication également avancée pour justifier leur présence [24-27].

83 Des mesures ont également été effectuées en mode QNM, qui permet une détermination plus résolue de la topographie qu’en mode contact. Toutefois ce mode nécessite l’utilisation d’une pointe de raideur plus importante k = 0,5 N/m. La fréquence d’oscillation du cantilever est de 1 kHz, la fréquence de balayage suivant X est de 1 Hz. La déflection moyenne du cantilever est de 0,1 V. Nous avons comparé la rugosité d’un hydrogel PDMA_P20-R3 à l’état de préparation et à l’état d’équilibre de gonflement. Les résultats sont présentés en Figure 2.20.

Figure 2.20 Courbe approche-retrait sur PDMA _P20-R3 en solution aqueuse pour une pointe de raideur 0,01 N/m à la fréquence d’oscillation 0,1 Hz. Etat de préparation en rouge et équilibre de gonflement en bleu.

A l’équilibre de gonflement, les mesures en QNM sur le gel confirment les résultats observés en mode contact. La rugosité moyenne de la surface est de l’ordre de 4 nm et quelques trous apparaissent en surface. A l’état de préparation, la distribution Gaussienne indique une rugosité moyenne de 3,5 nm, ce qui est sensiblement identique à l’état de gonflement. En revanche aucun trou n’a été visualisé en surface.