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Les effets de l’indétermination de la contrepartie sur le contrat. Le contrat doit

PARTIE I – L’INTEGRATION MINIMALE DES MOTIFS PAR LA CONTREPARTIE

B- La fixation unilatérale du prix en droits anglais et allemand

99. Les effets de l’indétermination de la contrepartie sur le contrat. Le contrat doit

intégrer un motif pouvant être identifié comme la contrepartie qui doit être, a minima, déterminable. A défaut d’intégrer une telle contrepartie, l’acte ne peut pas produire les effets juridiques normalement attachés au contrat. Il convient de préciser le sens d’une telle affirmation en considérant, concrètement, les effets de l’indétermination de la contrepartie.

449

Traduction de l’allemand par G. LARDEUX, R. LEGEAIS, M. PEDAMON, C. WITZ, Code civil allemand, Dalloz, 2010.

450

Ibid.

451

Le BGB contient alors, par ailleurs, des règles relatives à certains contrats spéciaux. Ainsi, par exemple, le § 612 (2) du BGB relatif aux contrats de service prévoit que si le montant de la rémunération n’est pas déterminé, il doit être considéré que les parties ont convenu que la rémunération serait conforme au barème existant ou, à défaut, qu’elle consisterait dans la rémunération usuelle. Une disposition identique est prévue au § 632 (2) pour le contrat d’entreprise et au § 653 (2) pour le contrat de courtage.

452

V. par ex. l’arrêt BGH 2.4.1964, BGHZ 41, 271 cité par C. WITZ, op. cit., n° 143, portant sur un contrat d’approvisionnement par un agriculteur d’une latierie locale. Le Bundesgerichtshof a considéré que le contrat existait, en dépit de l’indétermination du montant du prix, dès lors que les parties avaient bien la ferme intention de contracter. La laiterie a donc pu se prévaloir de l’application de ses tarifs (en matière de distribution le fournisseur est parfois – et même souvent – celui qui se voit imposer les tarifs de l’autre, ainsi en est-il significativement dans la grande distribution, laquelle impose ses prix à ses fournisseurs).

Section 2 – Les effets de l’indétermination de la contrepartie

100. La question de la nature de la sanction de l’indétermination de la contrepartie.

En droit français, antérieurement à la réforme, le défaut de cause, condition de validité du contrat, était sanctionné par la nullité du contrat. L’indétermination de la contrepartie – remplissant désormais les fonctions qui étaient celles de la cause objective – devrait conduire à l’invalidité du contrat et entraîner sa nullité. La nullité opère alors ab initio : l’acte est anéanti rétroactivement et, le cas échéant, des restitutions entre les parties sont mises en œuvre.

La contrepartie pourrait toutefois être appréhendée non pas comme une condition de validité du contrat mais une condition de son existence. La sanction du défaut de contrepartie ne serait dès lors pas tant la nullité de l’acte mais, plus radicalement, son inexistence453. L’inexistence est en effet un concept retenu par une partie de la doctrine et qui s’imposerait d’autant plus dans une perspective comparative. D’après l’analyse de Mme CUMYN, l’inexistence est la sanction de l’absence de consideration retenue en droit anglais454. Le caractère void du contrat dénué de consideration 455 correspondrait ainsi au concept d’inexistence. L’auteur relève d’ailleurs qu’« en raison des effets radicaux que le droit de

tradition anglaise attribue à la nullité absolue (void), les juristes ont tendance à rapprocher celle-ci d’une inexistence : le contrat nul est considéré comme n’ayant jamais existé »456.

L’inexistence n’apparaît a priori pas incompatible avec la logique du Dissens des §§ 154 et 155 du BGB dans la mesure où ces derniers règlent la question de la formation du contrat. Il pourrait dès lors être considéré que s’il est jugé que le contrat n’a pas été conclu au regard de l’indétermination de la contrepartie, c’est bien qu’il est inexistant.

Aussi séduisant qu’il puisse apparaître de prime abord, le concept d’inexistence n’apparaît en réalité pas pertinent pour décrire les effets de la sanction de l’invalidité du contrat fondée sur l’indétermination de la contrepartie. La présentation des arguments fondant le rejet de la notion d’inexistence (§1) précédera l’analyse de la sanction de la nullité (§2).

453

De nombreuses thèses ont été consacrées à cette notion, pour les plus récentes v. not. G. TAORMINA, Contribution à l’étude de l’apparence et de l’inexistence en matière contractuelle, thèse Paris XII, 1991 ; A. LAUDE, La reconnaissance par le juge de l’existence d’un contrat, thèse, préface J. MESTRE, PUAM, 1992 ; M. CUMYN, La validité du contrat suivant le droit strict ou l’équité : étude historique et comparée des nullités contractuelles, thèse, préf. J. GHESTIN, LGDJ, 2002 ; A. POSEZ, L’inexistence du contrat, thèse Paris II, 2010.

454

V. M. CUMYN, thèse préc., n° 203 et s.

455 V. par ex. Gaisberg v Storr [1950] 1 KB 107, CA ; v. également les propos de Lord Ellenborough à l’occasion de l’affaire Stilk v Myrick [1809] 170 ER 1168 : « the agreement is void for want of consideration ».

456

§1- Le rejet de la sanction de l’inexistence

101. Notion d’inexistence. Suivant l’analyse de Mme CUMYN, l’inexistence se

distingue de la nullité en ce qu’ « elle n’est pas une sanction, mais plutôt le constat de l’absence

de tout lien contractuel entre deux personnes » 457 . L’inexistence concerne ainsi « l’identification du contrat » tandis que la nullité suppose l’existence d’un contrat mais qui n’est pas conforme au droit458. La consideration anglaise constituerait en ce sens une condition d’existence du contrat459 : la nullité résultant du défaut de consideration correspondrait alors en réalité à un cas d’inexistence460. La sanction de l’inexistence pourrait également être avancée en droits français et allemand dès lors que la contrepartie est un élément essentiel nécessaire à la qualification du contrat à titre onéreux461. Le concept d’inexistence doit pourtant être écarté. Deux arguments peuvent ici être identifiés : l’un est formel, l’autre est substantiel.

102. Argument formel à l’appui du rejet du concept d’inexistence. Le rejet du concept

d’inexistence se fonde tout d’abord, en droit français, sur le constat du rattachement traditionnel du défaut de cause à une condition de validité du contrat sanctionnée par la nullité de ce dernier462. C’est dire que la sanction du défaut de cause – et aujourd’hui de l’indétermination de la contrepartie – correspond au régime juridique de la nullité. En ce sens, le nouvel article 1169 du Code civil dispose aujourd’hui que le contrat à titre onéreux dont la contrepartie est illusoire ou dérisoire au moment de sa formation est nul. Formellement, l’inexistence n’est donc pas la sanction consacrée du défaut de contrepartie : les textes prévoient expressément la

457 Ibid., n° 22.

458

Ibid. ; v. aussi T. HUC, Commentaire théorique et pratique du Code civil, F. Pichon, t. II, 1892, n° 12 : « il faut d’abord vérifier si l’acte existe, c’est-à-dire s’il présente tous les éléments essentiels à son existence juridique. Si cette recherche est satisfaisante, on pourra conclure que l’acte est existant ; dans le cas contraire, on dira que l’acte est inexistant ; il n’y aura qu’une vaine apparence d’acte ; ce sera en réalité le néant juridique. Mais il ne suffit pas d’avoir constaté qu’un acte remplit toutes les conditions requises pour son existence, et que par conséquent, en droit, il existe ; il faudra vérifier ensuite s’il est valable, s’il réunit toutes les conditions requises pour sa validité » ; Adde O. GOUT, Le juge et l’annulation du contrat, thése, PUAM, 1999, n° 108.

459

M. CUMYN, thése préc., n° 215 et s.

460

Ibid. n° 220.

461 En ce sens, v. D. MAZEAUD, « Les sanctions contractuelles : contradictions, approximations, imprécisions, etc. », D. 2011, p. 2711, n° 5 : « pour tout ce qui relève de la formation du contrat, proprement dit, à savoir le processus de la rencontre des volontés, l’inexistence paraît une sanction parfaitement appropriée, lorsqu’une condition de formation fait défaut, puisqu’aucun contrat n’est encore formé, et qu’il ne s’agit donc pas d’exercer un contrôle des volontés exprimées et de sa validité, mais seulement de vérifier que les consentements ont bien été échangés, qu’une acceptation a bien rencontré une offre de contracter ».

462

En ce sens v. Cass. 3ème

Civ., 21 septembre 2011, n° 10-21.900, D. 2011.2711, note. D. MAZEAUD : « la cour d’appel a retenu à bon droit que le contrat de bail à construction conclu pour un prix dérisoire ou vil n’était pas inexistant mais nul pour défaut de cause et en a exactement déduit que l’action en nullité de ce contrat, qui relevait d’intérêt privé, était, s’agissant d’une nullité relative, soumise à la prescription quinquennale de l’article 1304 du code civil ». En l’espèce, un contractant tenta d’invoquer la sanction de l’inexistence du contrat conclu à un prix dérisoire afin d’échapper à la prescription de l’action en nullité.

sanction de la nullité du contrat. De même, en droit allemand, le principe est que le contrat qui, bien qu’existant en apparence, ne peut être considéré comme formé est nul463.

Il pourrait toutefois être objecté qu’il existerait une différence entre l’indétermination de la contrepartie – qui conduirait à l’inexistence du contrat – et la contrepartie simplement illusoire ou dérisoire qui invaliderait l’accord formé et serait effectivement sanctionnée par la nullité. L’indétermination de la contrepartie correspondrait à un cas d’inexistence du contrat tandis que la contrepartie illusoire ou dérisoire relèverait de la sanction de la nullité. L’idée serait qu’en l’absence de contrepartie, il ne pourrait y avoir d’apparence de contrat – il est inexistant – tandis que, dans le cas où elle est illusoire ou dérisoire, il y a au moins eu une apparence de contrat – le contrat existe mais doit être rétroactivement anéanti en ce qu’il n’est pas conforme au droit. La distinction apparaît assez intenable : la question de l’indétermination de la contrepartie ne se pose, en toute hypothèse, que dès lors qu’il existe au moins un acte correspondant a priori à un contrat. C’est dire qu’il y a toujours au moins une apparence de contrat qu’il s’agit de contester au titre de l’absence de contrepartie, et donc de remettre en cause rétroactivement, ce qui correspond à la sanction de la nullité. L’existence d’une apparence de contrat constitue alors un argument substantiel à l’appui du rejet du concept d’inexistence s’agissant du contrôle de la contrepartie.

103. Argument substantiel à l’appui du rejet de l’inexistence : l’apparence d’un contrat. Le contrôle de la contrepartie suppose toujours une apparence de contrat. A défaut

d’apparence de contrat il n’y a en effet nul intérêt à contrôler l’existence ou non de la contrepartie. Il faut alors considérer la définition du contrat. En droit français, d’après l’article 1101 du Code civil, le contrat est « un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes

destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations ». Il y a donc apparence de

contrat lorsque des parties ont exprimé un consentement à un acte juridique ayant pour objet une ou plusieurs obligations, ce qui est classiquement décrit comme la rencontre d’une offre et d’une acceptation464.

463 J. BUSCHE, in Münchener Kommentar zum BGB, 7 auflage, 2015, § 134, n° 5 : « Es kommt somit von vornherein kein Vertrag zustande (« Nicht-Rechtsgeschäft »). Diese Sanktion liegt vor der Nichtigkeit eines äußerlich zustande gekommenen Vertrages » ; v. aussi, J. BUSCHE, in Münchener Kommentar zum BGB, 7 auflage, 2015, § 155, n° 15 concernant la sanction du dissentiment caché, à savoir la nullité du contrat, également retenue en présence d’un comportement objectivement négligeant d’une des parties (lequel peut être source de responsabilité au titre d’une culpa in contrahendo).

464 V. article 1113 du Code civil (« Le contrat est formé par la rencontre d’une offre et d’une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s’engager ») ; F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, F. CHENEDE, Droit civil, Les obligations, op. cit., n° 162 et s.

Le droit anglais décrit également le processus de formation du contrat comme la rencontre d’une offre (offer) et d’une acceptation (acceptance) 465, laquelle conduit à l’existence d’une apparence de contrat. C’est dire que l’apparence du contrat ne dépend pas de la consideration – qui elle joue un rôle sur le terrain de sa validité, de laquelle dépend sa force obligatoire – mais de la rencontre d’une offre et d’une acceptation. La consideration ne peut donc être présentée comme un critère d’identification du contrat : elle est une condition de sa validité. Il peut, à ce titre, être relevé que la formule employée par Mme CUMYN pour décrire la fonction de la

consideration – à savoir « identifier le rapport contractuel en attestant que les parties se sont effectivement engagées l’une envers l’autre »466 – suggère, à rebours de l’idée que l’auteur défend, que la fonction de la consideration est de confirmer l’engagement contractuel. N’est-ce pas une autre façon de dire qu’il s’agit de valider le contrat467 ? De même, en droit allemand, le contrat résulte de la rencontre de deux déclarations de volonté, une offre (§ 145 du BGB) et une acceptation (§147 du BGB) qui créent une apparence de contrat468, lequel pourra notamment être contesté en cas de Dissens.

La présence ou l’absence de contrepartie est alors parfaitement neutre s’agissant d’établir l’apparence d’un contrat : l’absence de contrepartie n’est pas de nature à contredire l’apparence du contrat mais d’invalider le contrat, apparent, qualifié de contrat à titre onéreux. Le contrôle de la contrepartie suppose donc a minima l’apparence d’un contrat qui, par ailleurs doit se rattacher à la catégorie des actes à titre onéreux en l’absence de tout élément démontrant une intention libérale. Or, à défaut de contrepartie, le contrat à titre onéreux ne peut être valable puisqu’il ne remplit pas les critères de sa qualification. En définitive, la sanction de l’indétermination du motif-contrepartie ne peut être que la nullité du contrat, conduisant à remettre en cause ce dernier rétroactivement.

§2- La sanction de la nullité du contrat

104. L’anéantissement rétroactif de l’acte. L’indétermination de la contrepartie

conduit, en ce que cette dernière est un motif qui doit nécessairement être intégré au contrat, à

465

V. R. DUXBURY, Contract Law, 2nd

ed., Sweet & Maxwell, 2011, p. 9 et s. ; R. MURRAY, Contract Law, The Fundamentals, 3rd

ed., Sweet & Maxwell, 2014, p. 11et s. ; E. MCKENDRICK, op. cit., p. 44 et s. ; M. CUMYN, th. préc., n° 207.

466 M. CUMYN, th. préc., n° 221.

467

V. en ce sens S. A. SMITH, Contract Theory, Clarendon Law Series, 2004, p. 209 : « Offer and acceptance are an essential part of any agreement. But that is not the end of the matter. In the common law, there are additionnal positive requirements that must be fulfilled for an agreement to be valid » [notre traduction : « L’offre et l’acceptation sont des éléments essentiels de l’accord. Mais les choses ne s’arrêtent pas là. En common law, il y a des exigences supplémentaires qui doivent être remplies pour que l’accord soit valable »].

468

V. § 145 et s. du BGB sur les règles relatives à l’offre et l’acceptation ; D. MEDICUS, AT, op. cit., §26 « Antrag und Annahme », n° 356 et s.

l’invalidité de l’acte. La nullité est la sanction de principe résultant de l’invalidité du contrat en droit français. Des concepts équivalents peuvent être identifiés en droits allemand et anglais : il est question de Nichtigkeit dans le premier et de contrat void dans le second. Une différence importante peut être immédiatement relevée : sauf commun accord des parties, la nullité du droit français doit être demandée en justice469. En droit allemand et anglais, une partie peut invoquer la nullité du contrat sans qu’il soit nécessaire qu’elle soit prononcée par un juge, ce dernier n’assurant, le cas échéant, qu’un contrôle du bien-fondé de la nullité dont se prévaut un contractant470. La nullité consiste unitairement en l’anéantissement rétroactif de l’acte471 : le contrat est, dès l’origine, dénué de force obligatoire. Dès lors, les parties ne peuvent s’en prévaloir ni entre elles ni à l’égard des tiers472 : l’acte est inefficace depuis sa conclusion à l’égard de tous. La nullité apparaît ainsi comme le degré d’inefficacité du contrat le plus fort473.

La rétroactivité de la nullité implique que les parties doivent être replacées dans la situation dans laquelle elles se seraient trouvées si le contrat n’avait pas été conclu474, ce qui se traduit par la mise en œuvre de restitutions au cas où l’acte aurait reçu exécution.

105. Le principe des restitutions consécutives à la nullité du contrat en droits français et allemand. La nullité emporte, en droit français, des restitutions au cas où les parties

auraient exécuté tout ou partie de leur engagement. Ainsi, d’après l’article 1178 alinéa 2 du Code civil, « le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé ». L’alinéa 3 du même article dispose alors, au sujet du contrat nul, que « [l]es prestations exécutées donnent lieu à restitution

dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9 », ces derniers consacrant, pour

l’essentiel, des solutions constantes. Les articles 1352 à 1352-9 du Code civil, au sein du chapitre IV clôturant le Titre IV sur le régime général des obligations, ont pour objet une série de dispositions réglant la question des restitutions, quelle qu’en soit la cause. Dès lors, suivant les termes de Mme KLEIN, « [d]étachées de l’origine quasi-contractuelle que la doctrine leur

a souvent prêtée, déracinées des règles de la nullité auxquelles la jurisprudence avait voulu les amarrer, les restitutions s’émancipent et prennent leur autonomie »475.

469

Article 1178 du Code civil. V. J.-F. HAMELIN, « Le caractère judiciaire de la nullité à l'heure de la réforme du droit des contrats », LPA, 9 déc. 2014, n° 245, p. 4 ; Y.-M. SERINET, « La constatation de la nullité par les parties : une entorse limitée au caractère judiciaire de la nullité », JCP G 2016, 845.

470 C’est également la solution retenue par les PEC et principes Unidroit. V. D. MAZEAUD, « Observations conclusives », in Réforme du droit des contrats : quelles innovations, RDC 2016, hors-série, p. 53, spéc. n° 3.

471

V. J. BEATSON, A. BURROWS, J. CARTWRIGHT, op. cit., p. 27.

472

Y. PICOD, « Nullité », in Répertoire de droit civil, Dalloz, 2013, n° 80 et s. Il existe toutefois des tempéraments à l’égard des tiers, tels que la théorie de l’apparence ou la protection du possesseur de bonne foi [Ibid., n° 115 et s.].

473 V. D. MEDICUS, op. cit., n° 487.

474

V. J. BEATSON, A. BURROWS, J. CARTWRIGHT, op. cit., p. 27.

475

L’instauration d’un régime autonome des restitutions tend alors à rapprocher le droit français des droits anglais et allemand. Ces derniers consacrent en effet une théorie autonome aux restitutions. A la différence du droit français, les droits anglais et allemand des restitutions reposent sur un concept unitaire, à savoir, respectivement, l’unjust enrichment (enrichissement injuste) et l’ungerechtfertigte Bereicherung (enrichissement injustifié), faisant l’objet des §§ 812 et suivants du BGB. Diverses situations permettent alors de caractériser un enrichissement injuste ou injustifié, c’est le cas du contrat nul en droit allemand. La Nichtigkeit d’un contrat emporte ainsi, le cas échéant, restitutions476. Les restitutions consécutives à la nullité du contrat sont mises en œuvre dès lors que la disparition du fondement juridique aux transferts de valeurs entre les parties conduit au constat d’un enrichissement injustifié. Le § 812 (1) du BGB prévoit ainsi une obligation de restitution à la charge de « celui qui sans justification juridique a reçu

quelque chose d’une personne par prestation ou d’une autre manière aux dépens de celle-ci »,

une telle obligation existe également « lorsque le fondement juridique disparaît »477, ce qui est le cas lorsque le contrat est nul. En droit anglais, en revanche, le seul fait qu’un contrat soit dit

void ne suffit a priori pas à fonder un droit aux restitutions478 : il faut que cette nullité résulte d’une cause d’invalidité du contrat constituant un unjust factor479 (facteurs injustes) ou ground

of restitutions480 (un fondement aux restitutions). Parmi ces unjust factors se trouvent notamment la failure of consideration (défaillance de la consideration).

106. La failure of consideration comme fondement aux restitutions en droit anglais.

La détermination de la possibilité d’obtenir des restitutions relève, en droit anglais, du droit des restitutions, Law of Restitution qui concerne, plus généralement, le droit de la responsabilité (Tort law), le droit du contrat (Contract law), et le droit des biens (Property Law). Le droit des restitutions se fonde classiquement sur la notion centrale d’enrichissement injuste (et non pas

476

V. H. KÖTZ, op. cit, n° 230.

477

Traduction de l’allemand par G. LARDEUX, R. LEGEAIS, M. PEDAMON, C. WITZ, op. cit.

478

La question est toutefois débattue. V. A. BURROWS, The law of Restitution, 3rd

ed., Oxford, 2011, p. 385 et s. ; G. VIRGO, The Principles of the Law of Restitution, 2nd ed., Oxford, 2006, p. 371 et s.

479

V. A. BURROWS, The law of Restitution, op. cit., p. 201 et s.

480

injustifié481) : l’unjust enrichment482. Les situations reconnues comme caractérisant un enrichissement injuste dans le cadre contractuel et permettant alors d’obtenir des restitutions correspondent, pour l’essentiel, aux causes d’invalidité du contrat. Ainsi en est-il de l’erreur (mistake), du dol (misrepresentation), de la contrainte (duress), de l’exploitation du cocontractant (undue influence et unconscionability) et de l’incapacité (incapacity). Un autre fondement est reconnu : il s’agit de la failure of consideration483. La notion de failure of

consideration renvoie, dans une première approche, à l’hypothèse où une partie a exécuté son

engagement mais n’a pas obtenu de contre-exécution en retour484. Au-delà de la question de la