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Estimation de l’objet à FEP connue : déconvolution classique

2.3 Les méthodes d’inversion

2.3.2 Estimation de l’objet à FEP connue : déconvolution classique

Un cas de figure courant en astronomie consiste à estimer l’objet o, à réponse h connue. En effet la FEP peut souvent être calibrée par ailleurs, par exemple sur une étoile voisine. L’estimateur du meilleur objet ˆo est alors celui qui minimise le critère présenté en2.40. Les deux termes de ce critère (attache aux données Jiet a priori Jo) doivent être choisi selon certaines règles :

2.3.2.1 Terme de vraisemblance

Le terme d’attache aux données, ou de vraisemblance, prend en compte la statistique du bruit dans l’image. Physiquement, celle-ci est le résultat d’une statistique poissonienne due au bruit de photon et d’une statistique gaussienne uniforme due au bruit de détecteur. En pratique, cette statistique peut être approximée par un bruit blanc (indépendant d’un pixel à l’autre), gaussien centré (dont la statistique sur un pixel est gaussienne, centrée sur 0), et de variance non uniforme. Le terme d’attache aux données est donc un moindre carrés pondérés (chaque pixel possédant sa propre variance, mais une statistique gaussienne) :

Ji(o, h) =X k,l  i[k, l] − (h ? o)[k, l] σ[k, l] 2 (2.41)

où σ2[k, l]représente la variance de bruit associée au pixel [k, l] dans l’image.

Les hypothèses d’obtention de ce critère sont les suivantes : le bruit dans les images est supposé gaussien, blanc, non uniforme. C’est une bonne approximation pour décrire le bruit réel dans l’image, dont l’origine est double : le bruit de détecteur est blanc et gaussien homogène, le bruit de photon est blanc et poissonien. En effet à fort flux, le bruit dominant est le bruit de photon, dont la statistique poissonienne pour de fortes valeur du paramètre de moyenne µ tend vers une statistique gaussienne dont la variance varie de pixel à pixel. La Figure2.18montre la loi de Poisson pour différentes valeurs du paramètres µ. Pour des paramètres de moyenne 15 ou supérieure, l’approximation avec une gaussienne est bonne. D’autre part à faible flux, le bruit dominant est le bruit de détecteur dont la statistique est gaussienne uniforme. Quel que soit le régime de flux, il est donc valable d’approximer la statistique du bruit par une loi gaussienne non uniforme (ie variant de pixel à pixel).

FIG. 2.18 – Evolution de la loi de Poisson pour différentes valeurs du paramètre µ.

2.3.2.2 Terme d’a priori

Le terme d’a priori doit rendre compte de la statistique des pixels de l’objet. Ce terme peut prendre plusieurs formes selon le type d’objet recherché. Il est évident qu’un objet présentant des bords francs (une lune résolue comme Titan ou Io par exemple), un objet plus lisse (une galaxie) et un champ d’étoiles ne présentent pas les mêmes statistiques. Le terme d’a priori doit donc être choisi en circonstances, c’est le but de la section suivante.

2.3.2.3 Régularisation sur l’objet

Intéressons-nous donc à la partie régularisation du critère Jo, qui est essentielle pour une estimation correcte de l’objet dans le cas de la déconvolution.

régularisation quadratique Supposons donc dans un premier temps que les pixels de l’objet o(r) suivent une statistique gaussienne, éventuellement non stationnaire, c’est à dire que la moyenne de l’objet om(r) dépend de r. Si on suppose que o−omest stationnaire, on peut alors définir un critère de régularisation dans

le plan de Fourier de la façon suivante : Jo(˜o(f )) = 1 2 X f |˜o(f) − ˜om(f )|2 DSPo(f ) (2.42)

avec DSPo(f )la densité spectrale de puissance associée à l’objet. Cette densité spectrale de puissance est estimée directement dans l’objet sous forme paramétrique, selon un modèle de Kattnig [59,60].

Une régularisation classique consiste à considérer que l’objet peut être décrit entièrement par un spectre généralement décroissant avec peu de hautes fréquences. Ce genre d’a priori fait donc intervenir un calcul de critère dans le plan de Fourier, où il est aisé de paramétrer un spectre décroissant avec peu de paramètres. DSPo(f ) = k/ (1 + (f /f0)p) − |˜om(f )|2 (2.43) où k ' N2

ph, avec N2

phle nombre de photons dans l’image, f0est inversement proportionnelle à l’éten-due spatiale de l’objet et p est une puissance qui caractérise la régularité de l’objet (o est généralement compris entre 2 et 4). La DSP de l’objet est estimée sous forme paramétrique, puisque les seuls paramètres k, f0et p permettent de la décrire.

Avec un modèle a priori gaussien, il est possible d’estimer les paramètrs des modèles a priori aisément, par exemple par MV[61] à FEP inconnue et [62], Annexe A, à FEP connue.

La régularisation quadratique est une forme générale de régularisation. Il suffit de prendre p = 2 dans l’expression précédente pour obtenir une régularisation de lissage. Celle-ci peut être interprêtée dans le plan de l’objet comme la minimisation des écarts entre pixels voisins. Cette régularisation fait en effet apparaître le gradient des pixels adjacents dans l’objet. L’effet est donc de réduire les écarts entre pixels voisins, autre-ment dit de lisser l’objet, de le faire tendre localeautre-ment vers une constante. Le réglage de l’hyperparamètre permet de pondérer cet effet, un hyperparamètre très supérieur à 1 mène à un objet estimé plan. Pour p = 4, on peut montrer que la régularisation porte sur le Laplacien des pixels voisins dans l’objet. Les pixels voisins sont alors lissés avec toutefois une liberté possible sur le gradient, l’objet estimé avec une sur-régularisation tend vers un plan incliné.

Ce genre de régularisation est adaptée aux objet présentant effectivement un spectre décroissant, c’est à dire des contours plutôt lisses. Il est cependant inapproprié dans le cas d’objet présentant des bords francs (planète résolue, saut de phase ou autre) car les bords francs de l’objet seront lissés, et la régularisation quadratique fait apparaître des oscillations au niveau des bords francs lors de la déconvolution. On parle alors d’effet de Gibbs (ou ringing effects).

régularisation quadratique-linéaire L1L2 La régularisation quadratique n’est pas préconisée dans le cas d’objet présentant à la fois des contours lisses et des bords francs. Cependant il est possible de la modifier pour prendre en compte ces contraintes, c’est le but de la régularisation quadratique-linéaire dite « L1L2». Cette régularisation pénalise de façon quadratique les faibles variations de pixel à pixel (typiquement dues au bruit) mais pénalise faiblement (voire ne pénalise pas) les fortes variations de pixels à pixel autorisant ainsi les bords francs dans l’estimation de l’objet. La forme du critère de régularisation suit une courbe comme illustrée sur la Figure 2.19. Cette régularisation a été proposée par S. Brette et J. Idier[63] dans le cadre du traitement du signal, isotropisée[64] et adaptée au cas de l’imagerie[65] par L. Mugnier. Le terme de régularisation Joprend alors la forme suivante :

Jo(o) = µX r  ∇o(r) δ  − ln  1 +∇o(r) δ  (2.44) Le choix de la fonction ∇o(r) conditionne le type de régularisation utilisée.

Considérons dans un premier temps ∇o(r) = q2

xo(r) + ∇2

yo(r), ∇xo(r) et ∇yo(r)étant les gra-dients de l’objet selon x et y. Pour les faibles sauts d’intensité, le critère défini en2.44tend vers une norme quadratique L2. Pour les forts sauts d’intensité d’un pixel à son voisin (correspondant à des bords francs), le

critère tend vers une norme linéaire L1. Celle-ci n’introduit pas de pénalisation du critère, en effet tous les chemins pour aller de A à B présentent le même poids en terme de critère (Cf Figure 2.20. C’est l’hyperpa-ramètre δ qui permet de gérer à partir de quelle ordre de grandeur des sauts le critère devient quadratique ou linéaire. Ce type de régularisation permet donc tout à la fois de lisser l’effet du bruit tout en conservant les bords francs de l’objet.

Dans un second temps, considérons ∆o(r) = |o − om|. Le critère ne porte alors plus sur les sauts d’intensités de pixel à pixel, mais sur les valeurs des pixels eux-mêmes. Le critère L1L2 correspondant est alors qualifié de blanc, et est particulièrement adapté aux objets de type champ d’étoiles. Ce critère est quadratique pour les faibles valeurs d’intensité (caractérisées par la valeur de seuil δ) et pénalise les faibles flux, il est linéaire pour les fortes valeurs d’intensité et permet la restitution de valeurs fortes.

Ψ

∆ o

δ

L

2

L

1

L

2

Norme L1−L2

FIG. 2.19 – Illustration monodimensionnelle de la régularisation quadratique-linéaire. Les faibles valeurs de sauts sont pénalisées quadratiquement, les fortes valeurs de saut sont pénalisées linéairement.

FIG. 2.20 – La norme L1introduit le même poids aux différentes configurations présentées ici. En particulier à celle représentant le bord le plus franc.

Paramétrisation du problème pour les champs d’étoiles Une classe particulière d’objet, fréquente dans les observations astronomiques, est les champs d’étoiles. C’est-à-dire une répartition de sources ponctuelles positionnées aléatoirement dans l’image. Une paramétrisation spécifique peut être utilisée[66], améliorant ainsi notablement la résolution théorique du télescope. La specificité de ce type d’objet réside dans le fait que les champs d’étoiles peuvent être décrits par une somme de Diracs, permettant alors un paramétrage de

l’objet simple en fonction de leur position αket de leur amplitude Fk. o(r) =X

k

Fkδ(αk) (2.45)

L’avantage de ce type de paramétrisation est de réduire considérablement le nombre d’inconnues mais aussi d’améliorer la précision sur l’estimation de la position de chaque étoile[66]. Cette précision dépend bien sûr du rapport signal à bruit de l’image considérée, cependant des précisions de l’ordre de λ/(60D)[67] peuvent être atteintes dans le cas de forts rapports signal à bruit. Ce type de paramétrisation est tout à fait valable dans le cas de l’observation d’exoplanètes, et est donc particulièrement intéressante.

Cette paramétrisation semble très performante, néanmoins elle n’assure pas la convexité du critère. C’est à dire qu’un critère fondé sur une paramétrisation de type champ d’étoile présente un nombre très important de minima locaux, en particulier loin de la position effective de la source ponctuelle recherchée. On peut donc par exemple utiliser une telle paramétrisation en ayant déjà une idée précise (à quelques pixels près) de la position des sources dans l’objet, et en choisissant un point de départ proche du minimum global du critère.