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Paragraphe I – Les sources de droit international nécessaires à cette interprétation

B. Un droit source d’obligations immédiates et concrètes pour les États parties

Pour diminuer la portée des droits inscrits dans le Pacte sur les droits économiques et sociaux, il est souvent argué que celui-ci prévoit la réalisation progressive des droits qui y sont énoncés, et qu’il prend en considération les contraintes dues à la limitation des

449 OIT. Convention n°168 sur la promotion de l’emploi et la protection contre le chômage. 1988. 450 CESC, préc., note 425, par.6.

451 Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres

ressources disponibles. Cependant, le droit au travail n’est pas un simple principe à portée philosophique : ce droit établit des obligations juridiques précises452.

Le Pacte impose en effet aux États parties diverses obligations avec effet immédiat453. Parmi celles relatives au droit au travail, les États doivent « garantir » que ce droit sera exercé « sans discrimination aucune » (art. 2, par. 2) et « agir » en vue d’assurer l’application pleine et entière de l’article 6 (art. 2, par. 1)454. Ils doivent prendre des mesures concrètes, aussi rapides et efficaces que possible, qui visent au plein exercice du droit au travail455.

« Le droit au travail, à l’instar de tous les autres droits de l’homme, impose trois catégories ou niveaux d’obligations aux États parties: les obligations de le respecter, de le protéger et de le mettre en œuvre »456.

L’obligation de respecter le droit au travail signifie notamment que les États doivent s’abstenir de refuser l’accès à tous à un travail décent, en particulier pour les travailleurs migrants457.

De l’obligation de protéger découle le fait que des mesures prises pour accroître la flexibilité des marchés, ou, dans notre cas, des programmes mis en place pour répondre à une pénurie de main-d’œuvre, « ne doivent pas avoir pour effet la précarisation du travail et la diminution de la protection sociale du travailleur »458.

Quant à l’obligation de mise en œuvre, « d’assurer l’exercice du droit au travail » [italiques dans le texte]459, elle implique notamment que les États prennent des mesures positives pour « permettre aux individus de jouir du droit au travail »460.

452 COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME DES NATIONS UNIES. Ordre du jour, Onzième session, A/3525.

1957, point 31 ; CESC. Observation générale n°18: Le droit au travail, E/C.12/GC/18. 2006, par.2.

453 CESC. Observation générale n°3. La nature des obligations des États parties. 1990, par. 1. En ce qui a

trait aux obligations des États parties concernant le droit à la santé, voir ECOSOC. Observation générale n°14 : Le droit au meilleur état de santé susceptible d'être atteint (art. 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). E/C,12/2000/4. 2000, par. 30.

454 CESC, La nature des obligations, préc., note 451, par. 2. 455 CESC, Le droit au travail, préc., note 450 par.19 et 20.

456 CESC. Observation générale n°18: Le droit au travail, E/C.12/GC/18. 2006, par.22. 457 Ibid, par.23.

458 Ibid, par.25. 459 Ibid, par.26. 460 Ibid, par.27.

L’État a donc pour obligation minimum

d’éviter toute mesure engendrant des discriminations et des traitements inégaux des individus et groupes défavorisés et marginalisés dans les secteurs privé et public ou de fragiliser les mécanismes de protection de ces individus et groupes461.

Une distinction est faite dans le Pacte entre l’incapacité d’un État et son manque de volonté à s’acquitter des obligations lui incombant au titre des articles 6 et 7462. Cette différenciation peut également être opérée dans les rapports privés, à l’image du champ d’application de la Charte québécoise. On peut affirmer que si le lien fixe avec l’employeur contrevient effectivement à l’article 46 de la Charte, cela résultera, plutôt que d’un manque de ressources, d’un manque de volonté politique. Le lien fixe avec l’employeur semble davantage constituer un choix politique, qui arrange les deux paliers de gouvernements, FERME et les employeurs agricoles, qu’un choix temporaire, du fait de l’absence d’alternative économiquement et socialement viable.

Bien que cela dépasse son mandat et la portée du droit international, le CESC mentionne, au chapitre des obligations, que tous les membres de la société, des individus au secteur privé, en passant par les collectivités locales, les syndicats et la société civile, « ont des responsabilités dans la réalisation du droit au travail ». Le Comité reconnaît que « seuls les États sont parties au Pacte » et qu’eux seuls doivent, en fin de compte, « rendre compte de la façon dont ils s’y conforment ». Mais il insiste sur le fait que les entreprises privées, nationales et transnationales, ont elles aussi « un rôle particulier à jouer dans la création d’emplois, les politiques d’embauche et l’accès non discriminatoire au travail »463. Cela implique le respect du droit à des conditions de travail justes et raisonnables, et la prise en compte, dans l’élaboration de leurs politiques, des principes des droits de la personne, y compris en droit international.

461 Ibid, par.31b. 462 Ibid, par.32.

De l’article 16 de la Convention sur les droits des travailleurs migrants découlent des obligations pour l’État d’emploi, afin de garantir aux travailleurs migrants leur droit à la liberté et à la sécurité de leur personne464. En effet,

Les travailleurs migrants et les membres de leur famille ont droit à la protection effective de l'État contre la violence, les dommages corporels, les menaces et intimidations, que ce soit de la part de fonctionnaires ou de particuliers, de groupes ou d'institutions.465

L’État d’emploi est donc responsable de s’assurer que les travailleurs migrants situés sous sa juridiction ne sont pas victimes de violence physique ou morale portant atteinte à la sécurité de leur personne. Si ces derniers le sont, l’État doit garantir l’accès à la justice et à des mesures de protection efficaces.

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