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PARTIE II CARACTERISATION DU CAPITAL-REGENERATION : ELEMENTS

Chapitre 1. Capital-régénération : le choix d’une recherche sur les ETI

1. Les ETI : un potentiel de croissance non actualisé

1.2 ETI : une catégorie insaisissable ... 92 1.3 La définition statistique de l’ETI : une exception française ... 94 1.4 Conclusion : l’innovation au cœur du déficit de croissances des ETI ? ... 94 2. ETI : des enjeux particuliers de régénération ... 95 2.1 Des entreprises matures contraintes à une régénération régulière ... 96 2.2 Un potentiel de croissance sous-exploité ... 97

3. Synthèse : les ETI, un objet pertinent ... 98

CHAPITRE 2. CAPITAL REGENERATION : L’INTERET D’UN PARTENARIAT DE RECHERCHE AVEC BPIFRANCE ... 99

1. Rôle et expertise de Bpifrance pour l’investissement dans les ETI ... 99 2. Difficultés des recherches empiriques sur le capital-investissement qui renforcent l’intérêt d’un partenariat avec Bpifrance ... 101

2.1 Difficultés des recherches empiriques sur le capital-investissement ... 101 2.2 Modalités de la recherche chez BPI France ... 102

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Chapitre 1. Capital-régénération : le choix d’une recherche sur

les ETI

Malgré leur poids aujourd’hui incontesté dans l’économie française, leur statut historique d’entre- deux éclaté entre « grosses PME » et grandes entreprises était accusé de brider leur croissance. Selon Yvon Gattaz l’absence de catégorie propre à l’ETI les maintenait cachées (Gattaz 2010, Simon, Guinchard et al. 2012), empêchant leur valorisation et leur prise en compte dans les

politiques publiques. Sa pression « pression amicale 16 » associée à un engagement plus large d’une

partie des dirigeants d’ETI pour la reconnaissance de leurs spécificités a abouti, en 2008, à la création d’une catégorie statistique à part entière. La conception cette observable a permis de mieux cerner leurs enjeux de croissance aussi bien grâce à des études statistiques émanant d’instances publiques ou de cabinets de conseil qu’à des projets de recherche académiques.

Objet de recherche à part entière (Chabaud and Messeghem 2014), elles se distinguent notamment des PME et des grandes entreprises par leur dynamiques de croissance. Des travaux de recherche ont commencé à spécifier les principaux ressorts de la croissance des ETI et les enjeux auxquels elles font face. En effet, malgré un apport socio-économique conséquent, en comparaison de leurs voisines européennes, le potentiel des ETI françaises serait sous-exploité. Le frein représenté par leur difficulté d’accès à des capitaux propres supplémentaires pour financer leur croissance a particulièrement attiré l’attention des pouvoirs publics.

Cette partie vise à expliciter la pertinence de l’ETI en tant qu’objet de recherche pour la caractérisation d’un « capital régénération » en montrant que celles-ci combinent logiques de croissance générative et besoins de financement.

1. Les ETI : un potentiel de croissance non actualisé

Une nouvelle catégorie statistique entre PME et grande entreprise

Les accords de Matignon, signés en 1939, ont suscités une scission au sein des entreprises de métallurgie parisiennes. Les petites entreprises accusaient les « grands patrons » à la tête de l’organisation patronale de signer sans les consulter. Le groupement des Petites et Moyennes Industries parisiennes (PMI) se constitue alors en tant que section à l’intérieur du Confédération générale de la production française (ancêtre du CNPF devenu le MEDEF). Le sigle PME remplace l’appellation de PMI à partir de 1944 lorsque la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME, rebaptisée en CPME depuis 2017) est créée par Léon Gingembre. S’ancre alors cette séparation entre petites et grandes entreprises, deux groupes qui se distinguent en particulier par leur la taille, leur organisation et leur gestion.

Les moyennes entreprises (ME) n’ont donc pas de reconnaissance spécifique. Bien qu’a priori contenue dans le sigle PME, cette catégorie est dispersée entre petites entreprises (PE) et grande entreprise (GE) alors même qu’elle se distinguerait de l’une comme de l’autre. Elle est perçue

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90 comme ayant une structure de capital en continuité avec celle de la petite entreprise et une gestion proche de celle des grandes. L’argument de taille critique est souvent avancé. La ME allie la force des GE que constituent les possibles économies d’échelles et un moindre coût de coordination. Par analogie avec le système vivant, Yvon Gattaz, fervent défenseur de la reconnaissance de la spécificité des ME, la définie comme « l’entreprise adulte » qui résulte de la croissance biologique de la PE ayant réussie. Il ajoute « en réalité, la GE n’est que très rarement l’aboutissement normal

de la croissance biologique, mais plutôt le résultat de montages financiers ou de concentrations industrielles » (Gattaz 2002). Cette inexistence légale l’exclue de nombreux dispositifs d’aide.

Ainsi, plusieurs mesures d’aide vont être limitées aux petites entreprises de la catégorie PME, comme les mesures fiscales de 1996 qui ne s’adressent qu’aux PME ayant un chiffre d’affaire inférieur à 50 millions d’euros ou la loi Fabius de 2001 sur l’épargne salariale qui accorde des avantages fiscaux aux PME de moins de 100 salariés. A contrario, ces ME subissent l’augmentation de l’impôt sur les sociétés qui vise les sociétés de plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaire. Ainsi, dirigeants et personnalités publiques plaident, à partir des années 70, pour une reconnaissance des moyennes entreprises dont la non-existence politique et statistique fait courir le risque d’affecter leur pérennité par des mesures, notamment fiscales, non adaptées. Plusieurs catégorisations seront proposées. La lettre 1982 de Yvon Gattaz à Pierre Mauroy indique 50 à 2000 salariés. Ce seuil fait l’objet de débats, tiraillé entre des problèmes de reconnaissabilité due au faible nombre d’entreprises de plus de 2000 salariés qui inquiète l’INSEE et le modèle allemand de la moyenne entreprise patrimoniale qui peut compter plus de 5 000 salariés. Ce seuil, flottant, remonte finalement entre 100 et 3000, vingt ans plus tard dans le livre plaidoyer de Yvon Gattaz intitulé « La

moyenne entreprise. Championne de la croissance durable » (Gattaz 2002).

C’est le soutien à ce modèle spécifique de « croissance durable » qui justifie une demande de reconnaissance et qui a progressivement attiré l’attention des pouvoirs public. En effet, les ME seraient un pilier de l’économie, fortement créatrices d’emploi, contribuant massivement au PIB national. A l’inverse des grandes entreprises, elles contribueraient aussi à l’intérêt général par un effet d’entrainement sur le reste de l’économie résultant de : leur enracinement régional, leur rentabilité plus industrielle que financière, les moindres délocalisations, de meilleures relations avec leurs fournisseurs, une orientation long-terme, etc.

Par ailleurs, les moyennes entreprises seraient aussi des championnes de l’innovation avec le plus gros budget de R&D cumulé par rapport aux PE et aux GE. En revanche, elles se verraient contraintes de revendre plus de la moitié de ces innovations créatrices (en opposition à des adaptations), faute de moyens financiers de développement industriel ou commercial (Gattaz 2002). La première mesure en faveur des ME cible d’ailleurs ce problème en accordant une prime à l’innovation pour les entreprises comptant un effectif de moins de 2000 salariés. Malgré tout, la non reconnaissance des ME en tant que catégorie à part entière empêcherait de mieux connaitre les freins à leur dynamique d’innovation, peu étudiées en comparaison de celle des grandes entreprises. Contrairement à l’Allemagne où le Mittelstand, connu comme le « miracle allemand », regroupe la principale force économique du pays, les ME françaises malgré leurs nombreux atouts ne seraient donc pas aussi performantes. Elles souffriraient de contraintes de développement spécifiques (innovation, fiscalité, manque d’accès aux financement) à l’origine de leur faible croissance (Esambert 1997) et de leur nombre restreint.

C’est pourquoi tout à tour, ont été créés le mouvement ETHIC (entreprises de taille humaine industrielles et commerciales en 1976, transformé en entreprise de taille humaine indépendantes et

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de croissance) puis, en 1995, l’ASMEP (association des moyennes entreprises patrimoniales) Aujourd’hui connu en tant que METI, une des revendications au cœur de ce mouvement porte sur la prohibitive fiscalité des transmissions qui transformerait les ETI en cible pour les grands groupes. Après une quarantaine d’années de débats et afin d’acquérir une précision d’analyse inédite sur ces organisations considérées comme cruciales pour la croissance, en 2008, la loi de modernisation de

l’économie (LME) a introduit une nouvelle catégorie statistique d’entreprises17. Le décret

d'application (n°2008-1354) de l'article 51 de la LME indique : « La catégorie des entreprises de

taille intermédiaire (ETI) est constituée des entreprises qui n'appartiennent pas à la catégorie des petites et moyennes entreprises, et qui : d'une part occupent moins de 5 000 personnes ; d'autre part ont un chiffre d'affaires annuel n'excédant pas 1 500 millions d'euros ou un total de bilan n'excédant pas 2 000 millions d'euros. »

Figure 6: Rapport (DGCIS 2010) Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) p10 issu du Cnis, Rapport du groupe de travail sur la définition des catégories d’entreprises, novembre 2008.

Au moment d’entériner le concept d’ETI, celles-ci sont perçues comme un pilier de l’économie malgré un déficit en nombre et un potentiel de croissance sous-exploité par rapport à leurs voisines allemandes. La création de ce nouvel observable a accru leur visibilité dans l’espace public, rendu possible des recherches spécifiques sur leurs caractéristiques incluant leurs dynamiques de

17 Le règlement Européen de 1993 fondateur des unités statistiques, une entreprise est « la plus petite combinaison d’unités constituant une unité organisationnelle de production de biens et services, et jouissant d’une certaine autonomie de décision ». Chaque état membre est ensuite libre de décliner opérationnellement. En France, la statistique d’entreprises est fondée sur l’observation de l’unité juridique que représente la société. Cependant, de nombreuses études comptent plutôt les « groupes » qui reflètent mieux les dépendances organisationnelles et stratégiques.

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92 croissance et d’innovation jusque-là peu étudiées et ainsi donné lieu à des mesures structurantes pour leur développement.

ETI : une catégorie insaisissable

La connaissance des caractéristiques physiologiques du tissu d’ETI françaises provient d’une littérature non académique publiée depuis par des cabinets de conseil, des think tank et des institutions publiques qui soulignent aussi bien la forte diversité empirique de l’objet ETI que son importance économique cruciale. Des données quantitatives sont extraites des bases statistiques (DEPP 2009, DGCIS 2010 , Hecquet 2010, Banque de France 2012, Hecquet 2014, OFEM 2017) ou produites par des sondages (Stoffaës 2008, DEPP 2009, DGCIS 2010, KPMG 2012, Lintignat 2012, KPMG and ASMEP-ETI 2013, Bpifrance 2014, Bpifrance 2014, Deloitte 2015, Bpifrance 2017, Bpifrance 2018, Messine 2019). L’INSEE et Bpifrance permettent de tracer des évolutions temporelles grâce à leurs rapports annuels, respectivement « Les entreprises en France » et « ETI, Enquête 201X ». D’autres les exploitent en explicitant des traits saillant de l’identité de la catégorie pour formuler des recommandations visant à soutenir leur développement (Stoffaës 2008, Vilain 2008, Retailleau 2010, Gallois 2012, Les cahiers du FSI 2012, Caudoux and Geffroy 2015, Observatoire du financement des entreprises 2015, Institut Montaigne 2018).

Les comparaisons statistiques historiques se révèlent délicates. En effet, les ETI ont longtemps été rattachées à la catégorie des PME voire aux « grosses PME » familiales et industrielles. Les données disponibles avant 2008 rassemblent donc souvent PME et petites ETI d’au plus 500 salariés. Néanmoins, alors que la catégorie ETI couvre théoriquement des entreprises employant jusqu’à 5 000 personnes, la distribution des ETI selon leur effectif n’est pas linéaire et met en exergue leur proximité avec les PME. Un rapport de la Direction générale de la compétitivité de l'industrie et des services (DGCIS 2010), corroboré par les enquêtes de conjoncture ETI réalisées par Bpifrance de 2015 à 2018 (Bpifrance 2018), indique que plus de la moitié des ETI regroupent moins de 500 personnes avec une densité maximale autour de 300 salariés. De plus, entre 2012 et 2016, de 15% à 25% des ETI possédaient un effectif inférieur à 250 personnes et étaient par conséquent exclues des PME non par leur taille mais leurs résultats financiers.

Une approche dynamique révèle la composition de la catégorie est particulièrement mouvante. Seule la moitié des ETI le resteraient de manière pérenne (56% sont dites « récurrentes » OpinionWay 2011 pour KPMG (KPMG 2012, Lintignat 2012, KPMG and ASMEP-ETI 2013)). La majorité des échanges se passe au niveau de la frontière basse, la transformation d’une société en grande entreprise restant rare. De plus, environ la moitié des sorties seraient temporaires.

La structure de l’actionnariat des ETI se rapprocherait plutôt de celle des PME (Gattaz 2002). Ces sociétés seraient donc majoritairement patrimoniales, c’est-à-dire que « la moitié du capital social est détenu par des personnes physiques nommément connues » (Bpifrance 2017). D’après les enquêtes annuelles ETI de Bpifrance et la DGE entre 2014 et 2017, on compte en effet autour de

65% de telles ETI entre 2014et 2017 (Bpifrance 2017). Parmi elles, se distingue le sous-groupe des

entreprises familiales dont certains actionnaires ont un lien de parenté. Les entreprises patrimoniales et familiales occupent une place à part dans le paysage des ETI et concentrent une large part de l’attention portée à cette catégorie d’entreprise. Le METI (mouvement des entreprises de taille intermédiaire) affiche un chiffre de 75% d’ETI familiales ou patrimoniales. A la question : « qui peut adhérer au mouvement ? », la première réponse affichée, devant la définition statistique

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officielle, indique « les entreprises, personnes morales, dont les dirigeants détiennent seuls, avec

leur famille ou leurs associés, une part significative du capital leur permettant de prendre des décisions stratégiques. ». D. Chabaud, dans un article fondateur pour l’étude de l’ETI formule une

assertion que dont on retrouve l’esprit dans nombre d’études : « sans doute, est-ce là l’une des

caractéristiques essentielles de ces « moyennes entreprises patrimoniales » que de relever des entreprises familiales » (Chabaud and Messeghem 2014). Néanmoins, selon les mêmes enquêtes

Bpifrance – DGE, les entreprises familiales ne représentent qu’environ 30% des ETI. Si cela représente une proportion conséquente de la catégorie, l’ETI ne semble donc pas réductible à cette seule structure actionnariale. Ainsi, le rapprochement avec la littérature sur l’entreprise familiale pour l’étude de l’ETI est parfaitement justifié mais a priori insuffisant.

Derrière la question de la structure de propriété se cache celle de l’autonomie. « Assez grande pour

être forte et assez petite pour être indépendante », telle est la devise que Yvon Gattaz suggérait

pour l’ETI (Gattaz 2002). Elle symbolise le rapprochement souvent opéré dans le cas des ETI entre indépendance et structure de propriété privée, c’est-à-dire non filiale d’un groupe de société. Or il faut veiller à ne pas confondre les deux. Le rapport Retailleau (Retailleau 2010) précise en effet qu’une entreprise dont l’organisation présente une tête de groupe/holding, n’échappe pas forcément à ses fondateurs car ceux-ci peuvent contrôler l’entité mère. De plus, une organisation en groupe peut aussi résulter de fusions conservant une identité et une large autonomie de l’entité acquise. Le rapport de la DGCIS publié en 2010 discute des difficultés de définition d’une catégorie statistique pertinente et du profilage des entreprises (DGCIS 2010). Il s’attarde notamment sur la question de la dépendance aux grandes entreprises. Il pointe par exemple le nombre conséquent d’ETI françaises contrôlées par des holdings ou des sociétés financières. Après examen de la détention de leur capital, il apparait qu’une très faible part dépendent réellement de grandes organisations et que la majorité se comporte en fait au reste du champ des ETI (hormis un total bilan plus élevé et une plus forte propension à l’export).

Les études statistiques rapprochent donc PME et ETI étant donné leur taille et leur structure actionnariale. L’ETI serait une PME qui aurait atteint une taille critique permettant de la qualifier « d’adulte », ce faisant, sa contribution à l’économie nationale est démultipliée. Malgré le faible nombre d’ETI (moins de 10% des unités légales), toutes les études s’accordent sur la contribution supérieure à leur proportion dans l’emploi, la valeur ajoutée, l’investissement privé et l’export. En ce qui concerne leurs performances économiques, le comportement des ETI se rapproche plutôt des grandes entreprises. Contrairement à ces dernières, l’ancrage territorial de l’ETI représente un réel atout pour l’emploi. Autre spécificité, les entreprises industrielles sont sur-représentées dans cette catégorie. Si les ETI forment un tissu structurant pour l’économie, elles restent trop peu nombreuses et trop petites en comparaison de leurs voisines allemandes du Mittelstand, systématiquement pris comme modèle. En 2011, sur 4 794 ETI, un rapport du FSI chiffrait à 58% le nombre d’entreprises de 50 à 2 000 salariés en France par rapport à l’Allemagne alors que la population française représente 77% de la population allemande (Kohler and Weisz 2012). Bien que le nombre d’ETI aurait dépassé la barre des 5 300 (Institut Montaigne 2018), le tissu français resterait moins dense que les réseaux des pays européens voisins. Ce constat récurrent de déficit en nombre d’ETI et de pré-ETI est à nuancer vu les différences de définition dans chaque pays.

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La définition statistique de l’ETI : une exception française

Il existe une différence notable de représentation des tissus d’entreprises français et allemands. En France, la séparation est analytique, les ETI françaises se définissent selon des critères quantitatifs d’effectif et financiers. Au contraire, le concept de Mittelstand allemand repose sur des caractéristiques sociologiques incluant : entreprises familiales, inscription dans la durée, attachement au territoire, désir d’indépendance. L’Institut de recherche sur le Mittelstand de Bonn donne une définition qualitative basée sur une unité : dirigeant-actionnaire. Une entreprise appartient au Mittelstand si deux personnes physiques ou les membres de leurs familles possèdent

au moins 50% des parts et contribuent à la direction18. Bien qu’il y ait recouvrement entre les deux

notions, le Mittelstand allemand va au-delà des limites aussi bien inférieures que supérieures de la définition française de l’ETI tout en excluant la part conséquente d’ETI non patrimoniales.

Plus largement, la catégorie des ETI françaises n’a aucun strict équivalent. Les Etats-Unis, l’Europe et de nombreux autres pays comme le Mexique ou le Bangladesh ont adoptés un modèle polarisé où seul importe de distinguer si une société est ou non qualifiée de PME (« SME »). L’idée d’equity

gap contribue à la constitution de ces catégories statistiques car celles-ci servent à discriminer les

entités pouvant candidater à certaines aides financières ou bénéficier d’avantages (fiscaux, accès privilégié aux marchés publics) dispensés par les Etats. Les termes « mid-sized firm », « middle- market company » et leurs dérivées désignent plutôt la sous-catégorie des grosses PME. Celui de « missing middle » étant employé pour désigner le manque de PME en Afrique. La définition Européenne de la PME a été reprise par la France (entreprise de moins de 250 salariés avec un chiffre d’affaire inférieur à 50 millions d’euros ou un total bilan n’excédant pas les 43 millions d’euros). Elle est donc disjointe de l’ETI française. La définition du gouvernement américain repose quant à elle sur des critères différents selon les secteurs d’activité. Une PME américaine peut ainsi compter jusqu’à 1500 employés. Un institut de recherche américain spécialisé sur l’analyse du « Middle Market », le National Center for the Middle Market, considère quant à lui qu’il s’agit des entreprises dont le chiffre d’affaire est compris entre 10 millions de dollars et un milliard de dollars. Tout comme le Canada pour qui un « medium sized business » comprend entre 100 et 500 employés, ces catégories intersectent à la fois celles des PME et des ETI françaises. L’absence de définition statistique partagée de l’ETI rend difficiles les comparaisons statistiques à l’internationale. Néanmoins, la concentration en ETI de petite taille et les transformations de certaines sociétés, tantôt PME, tantôt ETI permettent d’envisager des comparaisons empiriques avec les catégories étrangères comprenant de « grandes PME ».

Pour spécifier les caractéristiques des ETI, on peut donc se référer : en France, soit aux quelques articles antérieurs à 2008 ciblant spécifiquement les PMI, soit aux études postérieures à 2008 et plus largement, à une partie du champ théorique et empirique international sur les PME. Une partie des ETI étant familiales, on peut aussi capitaliser sur la littérature foisonnante traitant des family business.

Conclusion : l’innovation au cœur du déficit de croissances des ETI ?

Dix ans après leur reconnaissance officielle, les caractéristiques statistiques des ETI sont aujourd’hui bien mieux connues. La catégorie des ETI apparait comme hétérogène, volatile,

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structurellement proche des PME mais dotée d’une performance supérieure. Ni PME, ni grand groupe, elle forme bien un objet statistique spécifique. Au-delà de cette délimitation, quels sont les invariants qui légitiment leur étude en tant qu’objet de recherche à part entière ? Dans une récente