• Aucun résultat trouvé

Chapitre I - Encapsulation sous vide de dispositifs et de microsystèmes

2. Mécanismes physicochimiques de l’interaction gaz-solide Pour un solide, les interactions possibles avec d’autres atomes vont dépendre notamment du fait

4.1. Modélisation de la diffusion

4.1.3. Diffusion avec réaction dans le volume (sorption)

Les espèces diffusantes, atomes, ions ou molécules, peuvent réagir avec les éléments du film et être piégées de manière réversible ou irréversible. C’est la situation qui est recherchée pour obtenir une sorption irréversible ou au moins partiellement irréversible des gaz. Le piégeage est dû en premier lieu à des défauts résultant notamment de la présence de joints de grains. Ceci conduit également à une augmentation de la limite de solubilité effective par rapport au même matériau monocristallin. C’est une autre raison pour laquelle une densité de joints de grains élevée est recherchée dans les films getter. Par ailleurs, si la concentration atteint la limite de solubilité à une température 𝑇, la formation de précipités peut se produire si la température est réduite car la limite de solubilité est généralement une fonction croissante de la température. Dans le cas du packaging sous vide, cette situation peut éventuellement correspondre au refroidissement après scellement de la cavité du packaging. Enfin, si la concentration de l’espèce diffusante devient suffisamment importante, un composé défini stable comme un oxyde ou un hydrure peut se former si cela est thermodynamiquement favorable.

Le piégeage en volume produit une réduction variable de la concentration d’espèces diffusantes. Ceci peut être globalement pris en compte de manière simplifiée dans la modélisation de la diffusion en introduisant un terme de perte proportionnel à la concentration à la profondeur 𝑧 dans l’équation de diffusion de Fick [Sak01, Sel14] ou en reformulant les équations de Fick [Leg13].

En fait les pièges sont souvent de types multiples (lacunes, dislocations, joints de grains, précipités, …) et de nombreux autres phénomènes sont mis en jeu lors de la diffusion comme la présence et la génération de contraintes mécaniques qui altèrent la diffusion, la présence de gradients de potentiels (électro)chimiques et la ségrégation aux joints de grains et aux interfaces, etc.

Pour prendre en compte ces effets et/ou d’autres effets comme la présence d’un substrat perméable avec ou sans effet de résistance à la diffusion à l’interface film-substrat, une concentration variable à la surface, la variation d’épaisseur de la couche superficielle, le cas de multicouches, … , de très nombreux modèles analytiques et numériques sophistiqués par différences finies, par éléments finis ou par d’autres méthodes ont été proposés, notamment dans le cas de la diffusion de l’hydrogène dans les métaux massifs (voir par exemple : [Svo12, Tor15, Elm20, Li20, Dia16, Fuk85, Suz20]).

Même dans le cas d’un seul gaz et d’un seul film, le développement de tels modèles nécessite un temps d’étude et de développement très conséquent. Dans cette thèse où de nombreux alliages de composition variable et un mélange de gaz (pression partielle d’air) a été utilisé dans la majorité des expériences, l’approche expérimentale été privilégiée et l’analyse détaillée et la mise en œuvre de modèles avancés n’a pas été entreprise.

Chapitre II - Dégazage, activation et sorption des films getter : mécanismes physico-chimiques

Page | 50

Diffusion avec réaction à la surface et/ou à l’interface : cas de l’oxydation des métaux La pression dans une cavité d’encapsulation sous vide n’est pas suffisamment faible pour exclure une oxydation de la surface pendant l’activation thermique du film getter. Il convient donc d’examiner les mécanismes d’oxydation et leur modélisation. Nous allons donc présenter très succinctement les principaux modèles d’oxydation des métaux et les cinétiques d’oxydation résultantes.

Très schématiquement, l’oxydation d’un métal peut résulter :

i) soit de la diffusion d’ions (anions) oxygène dans le film en croissance accompagnée d’une réaction avec le film non oxydé (ou le substrat sous-jacent) ;

ii) soit de l’exodiffusion des ions (cations) du métal pur (ou du substrat) à travers le film accompagnée d’une réaction à la surface ;

iii) soit de la diffusion des ions oxygènes et des ions métalliques avec croissance à l’intérieur du film en croissance : reformation d’une molécule de gaz.

L’oxydation conduit à une croissance d’un film d’oxyde à la surface et à une consommation du matériau sous-jacent. Ceci peut être exploité pour mesurer la cinétique d’oxydation par voie électrique, au moins pour les matériaux cristallins où la diffusion est spatialement homogène (voir Chapitre III - 2.3). Le rapport entre le volume molaire d’oxyde formé et le volume de métal consommé est appelé le facteur de Pilling-Bedworth. Il est donné par :

𝑉𝑜𝑥

𝑉𝑚é𝑡𝑎𝑙= 𝑀𝑜𝑥 𝜌𝑚é𝑡𝑎𝑙

𝛼 𝑀𝑚é𝑡𝑎𝑙 𝜌𝑜𝑥 (II-23)

𝐴𝑣𝑒𝑐 ∶

𝑉𝑜𝑥

,

𝑉𝑚é𝑡𝑎𝑙 : les volumes de l’oxyde et du métal

𝑀𝑜𝑥

,

𝑀𝑚é𝑡𝑎𝑙 : les masses molaires de l’oxyde et du métal 𝜌𝑜𝑥

,

𝜌𝑚é𝑡𝑎𝑙 : les masses volumiques de l’oxyde et du métal

𝛼

: le coefficient stœchiométrique du métal dans l’oxyde

Le rapport entre l’épaisseur d’oxyde et l’épaisseur de métal est approximativement donné par : 𝑡𝑜𝑥

𝑡𝑚é𝑡𝑎𝑙= ( 𝑉𝑜𝑥

𝑉𝑚é𝑡𝑎𝑙)1/3 (II-24)

𝐴𝑣𝑒𝑐 ∶

𝑡𝑜𝑥

,

𝑡𝑚é𝑡𝑎𝑙 : les épaisseurs de l’oxyde et du métal L’épaisseur de métal consommée est alors :

𝑡𝑚é𝑡𝑎𝑙 = 𝑡𝑜𝑥 ( 𝑉𝑜𝑥 𝑉𝑚é𝑡𝑎𝑙) 1 3 (II-25)

Le Tableau II-2 donne les valeurs des rapport volumiques et d’épaisseur entre l’oxyde et le métal pour l’yttrium et les autres éléments considérés dans ces travaux de thèse.

Chapitre II - Dégazage, activation et sorption des films getter : mécanismes physico-chimiques Page | 51 Elément Si V Ti Y Zr Masse atomique (u. m. a.) 28,0855 50,94 57,867 88,906 91,224 Masse volumique (g/cm3) 2,3290 6,0 4,51 4,47 6,5 Coefficient de dilatation thermique (ppm/K) 2,6 8,4 8,6 10,6 5,7

Oxyde SiO2 VO2 V2O3 V2O5 TiO2 Y2O3 ZrO2

Masse molaire (g/mol) 60,082 82,939 149,878 181,877 89,8658 225,808 123,22 Masse volumique (g/cm3) 2,2 4,57 4,87 3,36 4,23 4,84 5,68 𝑉𝑜𝑥 𝑉𝑚é𝑡𝑎𝑙 2,2647 2,1377 1,8125 3,188 1,6558 1,173 1,546 𝑡𝑜𝑥 𝑡𝑚é𝑡𝑎𝑙 1,3132 1,288 1,219 1,472 1,288 1,0546 1,183

Tableau II-2 : Masses atomiques et volumiques de métaux de transition et du silicium et rapports volumiques et épaisseurs des oxydes et du métal ou du semiconducteur

Un rapport de Pilling-Bedworth > 1 produit une contrainte compressive dans le film d’oxyde et une croissance globale de l’épaisseur du film oxydé. Ceci est le cas pour l’yttrium, le titane, le zirconium, le vanadium et le silicium (Tableau II-2). L’état de contrainte dans le film d’oxyde dépend également d’autres paramètres comme la différence de structure de l’oxyde et du métal, la température (contraintes thermomécaniques), … Ceci a une influence sur la cinétique de croissance, au moins à haute température.

L’oxydation des métaux étant à l’origine de la corrosion et étant impliquée dans la catalyse, une littérature très abondante a été consacrée depuis près d’un siècle à son étude. De nombreux modèles et leurs variantes ont été proposés pour prédire l’oxydation des métaux dans différentes conditions (Wagner, Deal and Grove, Cabrera-Mott, Fehlner-Mott, Wagner, MacDonald, modèle généralisé, …) mais surtout à la pression atmosphérique, dans des liquides ou à très basse pression. Il y a donc un manque d’études à des pressions intermédiaires, qui est précisément le cas qui nous intéresse, comme cela a été souligné par J. Schnadt et al. [Sch18].

Pour la passivation à l’air de films métalliques à température ambiante, le modèle le plus considéré est le modèle de Cabrera-Mott [Cab49]. Ce modèle considère que l’oxydation est due à la migration des ions métalliques interstitiels à travers l’oxyde et qu’elle est contrôlée par le champ électrique autogénéré dans le film par effet tunnel des électrons jusqu’à l’oxygène chimisorbé en surface [Zho18, Lut18]. Ce modèle conduit à une cinétique d’oxydation dite inverse logarithmique de la forme :

𝑑(𝑧𝑡) 𝑑𝑡 = 𝐴 𝑒𝑥𝑝

(

𝐵 𝑧

) 𝑜𝑢

ln

(

𝑑𝑧(𝑡) 𝑑𝑡

)

= ln

(𝐴)

+ 𝐵/𝑧 (II-26) 𝑂𝑢 𝑒𝑛𝑐𝑜𝑟𝑒 ∶ 1 𝑧(𝑡)= 𝐴 − 𝐵 ln

(𝑡)

(II-27)

Où 𝐴 et 𝐵 sont des constantes. 𝐴 dépend entre autres de l’épaisseur limite qui augmente avec la pression partielle de gaz oxydant et varie avec l’espèce oxydante.

Ce modèle est aussi valide pour la plupart des métaux purs jusqu’à une certaine épaisseur très mince 𝑧1 liée à 𝐵 pour des températures inférieures à 100 – 200 °C, ou à plus haute température mais seulement pour l’oxydation initiale.

Chapitre II - Dégazage, activation et sorption des films getter : mécanismes physico-chimiques

Page | 52

Le modèle de Mott-Cabrera a été étendu aux alliages binaires. Sans entrer dans les détails, notons que qualitativement, l’énergie libre et la température déterminent l’oxydation. L’élément dont l’oxyde a l’énergie libre la plus négative sera oxydé en premier.

Pour une épaisseur supérieure à 𝑧1 et jusqu’à une autre épaisseur critique 𝑧𝑑, la croissance est contrôlée par la dérive des ions et les effets de charge d’espace [Muk18]. 𝑧𝑑 est lié à la longueur de Debye d’écrantage du champ électrique et est de l’ordre d’une fraction de µm à quelques µm. La cinétique suit une loi inverse logarithmique avec un taux de croissance tel que [Muk18] :

ln

(

𝑑𝑧

𝑑𝑡

)

= 𝐴 +𝐵

𝑧− 𝐶𝑧 (II-28)

Au-delà de 𝑧𝑑 le champ électrique devient négligeable, la croissance est limitée par la diffusion et est parabolique, elle est décrite par le modèle de Wagner :

𝑧2

(

𝑡

)

= 𝐴𝑡 𝑠𝑜𝑖𝑡 𝑑𝑧 𝑑𝑡= 𝐴

2𝑧 (II-29)

En fait, en pratique pour les films minces il peut être difficile de déterminer la loi de dépendance de la cinétique.

Dans les parties suivantes, nous ferons un survol non exhaustif des résultats publiés pour l’yttrium, le zirconium, le titane et le vanadium et les alliages Y-Zr, Y-Ti, et Y-V concernant la diffusion d’oxygène et l’oxydation puis concernant la diffusion de l’hydrogène et l’hydrogénation dans ces matériaux. Puis nous examinerons le cas du silicium afin d’estimer si un substrat de silicium peut être considéré comme une barrière de diffusion et donc comme un substrat imperméable pour un film getter. Enfin, la possibilité de formations de siliciures sera brièvement examinée.

Outline

Documents relatifs