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2. MECANISMES MOLECULAIRES DE LA DIFFUSION

2.1. Description phénoménologique de la diffusion moléculaire

La diffusion moléculaire est le mécanisme phénoménologique qui traduit l’indépendance des déplacements du centre de gravité de la molécule dans son environnement et donc la marche aléatoire des molécules. Il s’agit ici de mettre en relation une description phénoménologique et macroscopique de la diffusion moléculaire avec le concept microscopique de marche aléatoire ou mouvement brownien des molécules sous l’effet de l’agitation thermique [Haw, 2002].

2.1.1. Loi de Fick et dynamique de Langevin

En se basant sur les équations de Fourier qui décrivent les transferts de chaleur dans les matériaux, Fick propose en 1855 une description phénoménologique du transport de matière [Crank, 1975 ; Bird et al., 2002]. Le flux de matière, J, est proportionnel au gradient de concentration :

= − ∇r

J D C (I.7)

avec D le coefficient de diffusion et ∇r

l’opérateur gradient défini par

'

, ,

⎡∂ ∂ ∂ ⎤

⎢∂ ∂ ∂ ⎥

x y z⎦ en coordonnées cartésiennes. L’équation macroscopique correspond à une distribution uniforme

de la concentration (gradient de concentration nul). Elle n’est donc utilisable que pour des milieux homogènes ou considérés comme tel dans le cadre de l’approximation d’un milieu équivalent continu et homogène. En conséquence, l’équation de conservation locale de l’espèce diffusante s’écrit :

Une équation de transport similaire à l’équation I.8 peut être obtenue à partir de l’équation de Langevin appliquée à une particule soumise à une force aléatoire contrôlée par l’agitation thermique (bruit blanc), ξr

( )

t , et une force de frottement qui s’oppose au déplacement (équation I.9). En supposant que la quantité de mouvement est conservée et que la force de frottement est proportionnelle à la vitesse vr de la particule (avec un coefficient de frottement γ), nous avons :

( ) ( )

F t la résultante des forces dues aux chocs moléculaires à l’instant t. L’équation conduit à une description probabiliste de la présence de la particule. La position d’une particule soumise à l’équation (I.9) est déterminée par l’équation (I.10) où D est le coefficient de diffusion supposé constant et défini par le rapport σ2 2⋅γ2 (rapport d’un terme moteur sur un terme de frottement). La probabilité p(x,t) de trouver une particule à une position x à un instant t obéit à l’équation de Fick (pour D constant) :

2 être une fonction positive ou nulle, et intégrable sur tout le domaine accessible à la variable x.

Les lois de probabilité décrivent l’évolution temporelle d’un système obéissant à une dynamique markovienne. Un processus stochastique est dit de Markov si « l’évolution à partir d’un instant donné ne dépend explicitement que de la situation à cet instant et non de toute l’histoire antérieure » [Aslangul, 2004].

2.1.2. Extraction du coefficient de diffusion à partir d’une trajectoire : loi d’Einstein

Comme le suggère l’équation I.9, l’étude d’une population de molécules peut être substituée par l’analyse de la trajectoire d’une seule molécule si celle-ci est représentative de l’espace visité. Ce paragraphe détaille comment le coefficient de diffusion (selon la seconde loi de Fick) peut être corrélé à la trajectoire d’une ou de plusieurs molécules (selon la loi d’Einstein).

En considérons comme point de départ la seconde équation de Fick (équation I.8) dans un système à une dimension, avec la condition initiale u x t

(

, = 0

)

=δ

( )

x , c'est-à-dire la diffusion de particules concentrées initialement à l’origine (avec δ( )x la fonction Dirac, gaussienne de variance nulle), nous pouvons écrire :

+∞ +∞

Le membre de gauche fait apparaître une intégrale qui représente le parcours quadratique moyen x2 dans la direction x.

L’équation de Fick aboutit ainsi à l’équation d’Einstein (équation I.11), qui met en relation le coefficient de diffusion et le déplacement quadratique moyen, soit

2

= 2 +

D x cste

t dans le cas d’un système à une dimension.

Dans le cas d’une trajectoire rr( )t du centre de gravité d’un diffusant, la variance de la trajectoire à une échelle de temps t est calculée à partir de la moyenne des distances quadratiques parcourues entre deux instants séparés par une durée τ, et notée ( )t ( )t 2

t

rr+τrr . Lorsque l’échelle de temps est suffisamment grande, les vitesses des déplacements ne sont plus corrélées entre elles et D atteint un régime asymptotique : la variance augmente alors linéairement avec t, caractérisant une marche aléatoire. La valeur de D est déduit du second moment de la distribution radiale du centre de masse (g(r,t)) de la molécule diffusante [Müller-Plathe, 1996] :

le vecteur position du centre de masse au temps t, i l’opérateur moyenne sur le paramètre i, d le nombre de dimensions prises en compte dans la trajectoire ou la simulation.

La seconde définition de D (2ème ligne de l’équation I.12) est un cas particulier de la première, obtenue en moyennant les trajectoires calculées sur tous les états initiaux t=0 possible, et en supposant que toutes les sous-trajectoires ainsi définies sont centrées sur leur position initiale.

Cette définition permet de calculer D de façon plus sûre pour toutes les échelles de temps considérées sur la base d’un petit ensemble de trajectoires, c’est donc la définition qui est privilégiée dans la pratique. Elle relie les déplacements à l’échelle atomique au coefficient de diffusion macroscopique, pour des durées de diffusion très grandes (τ → ∞).

L’approche d’Einstein privilégie la position et la trajectoire des molécules. Une autre façon d’interpréter la diffusion est envisagée en s’intéressant aux corrélations entre les vitesses d’une particule au cours du temps. L’équation de Green-Kubo [Kubo, 1966] fait intervenir les fonctions d'autocorrélation des vitesses et permet d’estimer D dans les simulations de dynamique moléculaire :

( ) ( ) ( ( ) ( ) )

La fonction de corrélation des vitesses d’une particule est définie par v t vr

( ) ( )

r 0 et

précise la façon dont la vitesse change au cours du temps en moyenne, vr étant continue au cours du temps. Les relations d’Einstein et de Green-Kubo fournissent deux approches complémentaires pour estimer D lors de simulations de dynamique moléculaire : l’équation d’Einstein caractérise les éventuelles déviations du comportement dynamique ; la fonction de corrélation des vitesses renseigne sur la dynamique à court terme, pour laquelle l’équation d’Einstein n’est pas définie.