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Dupanloup et les catholiques libéraux : un ralliement improbable ?

GENÈSE D’UN RÉSEAU

Chapitre 2. Dupanloup et la Révolution de Juillet : le combat pour les libertés de l’Église catholique

C. Dupanloup et les catholiques libéraux : un ralliement improbable ?

Dupanloup contre les « Pèlerins de la Liberté »

Comme le rappelle Lagrange, l’aversion de l’abbé Dupanloup pour l’école de Lamennais ne fait que se renforcer avec la parution de leur organe de presse : « Tout, dans L’Avenir, le repoussait : la violence du langage comme la hardiesse des thèses. L’Avenir, c’était pour lui la révolution dans l'Église comme dans l’État ». Dupanloup est dépeint par Lagrange comme « un des adversaires les plus résolus de L’Avenir »228. Paradoxalement, il nuance également le jugement négatif de Dupanloup, futur champion du catholicisme libéral, sur Lamennais et ses idées audacieuses pour l’époque. Il explique qu’à ce moment-là, personne ne songeait alors à distinguer les libertés considérées comme simples faits des libertés revendiquées comme principe absolu, « tout occupé que l’on était à combattre ce que les idées de L’Avenir avaient de faux et de dangereux, plutôt qu’à dégager ce qui pouvait s’y mêler de vrai et d’utile »229. Cette distinction entre la « thèse » (l’énoncé de principes et vérités absolues) et « l’hypothèse » (l’adaptation de ces principes et vérités aux nécessités d’un pays et d’un temps)230 qui a rendu Dupanloup célèbre en 1865 suite à la publication du Syllabus serait-elle ici en germe ? N’oublions pas que Lagrange écrit bien des années plus tard et avec la volonté d’inscrire l’action de Dupanloup dans le sillage du catholicisme libéral.

Lecanuet, le biographe du comte de Montalembert, rapporte que le 12 novembre 1830, près d’un mois après la fondation de L’Avenir, le jour même où il fait la connaissance de Lacordaire, « par une providentielle coïncidence », Montalembert « renouvelle avec l’abbé Dupanloup la liaison commencée jadis chez le duc de Rohan. En vain s’efforce-t-il de convertir le jeune ecclésiastique aux doctrines de l’Avenir [sic], Dupanloup se montre intraitable ». « Malgré tout, écrit Montalembert dans son journal, c’est un charmant prêtre, plein de piété et d’ardeur ». Si bien qu’en l’absence de l’abbé Busson, « il le choisit pour confesseur »231. Il convient de ne pas enjoliver outre mesure les rapports d’amitié entre Dupanloup et Montalembert à leurs débuts comme le font Lagrange et Lecanuet, qui dans leurs biographies-hagiographies respectives, ont clairement pour objectif de magnifier la collaboration ultérieure entre ces deux champions de

228 Lagrange,Vie de Mgr Dupanloup, op. cit., p. 118.

229 Id.

230 Lagrange,Vie de Mgr Dupanloup, op. cit., p. 120.

l'Église de France. D’ailleurs selon Anne Philibert, Montalembert, qui avait choisi au départ Dupanloup pour confesseur, dut changer de directeur de conscience, à la demande même de ce dernier. « L’abbé Dupanloup l’avait renvoyé sans indulgence à un autre prêtre », écrit l’auteur rappelant que Montalembert n’osait confesser à l’abbé sa passion pour la duchesse de Rauzan, déjà mariée232. L’anecdote semble secondaire mais elle est toutefois intéressante car elle permet de faire la part des choses entre l’embellissement des relations entre Montalembert et Dupanloup au moment ou la lutte pour la liberté de l’enseignement fait rage et la réalité de ces relations qui somme toute n’exclue pas un véritable respect mutuel entre les deux hommes.

Pour le moment, il n’est nullement question pour Dupanloup de soutenir la cause catholique libérale. Lagrange rapporte qu’il discute des doctrines de L’Avenir avec les théologiens jésuites, notamment avec le Père Rozaven, assistant général des jésuites et auteur d’une réfutation des idées de Lamennais sur la certitude. Dupanloup n’intervient pas encore au niveau public mais horrifié par la ligne éditoriale de L’Avenir, il s’applique, lors de son pèlerinage à Rome en 1831, à faire condamner le journal en dénonçant « ces doctrines de schisme, d’orgueil et de liberté effrénée »233. Le jeune abbé se montre très méfiant envers les partisans de Lamennais : « Ces hommes sont des hommes empoisonnés ; je les poursuivrai à outrance et de toutes mes forces »234. Il est vrai que les catholiques libéraux gagnent en influence. Selon Georges Weill, L’Avenir a pu compter jusqu’à 2 000 abonnements chez le jeune clergé. Toutefois, les conservateurs et les évêques lui font la guerre, imposant même des désabonnements. La pression est si forte que les caisses de L’Avenir sont bientôt vides, les catholiques libéraux réagissent en le suspendant momentanément pour demander l’arbitrage de Rome contre les évêques français qui leur sont défavorables. Lamennais espère ainsi plaider sa cause auprès du Saint-Siège et obtenir son appui. Beaucoup, dont Lacordaire et plus tard Lagrange lui-même, voient dans cette démarche de Lamennais une erreur stratégique capitale. Solliciter le pape dans un contexte aussi tendu à Rome comme à Paris était fort risqué. Georges Weill estime que le moment choisi par Lamennais est inopportun. Le gouvernement pontifical est à peine sorti d’une première insurrection libérale dans ses États. Voyant se profiler une nouvelle révolte des “patriotes révolutionnaires”, Grégoire XVI fait appel aux Autrichiens qui l’aident à rétablir l’ordre dans ses États en avril 1831. Le recours aux Autrichiens entraîne une période de guerre d’influence avec la France, plus connu sous le nom

232 Anne Philibert, Lacordaire et Lamennais (1822-1832), La route de la Chênaie, Paris, Cerf, p. 656.

233 Lagrange,Vie de Mgr Dupanloup, op. cit., p. 118.

234 André Trannoy, Le romantisme politique de Montalembert, Paris, 1943, p.558, cité dans Roger Aubert,

de « crise d’Italie » (1832-1838). Le président du Conseil français, Casimir Périer, décide de l’occupation de la ville italienne d’Ancône235.

C’est dans cette atmosphère de crise que, le 30 décembre 1831, les « pèlerins de la Liberté », comme se nomment alors Lamennais, Lacordaire et Montalembert, arrivent à Rome pour plaider leur cause. Trois mois auparavant Dupanloup avait quitté la « Ville éternelle ». Malgré son absence in situ, il entend bien réagir aux prétentions des trois « pèlerins ». Comme le précise Lagrange : « Dans la position qui était alors la sienne, l’abbé Dupanloup n’avait d’autre moyen d’action que son influence, à Paris, sur Mgr de Quélen, et à Rome sur le cardinal de Rohan, qui lui-même y était fort considéré ; il en usa avec ardeur ». Ainsi dans l’une de ses lettres au cardinal de Rohan, Dupanloup tente d’utiliser l’influence du cardinal français à la cour romaine pour contrecarrer les catholiques libéraux : « La Providence vous a fait rester à Rome pour que vous opposiez vos lumières et votre autorité à M. de la Mennais et à ses deux compagnons de voyage. [...] Un grand mal sera retranché de nos maux déjà si grands et si nombreux. Ce n’est pas une affaire à négliger : tout le jeune clergé est perdu en France, si M. de la Mennais peut se dire approuvé de Rome »236.

L’abbé de la Madeleine ne ménage pas le prêtre de la Chenaie : « M. de la Mennais est non seulement l’idole des jeunes prêtres qu’il entraîne dans l’indépendance politique et la rébellion religieuse, mais le scandale de tout le vieux clergé et de tous les fidèles pieux ». Lagrange est plus nuancé quand il évoque les futurs alliés de Dupanloup en précisant que Dupanloup « était moins sévère pour Lacordaire dont l’âme avait touché la sienne, et pour M. de Montalembert, en qui, dès sa plus tendre jeunesse, il avait tant espéré. M. de la Mennais seul le faisait trembler »237. Mgr de Quélen avait également tenté de convaincre Rome d’arrêter Lamennais dans son radicalisme et de le ramener à plus de modération. Le 10 novembre 1831, l’archevêque de Paris écrivait au Saint-Siège : « J’ai appris que M. de La Mennais et ses associés avaient formé le dessein d’établir à Paris une école d’Ecclésiastiques, et qu’il serait possible qu’elle se constituât sans l’autorisation de l’ordinaire, et même malgré son désaveu. Ces Messieurs se vantent de l’approbation du Saint-Siège, ou l’induisent de son silence à leur égard. Combien j’aurais besoin dans cette circonstance délicate, d’où peut naître de fâcheuses décisions dans le clergé, des lumières apostoliques et de l’appui de la première autorité de l'Église »238.

235 Georges Weill, Histoire du catholicisme libéral (1828-1908), op. cit., p. 43-44.

236 Lagrange,Vie de Mgr Dupanloup, op. cit., p. 121.

237 Id.

Au vu de l’évolution future de Lamennais, son adhésion à la démocratie et son excommunication de l'Église catholique, cette opposition nette établie par Lagrange entre Lamennais et Dupanloup n’est pas à négliger. S’agit-il d’une reconstruction a posteriori effectuée par l’évêque de Chartres, soucieux de préserver la réputation et l’intégrité morale de l’évêque d’Orléans comme prélat de l'Église de France ? En effet, Dupanloup devient plus tard un catholique libéral convaincu et se heurte lui-même aux résistances du pape. Si Dupanloup tente d’atténuer subtilement l’encyclique de 1864, il ne veut pas rompre avec la hiérarchie ecclésiastique, comme Lamennais a pu le faire. D’où la prudence de son biographe Lagrange qui justifie et approuve les thèses de Lamennais, tout en condamnant le personnage, notamment en mettant en avant un Dupanloup défavorable à Lamennais. Il ne faut pas négliger en effet les attaques des ultramontains contre Dupanloup vers la fin de sa carrière épiscopale, fortement critiqué pour son catholicisme libéral. En outre, les relations de Dupanloup avec le pape deviennent de plus en plus complexes, surtout au moment du concile de Vatican I en 1869, l’évêque s’opposant au dogme de l’infaillibilité pontifical. Lagrange semble opter pour la prudence en montrant l’abbé Dupanloup plus romain que jamais et poussant des cris de joie à la nouvelle de l’encyclique Mirari Vos parue le 15 août 1832239.

Dans cette encyclique, le pape Grégoire XVI ne cite pas explicitement Lamennais ou L’Avenir mais il s’en prend durement à ces « novateurs téméraires » qui développent des idées condamnées comme doctrines subversives. Le pape considère que « c’est le comble de l’absurdité et de l’outrage envers [l'Église catholique] de prétendre qu’une restauration et qu’une régénération lui sont devenues nécessaires pour assurer son existence et ses progrès ». Grégoire XVI rappelle en effet « aux auteurs de semblables manœuvres » que « lui seul et non pas un simple particulier, a la pouvoir de prononcer « sur les règles sanctionnées par les Pères » et qu’ainsi [...] « c’est à lui de balancer entre eux les divers décrets des Canons, et de limiter les ordonnances de ses prédécesseurs, de manière, à relâcher quelque chose de leur rigueur et à les modifier après mûr examen, selon que le demande la nécessité des temps, pour les nouveaux besoins des églises ». Grégoire XVI renouvelle la condamnation du rationalisme et du gallicanisme, mais s’attaque plus particulièrement à toute forme de libéralisme, « cette maxime fausse et absurde ou plutôt ce délire, selon lequel on doit procurer et garantir à chacun la liberté de conscience ». La liberté de la presse, « la plus funeste, liberté exécrable » est vivement réprouvée car elle répand sans distinction « des monstres de doctrines » et des « prodiges d’erreurs » comme un venin mortel pour les âmes et les

239 Ibid., p. 122.

esprits. Grégoire XVI désapprouve également la séparation de l'Église et de l’État qui agit comme un ferment de séditions. Mais il confirme le Concordat et la soumission due aux princes par les peuples.

Lamennais et son école sont mis dans le prolongement de ces hommes « détestables et déloyaux » qui « brûlant d’une passion sans règle et sans frein pour une liberté qui ose tout » et qui « s’emploient tout entiers à renverser et à détruire tous les droits de l’autorité souveraine, apportant aux peuples la servitude sous les apparences de la liberté ». Pour Grégoire XVI, les mennaisiens se placent dans la lignée des « extravagances coupables » et les « désirs criminels » des « Vaudois, des Béguards, des Wicléfistes et d’autres semblables enfants de Bélial, la honte et l’opprobre du genre humain », qui furent « tant de fois et avec raison, frappés d’anathème par le Siège Apostolique ». « Si ces fourbes achevés, poursuit le pape, réunissent toutes leurs forces ; c’est sûrement et uniquement afin de pouvoir dans leur triomphe se féliciter, avec Luther d’être libres de tout ; et c’est pour l’atteindre plus facilement et plus promptement qu’ils commettent avec la plus grande audace les plus noirs attentats ». Le pouvoir sacré et pouvoir civil étant présentés comme profondément liés et interdépendants, toute liberté de conscience est à bannir absolument. Il est intéressant de noter que l’idéologie défendue par Grégoire XVI repose sur une vision de l’Europe héritée des guerres de religion des XVI-XVIIe siècles.

En conflit avec les libéraux d’une part et les Autrichiens d’autre part, cette ferme réaffirmation de l’alliance du trône et de l’autel par l’État pontifical constitue une légitimation de la subordination des gouvernements au Saint-Siège. L’encyclique finit ainsi par une adresse aux « princes », présentés comme les protecteurs de « la prospérité de la religion et des États ». « Qu’ils songent, explique le pape, que le pouvoir leur a été donné, non seulement pour le gouvernement du monde, mais surtout pour l’appui et la défense de l'Église ; qu’ils considèrent sérieusement que tous les travaux entrepris pour le salut de l'Église, contribuent à leur repos et au soutien de leur autorité »240. Cette référence aux « princes » catholiques semble en décalage avec la réalité de la monarchie française dans laquelle la religion catholique n’est plus religion de l’État mais simplement la « religion professée par la majorité des Français ».

Au-delà de l’énoncé ou rappel des doctrines catholiques, l’encyclique se présente comme une véritable démonstration de force permettant à Grégoire XVI de réaffirmer l’autorité de la papauté, non seulement sur ses fidèles dans tous les pays mais aussi sur les tenants de l’autorité

240 Lettres apostoliques de Pie IX, Grégoire XVI, Pie VII : encycliques, brefs, etc. texte latin avec la traduction française en regard précédées d'une notice biographique suivies d'une table alphabétique, Paris, Roger et Chernoviz, 1901, pp. 200-221.

politique. Les catholiques libéraux sont les premiers qui se heurtèrent à l’autorité papale. Comme l’a écrit Georges Weill : « L’encyclique Mirari Vos marque la première défaite du catholicisme libéral »241. L’historien explique que la condamnation portait moins sur les idées philosophiques et théologiques de Lamennais que sur sa politique d’alliance entre la religion et la liberté et sa politique de rapprochement avec les non-catholiques. De nouvelles révolutions semblaient découler inéluctablement d’une telle politique. Dans un premier temps, Lamennais, tête de file du catholicisme libéral français, se soumet à la décision du pape en supprimant L’Avenir et l’Agence générale. Mais convaincu de la validité et de l’urgence de réformes, il choisit de faire passer ses propositions, cette fois-ci par la voie politique, la voie de la démocratie. C’est ce qu’il explique dans l’ouvrage qu’il publie en avril 1834,Les Paroles d’un croyant. L’œuvre connaît un véritable succès. Mais Rome la condamne par une encyclique spéciale, Singulari Nos, parue en juin 1834. La rupture entre Lamennais et le Saint-Siège est définitivement consommée. Lacordaire et Montalembert ne suivent pas la voie de leur maître. Après une période de déception, d’incompréhension voire de colère, ils se soumettent complètement à Rome.

Devant la défection des catholiques libéraux, Dupanloup éprouve un grand contentement. Le 14 septembre 1832, il écrit à ce propos à l’abbé Lacroix : « Voilà la vérité ! Personne n’ose plus la dire ; il est convenable que le Père universel de l'Église se fasse entendre avec cette force. Cela donne du cœur aux petites bonnes gens comme moi et me fait parler haut. Tous les gens de bien sont ici dans l’admiration »242. Il poursuit : « Vous aurez vu la rétractation des Ménèsiens ; c’est bon et heureux. On rit bien un peu tout bas de cet Avenir déclaré mort huit mois après son enterrement ; ils ont loyalement combattu, je le veux bien : mais dans tout cela l’humilité n’est pas ce qu’il a de plus fort. [...] En somme, c’est une bonne affaire, et grâce à l’Eglise romaine, nous respirons et le scandale a disparu »243. Un an plus tard, Dupanloup écrivait encore : « J’aime tant l’esprit de cette Eglise romaine, sa modération inflexible, sa sagesse supérieure et divine, sa haute impassibilité, sa profonde indifférence pour les choses vaines et retentissantes, son bon sens immuable : Oh ! que l’esprit français a besoin de se retremper là. [...] Le livre de M. de la Mennais, comme vous l’avez bien jugé, a été ici sans effet et est aujourd’hui totalement oublié »244.

Dupanloup et Lacordaire esquissent néanmoins un premier rapprochement, comme le révèle les quelques rares échanges entre les deux hommes conservés aux archives de

241 Georges Weill, Histoire du catholicisme libéral, op. cit. p. 46.

242 Lagrange, Vie de Dupanloup, op. cit., pp. 122-123.

243 François Lagrange, Lettres choisies de Mgr Dupanloup, évêque d’Orléans, T. I, op. cit., p. 90. 244 Id.

Sulpice. En 1836, Lacordaire écrit à Dupanloup : « Voici la première fois que vous m’écrivez avec quelque bonté. Je vous remercie sincèrement ; je crois aux assurances que vous me donnez de votre propre mouvement, et Dieu sait qu’il ne tiendra pas à moi de voir s’éloigner tous les nuages que dix ans passés ont jetés entre nous »245. Dupanloup répond que ces nuages, qui ont duré aussi longtemps, étaient le résultat de leurs opinions divisées et la longue et malheureuse confiance accordée par Lacordaire à Lamennais : « Vous souteniez dès lors le système philosophique de Mr de Lamennais. J’ai toujours cru ce système absurde et désastreux. Je le combattis franchement dans ces longues discussions dont Mrs de Maligny et Francisco de Mezillac furent témoins : mais le pape vient de flétrir ce système ; vous avez fait vous-même un livre contre. [...] les malheurs et les égarements de L’Avenir [...] n’ont que trop douloureusement justifié mes alarmes et vous-même n’avez été le premier à consoler l'Église par votre retour [.] Ce qui fait votre gloire et mon irrécusable justification »246.

Désavouée par le pape, l’école de Lamennais est décimée. Avec elle, c’est le catholicisme libéral qui semble complètement éteint, à la grande joie de Dupanloup qui poursuit sa carrière ecclésiastique et littéraire. En avril 1841, le supérieur de Saint-Nicolas est chargé des cours d’éloquence sacrée à la faculté de théologie de la Sorbonne. Le cours est en fait consacré à l’étude des Pères de l'Église. Dupanloup commence par y traiter le thème du génie. Mais après la troisième leçon, l’abbé doit interrompre ses cours pour raison de santé. Il part donc à Rome pour se reposer mais aussi et surtout pour soutenir sa thèse de doctorat sur l’infaillibilité pontificale car bien que professeur à la faculté de théologie, il n’était pas docteur. Pour relever le prestige des grades dispensés par la vieille université de théologie, Mgr Affre, qui avait succédé à Mgr de Quélen à l’archevêché de Paris, avait alors décidé d’envoyer Dupanloup à Rome pour relever le niveau des enseignements de la Sorbonne en obtenant le grade de docteur. Lagrange rapporte qu’une fois à Rome, Dupanloup remit une note au pape sur le conseil du cardinal Lambruschini, secrétaire d’État du Saint-Siège qui en fut semble-t-il très satisfait247. Le réseau romain de Dupanloup se consolide. C’est à cette période, qu’il noue des relations étroites avec la famille Borghèse248. La correspondance de Dupanloup avec la princesse Borghèse, née Adèle de La Rochefoucauld,

245 Lettre de Lacordaire à Dupanloup, Paris, 13 avril 1836, Archives Saint-Sulpice, Fonds Dupanloup, lettres de Lacordaire. Orthographe modernisée et corrigée.

246 Lettre de Dupanloup à Lacordaire, Paris, non datée, Archives Saint-Sulpice, Fonds Dupanloup, lettres de