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1. MISE EN EVIDENCE DU CONFINEMENT GEOMETRIQUE

1.3. Simulation de la dynamique moléculaire hors équilibre (NEMD)

1.3.2. Analyse des mouvements locaux non-diffusifs au cours des simulations de

1.3.2.3. Enveloppe de fluctuation des diffusants

Pour les molécules non rigides, les évènements translatifs sur des échelles de temps accessibles aux simulations doivent être sérieusement distingués des mouvements comportant de la symétrie (comme les repliements, les déplacements concertés ou les retournements) et des mouvements de rotation globale de la molécule autour de son centre de gravité, mouvements qui ne modifient pas significativement la position du centre de gravité. Tous les mouvements locaux peuvent finalement conduire à des oscillations significatives voire même à une translation du centre de gravité de la molécule. Intuitivement, un évènement translatif significatif devrait sûrement être identifié si le déplacement du centre de gravité se produit en dehors de l’enveloppe de fluctuation de la molécule. On peut s’attendre à ce que l’enveloppe de fluctuation corresponde à la forme de la molécule dans le vide, et qu’elle soit plus grande et plus diffuse pour les molécules flexibles ou comportant plusieurs degrés de liberté de rotation. La figure IV.13 représente les enveloppes de fluctuation des 10 molécules testées, sous forme d’ellipsoïdes se chevauchant partiellement. Chaque ellipsoïde est centré sur la position moyenne de chaque atome dans un référentiel lié à la molécule. La surface externe des ellipsoïdes représente 95 % des variations des positions de chaque atome suivant les trois principaux axes de la molécule (configurations collectées sur l’ensemble des répétitions des simulations, voir tableau III.11). Certains atomes, généralement proches des extrémités des molécules, contribuent à plus de fluctuations que d’autres. Les molécules encombrées comme le BHT ou comportant des cycles aromatiques (bisphénol A, chimassorb 90, fluorescéine, rubrène) présentent des axes ou des plans de symétrie complexes entrainant une diminution de

la probabilité de translation ou de réorientation du diffusant. Les ellipsoïdes représentent la variance de la position de chaque atome dans un référentiel lié à la cellule mais qui translate afin de garder le centre de gravité fixe. Nous observons par conséquent ici les fluctuations du contour des molécules accompagnées des rotations possibles. Si les diffusants étaient complètement relaxé, leur enveloppe de fluctuation devrait ressembler à une sorte de

"coquillage" représentatif de leur rayon de giration : cas observé ici uniquement pour l’anisole.

Figure IV.13 : Représentation moléculaire des diffusants testés. Les structures initiales insérées dans le canal sont dessinées par des sphères de Van-der-Waals. Les structures moyennées sur l’ensemble des répétitions des simulations (durées totales simulées comprises entre 24 et 96 ns) sont notées "*".

Chaque sphère représente 95 % de l’enveloppe de fluctuation de la position de chaque atome ; chaque sphère est centrée sur la position moyenne de chaque atome dans un référentiel lié à la molécule.

Conclusions de la partie 1.

L’hypothèse d’un mécanisme de confinement qui limiterait la capacité des MTA à diffuser a été discutée sur la base de données expérimentales et de résultats de simulation de dynamique moléculaire. Les molécules étudiées par simulation couvrent une large gamme de molécules de la base expérimentale européenne : des gaz (méthane) jusqu’aux additifs. Le polymère hôte est simulé dans des conditions qui reproduisent la densité attendue dans les régions amorphes du polymère tout en favorisant sa relaxation : i) longueur de chaîne inférieure à la longueur d’enchevêtrement, ii) tendance à recristalliser, iii) présence d’un canal.

L’ensemble de ces conditions n’est pas connu pour induire a priori un confinement.

Le confinement, ou piégeage entropique, est défini comme la présence de corrélations dans le déplacement de la molécule. Dans le cadre d’une interprétation statistique des déplacements des atomes du diffusant, il se manifeste par une loi non linéaire de la composition des variances de chaque atome. Toutes les fluctuations d’un atome se propagent au-delà d’une échelle de temps τ. Nous proposons une identification de ce phénomène à partir de la loi d’échelle du type D∝Mα où une valeur de α > 1 pour M assez grand (M > 100 g⋅mol-1) traduit une loi de composition de variances non homogènes. Pour des temps très courts, cette inhomogénéité peut être la conséquence de contraintes géométriques internes à la molécule, alors que pour des temps très longs (par rapport à la période de vibration des atomes) elle traduit des contraintes liées à l’hôte.

Les valeurs de α suggérées par les données expérimentales sont toutes supérieures à 1 quels que soient la molécule et le polymère testés. Ces valeurs excluent les mécanismes hydrodynamiques de diffusion connus pour les liquides : Stoke-Einstein (α = 0,5 ; coefficient de frottement proportionnel au rayon de giration), Rouse (α = 1 ; coefficient de frottement proportionnel au nombre de sous-unités), théorie des volumes libres de Fujita (volume minimal pouvant contenir le diffusant proportionnel à α). Des conclusions analogues sont obtenues en comparant les lois d’échelle associées à l’énergie d’activation.

Les simulations montrent un piégeage entropique des diffusants sur une durée très supérieure à la fréquence des atomes (1 ps) dès le méthane. Le diffusant explore un très grand nombre de configurations par rotations et déformations, sans translation sur le long terme. Les propriétés de ces micro-états (temps de corrélation, enveloppe de fluctuation) sont

reproductibles entre les simulations (avec ou sans canal plan) et sont caractéristiques des degrés de liberté au sein de la molécule et des interactions avec le polymère hôte. Certaines molécules n’ont que la capacité à se déformer (exemple du rubrène) du fait de leur taille et de leur rigidité, d’autres ont seulement des segments libres de rotation (cycles dans le bisphénol A, tertiobutyle dans le BHT), et d’autres encore ont la capacité à tourner librement (méthane, anisole). A l’exception de l’anisole, la majorité des MTA testées présentent des enveloppes de fluctuation anisotropes qui traduisent à la fois les contraintes géométriques et les contraintes internes avec la molécule. Les alcanes tendent à "s’écouler". Les extrémités mobiles (cycles, tertiobutyles) tendent à démultiplier le nombre de micro-états et donc les effets entropiques.

L’utilisation d’un champ de forces détaillé a permis de reproduire les enveloppes de 10 MTA tout en préservant les plans de symétrie imposés par les contraintes internes de la molécule.

Puisque le confinement émerge même en l’absence d’enchevêtrement des chaînes du polymère, la compacité de l’empilement des atomes semble être le principal phénomène à l’origine du piégeage entropique comme cela a été suggéré.

Le confinement mis en évidence contribue à réduire fortement la capacité à simuler la diffusion quand α > 1. En particulier, il s’avère difficile de dissocier un "saut" des micro-états et d’échantillonner une molécule dispersée au milieu des chaînes de polymère (statistique pauvre). Théodorou [1996] a évalué la durée de simulation nécessaire pour pouvoir estimer la diffusion à l’équilibre, pour une molécule subissant une translation de 5 Å et dont le coefficient de diffusion serait de 2,4⋅10-13 m2⋅s-1 :

( ) ( )

2 2

2 6 5 Å 6 2, 4 10 m s13 2 1 170 ns

t= r ⋅ =D × ⋅ =

Cette durée de simulation minimale nécessite des temps de calcul excessifs.

L’approche NEMD (hors équilibre avec canal) proposée accentue la relaxation du polymère (chaîne plus courtes, C30) et les fluctuations de densité (effondrement spontané d’un canal), tout en respectant la compacité des atomes. L’échantillonnage hors-équilibre demande toutefois un grand nombre de répétitions à partir d’un même état initial ou de différents états initiaux.