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PARTIE I. HISTOIRE D’UNE DISTINCTION ENTRE PREMIER ET SECOND

1.6 Ecoles et collèges sous la V ème République

Le système éducatif actuel prend sa forme définitive sous la Vème République.

1.6.1 Rattachement au second degré de la formation des 12-15 ans

La réforme dite « Berthoin » (1959) va mettre en place la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans et l’amélioration de la formation des enseignants des collèges d’enseignement général, CEG (anciens CC). Elle va créer un cycle d’observation (6ème-5ème) en rapprochant le premier cycle du secondaire des classes du primaire supérieur. Ce cycle mène : à un enseignement général long, classique ou moderne jusqu’au baccalauréat, à un enseignement général court prolongeant d’une seule année le CEG, ou encore à l’enseignement professionnel. Cette réforme part de l’intention de permettre à tous de choisir ses études en s’émancipant de son origine sociale mais elle n’atteindra pas son objectif car le cycle d’observation reste discriminé. Le recteur Capelle la critique durement notamment par rapport au sort fait aux enfants ne pouvant entrer en 6ème mais devant être scolarisés jusqu’à 16 ans. Il s’oppose à une orientation après la 5ème

qu’il juge trop anticipée et tente de créer des établissements autonomes pour le cycle d’observation. Il doit reculer face à l’hostilité du

PARTIE I : Histoire d’une distinction entre premier second degré

SNES et de la Société des agrégés qui y voient une tentative de soustraire les classes de 6ème et 5ème au secondaire. Si la réforme Berthoin aménagée par Capelle avait réussi, nous pourrions avoir aujourd’hui un niveau primaire pour les 7-14 ans suivi d’un secondaire à partir de la 4ème.

Si les propositions de Capelle ne sont pas adoptées, l’inefficacité du cycle d’observation est constatée par tous. Il ne permet pas une réelle orientation des élèves car celle-ci arrive trop tôt dans la scolarité et ne fait que confirmer la ségrégation scolaire qui existe déjà à l’entrée en 6ème. En effet, les classes du cycle d’observation étant intégrées aux

établissements dans lesquels la poursuite d’étude est envisagée, les élèves continuent leur scolarité là où ils l’ont engagée. En 1963, la réforme Fouchet (décret du 3 août 1963) tente de donner un nouvel élan à la démocratisation de l’école en portant à quatre ans le cycle d’observation et d’orientation (de la 6ème

à la 3ème) et en l’implantant dans un nouveau type d’établissement distinct des autres, le collège d’enseignement secondaire (CES), dans lequel « il s’agissait, dans un premier temps, de faire travailler sous un même toit ceux qui, jusqu’ici, avaient été séparés par les structures, les traditions et les préjugés » (Capelle, 1974, p. 40). Cette création a été décidée à l’Elysée mais elle est l’aboutissement d’un compromis entre les positions du recteur Capelle, du président De Gaulle, du premier ministre Pompidou et du ministre de l’Education nationale Christian Fouchet (Chapoulie, 2010). Les avis de ces personnalités divergent grandement. Pompidou est contre un tronc commun au-delà de 11 ans (fils d’instituteur, il est le produit d’une méritocratie qui a fonctionné). Afin de concilier tout le monde, les CES sont créés mais deux des mesures envisagées par Capelle sont rejetées : l’élaboration d’un tronc commun de la 6ème

à la 3ème, puisque des filières sont conservées et le recrutement d’un corps d’enseignants exclusivement affectés en collèges. L’appellation elle- même de collège d’enseignement secondaire et pas d’école moyenne ou d’école d’orientation traduit un choix : il s’agit de placer ces établissements dans la continuité des anciens collèges (donc dans le secondaire), et pas dans celle des EPS. Capelle dira de cette organisation, par juxtaposition de filières, qu’elle fut retenue « pour combler le fossé qui séparait, par les enseignants et les mentalités, plus encore que par les programmes et les méthodes pédagogiques, le cycle des CEG du premier cycle de l’enseignement secondaire traditionnel » (Capelle, 1974, p. 40).

En 1963-1964, l’organisation du collège juxtapose trois filières : « classique » et « moderne long » où les professeurs sont certifiés ou agrégés et qui alimentent normalement

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le second cycle long ; « moderne court » qui prolonge les CC devenus CEG (établissements voués à disparaître) et dont les enseignants sont principalement bivalents (le plus souvent des instituteurs ayant préparé le diplôme du CAP-CEG) ; les « classes de transition » (6ème-5ème) suivies des « classes pratiques » (4ème -3ème) qui doivent se substituer aux classes de fin d’études des écoles primaires élémentaires et où les cours sont dispensés par des instituteurs. Dans ce cadre-là, le passage d’une filière à l’autre est possible, au moins dans la théorie. Progressivement et difficilement, ce nouveau collège se détache des lycées pour devenir autonome et une nouvelle architecture en trois niveaux se dessine : école, collège, lycée. Cette évolution entraîne le repli des écoles primaires sur la tranche des 6-11 ans : les classes de fin d’étude sont supprimées et l’entrée en 6ème

vide les grandes classes du primaire de leurs élèves. Les programmes et méthodes pédagogiques évoluent car l’école n’est plus une fin en soi, elle prépare à l’entrée au collège. Ainsi, les programmes peuvent être allégés, de nouvelles méthodes moins basées sur la mémorisation d’un grand nombre de connaissances se développent alors que, dans le même temps, il faut former les élèves aux exigences du collège, notamment en en faisant des lecteurs comprenant les textes et pas uniquement capables de les lire à voix haute.

De nombreux débats agitent la communauté enseignante pour savoir si le nouveau collège doit être rattaché au premier ou au second degré. En effet, les enseignants qui y exercent sont soit issus du primaire, soit du secondaire, certifiés, voire, plus rarement, agrégés. Chacun revendique être le plus à même d’enseigner au collège en arguant une plus grande proximité avec le peuple ou une meilleure formation universitaire. On retrouve ici les débats entre le SNI et le SNES, deux syndicats de la FEN, dont les positions sont, comme à l’occasion des conclusions du plan Langevin-Wallon, radicalement opposées, chacun cherchant à asseoir son pouvoir sur ce niveau et à défendre sa conception de l’enseignement. Les premiers dénoncent la fausse démocratisation des CES qui organisent une ségrégation entre les filières et défendent la supériorité des méthodes pédagogiques des enseignants du premier degré qui y enseignent. Les seconds se battent contre la séparation entre les collèges et les lycées et s’efforcent de maintenir une distinction avec les instituteurs, devenus PEGC (professeurs d’enseignement général de collège) en 1969, soulignant la faiblesse de leur formation universitaire. Ainsi, s’il y a une idée de créer un corps spécifique d’enseignants du collège, notamment dans le projet du ministre de l’Education nationale Fontanet de 1974 abandonné à la mort de Pompidou, les tensions syndicales rendent cette réforme impossible.

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Le SNI, qui a d’abord condamné la création du corps des PEGC, milite ensuite pour leur rapprochement avec les instituteurs ce qui se concrétise dans la transformation du syndicat du primaire en SNI-PEGC. De son côté, « le SNES, revendique la syndicalisation de ce nouveau corps et, faute de l’obtenir, réclamera son extinction » (Aubert et al., 1985, p. 208). Le collège est perçu comme un

« territoire à défendre pour le SNES qui entend bien préserver l’intégralité des frontières d’un domaine – l’enseignement secondaire – sur lequel il revendique passionnément la souveraineté ; [et comme un] espace à conquérir pour le SNI qui y voit une extension logique de l’école primaire, de cette école du peuple dont il se sent le défenseur légitime » (Brucy, 2003, p. 265).

Au-delà des luttes syndicales entre le SNI et le SNES, le débat sur l’école moyenne porte deux visions de l’éducation :

« Les professeurs défendent une idée de la culture : les humanités classiques sont pour eux la seule culture digne de ce nom ; les instituteurs en reconnaissent d’ailleurs implicitement la qualité, en confiant souvent leurs propres enfants aux sections classiques des lycées. Affaiblir cette culture serait pour les professeurs un abandon, un reniement, car beaucoup lui doivent d’être devenus ce qu’ils sont. C’est ce qu’il y a de mieux. Un tronc commun sans latin est pour eux un nivellement par le bas, primarisation du secondaire, démocratisation au rabais. Les instituteurs jugent cette position idéaliste. La culture humaniste, beaucoup trop éloignée des réalités populaires, relève d’un monde largement disparu, et survit parce qu’elle est la marque distinctive des classes dominantes. Eux qui connaissent le peuple, parce qu’ils en élèvent les enfants et qu’ils vivent avec eux […] mesurent l’inadaptation des humanités à la masse de la population et ils souhaitent une formation plus moderne, une culture qui arme aussi le jeune pour la vie. » (Prost, 2013, p. 80)

Finalement, c’est le secondaire qui réussira la conquête de l’école moyenne. Mais en répondant à une demande de primaire supérieur par une scolarité secondaire inévitablement dégradée, on a aggravé la marginalisation des mauvais élèves et fait reculer la démocratisation de l’école car les CEG œuvraient plus efficacement à cette démocratisation que les CES créés pour l’organiser (id., p. 96).

Cette démocratisation de l’école est au cœur de la réflexion des années 1970. Le développement des études statistiques de l’INSEE permet de mesurer la répartition des élèves par filière et classe sociale et personne ne peut plus ignorer le lien entre ces deux éléments. Les études des sociologues Bourdieu et Passeron, Les Héritiers en 1964 et La Reproduction en 1970, soulignent le rôle de l’école dans cette reproduction sociale. Pour ces auteurs, le système scolaire sélectionne sur les critères de la classe dominante (de la bourgeoisie), tout en faisant croire qu’elle le fait sur la base d’une réussite scolaire qui serait accessible à tous. Un autre ouvrage a eu une large audience à la même époque, L’école capitaliste en France de Baudelot et Establet. Ici aussi, il est question du rôle de l’école dans la reproduction du système capitaliste mais, ce qui est mis en avant, c’est la structure même de l’école en deux réseaux distincts : le primaire-professionnel d’un côté et le secondaire-supérieur de l’autre.

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L’idéologie de la soumission est inculquée aux élèves du premier, celle de la domination à ceux du second. Les mêmes auteurs s’intéresseront au premier degré en 1975 dans un autre ouvrage de référence, L’école primaire divise…, dans lequel ils reprennent leurs précédentes thèses et continuent de dénoncer l’inégalité du système scolaire : « L’école primaire ne reflète pas les différences sociales entre les enfants, elle les exploite ; elle n’enregistre pas des handicaps, elle les produit » (Baudelot, Establet, 1975, p107). Les livres de Bourdieu et Passeron comme ceux de Baudelot et Establet ne seront pas accueillis avec plaisir par beaucoup d’enseignants qui y voient une attaque de leur travail jugé inefficace pour réduire les inégalités sociales. Pourtant, les éléments factuels sur lesquels ces théories sont construites ne pourront pas être remis en cause : dans les années 1970, la démocratisation n’existe pas, dans les faits, à l’école11.

1.6.2 Collège unique

« La question de la nature du collège, si elle n’a jamais été tranchée dans les textes, l’a été dans les faits : par son organisation pédagogique, le contenu de ses programmes et la formation de ses enseignants, le collège est conçu comme une préparation au lycée général » (Haut Conseil de l’Education, 2010, p. 19)

C’est la loi Haby du 11 juillet 1975 qui, en fusionnant les CES et CEG dans un même et unique collège, va donner au système éducatif la forme qu’on lui connaît aujourd’hui : tous les enfants de 3 à 16 ans sont scolarisés dans les mêmes établissements de la maternelle au collège. Les filières sont également supprimées au collège et des classes fortement hétérogènes deviennent la norme. L’idée de la réforme est de répartir les élèves en fin de 3ème dans les formations générales, techniques ou professionnelles, et cela en fonction de leurs aptitudes. La seule exception réside dans la possibilité d’être orienté en CAP à la fin de la 5ème. Le schéma suivant permet de mieux comprendre à partir de quels établissements antérieurs le collège unique s’est constitué.

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Ce débat est toujours vif aujourd’hui comme en témoigne par exemple la publication du livre de Laval, Vergne, Clément et Dreux (2011) qui dénonce dès son titre « La nouvelle école capitaliste » ou, celui de l’économiste Eric Maurin (2007) qui, au contraire, met en avant les bénéfices de la démocratisation et du collège unique.

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Figure 2 : Evolutions des principales appellations des établissements scolarisant des élèves de

plus de 11 ans de la IIIème République à 1975

IIIe République 1941 1959 1963 1975 Ecoles primaires

supérieures

Collèges Collèges

Lycées Lycées Lycées

(2e cycle) Lycées Ecoles nationales professionnelles Ecoles nationales professionnelles Lycées techniques (1er cycle) Collèges d’enseignement secondaire (2e cycle)

Ecoles pratiques Collèges techniques Collèges Cours complémentaires Cours complémentaires Collèges d’enseignement général

Tous les établissements ci-dessus seront fusionnés dans le collège de 1975 en dehors des seconds cycles des lycées et lycées techniques. Ainsi, dans le collège d’aujourd’hui, on scolarise ceux qui, sous la IIIème République, étaient répartis dans six types d’établissements très différents tant au niveau du public accueilli que des enseignants y exerçant.

Si l’unification du collège, voulue par Haby, semble être opérationnelle pour les élèves, elle ne l’est toujours pas pour les professeurs. En effet, nous avons vu que l’idée d’un corps unique d’enseignants pour ce niveau avait été abandonnée. Des professeurs de CEG, souvent d’anciens instituteurs, enseignent à côté de leurs collègues du second degré. Dans les années 1980, les professeurs de collèges sont pour 55 000 des certifiés, pour 4 000 des agrégés, et pour 83 000 des PEGC. De plus, une culture moderne, différente de celle « classique » du lycée, n’est pas pensée.

« Le collège unique secrète des effets pervers, car s’il a pour mission d’intégrer l’ensemble des enfants, il est soumis, dans le même temps, à une exigence de performance et à une logique de sélection qui lui demandent de dégager une élite scolaire. » (Compagnon, Thévenin, 2001, p. 378). Devant le constat d’échec de la démocratisation effective de l’école, la gauche, arrivée au pouvoir en 1981, par l’entremise de son ministre de l’Education

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nationale, Alain Savary, va créer les zones prioritaires (qui deviendront les ZEP) dans le but de donner davantage de moyens aux établissements accueillant les populations les plus défavorisées. C’est le début de l’institutionnalisation de la discrimination positive. « L’idée que l’équité démographique exigeait de donner plus à ceux qui avaient moins constituait une révolution conceptuelle » (Prost, 2013, p. 197). La création de ces zones prioritaires s’appuie sur les propositions du SGEN. La FEN dénonce le « tiers-mondisme » de la mesure (Compagnon, Thévenin, 2001, p. 309). Mais si l’instauration des ZEP est facile à mettre en place, il reste à réfléchir à l’évolution des pratiques des enseignants. Le rapport De Peretti, remit en février 1982, propose de porter une grande attention à la formation continue des professeurs. Les MAFPEN (Missions académiques à la formation des personnels de l’éducation nationale) sont créées et les plans académiques de formation se mettent en place régulièrement, amorçant un réel changement.

Afin de travailler à la rénovation des collèges, « maillon faible du système scolaire » (Prost, 2013, p. 201), un nouveau rapport est demandé par Savary à Louis Legrand, professeur en sciences de l’éducation engagé dans la rénovation de l’enseignement du français et connu et apprécié des mouvements pédagogiques. Rendu le 6 janvier 1983, ce rapport propose un changement radical : résoudre le problème de l’hétérogénéité des élèves par la constitution de groupes de niveau pour le français, les mathématiques et la langue vivante dès la 6ème, mettre en place un système de tutorat et modifier le temps de service des enseignants (16 heures d’enseignement avec les élèves, 3 heures de concertation et 3 heures de tutorat). Ces propositions, si elles pouvaient sembler révolutionnaires, avaient été expérimentées avec succès dans 17 collèges de 1967 à 1975. Mais cette nouvelle conception du métier est totalement rejetée. Savary décide donc de ne pas donner suite. Dans le même temps, il accentue la réflexion sur l’autonomie des établissements en s’appuyant sur le mouvement de décentralisation en cours.

Dans ce contexte, la loi du 22 juillet 1983, portant sur la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat, crée une nouvelle catégorie d’établissement, l’établissement public local d’enseignement (EPLE), qui comprend les collèges, lycées et établissements de l’éducation spéciale. Les EPLE se trouvent dotés d’une « légitimité nouvelle pour développer des politiques d’établissement leur permettant d’afficher une identité spécifique vis-à-vis de l’extérieur » (Duru-Bellat, Van Zanten, 2006, p. 23). Puis en 1985, est lancé l’objectif de 80% d’une classe d’âge au baccalauréat à l’horizon

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de l’an 2000 et la création du baccalauréat professionnel. Ce dernier va contribuer à faire disparaître le CAP qui se préparait après la 5ème. Dorénavant, tous les élèves restent au collège de la 6ème à la 3ème mais les mauvais élèves ne sont pas devenus bons pour autant. L’échec scolaire « ronge le collège et dénoue le lien social » (Prost, 2013, p. 254).

Le retour de la droite en 1986 est marqué par la volonté de briser l’influence de la FEN. Pour cela, des mises à disposition, notamment syndicales, sont refusées, les postes d’autorité sont renforcés (notamment avec la création au ministère d’une Direction des personnels d’inspection et de direction), le recrutement des PEGC est arrêté, etc. Ce dernier point marque la victoire du secondaire sur le primaire pour la prise de contrôle du collège et prend acte du fait que « dans l’enseignement face à la classe, les PEGC, quelle que soit leur formation, finissent par s’appuyer sur une identité professionnelle secondaire afin de correspondre au modèle de la discipline prôné par l’institution » (Bret, 2015b, p. 76). Plus qu’une victoire syndicale, il s’agit du poids des intellectuels qui ont défendu une culture classique élitiste légitime, à laquelle le premier degré n’a pas de nouvelle culture à opposer. Pourtant « il y avait contradiction à généraliser un enseignement élitiste dans ses méthodes comme ses contenus » (Prost, 2009, p. 15).

1.6.3 IUFM et unification du corps des enseignants

L’étape suivante est importante pour l’évolution du système éducatif. Il s’agit de la loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989 de Lionel Jospin, ministre de l’Education nationale de la gauche qui a remporté les élections présidentielles. Parmi les mesures qui en découlent : l’élève est placé « au centre du système éducatif », un Conseil national des programmes et un Conseil supérieur de l’éducation sont instaurés, l’enseignement est structuré en cycles en vue de favoriser la continuité des apprentissages et les IUFM sont créés en vue d’uniformiser le corps des enseignants. Cette dernière mesure nous intéresse particulièrement. En effet, elle signe la fin d’une distinction entre le statut des professeurs des écoles, qui remplacent les instituteurs, et celui des professeurs des collèges. Mis à part pour les agrégés, le nombre d’années d’études nécessaire pour passer le concours est le même, la formation se déroule dans un lieu unique, les salaires sont alignés, les enseignants du premier degré deviennent fonctionnaires de catégorie A…

Au travers du rapide historique dressé dans cette partie, nous avons vu que ce rapprochement n’était pas évident, les professeurs du secondaire étant considérés, au cours de

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l’histoire, comme faisant un métier supérieur intellectuellement à celui des instituteurs. Pourtant des éléments précurseurs ont permis cette évolution. L’idée d’une formation professionnelle intégrée à l’université remonte au moins au plan Langevin-Wallon. La diversification des études assurées par l’université, notamment avec la création des IUT, autorise à penser une formation à vocation professionnelle dans le sein de cette institution. Le SGEN, le parti communiste, puis le colloque d’Amiens en 1968, proposent une rénovation de la formation des enseignants avec un même recrutement au niveau licence, l’intervention