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Ecole et Ethique : la question des valeurs et des fins en éducation

Partie 2 – Fondements théoriques : une approche pluridisciplinaire

3. Ecole et Ethique : la question des valeurs et des fins en éducation

Les programmes officiels en vigueur en France prévoient un enseignement « civique » et « moral », en liant au passage ces deux dimensions sous un même intitulé. Cette « commande » institutionnelle, au double sens de devoir à accomplir et de besoin formulé au nom de la société, ouvre la voie à de nombreux questionnements. Pour notre part, nous souhaitons dans les lignes qui suivent interroger les implications de l’usage des concepts d’éthique et de morale à l’Ecole, et poser la question des valeurs en éducation, en explorant notamment les liens qui les unissent avec la citoyenneté démocratique.

3.1. Autour des concepts d’éthique et de morale

Cette première sous-partie vise à poser quelques jalons définitoires concernant les concepts d’ « éthique » et de « morale », afin de préciser sur quoi repose leur différenciation, et justifier les choix terminologiques que nous opérons dans la présente recherche.

3.1.1. Etymologie et définition

Si une différenciation doit s’opérer entre « morale » et « éthique », ce n’est pas l’étymologie qui nous y aidera. En effet, les deux termes partagent une origine étymologique tout à fait similaire, grecque pour « éthique » de ethos, désignant les mœurs, latine pour « morale » de mores, désignant également les coutumes et habitudes, les mœurs.

Les définitions disponibles dans les dictionnaires de langue française indiquent également des traits sémantiques communs. Ainsi, le TLFI éfinit le substantif « éthique » comme étant la « science qui traite des principes régulateurs de l'action et de la conduite morale ». Cette entrée philosophique figure également dans la définition de la morale comme

« science qui a pour objet les règles de la conduite et les fins de l'action humaine ». L’adjectif « éthique » quant à lui « concerne la morale ». Les deux termes sont donc sémantiquement très proches. Tout au plus peut-on relever à ce stade que figure seulement dans la définition de la morale la référence à « des règles de conduite reconnues comme absolument et universellement valables. » Sur le plan des usages sociaux, il est intéressant de noter une évolution contrastée de ces deux termes depuis la fin des années soixante : le succès contemporain du mot « éthique », vérifiable dans les nouveaux mots et expressions qu’il a générés (bioéthique, éthique économique, éthique professionnelle, etc), contraste avec le discrédit attaché à la « morale » et à ses interdits, symbolisés dans les expressions « faire la morale ». Comme le souligne Pierre Verdier dans son article « Morale, éthique, déontologie et droit » paru dans Les Cahiers de l'Actif :

« Dans le langage actuel, la morale ayant pris un petit goût de vieux, on préfère parler d’éthique, mot qui fait plus moderne, même s’il date d’Aristote. On accepte mal qu’on nous fasse la morale ; on comprend mieux que l’on rappelle des exigences éthiques. »204

Ces usages sociaux divergents nous incitent à approfondir notre connaissance de ces concepts afin de mieux cerner, au-delà de leur proximité sémantique, leurs éventuelles nuances et complémentarités.

3.1.2. Eléments de différenciation

Les termes « éthique » et « morale » sont-ils synonymes ? La seule différence est-elle que l’usage de la langue française a longtemps fait prévaloir la racine latine et le terme de « morale » ? Comment expliquer le succès médiatique actuel du terme « éthique » et le discrédit qui pèse sur la « morale »? Dans la mesure où les deux termes existent et cohabitent, il parait souhaitable de se placer sur le terrain de prédilection de la réflexion en matière de morale et d’éthique, la philosophie. Ainsi, Louis Legrand205 situe clairement la différenciation entre ces deux termes sur le plan philosophique, puisqu’il souligne que

« la morale est l’ensemble des règles qui régissent les rapports entre les personnes. Elle fait partie d’une façon de vivre communément admise. Elle définit de manière habituelle et consensuelle ce qu’est le Bien et le Mal. »,

tandis que l’éthique

« apporte en ce domaine la distance de la réflexion philosophique. Elle s’interroge sur le Bien et le Mal, met en question les valeurs, en cherche le fondement possible dans un ordre extérieur et supérieur à la coutume ».

Voilà donc une première piste de différenciation : l’éthique serait philosophique en ce qu’elle se situerait du côté de la réflexion et du questionnement. Les lignes qui suivent ont

204 Verdier P., « Morale, éthique, déontologie et droit », Les Cahiers de l'Actif, n° 276/277, p. 17.

pour fonction d’approfondir ces premiers éléments, en opérant un rapide survol historique, puis en présentant successivement la position de Paul Ricoeur et d’André Comte-Sponville sur le sujet, ce qui devrait nous permettre de tirer quelques conclusions relatives à nos propres choix terminologiques.

3.1.2.1. Approche philosophique : quelques jalons historiques

Dans un premier temps, posons quelques jalons historiques en matière de réflexion philosophique sur l’éthique. Le nombre de philosophes ayant réfléchi à cette question étant considérable, il nous fallu choisir - et par conséquent renoncer. Nous limiterons ainsi notre présentation au XXème siècle français, et en particulier aux travaux de Ricoeur. Au préalable, nous rappellerons brièvement en quoi sa pensée se distingue de celle de deux de ses prédécesseurs, Emile Durkheim et Henri Bergson206.

Dans L’éducation morale207, Durkheim a posé les bases d’une éthique érigée en science sociologique, indépendante de la religion, analysée depuis comme la seule voie conforme à la modernité. Les commandements moraux, que les élèves doivent intégrer pour devenir de « bons » citoyens, et qui permettent la vie en société, ne sont pas à découvrir : ils existent déjà et s’imposent à nous, ils sont « la société en nous ». La morale est donc laïque car elle est scientifique, les faits moraux étant « des phénomènes naturels qui relèvent de la seule raison »208.

Bergson insiste surtout sur l’opposition entre société close et société ouverte (Les deux

sources de la morale et de la religion, 1932). La première, organisée autour d’une nation, se définit en se distinguant des autres nations. Selon Bergson, elle ne pourra donc jamais s’adresser à l’humanité tout entière. Il lui préfère la société ouverte, qui repose sur une autre morale et une autre religion, et qui est animée par l’amour du genre humain et le respect de « l’éminente dignité de la personne humaine »209.

« Aussi la morale ouverte ne peut-elle se passer de la religion, à savoir celle des grands mystiques qui ont lancé l’appel à l’amour de l’humanité et à la justice dans le monde. Donc, à coté de la pression sociale, il y a encore « l’élan d’amour » (id., p. 98) que Bergson voit comme une manifestation de l’élan créateur de la vie en général qu’il avait décrit dans son oeuvre parue en 1907 : L’évolution créatrice.»210.

206 Nous travaillerons à parti des conclusions établies par Peter Kemp dans Kemp P., « Le fondement de l'éthique vu à travers l'éthique du siècle de Ricoeur », Revue de métaphysique et de morale, 2006/2 n° 50, p. 173-184.

207 Durkheim E.

208 Durkheim E., cité par P. Kemp.

209 Bergson H., 1958, Les deux sources de la morale et de la religion, PUF, p. 28.

Cette présentation rapide des positions de deux philosophes, le premier au tout du début du vingtième siècle, le second après l’expérience traumatisante de la première guerre mondiale, nous a permis d’entrevoir quelques-uns des jalons importants en matière de réflexion philosophique sur l’éthique : les rapports entre éthique et religion, l’autonomie et la liberté du sujet, ses liens avec ses semblables, sur le plan familial, national et au-delà avec l’humanité tout entière.

3.1.2.2. La position de Paul Ricoeur

Voyons à présent en quoi la pensée de Ricoeur a fait date au XXème siècle et nourrit notre réflexion, notamment en ce qui concerne les relations entre l’éthique et la morale. Pour évoquer - à grands traits - les points forts de son raisonnement, nous nous appuierons sur les textes suivants : les études 7, 8 et 9 de Soi-même comme un autre (1990), qu’il appelle sa « petite éthique » ; un essai extrait d’une conférence donnée au Centre Pompidou intitulée « De la morale à l’éthique et aux éthiques », parue dans l’ouvrage collectif Un siècle de philosophie en 2000, et qui constitue, selon la volonté du philosophe, « un peu plus qu’une clarification et un peu moins qu’une rétractation ». Lorsqu’il se propose de définir et de distinguer « éthique » et « morale », Ricoeur commence par insister sur la proximité étymologique et historique de ces deux termes :

« Qu'en est-il maintenant de la distinction proposée entre éthique et morale ? Rien dans l'étymologie ou dans l'histoire de l'emploi des termes ne l'impose. L'un vient du grec, l'autre du latin ; et les deux renvoient à l'idée intuitive de moeurs, avec la double connotation que nous allons tenter de décomposer, de ce qui est estimé bon et de ce qui s'impose comme obligatoire. »211.

La fin de cette citation laisse entrevoir une des pistes de différenciation retenue : certes, la distinction ne reposera pas sur l’étymologie et Ricoeur parle de définition par « convention » ; elle s’inscrit pourtant dans un double héritage philosophique, aristotélicien pour ce qui relève de l’éthique, kantien pour ce qui touche à la morale.

« C'est donc par convention que je réserverai le terme d'éthique pour la visée d'une vie accomplie et celui de morale pour l'articulation de cette visée dans des normes caractérisées a la fois par la prétention à l'universalité et par un effet de contrainte (on dira le moment venu ce qui lie ces deux traits l'un à l'autre). On reconnaîtra aisément dans la distinction entre visée et norme l'opposition entre deux héritages, un héritage aristotélicien, où l'éthique est caractérisée par sa perspective téléologique, et un héritage kantien, où la morale est définie par le caractère d'obligation de la norme, donc par un point de vue déontologique. » 212.

211 Ricoeur P., 1990, Soi-même comme un autre, Seuil, p. 200.

Voyons à présent en quoi son essai paru en 2000 prolonge la réflexion engagée. Tout en rappelant la difficulté de l’entreprise et l’absence de consensus sur le rapport (hiérarchique ou non) qu’entretiennent ces deux termes, Ricoeur propose de faire de la « morale » le noyau dur, celui par rapport auquel sera définie l’éthique. La morale revêt deux dimensions : elle désigne d’abord « la région des normes », le permis et le défendu. C’est cette dimension que Ricoeur adosse au formalisme kantien et à l’impératif catégorique, formulé en ces termes : « Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle ». La morale fait également référence au « sentiment d’obligation en tant que face subjective du rapport d’un sujet à des normes » : la norme existe face à un sujet capable d’assumer la responsabilité de ses actes et de se poser comme agent. Ce faisant, Ricoeur fait du système moral un système autoréférentiel, clos, puisqu’il « ne présuppose rien de plus qu'un sujet capable de se poser en posant la norme qui le pose comme sujet ».

Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, l’éthique se définit par rapport à la morale envisagée comme terme de référence. Elle comprendrait elle-même deux axes : le premier ferait référence à l’amont des normes (Ricoeur l’appelle « éthique antérieure ») et le deuxième à l’aval des normes (c’est l’« éthique postérieure »). C’est ainsi que Ricoeur justifie les emplois diversifiés du terme « éthique », faisant tantôt référence à une réflexion sur les normes, une « métamorale », et à d’autres occasions décliné en « éthiques régionales », lorsqu’il est accompagné de compléments (éthique médicale, éthique juridique, etc).

Avant de détailler ce qu’il entend par « éthique antérieure », Ricoeur prend soin de justifier le recours à cette catégorie : dans la mesure où l’ordre moral est autoréférentiel, pourquoi convoquer une éthique dont le champ d’application serait l’amont des normes ? La réponse se situe dans la prise en compte du sentiment subjectif d’obligation du sujet face aux normes, de la motivation du sujet à effectuer son devoir - autrement dit, dans la considération du rôle essentiel que jouent les sentiments moraux, qui font suture « entre le royaume des normes et de l'obligation morale, d'un côté, et celui du désir de l'autre ». Les éthiques postérieures font quant à elle référence à ce que Ricoeur nommait dans Soi-même

comme un autre la sagesse pratique, et qu’il désigne dans le présent essai sous le vocable d’éthiques « appliquées ». L’auteur fait une nouvelle fois référence aux travaux de Kant et plus particulièrement aux variantes de l’impératif catégorique, qui ont trois sphères d’action : soi, autrui, la cité, auxquelles correspondent les impératifs de maintien de soi, de sollicitude pour autrui et de participation citoyenne à la souveraineté :

« À leur tour ces formules encore générales qui distribuent l'impératif dans une pluralité de sphères (…) ne deviennent des maximes concrètes d'action que reprises, retravaillées, réarticulées dans des éthiques régionales, spéciales, telles que éthique médicale, éthique judiciaire, éthique des affaires, et ainsi de suite dans une énumération ouverte. ».

C’est la vertu intellectuelle de phronesis chez Aristote, prudence chez les Latins, qui devrait permettre de forger ces maximes concrètes dans les circonstances difficiles de l’action.

Nous citons ici la conclusion de l’essai de Ricoeur, qui met en lumière le rapport de complémentarité qu’entretiennent morale et éthique dans la réflexion du philosophe :

« En conclusion, on peut tenir pour équivalentes les deux formulations suivantes: d'un côté

on peut tenir la moralité pour le plan de référence par rapport auquel se définissent de part et d'autre une éthique fondamentale qui lui serait antérieure et des éthiques appliquées qui lui seraient postérieures. D'un autre côté, on peut dire que la morale, dans son déploiement de normes privées, juridiques, politiques, constitue la structure de transition qui guide le transfert de l'éthique fondamentale en direction des éthiques appliquées qui lui donnent visibilité et lisibilité au plan de la praxis. L'éthique médicale et

l'éthique judiciaire sont à cet égard exemplaires, dans la mesure où la souffrance et le conflit constituent deux situations typiques qui mettent sur la praxis le sceau du tragique. » Nous complèterons cette première approche des spécificités éthique/morale et de leur articulation par les travaux d’André Comte-Sponville, en particulier la conférence « Ethique, morale et politique » publiée en 1994 dans Les Cahiers du GREP213.

3.1.2.3. Les travaux d’André Comte-Sponville

Dans l’introduction de la conférence précitée, Comte-Sponville rappelle les évolutions importantes survenues depuis les bouleversements de 68 qui avaient chassé la morale au profit de la politique, et le philosophe souligne à quel point cette tendance s’est aujourd’hui inversée, au point que c’est la morale qui tient lieu de politique. Ce règne de la morale et de l’éthique, qualifié de « sujet à la mode », mérite une clarification terminologique afin de tenter de déterminer les critères conceptuels permettant de distinguer ces deux termes. Cette entreprise de clarification repose sur les travaux de Gilles Deleuze et Marcel Conche au tournant des années 70-80. L’éthique et la morale partagent le fait d’être des discours normatifs, des jugements de valeur qui visent à guider nos actions. Mais elles se distinguent par le statut qu’elles octroient à ces valeurs. Comte Sponville bâtit cette distinction sur quatre dimensions :

- la morale pose le Bien et le Mal comme valeurs absolues voire transcendantes, alors que l’éthique s’articule aux valeurs de bon et de mauvais, considérées comme relatives et

213 Comte-Sponville A., 1994, « Ethique, Morale et Politique » , Les Cahiers du Grep Midi-Pyrénées, n° 9/10, pp.214-215.

immanentes. La célèbre citation de Nietzsche prend alors tout son sens : « Par delà le Bien et le Mal, cela du moins ne veut pas dire par delà le bon et le mauvais »214. Ainsi, Nietzsche rejette la morale (le bien et le mal), mais pas l’éthique (le bon et le mauvais). Selon Comte Sponville, Nietzsche se prononce donc pour une éthique immoraliste ;

- la deuxième différence découle de la première : les valeurs morales étant absolues, elles

s’imposent à tous et prétendent à l’universalité ; les valeurs éthiques au contraire sont

toujours relatives (à un individu, à un groupe d’individus). Il y aurait donc « la » morale, une et universelle, et « des » éthiques, plurielles et particulières.

- les valeurs absolues de la morale appellent des commandements, ce que Kant appelle des « impératifs catégoriques ». Les valeurs relatives de l’éthique correspondent davantage à

des conseils, à des impératifs hypothétiques. Selon la formule de Comte Sponville, « la morale commande » et « l’ « éthique recommande ».

- la dernière différence touche aux fins : tandis que la morale vise la vertu et culmine dans

la sainteté (le terme étant pris ici non pas au sens religieux mais au sens où l’entend Kant, comme la capacité à agir toujours conformément à son « devoir »), l’éthique vise le

bonheur et culmine dans la sagesse.

Le conférencier aboutit ainsi à deux définitions :

J’appellerai morale le discours normatif et impératif qui résulte de l’opposition du Bien et du Mal considérés comme valeurs universelles et absolues. C’est l’ensemble de nos devoirs. La morale répond à la question « Que dois-je faire ? ». Elle se veut une et universelle. Elle tend vers la vertu et culmine dans la sainteté.

J’appellerai éthique tout discours normatif mais non impératif (sans autre impératif qu’hypothétique, donc sans impératif au sens usuel du terme) qui résulte de l’opposition du bon et du mauvais considérés comme valeurs relatives. C’est l’ensemble réfléchi de nos désirs. Une éthique répond à la question « Comment vivre ? » Elle est toujours particulière à un individu ou à un groupe. C’est un art de vivre. Elle tend le plus souvent vers le bonheur et culmine dans la sagesse.

Ces deux approches de l’éthique et de la morale, personnelles et contestables, montrent que malgré leur origine étymologique similaire et leur proximité sémantique, ces deux termes renvoient à des contenus différents : il est à présent temps de présenter le positionnement que nous retiendrons dans le cadre de la présente recherche.

3.1.3. Implications dans le cadre de notre recherche

Nous justifierons d’abord notre choix de privilégier le terme « éthique » vis-à-vis de celui de « morale » dans notre recherche, puis nous définirons ce que nous entendons par

214 Nietzsche F., La Généalogie de la Morale, 1887 - cité par G. Deleuze dans Spinoza – Philosophie

« éthique interactionnelle », puisque cela constituera l’un des axes retenus pour mener l’analyse.

3.1.3.1. Le choix de l’éthique

Dans sa contribution intitulée « Enseigner la morale aujourd’hui ? », Legrand pose l’hypothèse suivante : il attribue le succès contemporain du terme « éthique » au fait que « nul n’est aujourd’hui assuré des valeurs à vivre et à affirmer comme régulateurs de la vie quotidienne », constat qu’il relie à « la généralisation de l’individualisme avec la recherche du profit personnel érigé en moteur du progrès matériel et social », « la rentabilité dev(enant) la pierre de touche de dispositions légales » au détriment de la justice sociale et « la Morale étant mise en cause comme mystification au profit des dominants. » (Legrand, 1991, p. 54).

Il conclut son analyse en ces termes :

« L’interrogation sur les valeurs est omniprésente et c’est probablement pourquoi l’ « Ethique » est descendue du ciel des philosophes pour envahir notre horizon quotidien. ».

Sans négliger l’importance de ces facteurs contextuels, notre choix de mettre l’accent sur l’éthique dans nos analyses relève également de la nature de nos questions de recherche : en effet, la construction de compétences citoyennes, dont l’examen constitue le cœur de notre propos, exige le développement de compétences réflexives chez les élèves, amenés à (se) questionner, à débattre, à douter, à rechercher, à remettre en cause…autant d’opérations qui relèvent davantage d’une posture éthique que morale, au regard des éléments de définition que nous avons posés précédemment. En effet, comme le souligne