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Une même physionomie du peuplement est observée pour des savanes non défrichées depuis plus de 15 ans. Les fourrés évoluent faiblement en hauteur. Il y a peu de régénération ligneuse au niveau des plages herbacées et les fourrés grandissent comme une tache par extension à partir d’individus mères. Néanmoins, pour certaines conditions localisées, sous le couvert des grands arbres ou sur les anciennes termitières, des fourrés plus denses se forment, de nouvelles espèces s’installent timidement en sous-bois.

Les trois histogrammes des hauteurs (figure 16) montrent que la stratification se renforce au fur et à mesure que la formation évolue. Suite à l’abandon du champ, seules les espèces capables de régénérer de souche sont présentes (Dichrostachys glomerata,

Piliostigma thonningii, Newbouldia laevis), ainsi que les plantes à tubercule comme Icacina senegalensis, Dioscorea bulbifera et D. togoensis. Le palmier rônier, Borassus aethiopum, dont la germination est stimulée par le passage des feux, est déjà bien

représenté dans ses stades juvéniles. Dans la jeune jachère, 53 pousses de rônier furent dénombrées sur une surface de 100 m².

Figure 16 : Histogrammes des hauteurs de la savane à rônier

histogramme des hauteurs jachère 1 an 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 1 6 11 16 21 26 31 36 41 46 51 56 61 66 71 76 81 86

histogramme des hauteurs jachère 5 ans 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 1 5 9 13 17 21 25 29 33 37 41 45 49 53 57 61 65 69 73 77

histogramme des hauteurs, savane à Ronier, jachère

ancienne 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 1 1631 4661 7691 106 121 136 151 166 181 196 211

Evoluant au cours des années, le nombre d’espèces ligneuses augmente, pour passer de 11 espèces au premier stade, à 18, puis 29 pour les stades anciens. Le peuplement s’enrichit de jeunes plants d’Albizia zygia, Holarrhena floribunda, Bridelia micrantha et

Présentes dans la sous-préfecture de Kanfarandé, ces formations sont l’objet d’une double exploitation. Au vu du cortège dominant, le passage répété des feux semble avoir structuré ces formations. Or, deux types de feu les traversent, les feux précoces de l’élevage et les feux tardifs de la défriche-brûlis.

En saison sèche, ces savanes forment l’espace de divagation des troupeaux. Nous avons recensé 60 têtes de bétail utilisant ce parcours, appartenant à des éleveurs résidents des villages de Kassagba et Kankayani, mais ce chiffre est très probablement sous estimé. Une transhumance de faible importance a lieu pendant la saison sèche, conduisant les bêtes depuis Sogoboli (plateaux de Boké) vers les plaines de front de mer. Le feu parcourt presque chaque année ces savanes, vers les mois de décembre et janvier, afin de stimuler la repousse herbeuse.

A l’approche de la saison des pluies, s’y pratique la défriche-brûlis. Les jachères alors exploitées sont jeunes, de 4 à 5 ans, et seront uniquement cultivées en arachide la première année et en fonio pour une deuxième année de culture. Pour l’arachide et le fonio, les sols gravillonnaires et généralement peu épais offrent, selon les exploitants, des rendements suffisants.

Ces savanes à pyrotolérantes sont remarquables par la présence et la dynamique des

Borassus aethiopum. La flore est plus pauvre dans les secteurs faisant l’objet des cultures

sur défriche-brûlis, dans l’espace ceinturant les villages, mais, alentour, dans les secteurs rarement exploités pour l’agriculture, le peuplement est relativement diversifié et bien équilibré (0,84 de valeur de régularité39).

4.2. « FÖTONYI » : FORETS ET AGRICULTURE

Les coteaux ferralitiques sont le siège de la défriche-brûlis. Parce que l’ensemble des forêts sur sols ferralitiques a fait l’objet d’une défriche, contemporaine ou ancestrale, toutes les formations nommées « Fötonyi » par les villageois sont des jachères au sens général du terme : « la jachère est l’état d’une parcelle entre la récolte d’une culture et le moment de la mise en place de la culture suivante » (Sébillotte, 1991).

Dominant les paysages de la zone continentale, les jachères dites « actives » sont des formations denses, composées d’arbustes et de petits arbres, ponctuées parfois de grands ligneux. Elles forment le domaine agricole où alternent cultures annuelles de riz et d’arachide principalement et temps de repos compris entre 4 et 12 ans. Le peuplement végétal, constitué d’espèces héliophiles à croissance rapide, capables de rejeter à partir des souches, est en équilibre avec les pratiques actuelles.

Après de longues années d’abandon (plus de 20 ans), la jachère peut se structurer en une formation forestière complexe. Les îlots boisés, sorte de reliques, sont les témoins de cette possible évolution. Ils sont aujourd’hui de taille réduite, mais jouent un rôle fondamental dans la résilience des écosystèmes. Le rôle de la faune, notamment les primates, dans la dissémination des espèces est considérable. A l’heure actuelle, l’existence de ces îlots, ou leur éventuel développement, est conditionnée, à la fois, par le facteur édaphique et par les modes de gestion locaux. Ils ne se rencontrent que sur les sols profonds, dans des stations où l’humidité peut être maintenue toute l’année (notamment grâce à la présence de grands ligneux). Les « Fötonyi » sont volontairement protégés du passage des feux.

4.2.1. Les « jachères actives »

Bien qu’elles puissent être liées aux autres formations végétales dont elles sont dérivées, ou vers lesquelles elles peuvent évoluer, les jachères forment une facette à part entière. La jachère est maintenue et gérée en tant que telle par les populations via les cycles de défriche-brûlis : la jachère est un « champ passé et futur » (Haudricourt, 1964).

Cette dynamique sur le court terme en fait un milieu particulier.

Nous entendrons donc par le terme de « jachères actives », les milieux soumis régulièrement aux cycles de défriche, par opposition à la plupart des formations boisées, qui ont, elles aussi, fait l’objet de défriches par le passé.