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PARTIE I. HISTOIRE D’UNE DISTINCTION ENTRE PREMIER ET SECOND

2.2 Une année des Dossiers de la revue Les cahiers pédagogiques

pédagogiques) qui se présente comme un mouvement militant dont les adhérents sont des acteurs du monde éducatif de la maternelle à l’Université. Publiée depuis 1946, cette revue est diffusée à hauteur de 6000 exemplaires pour chaque numéro. Elle s’appuie sur des récits d’expériences, des réflexions théoriques, des comptes rendus de recherche, etc. Elle est « à la fois une revue, un mouvement pédagogique, un outil de formation professionnelle, un espace hétérogène de débat et de questionnement, un espace de circulation de savoirs (y compris scientifiques) » (Riondet, 2013, p. 11). Cette revue réunit à son origine « 1'aile marchante du corps professoral, ceux qui ont soutenu les expériences du Front populaire, espèrent le plan Langevin-Wallon et qui, dans l'attente d'une véritable réforme, se battent sur le front de l’innovation pédagogique » (Chartier, 1996, p. 205).

Notre choix s’est porté sur cette revue en particulier parce qu’elle concerne tout le système éducatif et nous donne ainsi l’occasion d’étudier d’éventuelles passerelles entre les différents degrés d’enseignement notamment entre le premier et le second. Nous nous sommes concentrée sur l’année 2013 lors de laquelle la Loi pour la refondation de l’école a été adoptée.

2.2.1 Analyse du corpus

Notre corpus est constitué des articles de la partie Dossier de la revue les Cahiers pédagogiques pour l’année 2013, soit 8 numéros regroupant 215 articles sur 366 pages. Les thèmes de ces dossiers sont les suivants : « Par ici les sorties » (janvier), « Actualité de la pédagogie différenciée » (février), « Le sens de l’orientation » (mars), « Mieux apprendre avec la coopération » (mai), « A l’école de la bande dessinée » (juin), « Questions aux programmes » (septembre), « Apprendre à chercher, chercher pour apprendre » (octobre), « Ce qui fait changer un établissement » (décembre). Nous voyons qu’aucun ne porte sur une

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classe d’âge ou un public particulier mais que, au contraire, ils sont tous susceptibles de faire l’objet de comptes rendus d’expériences ou de réflexions concernant plusieurs niveaux.

Nous avons dépouillé la totalité de ces articles en notant pour chacun le numéro concerné, le titre de l’article, la pagination, le nom du ou des auteurs ainsi que le niveau dans lequel il(s) exerce(nt), le ou les niveau(x) expressément évoqué(s). Nous avons codé les données concernant le niveau d’exercice des auteurs de la façon suivante : 1 pour le premier degré, 2 pour le collège, 3 pour le lycée, 4 pour l’enseignement supérieur, l’Université ou autres champs de la recherche et 6 pour les personnes relevant d’autres catégories ou n’entrant pas directement en ligne de compte dans notre analyse (conseiller d’orientation, scénaristes, enseignants en Segpa ou en FLE, rédacteurs de la revue, etc.). Nous avons repris les mêmes codes pour les niveaux auxquels il est fait référence dans les articles, en y ajoutant le 5 pour les textes traitant de l’éducation de façon générale sans référence particulière à un niveau d’enseignement. Devant le faible nombre d’articles écrits par des professeurs en maternelles ou en lycées professionnels (et/ou concernant ces niveaux) nous avons fait le choix de joindre les premiers au primaire (code 1) et les seconds aux lycées (code 3) sans différencier ces types d’établissements. Les auteurs et/ou sujets d’articles faisant référence à plusieurs niveaux ont été codés avec le signe « + » entre les chiffres indiquant les niveaux concernés. Ainsi, un article parlant du premier degré et du collège sera codé « 1+2 ». Quelques auteurs sont présentés comme exerçant dans plusieurs niveaux, c’est le signe « ET » qui a été utilisé pour les qualifier. Ainsi, un professeur du second degré dont il n’est pas précisé s’il exerce en collège ou lycée apparaîtra en « 2ET3 ».

Une fois notre corpus dépouillé et codé dans un tableur Excel, nous avons croisé les champs « auteur » et « sujet » dans un tableau croisé dynamique faisant apparaître le nombre d’articles concernés ainsi que le nombre de pages correspondant. Nous avons privilégié le nombre d’articles au nombre de pages dans notre analyse car il nous semble que le premier élément traduit davantage une volonté éditoriale que le second.

2.2.2 Auteurs en fonction de leur niveau d’exercice

Le graphique suivant indique le niveau dans lequel les auteurs des Dossiers des Cahiers pédagogiques exercent.

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Figure 3 : Répartition des auteurs en fonction de leur niveau d’exercice35

Les auteurs, principalement des enseignants ainsi que quelques Inspecteurs, ont été classés par rapport aux niveaux dans lesquels ils exercent. Les parents d’élèves, conseillers d’orientation, enseignants en Segpa ou en FLE et personnes n’exerçant pas dans l’Education nationale apparaissent dans la rubrique « Autres ». Les auteurs (au nombre de treize) exerçant dans plusieurs niveaux ou à plusieurs titres font l’objet d’une catégorie spécifique. Il est intéressant de noter que, parmi ceux-ci, 10 enseignants sont présentés comme appartenant au second degré sans distinction entre le collège et le lycée. Cette donnée peut être considérée de plusieurs façons. On peut insister sur la liaison entre le collège et le lycée qui est ici apparente alors qu’il n’y a pas, dans notre échantillon, d’auteur décrit comme exerçant dans le premier et le second degré. On peut également regarder ce chiffre en soulignant qu’il est peu important puisque les enseignants de collège (71 auteurs) et de lycée (32 auteurs) sont tous enseignants du second degré et qu’ils auraient pu tous être présentés de cette façon-là. Le choix de la revue semble donc être de différencier le collège du lycée, tout comme il distingue le premier degré ainsi que le domaine universitaire.

En nous penchant sur notre graphique, nous pouvons remarquer que ce sont les universitaires (74) suivis des enseignants de collèges (71) qui sont les plus représentés, les enseignants exerçant dans le premier degré (26) et ceux des lycées (32) étant les moins nombreux.

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« Auteur unique » fait référence aux auteurs ayant écrit un article seul ; « Auteurs en co-écriture » comptabilise les auteurs ayant écrit avec quelqu’un d’autre ; « Auteurs en co-écriture avec un auteur exerçant dans un autre niveau » extrait de la somme précédente les co-écritures entre auteurs de niveaux différents ; « Total » fait la somme des deux premières catégories.

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Nous avons choisi de comptabiliser séparément les auteurs écrivant seuls un article et ceux écrivant avec une autre personne. En effet, cette donnée nous permet de commencer à percevoir si les niveaux d’enseignements sont perméables entre eux ou non. Ainsi, sur les 26 personnels du premier degré ayant écrit dans les Cahiers pédagogiques en 2013, 16 l’ont fait seuls et 10 avec un autre auteur. Il s’agissait principalement d’articles écrits avec des collègues de même niveau, un seul article ayant été écrit avec deux professeurs de collège et deux autres avec des universitaires. Sur les 71 auteurs de collège, 38 ont écrits seuls et 33 avec une autre personne. Tout comme pour le premier degré, les co-écritures se sont majoritairement faites avec des collègues de même niveau (11 articles représentant 25 auteurs), alors qu’un seul article est co-écrit par des professeurs des écoles et collèges et deux articles par des enseignants de collège et lycée. Quant aux auteurs de lycée, sur 32, seuls 8 écrivent avec une autre personne. Outre les deux textes précédemment cités écrits avec un collègue de collège, 3 articles sont rédigés avec un collègue exerçant dans le même niveau. Ainsi, ce qui se dessine à l’aune de cette première analyse, c’est que les personnels concernés par un niveau d’enseignement se mélangent peu avec les autres collègues lorsqu’il s’agit de rédiger un texte pour cette revue.

2.2.3 Niveaux évoqués dans les articles en fonction du statut des auteurs

Pour faciliter la lecture des tableaux suivants, nous les avons scindés en sous- thématiques. Nous traiterons dans un premier temps des auteurs uniques d’articles puis des co-écritures et, enfin, nous nous intéresserons plus particulièrement aux articles citant expressément plusieurs niveaux.

2.2.3.1 Les niveaux évoqués dans les articles écrits par un auteur unique

Le tableau suivant fait apparaître les niveaux expressément évoqués dans les 177 articles écrits par un auteur unique :

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Tableau 1 : Articles des Dossiers des Cahiers pédagogiques écrits par un auteur unique

Sujets Auteurs 1 2 3 4 5 6 1+2 1+2+3 1+2+3 +4 2+3 2+3+4 3+4 Total 1 14 1 1 16 2 30 3 3 1 1 38 3 22 2 24 4 9 3 4 5 25 2 1 1 1 4 1 56 6 1 1 3 1 13 5 1 4 1 30 1ET4 1 1 2ET3 2 1 1 5 9 2ET3ET4 1 1 2ET6 1 1 4ET6 1 1 Total 24 36 30 7 45 13 3 2 1 14 1 1 177

Les chiffres correspondent, pour les auteurs comme pour les thèmes abordés dans les articles, aux niveaux suivants : 1=premier degré ; 2=collège ; 3=lycée ; 4=Université ou supérieur ; 5=enseignement de façon général ; 6 = autre.

D’après ce tableau, nous voyons que lorsqu’un auteur est seul à écrire son article, il écrit principalement sur le niveau auquel il appartient. Ainsi, sur 16 articles écrits par des enseignants du premier degré, 14 concernent exclusivement ce niveau. Pour les professeurs de collèges, le rapport est de 30/38 et pour ceux des lycées de 22/24. Les universitaires écrivent majoritairement sur l’enseignement de façon générale (25/56) ou sur un seul niveau (21/56). Si l’on regarde uniquement les auteurs exerçant dans le premier et le second degré (90), on remarque que 77% écrivent exclusivement sur le milieu dans lequel ils travaillent.

Qu’un enseignant de primaire, de collège ou de lycée évoque principalement son travail avec ses élèves n’est pas, en soi, étonnant. Pour autant, on aurait pu attendre un nombre plus important d’articles relatant des expériences concernant plusieurs niveaux ou réfléchissant à cette perspective notamment au regard des thèmes des Dossiers analysés. Même dans le dossier consacré à l’orientation, seuls deux articles concernent le collège et le lycée et un le lycée et l’université. Ils n’ont pas été rédigés en co-écriture. Leurs auteurs ont été classés dans la catégorie « Autre » (codée 6) car il s’agit d’un journaliste anonyme des Cahiers pédagogiques, d’un conseiller d’orientation et d’un retraité de l’enseignement et du journalisme.

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2.2.3.2 Les niveaux évoqués dans les articles en co-écriture

Les co-écritures pouvant être davantage susceptibles d’évoquer un travail entre différents niveaux d’enseignement, regardons à présent les niveaux évoqués dans les articles écrits par plusieurs auteurs.

Tableau 2 : Articles écrits par plusieurs auteurs

Sujets Auteurs 1 2 3 5 1+2 1+2+3 2+3 Total général 1+1 3 3 1+2 1 1 1+4 2 2 2+2 10 1 11 2+3 2 2 2+4 2 1 3 2+6 1 1 3+3 3 3 4+4 2 2 1 5 4+6 1 2 3 6+6 2 1 1 4 Total général 10 10 3 7 2 3 3 38

Les chiffres correspondent, pour les auteurs comme pour les thèmes abordés dans les articles, aux niveaux suivants : 1=premier degré ; 2=collège ; 3=lycée ; 4=Université ou supérieur ; 5=enseignement de façon général ; 6 = autre.

Notons tout d’abord que, sur les 38 articles rédigés en co-écriture, 12 seulement l’ont été par des collègues de niveaux différents. Seul un article est co-écrit par un personnel du premier degré avec deux collègues de collège, et deux entre personnels de collèges et lycées.

Venons-en à présent aux thèmes des articles. Si on laisse de côté les textes portant sur l’éducation de façon générale, sur 38 articles écrits à plusieurs mains, seuls 8 portent sur plusieurs niveaux : 5 sur le premier et le second degré et 3 sur le collège et le lycée.

2.2.3.3 Les articles portant sur plusieurs niveaux d’enseignement

Dans le cadre de notre étude, il est particulièrement intéressant d’analyser les articles concernant plusieurs niveaux, notamment ceux évoquant le premier et le second degré. C’est ce que fait apparaître le tableau suivant qui comptabilise à la fois les articles écrits par un seul auteur et ceux en co-écriture.

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Tableau 3 : Articles portant sur plusieurs niveaux

Sujets Auteurs 1+2 1+2+3 1+2+3+4 2+3 2+3+4 3+4 Total général 1 1 2 1 1 4 4 1 1 1 4 1 12 6 1 4 1 12 1+2+2 1 1 2+2 1 1 2+3 2 2 2+4 1 1 2+6 1 1 2ET3 5 5 2ET3ET4 1 1 4+4 1 1 6+6 1 1 Total général 4 6 1 17 1 1 30

Les chiffres correspondent, pour les auteurs comme pour les thèmes abordés dans les articles, aux niveaux suivants : 1=premier degré ; 2=collège ; 3=lycée ; 4=Université ou supérieur ; 5=enseignement de façon général ; 6 = autre.

Grâce à ce tableau, nous voyons que le premier degré et le collège sont expressément cités dans 4 articles écrits, pour chacun d’entre eux, par un professeur de collège, un universitaire, un professeur des écoles et deux de collège, un professeur du second degré faisant également de la recherche. Si l’on rajoute à ces articles ceux concernant le premier et le second degré (avec le lycée), on trouve 6 textes de plus. Dans chacun de ces textes, il y a toujours un universitaire ou un auteur de la catégorie « Autre » qui a participé à la rédaction. Enfin, un article concerne le système scolaire du premier degré à l’Université. Si l’on regarde, à présent, les articles concernant le collège et le lycée exclusivement, on en compte 17, dont 8 ont été écrits par des universitaires ou autres catégories, et 5 articles par des enseignants se présentant comme appartenant au second degré et ayant exercé en collège et lycée. Un autre article concerne le secondaire et l’Université. Nous pouvons également noter que seuls deux articles concernent à la fois le lycée et l’enseignement supérieur.

Le graphique suivant fait apparaître le pourcentage du nombre de pages d’articles portant au moins sur deux niveaux parmi le premier degré, le collège, le lycée et l’université sur la totalité des 30 articles concernés.

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Figure 4 : Nombre de pages en fonction des niveaux expressément évoqués parmi les articles

traitant d’au moins deux niveaux (en %)

Les articles concernant directement le collège et le lycée sont les plus nombreux (57%) ce qui représente 65% du nombre de pages, alors que ceux ne portant que sur le premier degré et le collège représentent 14% des articles concernant au moins deux niveaux soit 9% du nombre de pages. Si la liaison collège-lycée semble être privilégiée à celle entre le premier et le second degré et à celle entre le lycée et l’université, nous noterons qu’il y a peu d’articles qui font état d’expériences dans au moins deux niveaux différents (30 sur un total de 215 soit moins de 50 pages sur 366). Afin de mieux prendre en compte nos données, nous pouvons les ramener au nombre total d’articles écrits dans les Dossiers des Cahiers pédagogiques. De cette façon, on obtient les pourcentages suivants : 8,82% des pages du total des articles concerne exclusivement le collège et le lycée (soit 7,91% des articles), 1,20% le premier degré et le collège (soit 1,86% des articles). Si on ajoute à ces articles ceux portant sur plus de deux niveaux, 12,11% des pages concerne le collège et le lycée (soit 11,64% des articles) et 3,94% des pages porte sur le premier et le second degré (soit 5,12% des articles).

Ainsi, l’analyse des articles, écrits pendant l’année 2013 des Dossiers de la revue les Cahiers pédagogiques, montre une faible perméabilité entre les différents niveaux d’enseignement que sont le premier degré, le collège, le lycée et l’enseignement supérieur. C’est particulièrement le cas pour ce qui concerne le lien entre école et collège qui est peu développé tant au niveau des sujets des articles que des co-écritures. Sans accorder à cette

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analyse plus d’importance qu’elle n’en a (la revue des Cahiers pédagogiques a une audience limitée et plutôt orientée vers le second degré), elle montre néanmoins la faible porosité des frontières entre niveaux d’enseignement et l’intérêt limité que suscite la question des liens pédagogiques inter-niveaux.

2.3 Conseil école-collège et nouveaux cycles : un exemple de