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3.1. Introduction

La conception dynamique de l’évaluation, issue de l’évaluation formative, est liée à la volonté de prendre en compte des réalités observables dans les salles de classe, dans leur entièreté : la préservation de la relation didactique ; la complémentarité entre les différentes formes d’évaluation ; les analogies et les complémentarités entre les phases d’enseignement- apprentissage et celles d’évaluation ; les interactions évaluatives.

Elle est aussi liée à l’objectif d’améliorer les apprentissages des élèves, en faisant en sorte que les professeurs utilisent les résultats de l’évaluation dans la gestion de leurs classes.

La réalité du processus évaluatif interactif complété par l’approche par les compétences dans la définition des contenus d’enseignement a différentes conséquences d’ores et déjà observables :

x le lexique change : pour les compétences, l’évaluation est plutôt certificative et non pas sommative ; ce sont plutôt les apprentissages que les acquis qui sont évalués ; x la classification entre les différents types d’évaluation est fragilisée : il y a peu de

différences entre une évaluation certificative donnant lieu à feedbacks et une évaluation formative notée. La distinction entre formatif et certificatif existe-t-elle encore ?

x dorénavant, la distinction entre apprentissage et évaluation dépend seulement de l’objectif visé. Confronter un élève à une situation complexe inédite peut être utilisé aussi bien dans une perspective d’apprentissage que d’évaluation.

En revanche, de nouvelles questions émergent progressivement :

x la plus grande parenté entre apprentissage et évaluation interroge la place du système didactique (professeur / élève / savoir) dans le processus évaluatif interactif ;

x le contrat didactique est le régulateur des interactions qui se développent dans la classe : de quelle façon est-il le régulateur des interactions évaluatives ?

Enfin, des questions oubliées ressurgissent :

x la question de la fiabilité de l’évaluation est posée à travers les tâches prescrites :

x la forme du jugement évaluatif quand il porte sur des compétences est-elle particulière ?

3.2. Première conséquence : des changements

lexicaux

La qualification des évaluations en fonction des objectifs visés est classique : l’évaluation est sommative, certificative, formative ou diagnostique. Ce vocabulaire tend à évoluer pour intégrer l’image du processus évaluatif et l’approche par les compétences : l’évaluation certificative remplace l’évaluation sommative.

Une autre qualification intègre la nature des objets évalués : connaissances ou compétences. Or, la réalité d’une compétence « acquise » comme peut l’être celle d’une connaissance acquise, est discutable comme l’ont montré les travaux visant à distinguer la performance et la compétence (Nagels, 2009 ; Perrenoud45, 1995). Considérer l’évaluation des acquis quand il s’agit de compétences l’est donc également. A ce constat d’inadaptation de l’expression

évaluation des acquis pour les compétences, s’ajoute un constat d’analogie entre les

apprentissages et l’évaluation : les élèves y sont confrontés à des situations. Il est plus conforme à la réalité des pratiques de considérer les apprentissages, comme objets d’évaluation. L’évaluation des apprentissages se substitue à l’évaluation des acquis.

3.2.1.

L’évaluation certificative remplace l’évaluation

sommative

La littérature a explicité ce que l’évaluation sommative et l’évaluation certificative ont en commun et ce qui les distingue :

x elles ont en commun, l’objectif de faire un bilan de ce que savent et savent faire les élèves à l’issue d’une période d’enseignement ;

45 « la performance observée serait un indicateur plus ou moins fiable de la compétence […]. Dans ce contexte,

la compétence est une promesse de performance de tel niveau moyen » Perrenoud, P. (1995). Des savoirs aux compétences : de quoi parle-t-on en parlant de compétences ? Pédagogie collégiale (Québec), Vol. 9, n°1. pp. 20-24.

x elles se distinguent par la publicité qui est faite de ce bilan : il peut être communiqué aux élèves concernés et à leurs familles, aux autres professeurs, à l’extérieur de l’établissement scolaire (employeurs). Classiquement, l’évaluation est dite certificative quand elle donne lieu à l’attribution d’un diplôme qui correspond à la forme la plus large et la plus officielle de publicité.

Cette distinction pourrait être encore opératoire

x si le qualificatif sommative n’était pas devenu inadéquat pour l’évaluation des compétences : en effet, il ne s’agit pas d’évaluer une « somme de savoirs », mais de valider un niveau de compétences ;

x si dans les faits, l’évaluation formelle ne donnait pas systématiquement lieu à une communication (au moins) aux élèves.

Ces deux réserves se traduisent dans la littérature par une tendance à abandonner progressivement l’expression d’évaluation sommative au profit de celle d’évaluation

certificative.

La littérature donne différentes définitions de l’évaluation sommative, assez convergentes (Amigues, 1996 ; De Landsheere, 1992 ; Talbot, 2009), alors même que l’origine anglo- saxonne par néologisation du mot sommative rend suspecte son utilisation (Scallon, 1999). L’expression d’évaluation certificative devient préférée alors qu’elle était réservée aux examens (Tourneur cité par Scallon, 1999). Les changements curriculaires en cours renforcent encore la nécessité de renoncer à l’évaluation sommative (Mottier Lopez, 2015) parce qu’un élève ne capitalise pas des compétences comme ses prédécesseurs pouvaient le faire avec des connaissances.

« L’évaluation intervient après un ensemble de tâches d’apprentissage constituant un tout, correspondant par exemple à un chapitre du cours, à l’ensemble du cours d’un trimestre, etc. Les examens périodiques, les interrogations d’ensemble sont donc des évaluations sommatives »46

« L’évaluation sommative désigne ce qui se rapporte à l’évaluation-bilan pratiquée à l’issue d’une séquence d’enseignement »47

« L’évaluation sommative clôt une phase d’apprentissage, sous la forme d’une vérification de l’acquis, en sanctionnant la performance, sous diverses formes, et en rejetant l’erreur dans le sens où elle n’est prise en compte que de manière négative […] »48

46 Landsheere, G. de. (1992). Dictionnaire de l’évaluation et de la recherche en éducation: avec lexique anglais- français (2. éd., et augm). Paris : Presses Universitaires de France.

« Dans les écrits francophones européens, on utilise de plus en plus l'expression "évaluation certificative". Au Québec, l'adjectif "sommative" a été adopté d'abord comme traduction libre du terme anglais. Il a été ainsi utilisé et toléré comme un néologisme. Le qualificatif est ambigu et suggère, à première vue, l'idée de somme. Était-ce là une façon de désigner l'évaluation continue qui procède de plusieurs résultats chiffrés cumulés en cours de route pour donner une somme ou un total. Et si on donne à l'évaluation sommative le sens d'une évaluation terminale, d'autres problèmes surgissent. L'évaluation sommative, telle que menée dans le cours de la formation des individus, peut être à la fois au terme et au début d'un processus. Par exemple, des résultats de fin d'année (évaluation sommative) peuvent servir à l'entrée d'une autre année pour prescrire des activités de rattrapage (évaluation diagnostique). Pour l'instant et pour un certain temps encore, on va se permettre de qualifier indifféremment l'évaluation de "sommative" ou de "certificative", tout en étant conscient que l'évaluation certificative recevra tôt ou tard ses lettres de noblesse. » 49

« Dans un article documenté sur le sujet, et à l’instar de plusieurs auteurs qui l’ont précédé, Tourneur (1985) préconise l’appellation "évaluation certificative". L’auteur affirme que, de tous les buts reconnus de l’évaluation sommative (notation, attestation, feedback, etc.), la certification des compétences constitue son rôle le plus spécifique et le plus important. (p. 11). Il y aurait donc là l’explication d’origine de l’expression "évaluation certificative". Tourneur reconnaît deux fonctions principales que remplit la certification : une fonction externe et une fonction interne. La certification

externe50 s’intéresse aux compétences telles qu’on veut les voir démontrer au terme de la formation et telles que

reliées à la vie sociale et au monde professionnel. La certification interne vise à attester les apprentissages à divers moments, dans le but de s’assurer que la personne est en mesure de progresser dans sa formation. »51

« Perrenoud (2001) définit comme suit ces différentes fonctions [de l’évaluation] :

[…]L’évaluation certificative. Elle garantit des acquis à l’égard de tiers, sur le marché du travail, à la rigueur à la fin d’un cycle d’études ; elle intervient à l’issue d’un cursus donné ; […] »52

« Nous privilégions le terme d’évaluation certificative plutôt que sommative, qui insiste plus à nos yeux sur la fonction visée. »53

3.2.2.

L’évaluation des apprentissages se substitue à