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SECTION I : ETAT DE L’ART

I.2. Gestes, intonations et mots en interaction

I.2.2. Marques intonatives

2.2.3 La durée et les pauses silences

Dans les marques intonatives, la durée des syllabes et les pauses silences intéressent aussi notre étude. La durée d’une syllabe varie en moyenne entre 12 et 15 cs. Et la pause silence entre 40 et 50 cs. Une pause silence supérieure à 60 cs, peut entraîner des manifestations sonores de la part de l’écouteur :

Danon-Boileau, L. & Morel, M.-A., 2006, - Le français se caractérise par une durée stable des syllabes, (une durée moyenne de syllabe de 12 à 15 centisecondes (2004 : 336)).

On observe donc des suites de cinq à sept syllabes par seconde. La durée de la pause-silence se situe entre quarante et cinquante centisecondes. Or une pause silencieuse de plus d’une seconde entraîne régulièrement une manifestation sonore de celui à qui le discours est adressé. Le silence est, en effet, difficilement tolérable dans un dialogue en français.

Morel explique qu’une pause silence longue témoigne de la supériorité hiérarchique de celui qui parle et que celle-ci est reconnue par celui qui écoute :

MOREL, M.-A., 2000, - La pause silence longue est un procédé autoritaire.

Elle est toujours interprétée (en français du moins) comme une preuve d’autorité. […]

La possibilité de recourir à des pauses longues (dépassant une seconde) sans qu’il y ait interruption de l’écouteur témoigne d’une supériorité hiérarchique imposée par celui qui parle et reconnue par son interlocuteur.

2.2.3- 1- La gestion de la formulation

Selon Bouvet et Morel, la durée gère la formulation que celui qui parle se prépare à dire tandis que la pause silence vient à l’aide de l’écouteur afin qu’il construise le sens de ce qu’il vient d’entendre.

BOUVET, D. & MOREL, M.-A., 2001, - La durée (allongement de la syllabe finale) gère la formulation de ce qui est à venir et est donc un indice de continuation.

- Les pauses-silence homogénéisent la séquence qu'elles closent en permettant à l'écouteur de construire le sens. Ainsi, quand quelqu'un parle trop vite, le sens ne peut être construit par l’écouteur.

Morel, de son coté, récapitule les outils principaux en français qui gèrent la formulation. Elle parle ainsi d’allongement de la durée, du « euh » d’hésitation, et de la répétition d’un mot grammatical

MOREL M.-A., 2011, - Les principaux outils fournis par le français pour gérer la formulation, sans recourir à la pause silencieuse longue, revêtent trois formes :

1) l’allongement de la durée des mots grammaticaux placés à l’initiale des syntagmes (pronoms, déterminants, prépositions, présentatifs …), ou plus rarement de la syllabe finale des mots sémantiquement pleins ;

2) le « euh » d’hésitation, dont la durée peut varier entre 20 et 80 centisecondes ; 3) la répétition des mots grammaticaux, qui entraîne un redémarrage au début du syntagme, ou qui restent en suspens en cas d’abandon de la construction amorcée.

(à paraître)

Elle s’arrête ensuite sur le fait qu’un mot- outil est obligatoirement repris à l’initiale du syntagme lors de son achèvement :

MOREL M.-A., 2010, - Lors de la recherche d’un mot ou d’une construction syntaxique, les mots-outils initiaux accompagnent de façon très régulière le travail de formulation […] Mais ce qui est tout à fait remarquable, c’est que, dans tous les cas, le mot-outil est obligatoirement repris à l’initiale du syntagme lors de son achèvement […]

Et si le locuteur n’arrive pas à trouver le mot il modifie le mot-outil mais ne change pas sa construction syntaxique

- Ce n’est que si la recherche du mot se révèle infructueuse que l’énonciateur se résout à modifier la forme du mot-outil (de la préposition par exemple), sans pour autant changer la construction syntaxique.

Morel présente enfin la place que peuvent occuper les mots-outils dans le paragraphe du

- La réduplication des mots grammaticaux intervient dans le préambule, lors de la mise en place des éléments de cadrage thématique

- ou à l’initiale du rhème

- soit des cas où l’on ne relève aucune réduplication de mot-outil

- recours au « euh » entre deux pauses silencieuses et à l’allongement de la syllabe finale des mots sémantiquement pleins

- on voit fonctionner le principe de l’occupation maximale du canal sonore : on n’observe pas de pause dans l’environnement du « euh », et ce sont les mots-outils qui subissent l’allongement, le mot-outil étant alors repris lors de l’achèvement de la structure.

- le « euh » allongé accompagné d’un mouvement des mains, de la tête et du regard traduisant l’impuissance à dire

- le sourire adressé à l’interlocuteur traduisant une impression de bien-être28.

2.2.3- 2- La place du geste dans la formulation

2.2.3- 2-1- La pause gestuelle

Nous présentons ici aussi une hypothèse sur l’existence des pauses gestuelles, car nous allons nous y arrêter lors de notre analyse.

Ce qui attire notre attention dans cette hypothèse c’est d’une part la définition de la pause gestuelle comme une durée importante des positions de repos entre deux gestes et d’autre part la distinction entre la pause gestuelle et la tenue du geste, cette dernière ne constituant pas un moment de repos :

CANDEA, M., SENDER, J.-G., 2008, - Lorsque la durée des positions de repos entre deux gestes n'est pas nulle nous avons considéré qu'il s'agissait d'une "pause gestuelle". Celle-ci est à distinguer, selon nos observations, de la « tenue gestuelle "

qui n'est pas une vraie position de repos mais une phase de stabilité à l'intérieur d'un geste qui reste suspendu dans son parcours; comme toute autre phase du geste, elle peut être suivie par un retour vers la position de repos, ou par le début d'un nouveau geste.

Nous nous demanderons donc s’il n’y aurait pas un travail de formulation lors d’une pause gestuelle. Et si la pause gestuelle ne serait pas un indice de rupture de la coénonciation dans la relation entre les locuteurs. Cela reste à examiner lors de notre analyse en deuxième section.

2.2.3- 2-2- Les gestes des mains

Nous soulignons ici un élément très important, dont nous avons déjà parlé à propos de Gullberg : l’intervention des gestes des mains dans le travail de formulation :

MOREL M.-A., 2011, - Il est aussi souvent souligné que, lors de difficultés dans la formulation, les manifestations gestuelles s’accroissent notablement, en particulier les gestes des mains. (à paraître)

28 voir ici l’exemple type où Arnaud dit « C’est une colle !! » + éclat de rire entre lui et Gérard