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Diffraction et cas mussolinien

à grande échelle

3.4. Diffraction et cas mussolinien

Cette question de la diffraction permettrait de considérer ou de reconsidérer le cas Mussolini, et l’insertion des structures montessoriennes dans les arcanes du régime fasciste, plus tardivement, entre 1924 et 1934 (Leenders, 2001). Si l’engagement personnel de Maria Montessori auprès de Mussolini ne fait pas de doute, la question de la compatibilité entre les

pratiques pédagogiques montessoriennes et un projet de type autoritaire35

reste sujet à controverses. Il paraît difficile de considérer qu’il y aurait une comptabilité comme naturelle de cette pédagogie avec le régime fasciste : ces deux piliers que sont la liberté enfantine et la remise en question de

33 Teresina  Bontempi confirmera à Pierre  Bovet qu’elle n’a plus « aucun contact avec Madame

Montessori ». AIJJR/FG.F.1/13 : lettre de Bontempi à Bovet, 14 janvier 1920.

34 À ce propos, Röhrs note que l’attitude de Maria  Montessori vis-à-vis de l’Éducation nouvelle est

« difficile à cerner » et qu’il ne semble y avoir eu « aucune véritable collaboration » (Röhrs, 1994). Si ces éléments restent encore à creuser, il semble que le fait de créer ses propres réseaux et le choix d’une forme « d’orthodoxie » des pratiques explique cette position entre présence et distance.

35 Il faudrait ici discuter l’engagement nationaliste de la pédagogue (proposant une pédagogie

l’adulte et son pouvoir sur l’enfant semblent en effet contredire par avance toute volonté d’embrigadement des enfants. Il faudrait affiner ainsi les lectures  –  donc également les appropriations et les utilisations  –  qui auraient été faites du texte montessorien pour concevoir les alliances

théoriques qui ont pu être envisagées entre les deux parties36. Le « cas

Montessori » semble pouvoir présenter une dissonance historique37 entre les

pratiques effectives, le message pédagogique et l’engagement politique de la pédagogue, et avec elle, les structures montessoriennes. Sommes-nous alors une fois de plus dans un cas de diffraction ? Sommes-nous dans un cas de dissociation entre pratiques et engagement politique ? Ou sommes- nous dans un cas d’exception au dogmatisme montessorien ? Considérons, rapidement, ces trois hypothèses.

À propos de la pédagogie montessorienne appliquée sous Mussolini, l’historien De  Giorgi parle de « montessorisme vague sans Montessori » (vagheggiando un montessorismo senza Montessori), non conforme aux intentions initiales, axé sur une « pédagogie de l’ordre » plutôt qu’une « pédagogie de la liberté », entraînant, dès 1927, des tensions au sein des institutions du régime prenant le nom de Montessori / des institutions montessoriennes adoubées par le régime. Ce serait la première hypothèse,

celle de la diffraction : la pédagogie montessorienne italienne sous

Mussolini serait une pédagogie diffractée, et Maria  Montessori aurait laissé volontairement faire ces pratiques diffractées, pour des raisons politiques autant qu’opportunistes de diffusion sur le territoire italien. Elle aurait néanmoins, selon cette hypothèse, rompu en partie avec la stratégie du silence – en témoigne, par exemple, le fait que les cours internationaux à Rome s’effectuent sous la présidence d’honneur de Benito  Mussolini. Cette hypothèse supposerait également de considérer la pluralité possible – orthodoxes et non orthodoxes – des pratiques en Italie.

La deuxième hypothèse considérerait que les pratiques n’ont pas bougé, en dépit des porosités entre les structures pédagogiques montessoriennes et les membres du régime, et que Maria  Montessori n’a pas transigé sur le contenu pédagogique. Cette option supposerait non une compatibilité entre politique et pédagogie, mais au contraire une dissociation entre les

36 Ce qui supposerait également de l’articuler à une généalogie et une histoire affinée du régime, le

Mussolini de  1924 n’étant pas le Mussolini rencontrant Hitler en  1936, ni le Mussolini imposant un serment au régime en 1938.

37 Nous reprenons la notion de « dissonance cognitive » pour l’appliquer à l’histoire, pour souligner une

« rupture de l’harmonie », une discordance, un conflit entre deux parties d’une pédagogie ou, ici, entre la pédagogie et ses pratiques, et entre la pédagogue et ses engagements.

pratiques pédagogiques et les engagements politiques de la pédagogue,

comme Alain Badiou le propose pour le cas Heidegger38. Cela supposerait

en outre que le régime ait mécompris les pratiques ou les ait utilisées à son avantage, donc que les pratiques rendent cette utilisation possible. Il est intéressant d’ailleurs de souligner que la famille de Maria Montessori soutient de nos jours que la rupture entre Montessori et Mussolini aurait été consommée, après plusieurs années de difficultés, à l’issue d’un différend sur la volonté d’introduire l’uniforme dans les classes. Ce fait pourrait paraître anecdotique ; il indique au contraire qu’en l’espèce, la question des pratiques semble avoir été cruciale. L’alliance Montessori- Mussolini aurait été, en ce cas, avant tout politique et non pédagogique, et l’intransigeance de la doctoresse sur l’orthodoxie des pratiques jouerait ici en sa faveur. Cette seconde hypothèse appuierait une fois de plus la notion de diffraction, cette fois des lectures et des idées pédagogiques. Elle laisserait entendre que l’alliance (et la dissociation historique) n’aurait pu se conclure politiquement que parce que le régime ne touchait pas, ou pas encore, au contenu pédagogique et que les pratiques permettaient une utilisation idéologique.

La troisième hypothèse supposerait que sous Mussolini, Maria Montessori a fait exception à son orthodoxie et a accepté de modifier les pratiques de classe pour s’accorder aux demandes du régime. Il faudrait ici retrouver des traces des pratiques effectuées pour confirmer ou infirmer cette hypothèse, et faire également une généalogie des pratiques.

Cette troisième hypothèse mérite que l’on s’attarde sur la question des extensions possibles de la pédagogie  –  et le cas montessorien serait ici spécifique. Dès les premières publications, Maria Montessori insiste sur le fait que sa pédagogie est « scientifique », c’est-à-dire qu’elle s’intéresse à l’enfant par l’observation, en dehors de toute considération d’ordre philosophique ou théorique surplombante qui considérerait l’enfant a priori, de manière abstraite. Cette dénomination annonce ainsi une indépendance et une neutralité politique de la démarche. Le « matériel », l’importance de la main et l’éducation par le sensible en font de fait une pédagogie centrée avant tout sur les savoirs culturels (langage, mathématiques, éducation sensorielle, vie pratique), plus que sur un contenu idéologique (comme pourrait l’être l’histoire par exemple,

38 Le philosophe Alain Badiou insiste sur le fait que l’adhésion d’Heidegger au parti nazi ne regarde que

la personne d’Heidegger, pour autant que l’œuvre heideggerienne ne contient pas de traces de l’idéologie nazie. Par analogie, nous pourrions indiquer que la pédagogie montessorienne n’est pas réductible à l’engagement de la pédagogue, puisque la pédagogie de la liberté montessorienne semble irréductible à toute utilisation pour une politique autoritaire.

qui n’arrive que plus tard dans l’histoire des pratiques, en Inde, avec son fils Mario). Ce fait est renforcé par le centrage initial de la pédagogie sur l’enfant petit, pour qui la question politique est moins prégnante.

On peut donc assister à au moins deux phénomènes. Le premier est qu’il n’y a pas, dans les textes montessoriens, de contenu politique. Rien donc ne va dans le sens de l’embrigadement des enfants ; mais rien ne va non plus dans le sens de la formation de l’esprit critique – si l’on les compare à d’autres pédagogies, même si la liberté enfantine et l’authenticité de l’enfant (ce qu’elle nomme souvent la « désinvolture ») sont deux guides pour la pratique, et sembleraient constituer des limites à ne pas franchir. Cette neutralité politique en fait une pédagogie adaptable à tous les contextes ; mais elle constitue de fait aussi une forme de fragilité et de disponibilité à la diffraction. Le second phénomène est que cette pédagogie ne semble pas pouvoir se limiter à une méthode précise, avec un programme clos sur les fondamentaux ; elle est aussi une démarche, celle de passer par la main et par le sensible. Cela permet des extensions de matériel et une application de cette démarche à d’autres domaines : c’est ainsi que la pédagogue présente, en 1935, la démarche du père Casulleros, qui utilise la méthode Montessori à l’école de Barcelone pour l’appliquer à l’éducation religieuse. Les « gestes et activités » des enfants ont, en classe, « des applications et

significations différentes » : ils sont ici étendus à la vie spirituelle. Bien entendu, la doctoresse donne son assentiment, indiquant que les exercices de sa pédagogie « portent en eux le germe de l’éducation religieuse, et […] semblent en être les prémisses » : « ces activités perfectionnent en effet

le petit enfant en le rendant calme, obéissant, attentif à ses mouvements, capable de silence et de recueillement » (Montessori, 1935, p.  22). L’éducation religieuse doit pourtant être sans doute déconnectée en partie de la question politique : la pédagogue considère que l’enfant, par-delà les appartenances religieuses, est un être sensible au sacré et au symbole. Il ne s’agit donc pas tant de transmettre les préceptes religieux que d’« ouvrir

l’âme [aux] voies de la vie », sans déroger au principe de liberté, de manière à ce que les enfants « n’éprouvent ni timidité, ni peur, et ne [soient] point

crédules » (p. 20 et 25).

Cela constituerait alors une sorte de quatrième hypothèse, qui indiquerait que l’absence de message politique clair encourage et permet la diffraction, ou l’utilisation par des contenus idéologiques divers : ce qui expliquerait comment la pédagogie montessorienne a pu se diffuser à la fois dans les réseaux protestants, catholiques, théosophiques, ceux des militants de l’Éducation nouvelle, ceux des militants de l’école publique.

Dans tous les cas, quelle que soit l’hypothèse privilégiée, force est de constater que la seule considération des idées pédagogiques ne suffit pas : la question des pratiques et du comment des pratiques est ici essentielle. Nous touchons alors à un silence possible de l’histoire de la pédagogie : car comment retrouver les traces des habitudes, des dispositions éthiques et corporelles des enseignants et des élèves, qui font toute la complexité d’un héritage pédagogique ?

Conclusion

Dans Phèdre, Socrate déplore que l’écrit ne puisse « se tirer d’affaire

tout seul » : une fois couché sur le papier, il passe de main en main et sert à tous les objectifs. La question reste bien entendu posée pour les pédagogues : leurs écrits et leurs lecteurs sont nécessaires à la diffusion des idées et des pratiques pédagogiques, mais prennent aussi le risque de la dilution, de l’appropriation pour d’autres objectifs et/ou de la diffraction.

C’est à un effet politique et pédagogique de la diffraction auquel nous assistons sans doute devant ce rendez-vous manqué avec Genève au début des années  1910. Celui-ci engendre  –  mais le processus était sans doute déjà à l’œuvre avant  1913  –  une stratégie d’internationalisation de la pédagogie Montessori selon la stratégie du double gain. D’un côté, nous pouvons voir à l’œuvre une diffusion laissant faire la diffraction ; de l’autre nous assistons à un cadrage précis des pratiques, adossées à une relation étroite aux recherches et aux évolutions de la pédagogie et à une distinction entre praticiens et propagandistes. Mais la diffraction peut également nous aider à appréhender autrement le cas de la diffusion de la pédagogie montessorienne sous Mussolini. Nous n’avons tranché pour aucune des trois hypothèses présentées dans ce texte – diffusion diffractée sur laquelle Maria  Montessori aurait gardé le silence par volonté d’accommodation avec le régime ; diffusion non diffractée mais au contraire « orthodoxe » dans les classes, supposant une dissociation entre engagements personnels et politiques de Maria Montessori elle-même et pratiques dans les écoles ; diffusion volontairement modifiée par la pédagogue pour coller aux intentions du régime  –  dans l’objectif, surtout, de montrer combien les pratiques concrètes comptent pour appréhender la réception et la diffusion d’une pédagogie.

L’historien ne peut que constater que la diffraction pose un certain nombre de problèmes du point de vue du pédagogue créateur d’un système singulier, évolutif, qu’il entend défendre, et qui porte son nom. Sont en jeu la qualité, la réputation, voire l’instrumentalisation d’idées pédagogiques. La création, dans le cas montessorien, d’un réseau institutionnalisé  –  l’Association Montessori Internationale  –  et le fonctionnement en relais de disciples – au sens d’« héritiers » – peut ainsi contrecarrer ou restreindre les effets néfastes de la diffraction. Il faut néanmoins souligner une difficulté, un paradoxe et un avantage.

La difficulté tient au fait que la diffraction reste inévitable lors d’une diffusion large d’une pédagogie, ne serait-ce que pour des raisons matérielles et géographiques : un petit noyau de disciples ne peut vérifier la congruence de toutes les pratiques et de tous les discours, surtout dans le cas d’une diffusion à l’échelle internationale. Dès lors, la double stratégie montessorienne  –  liens étroits d’un côté, silence sur la diffraction et les éventuels mauvais lecteurs de l’autre  –  peut être considérée comme un moyen de limiter les effets de la diffraction, sans pour autant l’entraver.

Car il en va d’un paradoxe : la diffraction est aussi un mal nécessaire. Les passeurs, même autoproclamés, anciens disciples, même tordant ou affaiblissant le message initial, voire même les dissidents, participent de la propagation des idées et des techniques. Il y aurait ici à creuser, par cette entrée, la question de la diffusion sous Mussolini : quelle stratégie aurait pu être adoptée par la pédagogue, du point de vue des pratiques ? Quelle marge de manœuvre le régime lui a-t-il laissée ?

La double stratégie montessorienne est ainsi sans aucun doute un avantage et témoigne d’une forme d’habileté tactique. Le choix de l’orthodoxie et du silence sur la diffraction est peut-être ce qui a permis sa diffusion sous Mussolini, en conciliant une alliance permettant l’expansion de la pédagogie sans toucher pourtant aux pratiques de classe, donc en garantissant une forme d’autonomie politique des pratiques. Cela est valable, dans une moindre mesure, pour l’Éducation nouvelle : la double stratégie montessorienne a sans aucun doute permis à Maria Montessori de contourner ces réseaux et les éventuelles dominations, notamment genrées, à l’œuvre entre pédagogue femme et pédagogues hommes  –  nous en avons esquissé quelques éléments dans ce texte. Ainsi, le fait de construire ses propres réseaux, sans chercher à s’associer ou à parlementer sur les pratiques avec les réseaux masculins a assuré une forme d’autonomie, une fois de plus, qui n’a pas manqué d’être critiquée comme du dogmatisme.

Cette autonomie de fait  –  mais était-elle théorisée, il faudrait l’étudier de manière plus approfondie ici  –  n’est pas sans rappeler celle qu’une philosophe précurseure des idées féministes, Mary  Astell, recommandait aux femmes au regard du tout nouveau contrat social qui les excluait : résister à la domination masculine en construisant ses propres réseaux amicaux et politiques, sans chercher à s’inclure dans la citoyenneté fraternelle masculine excluante. La comparaison, ici seulement esquissée, serait peut-être féconde pour penser la stratégie singulière de diffusion de la pédagogie Montessori.

Archives

Fonds général des Archives de l’Institut Jean-Jacques Rousseau, Genève (AIJJR/ FG. F6/28)

Fonds de l’Association Montessori Internationale (Amsterdam, Pays-Bas)

Sources publiées

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Bovet Pierre, (1932), Vingt ans de vie. L’Institut J.J. Rousseau de 1912 à 1932, Neuchâtel : Delachaux et Niestlé, Archives ouvertes de l’Université de Genève. Montessori  Maria, (1912), Les case dei bambini. La méthode de la Pédagogie

scientifique appliquée à l’éducation des tout petits, traduction abrégée, avec

l’autorisation de l’auteur, par Mme  H.  Gailloud, préface de Pierre  Bovet, Neuchâtel : Delachaux et Niestlé.

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Bovet-Montessori, lettres. Archives de l’Association Montessori Internationale, Amsterdam, Pays-Bas.

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Résumé : Ce texte décrit un différend opposant, au début de

l’internationalisation de la pédagogie montessorienne (1913), Pierre Bovet, alors directeur du tout jeune Institut Jean-Jacques  Rousseau, et Maria  Montessori. Il propose la notion de « diffraction » pour décrire, lorsqu’une pédagogie se diffuse, les effets de pertes, de dilution des intentions ou des pratiques, voire les déviations de la pensée initiale, pour saisir la nature et les contenus des transferts et des resémantisations à l’œuvre. Ce texte fait ainsi l’hypothèse que ce différend a contribué à l’internationalisation spécifique de la pédagogie Montessori, hors des canaux genevois et à distance de l’Éducation nouvelle. Mais il insiste également sur la place que doivent prendre les pratiques concrètes pour considérer, y compris du point de vue de l’historien, la diffusion d’une pédagogie.

Quel statut donner à un mauvais passeur ou à un mauvais lecteur d’une pédagogie, c’est-à-dire à un passeur diffusant une pédagogie diffractée ? Jusqu’à quel point les pratiques – en particulier les pratiques montessoriennes, décrites comme « scientifiques » et non idéologiques ou philosophiques  –  sont-elles affectées par le contexte politique ou idéologique qui les porte  –  par exemple dans le cas du régime mussolinien ? Jusqu’à quel point le pédagogue doit-il ou peut-il cadrer la diffraction, et comment l’historien peut-il considérer pratiquement cette question ?

Mots-clés : Maria  Montessori, pédagogie Montessori, internationalisation, Institut Jean-Jacques Rousseau, Pierre Bovet, transferts, diffraction.

Abstract : This text describes a contention between Pierre Bovet (director

of the Jean-Jacques Rousseau Institute, in Geneva) and Maria Montessori, at the beginning of the internationalization of this pedagogy (1913). It suggests the notion of « diffraction » in order to describe the effets of loss, dilution or deviation of intentions or practices, when a pedagogy