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« L’évaluation […] n’est pas un à-côté des apprentissages. Elle doit y être intégrée et en être l’instrument de régulation,

pour l’enseignant et pour l’élève. »135

« Elles [les évaluations sommatives internes] doivent permettre à l’enseignant de moduler son cours en fonction des difficultés de son public et de renvoyer aux élèves un message d’encouragement ou d’avertissement en fonction du travail fourni. »136

« L’évaluation devient une véritable étape du processus de négociation didactique. […] Par conséquent l’évaluation joue un rôle essentiel dans le maintien de la relation didactique indispensable à la poursuite des enseignements. »137 La relation didactique et la négociation didactique apparaissent en prise directe avec les pratiques de classe.

3.6.4.

Synthèse partielle : le contrat et la négociation

didactiques régulent les interactions évaluatives

Le contrat et la négociation didactiques ont été présentés dans une perspective d’apprentissage, mais dès lors qu’ont été introduites les notions de relation didactique et de transaction didactique, leur champ s’est étendu au fonctionnement de la classe, dans son intégralité. Ils sont donc présents dans les situations d’évaluation formelle. Ils jouent le rôle de régulateurs des interactions évaluatives (Reuter, 2007).

134 Crahay, M. (2007). Peut-on lutter contre l’échec scolaire ? Pédagogie en développement. Bruxelles, Paris,

février 2007. UFAPEC.

135

Extrait des programmes de collège. Bulletin officiel spécial n°6, 28 août 2008, p. 12.

136 op. cit. p. 151. 137

3.7. Deux questionnements anciens, ravivés :

la fiabilité de l’évaluation, le jugement

évaluatif

3.7.1.

Introduction

Pour clore cette revue de la littérature, l’état de la réflexion sur deux problématiques anciennes est nécessaire parce qu’elles ont un lien direct avec l’évaluation dans la classe :

x la fiabilité de l’évaluation. C’est la question que les premiers docimologues ont souhaité aborder en étudiant la notation des copies d’examen : c’est la question de l’existence de la note juste. Après la fiabilité du jugement évaluatif, De Ketele et Gérard (2005) étendent l’étude de la fiabilité à d’autres aspects. Des chercheurs nord- américains puis Pasquini (2013) examinent la fiabilité de l’énoncé de l’épreuve en se référant au concept d’alignement curriculaire ;

x le jugement évaluatif. C’est sur lui que se concentre traditionnellement l’attention des acteurs de l’école (élèves, professeurs, parents d’élèves). Pendant la quasi-totalité du XXe siècle, il s’est exprimé sous la forme d’une note dont la docimologie a montré tous les défauts et les insuffisances. Depuis le début du XXIe siècle, l’obligation d’évaluer des compétences pose des questions inédites : existe-t-il des niveaux de compétences ? Comment attester qu’un niveau de compétences est atteint ? Comment exprimer le jugement évaluatif concernant le niveau de compétences d’un élève ? Perrenoud (1994) montre la difficulté d’évaluer une compétence, inhérente à la notion de compétence elle-même ; il explicite une méthode en distinguant performance et compétence. Rey (2012) propose une gradation des compétences et une méthodologie pour construire des épreuves compatibles ainsi que les outils pour évaluer la production de l’élève.

3.7.2.

La fiabilité de l’évaluation

En raison du rôle social de l’évaluation, la question de sa fiabilité est étudiée depuis longtemps. Elle est abordée dans la littérature sous deux angles : la fiabilité de l’épreuve et la fiabilité du jugement évaluatif.

La fiabilité du jugement évaluatif est traitée à travers son objectivité : le jugement serait-il le même si l’on change d’évaluateur ? Dès ses premiers travaux, la docimologie donne une réponse négative à cette question.

« Les divergences dans l’évaluation traditionnelle » sont observables sur un lot de copies et aussi sur une même copie (Noizet & Caverni, 1978). Merle (1998) propose trois familles d’explications138

pour comprendre l’incertitude de l’évaluation professorale.

Pour minimiser l’impression d’une évaluation « loterie », Gérard (2002) défend la réalité de la subjectivité dans l’évaluation, en insistant sur la distinction entre subjectivité et arbitraire. Pour lui, l’évaluation est par essence-même subjective, en revanche l’évaluateur doit se garder de prendre des décisions arbitraires. De Ketele et Gérard (2005) aborde la problématique de la fiabilité de l’épreuve en fonction de paramètres contextuels : les résultats seraient-ils les mêmes si on recueillait l’information à un autre moment, avec un autre outil, par une autre personne ? Si le professeur-évaluateur est considéré comme un facteur de la fiabilité, ils ne mentionnent pas les élèves.

« La fiabilité est le degré de confiance que l'on peut accorder aux résultats observés : seront-ils les mêmes si on recueille l'information à un autre moment, avec un autre outil, par une autre personne, etc. ? Elle nous renseigne sur le degré de relation qui existe entre la note obtenue et la note vraie (Cardinet & Tourneur, 1985 ; Laveault & Grégoire, 1997,2002). Il ne faut cependant pas perdre de vue que la note vraie est une abstraction, un point de convergence souhaité indépendant des évaluateurs et des circonstances. »139

D’autres chercheurs suivent une autre voie pour explorer la fiabilité de l’évaluation, en étudiant l’énoncé, à travers des questions telles que : l’énoncé permet-il d’évaluer ce qu’il est sensé évaluer ? Les tâches prescrites sont-elles conformes aux curriculums, prescrit et réel ? Longtemps avant que le terme curriculum ne soit utilisé, Scriven (1967) cité par Amigues (1995), définit trois règles nécessaires pour assurer « l’homogénéité de l’évaluation » :

« Il faut qu’il y ait cohérence entre : les objectifs du programme et le contenu de l’enseignement ; le contenu de l’enseignement et les instruments de l’évaluation ; les objectifs du programme et les instruments d’évaluation. »140

138

« […] les incertitudes de la notation dans une situation d’anonymat de la correction ; la seconde montre l’effet du statut scolaire et social de l’élève sur l’évaluation de ses écrits ; la dernière, enfin, prend en considération l’effet de l’établissement de scolarisation et des intercations en classe […] » in Merle, P. (1998).

Sociologie de l’évaluation scolaire (1re. ed). Paris : PUF. p. 16.

139 De Ketele, J.-M. & Gérard, F.-M. (2005). La validation des épreuves d’évaluation selon l’approche par les compétences. BIEF.

Les chercheurs québécois (Bissonnette et al., 2006) reprennent l’idée de cohérence entre contenus d’enseignement, contenus de l’enseignement, évaluation sous l’appellation actualisée d’alignement curriculaire : leur objectif n’est pas de s’assurer de la fiabilité de l’évaluation mais d’une meilleure efficacité de l’enseignement et donc de la réussite des élèves.

Ils sont suivis par Roach, A., Bradley, N. Kurz, A. (2008), Matone et Sireci (2009) qui, dans leurs articles, prolongent leur présentation de l’alignement, par celle de différents outils ou méthodes qui permettent d’étudier la réalité de l’alignement entre les contenus d’enseignement et l’évaluation (methods for evaluating). En 2013, The glossary of éducation

reform141 définit le curriculum aligné, notion voisine de l’alignement curriculaire : dans cette définition, la primauté est donnée à la cohérence des contenus d’enseignement avec les contenus de l’enseignement ; ce n’est qu’en complément (but it also refers to coherence…), que l’évaluation ordinaire (assessment) et les examens ou tests standardisés (standardized

tests) sont cités.

Dans la littérature francophone, la notion d’alignement curriculaire est présentée dans un ouvrage d’auteurs québécois, publié en 2013, qui porte sur l’enseignement explicite142 : elle y

apparaît sous la forme Vérifier l’alignement curriculaire dans le chapitre 4 La préparation de

la gestion des apprentissages. Dans la logique de l’enseignement explicite143, l’évaluation

porte sur ce qui a été enseigné et doit être sans surprise pour les élèves.

Procéder de cette façon illustre bien cette stratégie de l’alignement curriculaire qui propose de traduire un curriculum prescrit en un curriculum enseigné et évalué […]. »144

En Europe, Pasquini (2013) présente une recherche145 dans laquelle il reprend les éléments de l’alignement curriculaire pour les exploiter en vue d’améliorer l’évaluation.

« Cette perspective, qui donne une attention particulière aux rapports étroits qui doivent exister entre l’objet d’enseignement-apprentissage (Barth, 2001), les objectifs d’apprentissages, les tâches données aux élèves et

141 Created by the Great Schools Partnership, the Glossary of education reform is a comprehensive online

resource that describes widely used school-improvement terms, concepts, and strategies for journalists, parents, and community members. http://edglossary.org.

142 Gauthier, C., Bissonnette, S., & Richard, M. (2013). Enseignement explicite et réussite des élèves : la gestion des apprentissages. Bruxelles : de Boeck. p. 119.

143 Ibid. p. 41 : « L’enseignement explicite est ainsi la formalisation d’une stratégie d’enseignement structurée

en étapes séquencées et fortement intégrées. » Ce sont les auteurs qui signalent enseignement explicite.

144 Ibid. p. 119.

145 Lorsqu’une équipe d’enseignantes développe des compétences évaluatives efficaces sans que l’évaluation

l’évaluation de leurs performances, permet de penser toute démarche évaluative en rapport avec l’enseignement dispensé et les parcours des élèves. »146

La recherche suisse Vers une différenciation des épreuves cantonales de référence de 10ème

année (2015)147 aborde le thème de l’alignement curriculaire en insistant sur les insuffisances

de certains contenus d’enseignement qui rendent délicate, sa mise en place.

« L’alignement des ECR [épreuve cantonale de référence] sur le plan d’études ne va pas de soi. En l’absence de standards de formation décrivant les connaissances et compétences attendues de façon suffisamment opérationnelle pour être plus facilement traduites en tâches ou en situation problèmes (Klieme, 2004), l’arrimage des tâches aux objectifs pédagogiques n’est jamais sûr à cent pour cent. »148

En conclusion, l’alignement curriculaire semble reprendre quelques éléments de base de la pédagogie par objectifs concernant la clarté des objectifs de l’évaluation. La notion n’est pas discutée dans les recherches sur l’évaluation peut-être parce que son objectif politico- économique de vérification de la qualité de l’enseignement en fait une notion hybride. Les dernières recherches utilisent la notion pour prévenir d’éventuelles dérives dans l’élaboration des énoncés.

3.7.3.

Le jugement évaluatif

3.7.3.1.

L’instabilité et la fragilité du