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Chapitre 1 – Hydrogel et Adhésion : Au Fil de l’Eau

1. Adhésion et gonflement

Pour introduire l’étude de l’évolution des propriétés d’adhésion de l’hydrogel PDMA en milieu aqueux, nous nous sommes inspirés des résultats de Aka-Any-Grah et al. en mucoadhésion sur les

hydrogels pluroniques [5]. Indépendamment de la formulation, leurs travaux ont montré le lien entre la diminution de la mucoadhésion des gels et la dilution de la concentration en polymère dans le réseau par un faible volume de fluides vaginaux. Dans cette première partie, nous avons souhaité vérifier ces observations dans le cas de notre système modèle de référence gel/brosse.

1.1. Principe de test d’adhésion

Les variations des propriétés d’adhésion de l’hydrogel PDMA_P10-R2_eq par dilution du réseau

sont étudiées au cours de son gonflement dans le milieu aqueux de référence [𝑝𝐻 = 2; 𝑇 = 21°C]. La surface modèle utilisée pour effectuer le test de contact plan-plan est une brosse de PAAc gonflée, d’environ 12 nm d’épaisseur. Les paramètres de traction utilisés dans cette seconde partie sont ceux de référence, définis dans le chapitre 2 et rappelés ci-dessous :

Vitesse d’enfoncement ve 10 µm.s-1

Force de compression F - 0,3 N

Temps de contact tc 2 min

Vitesse de décollement vd 100 µm.s-1

Tableau 3.1 Paramètres expérimentaux de référence pour les tests de Probe-Tack immergés.

Dans un premier temps, l’hydrogel et la brosse sont alignés dans l’air, en tenant compte du critère défini dans le chapitre précédent. Le système est ensuite immergé dans le milieu d’intérêt et une première mesure de l’énergie d’adhésion (état initial hors équilibre (1)) entre les deux surfaces est effectuée à 𝑡𝑖𝑚𝑚1 = 2 min. Cette mesure correspond à la dilution minimale du réseau immergé. Après décollement des deux surfaces, le système gel/brosse est maintenu dans les mêmes conditions sans contact pendant 18 h et 30 min, au cours desquelles l’hydrogel atteint son équilibre de gonflement (état 2). La dilution en polymère au sein du réseau tridimensionnel est alors maximale. Une seconde mesure d’adhésion est effectuée à 𝑡𝑖𝑚𝑚2 = 18 h 30.

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1.2. Résultats et Discussion

La comparaison des résultats des tests d’adhésion entre le PDMA_P10-R2 et la brosse de PAAc en solution aqueuse acide aux temps d’immersion 𝑡𝑖𝑚𝑚1 et 𝑡𝑖𝑚𝑚2 est présentée en Figure 3.1.

Figure 3.1 Comparaison des courbes force-temps obtenues en contact plan-plan immergé en solution acide, entre un gel de PDMA_P10-R2 et une brosse de PAAc à l’état initial hors équilibre de gonflement et à l’état d’équilibre (gauche). Détail de la courbe à la mise en contact des deux surfaces (droite).

Le phénomène de relaxation du gel au contact est légèrement supérieur lorsque le PDMA se trouve à l’équilibre de gonflement. Cette différence peut s’expliquer par une augmentation plus importante de l’épaisseur du gel au cours des premières minutes d’immersion. En gonflant, le gel, qui est alors proche de son état de préparation, impose une force supplémentaire sur le poinçon, entrainant l’augmentation de la force globale appliquée au système, d’où une relaxation atténuée. D’autre part, on note la présence d’un décalage des courbes d’enfoncement force-temps (Figure 3.1-droite). L’établissement du contact total entre la brosse et l’hydrogel gonflé à l’équilibre, à la force de compression de - 0,3 N nécessite un intervalle de temps supplémentaire d’environ 0,8 s par rapport au contact fait à 𝑡𝑖𝑚𝑚1 . Les raisons de l’existence de ce décalage seront étudiées en détails dans le paragraphe suivant.

La Figure 3.2 présente les courbes force-déplacement aux deux temps d’immersion étudiés. L’origine du déplacement correspond au contact du gel à 𝑡𝑖𝑚𝑚1 et de la brosse à force de compression nulle. Il n’y a pas de remise à zéro du déplacement entre les deux mesures d’adhésion. Ainsi la translation de la courbe relative à 𝑡𝑖𝑚𝑚2 = 18 h 30, par rapport à l’origine de déplacement, est caractéristique du gonflement du gel. Les résultats indiquent un gain en

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épaisseur au cours de l’immersion de l’ordre de 215 µm. D’après les données relatives au gonflement du PDMA_P10-R2, nous avons montré précédemment que le gel à l’équilibre de gonflement voit chacune de ces dimensions caractéristiques augmenter d’un facteur 1,113. L’épaisseur du gel, initialement de 1,8 mm, augmente théoriquement de 200 µm, valeur en bonne adéquation avec la mesure expérimentale : la variation d’épaisseur du gel mesurée lors du suivi cinétique d’adhésion entre l’état hors équilibre initial et l’état d’équilibre est identique à celle obtenue par suivi cinétique de gonflement non contraint du PDMA_P10-R2.

Figure 3.2 Courbes force-déplacement obtenues en contact plan-plan immergé en solution acide, entre un gel de PDMA_P10-R2 et une brosse de PAAc à l’état initial hors équilibre (▬) et à l’état d’équilibre de gonflement (▬) ; l’écart de déplacement de 215 µm correspond à

l’augmentation d’épaisseur du gel due au gonflement (droite). Courbes force-déplacement translatées correspondant à la phase de décollement (gauche).

Après 2 minutes d’immersion, le maximum de force d’adhésion mesurée entre le gel et la brosse de PAAc est de 0,38 N, contre 0,15 N à 𝑡𝑖𝑚𝑚2 . Les énergies d’adhésion associées sont estimées à partir des courbes force-déplacement au décollement (Figure 3.2-droite). De 102 mJ.m-2 à 𝑡𝑖𝑚𝑚1 , l’adhésion passe à 37 mJ.m-2 lorsque le gel est à l’équilibre de gonflement, soit une perte relative de 64 % de l’adhésion du PDMA_P10-R2_eq par rapport à l’état initial. Parallèlement,

l’échantillon voit sa concentration massique en polymère et sa densité surfacique en chaînes élastiquement actives diminuer de 26 %, avec une valeur à l’équilibre de gonflement de 7,3 wt%. Le pKA du PAAc étant de 5,5, à pH = 2 la totalité des fonctions carboxyliques sont protonées. La formation de liaisons hydrogène multiples entre le PDMA et la brosse de PAAc est à l’origine de l’adhésion mesurée.

111 Un calcul assez simple nous permet de convertir l’énergie d’adhésion mesurée en mJ.m-2, en termes d’énergie thermique par chaîne, en utilisant la valeur de la densité de greffage de la brosse 𝜎, selon l’équation suivante :

𝑊𝑎𝑑ℎ(𝑘𝑇. 𝑐ℎ𝑎î𝑛𝑒−1) = 4,11 × 𝜎 (𝑐ℎ𝑎î𝑛𝑒. 𝑛𝑚𝑊𝑎𝑑ℎ(𝑚𝐽. 𝑚−1) −2) Eq 3.1

Ainsi à 𝑡𝑖𝑚𝑚1 , l’énergie d’adhésion gel/brosse est estimée à 165 𝑘𝑇 par chaîne, contre seulement 60 𝑘𝑇 par chaînes après l’immersion du gel de PDMA pendant 18 h 30 dans le milieu aqueux. En considérant l’énergie thermique d’une liaison hydrogène de l’ordre de 10 𝑘𝑇 [6], cela signifie que si à 𝑡𝑖𝑚𝑚1 chaque chaîne forme en moyenne 17 liaisons hydrogène, à 𝑡𝑖𝑚𝑚2 , elle n’en forme plus que 6.

Après 18 h 30 d’immersion, la dilution due au gonflement du gel entraîne une décroissance du nombre de groupements accepteurs de liaisons hydrogène dans l’interphase volumique créée entre les deux surfaces. Par conséquent, un nombre plus faible de ponts hydrogène est formé avec la brosse et lors du décollement, l’énergie à fournir pour casser les liaisons physiques et la contribution de la dissipation élastique due à leur rupture s’en trouvent réduites. Les performances adhésives macroscopiques du système étudié sont plus faibles. Toutefois, la perte d’adhésion entre les deux états de gonflement et la diminution importante du nombre de liaisons hydrogène formées est proportionnellement beaucoup plus importante que la perte de concentration en polymère.

En conclusion, cette première série de mesures a confirmé les résultats de Aka-Any-Grah et al.

sur les hydrogels pluroniques : la dilution des unités monomères susceptibles d’interagir avec la brosse, liée au gonflement du réseau polymère entraîne la diminution des propriétés d’adhésion du PDMA_P10-R2 entre l’état initial hors équilibre et l’état d’équilibre. La diminution de concentration qui accompagne le gonflement du gel n’explique qu’en partie le résultat, la perte relative d’adhésion étant plus de 2 fois supérieure à celle de la concentration.

Il est alors pertinent de s’interroger sur la dynamique de cette perte d’adhésion entre ces deux états limites et son évolution en fonction du temps d’immersion.

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