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La présente section vise à décrire de manière détaillée chacun des facteurs constitutifs de chacunes des sous-composantes des trois composantes majeures du MGDEC. En somme, cette section a pour objet de tenter d’apporter des éléments de réponse plus précis à la question de départ suivante : existe-t-il des pratiques éducatives plus efficaces que d’autres ?

2.7.1 Conditions préalables nécessaires à une gestion de classe efficace

Ainsi, afin de mettre en œuvre un système de gestion de classe pleinement efficace, il est nécessaire pour l’enseignant d’établir des conditions préalables à la mise en œuvre d’un tel système. Sans ces conditions préalables, l’efficacité des mesures visant à optimiser le temps alloué aux apprentissages, à optimiser l’engagement des élèves dans les activités scolaires, à prévenir l’apparition des comportements inappropriés des élèves en classe et à augmenter les comportements appropriés de ces derniers sera d’emblée compromise. Par conséquent, l’enseignant doit à la fois créer, maintenir ou rétablir une relation interpersonnelle de qualité avec ses élèves, s’appliquer à bannir toute une pléiade de conduites contre-productives, faire preuve d’autodiscipline en n’adoptant pas lui-même des comportements qu’il cherche à éliminer chez ses élèves et enfin, proscrire les pratiques coercitives quelles qu’elles soient.

2.7.1.1 Créer une relation enseignant-élève de qualité

La qualité de la relation enseignant-élève dépend des attitudes, des pratiques et des actions de l’enseignant lorsqu’il interagit avec ses élèves. En effet, les interventions de l’enseignant teintent, de manière positive ou négative, la qualité de la relation qu’il entretient avec ses élèves. Toutefois, chacune de ses interventions en classe dépend en grande partie des représentations qu’il a de ses élèves et de son rôle d’enseignant (Brophy, 1998; Chouinard, 1999 ; Kagan, 1992;

Legendre, 1993). Enfin, la qualité de cette relation, quelle qu’elle soit, influence les comportements ainsi que l’apprentissage des élèves (Canter et Canter, 1992 ; Curwin, 1992 ; Curwin et Mendler, 1988 a ; Ginott, 1971 ; Glasser, 1996 ; Kounin, 1971 ; Lépine, 1995 ; Redl et Wattenberg, 1951 ; Rogers, 1976).

Ainsi, un enseignant qui ne respecte pas l’amour propre et la dignité des élèves, se montre irrespectueux envers eux, les méprise, les humilie ou fait un usage excessif de mesures punitives, provoque par réaction, l’apparition de comportements inappropriés en classe. Les problèmes de comportement entraînent de la part des enseignants des pratiques coercitives inadéquates qui provoquent chez les élèves des réactions d’opposition qui donnent lieu à des pratiques encore plus inadéquates, car plus coercitives, et ainsi de suite jusqu’à influencer le climat de l’école. Enfin, « une fois établi, ce climat peut exercer son influence sur les pratiques, notamment en limitant les possibilités de changement, ce qui réduit les possibilités de mobilisation autour d’interventions visant à prévenir ou à faire s’atténuer des problèmes » (Massé, Desbiens, Lanaris, 2006, p. 61).

En somme, une relation de mauvaise qualité finit par déteindre à la fois sur la motivation, sur l’apprentissage et sur le comportement des élèves et influence négativement les pratiques éducatives ainsi que le climat de classe, ce qui a pour effet d’exposer toute la communauté éducative aux conséquences dramatiques qui y sont liées. À l’inverse, si l’enseignant respecte les besoins et les émotions de ses élèves, se montre courtois et bienveillant envers eux, respecte

leur amour propre et leur dignité, leur permet de sauver la face, s’il ne les critique pas, s’il fait abstraction des réprimandes et des punitions, s’il évite les luttes de pouvoir, s’il fait face aux crises et aux conflits de manière civilisée et calme, s’il ne cherche pas à se donner de l’importance, s’il suscite l’intérêt des élèves, les stimule et leur montre à tout moment qu’il souhaite les aider, le comportement de ces derniers en classe ainsi que leur apprentissage scolaire s’amélioreront naturellement (Curwin et Mendler dans Charles, 1997, pp. 225-248 ; Ginott dans Charles, 1997, p. 91-94 ; Glasser, 1996 dans Charles, 1997, p. 181).

Cela aura donc un effet positif sur la qualité de l’encadrement pédagogique, sur le climat de classe et sur la qualité de la relation enseignant-élève. Par conséquent, établir une relation positive avec ses élèves, y compris ceux présentant des comportements inappropriés en classe, est capital (Massé, Desbiens et Lanaris, 2006), notamment dans l’optique d’une gestion efficace de la discipline en classe.

2.7.1.2 Éviter les conduites enseignantes contre-productives

Si au regard de la littérature consultée il est nécessaire d’éviter certaines pratiques, il est néanmoins facile pour certains enseignants de glisser malgré eux dans le biais de certaines pratiques considérées comme coercitives. En effet, selon Chouinard (1999), « la réalité de la classe correspond rarement aux représentations et aux attentes des [enseignants] débutants [car] ils sont confrontés à des élèves parfois indisciplinés et peu motivés » (Chouinard, 1999, p. 500-501). Confrontés à cette réalité durant leurs premières années d’enseignement, les enseignants novices passent du stade de l’idéalisation au stade de survie (Chouinard, 1999). Puis, dans leur tentative de reprendre le contrôle de la situation, certains enseignants adoptent un type de gestion de classe plus autoritaire et deviennent plus sévères et plus punitifs (Chouinard, 1999). Parfois, certains enseignants « remettent leur efficacité en question et cherchent à compenser leur manque de connaissances en prenant pour modèle

un enseignant plus expérimenté de leur école ou en adoptant des approches dont ils se souviennent alors qu’ils étaient eux-mêmes élèves » (Chouinard, 1999, p. 500-501).

Or, les menaces, les réprimandes, les punitions et les exclusions de la classe sont des « solutions à court terme » à proscrire par les enseignants, car elles « s’avèrent souvent catastrophiques à long terme » (Curwin, 1992, p. 51, dans Charles p. 234). Elles ne font que réprimer le comportement non souhaité de l’élève, altèrent l’image de soi de l’élève et son désir d’apprendre, sa motivation, et l’incitent au final à désobéir de plus belle (Charles, 1997, p. 234).

2.7.1.2.1 Éviter l’indiscipline de l’enseignant lui-même

Afin de parvenir à mettre en œuvre une gestion de classe efficace, l’enseignant doit se montrer discipliné, ce qui signifie qu’il « ne doit pas adopter lui-même des comportements qu’il cherche à éliminer chez les élèves » (Charles, 1997, p. 79). Charles (1997), relate donc les comportements, les attitudes et les commentaires qui selon Ginott compromettent toute discipline en classe et qui caractérisent les enseignants manquant d’autodiscipline : « 1. Ils se mettent en colère : ils crient, jettent brutalement leurs livres sur le pupitre et font preuve de violence verbale ; 2. Ils injurient les élèves : “On dirait de vrais porcs ! Nettoyez-moi ça ! ” ; 3. Ils s’en prennent au caractère des élèves : “Jean, tu n’es qu’un paresseux” ; 4. Ils se montrent grossiers : “Asseyez-vous et fermez-la ! ” ; 5. Ils réagissent de manière exagérée. Par exemple, si Marie laisse tomber par mégarde le paquet de copies à distribuer, un enseignant qui manque d’autodiscipline s’exclamera : “Pour l’amour du ciel ! Tu n’es donc pas capable de faire quoi que ce soit comme il faut ! ” ; 6. Ils se montrent cruels : “Simon, sois très prudent en rentrant chez toi. Tu manques un peu de cervelle.” ; 7. Ils punissent l’ensemble de la classe lorsqu’un élève s’est mal comporté : “Étant donné que certains d’entre vous n’ont pas été capables de se taire durant la réunion, nous n’assisterons pas à la prochaine. ” ; 8. Ils profèrent des menaces : “Si j’entends un

seul mot, vous aurez tous un devoir supplémentaire à faire ce soir. ” ; 9. Ils font de longs sermons : “Il semble bien que plusieurs d’entre vous pensent que la poubelle est faite pour jouer au basket. Vous pouvez jeter vos déchets par terre dans la cour, mais ici, dans la classe…” ; 10. Ils mettent les élèves au pied du mur : “Qu’es-tu en train de faire ? Pourquoi fais-tu ça ? Il faut vraiment que tu sois stupide ! Excuse-toi immédiatement !” ; 11. Ils établissent des règles de façon tout à fait arbitraire, sans demander leur avis aux élèves » (Charles, 1997, p. 91-92).

2.7.1.2.2 Autres attitudes à proscrire par l’enseignant

Bien que nombreuses, ces attitudes ne sont pas les seules que les enseignants doivent proscrire en classe. En effet, la majorité des spécialistes en gestion de classe s’accordent pour dire que ces derniers ne doivent jamais : 1- laisser un élève perturber le groupe ou mal se conduire, sans réagir, car « cela lui montre qu’on ne s’intéresse pas suffisamment à lui pour lui signifier que son comportement est inacceptable » (Canter et Canter, 1992, p. 79 dans Charles, 1997, p. 139) ; 2- faire des sermons, la morale, culpabiliser l’élève, le dénigrer, lui soutirer des promesses, le rabaisser, ridiculiser, le dénigrer et exiger quoi que ce soit de lui de manière abrupte, car ces attitudes de l’enseignant vont provoquer une résistance de la part des élèves (Charles, 1997) ; 3- donner une étiquette peu flatteuse à l’élève (Charles, p. 79) car ce dernier aura tendance à se comporter conformément à l’étiquette qu’on lui aura attribuée. En effet, « en mettant une étiquette sur le caractère d’une personne, on pose des limites à la vision qu’elle a d’elle-même, de sa valeur et de son avenir. Cette attitude ne favorise jamais la compréhension, ne stimule pas l’imagination et n’encourage ni la croissance de soi ni la réussite » (Charles, 1997, p. 88) ; 4- utiliser les réprimandes, les sarcasmes et les retenues qui s’avèrent souvent catastrophiques à long terme,

« elles altèrent l’image de soi de l’élève et réduisent ainsi son désir d’apprendre, ce qu’il incite encore plus à désobéir » (Charles, 1997, p. 234) ; 5- commander, par exemple donner des consignes sans vouloir écouter un élève ; s’esquiver, par

exemple changer de sujet pour ne pas avoir à tenir compte des préoccupations d’un élève (Charles, 1997, p. 214).

2.7.1.2.3 Conséquences néfastes des menaces et des réprimandes

La majorité des spécialistes s’accordent pour dire que l’usage de réprimandes et de menaces par l’enseignant est à bannir, car ces énoncés sont susceptibles de nuire à l’apprentissage, de détériorer le climat dans la classe, d’entraîner des conséquences néfastes et durables pour les élèves comme des craintes excessives, des réactions négatives, de l’anxiété, de la peur, de la haine, de la vengeance (Redl et Wattenberg, 1951 ; Kounin, 1971 ; Glasser, 1986, 1992).

En effet, au-delà « de provoquer de l’anxiété et de la peur chez l’élève [les menaces] nuisent souvent à l’apprentissage et risquent d’entrainer une détérioration du climat dans la classe » (Charles, 1997, p. 28).

Quant aux commentaires dissuasifs, au même titre que les réprimandes, ils n’empêchent pas la propagation du comportement déviant au reste du groupe et n’ont que peu d’effet sur les élèves du secondaire. De plus, le fait que les enseignants ne mettent pas toujours à exécution leurs menaces « constitue trop souvent la cause de leurs problèmes de discipline » (Charles, 1997, p. 28) et

« contribue à éroder leur capacité de contenir les comportements indésirables de même que celle d’établir des relations positives avec la classe » (Charles, 1997, p. 28). Notons également que « les commentaires négatifs et les réprimandes ont le désavantage de servir de renforçateurs positifs plutôt que de punitions » (Massé, Desbiens et Lanaris, 2006, p. 184). Et pour ce qui est de « crier en s’adressant à un élève, lui donner des copies, des devoirs supplémentaires ou des retenues parce qu’il s’est battu ou qu’il a enfreint un règlement [ce] sont des conséquences qui n’ont pas de rapport logique avec le comportement fautif et qui ne permettent pas à l’élève d’apprendre le comportement approprié » (Massé, Desbiens et Lanaris, 2006, p. 185).

2.7.1.2.4 Conséquences néfastes de l’exclusion

Enfin, l’exclusion de la classe ainsi que toute mise à l’écart systématique de l’élève suite à un comportement inapproprié va à l’encontre de l’objectif éducatif de l’école car « l’apprentissage de la responsabilité ne peut se faire que par la pratique » (Curwin, 1992, p. 50, dans Charles p. 232). En effet, « personne ne dirait à un mauvais lecteur qu’il n’a pas le droit de jeter les yeux sur quelque livre que ce soit tant qu’il ne saura pas mieux lire. De façon analogue, on n’apprendra jamais à un élève à jouer de manière appropriée dans la cour de récréation en l’en excluant, ou à bien gérer son temps en planifiant tout pour lui » (Curwin, 1992, p. 50, dans Charles p. 232).

En effet, l’exclusion de l’élève de la classe n’a pas de valeur éducative (Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999) car l’exclusion « a souvent pour effet de priver d’école ceux qui en ont le plus besoin. Elle peut également prendre l’allure d’une récompense si cela permet de retirer les élèves d’une situation à laquelle ils ne veulent pas faire face » (Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999, p. 486).

En somme, les punitions sont nocives car elles poussent les élèves à manifester des comportements autodestructeurs et antisociaux (Gordon, 1989, dans Charles, p. 201). D’ailleurs Freinet, déjà à son époque, prenait parti contre les punitions et en soulignait l’inefficacité ainsi que les inconvénients comme la

« dégradation de la personnalité vouée à la rancune et à la haine, [le] dégoût définitif des pratiques scolaires humiliantes et perturbantes, [la] crainte maladive de la maîtresse, [le] manque de confiance en soi, [ainsi que] des sentiments d’échec qui entraînent repli affectif ou mauvaise conscience » (Freinet, 1978, p. 57).

Ainsi, « de nombreux spécialistes s’entendent pour dire que les effets secondaires indésirables risquent de l’emporter sur les intentions les plus louables des éducateurs » (Charles, 1997, p. 41). En effet, « s’il considère que la punition est injustifiée, malveillante ou trop sévère, l’élève éprouvera des sentiments

négatifs très difficiles à surmonter, susceptibles de le décourager d’apprendre et susceptibles même de l’amener à exercer des représailles contre l’enseignant et les autres élèves » (Charles, 1997, p. 41).

En somme, selon les spécialistes en gestion de la discipline en classe, il ne fait aucun doute qu’« il faut abandonner le recours à la coercition, parce que cette approche s’avère stérile » (Glasser dans Charles p. 180).

2.7.1.2.5 Conséquences néfastes des punitions

Les pratiques coercitives sont des solutions à court terme à bannir du fait des effets souvent catastrophiques et pervers qu’elles génèrent comme

« l’aggravation des comportements déviants (agressivité, vol, mensonge, etc.) et l’évitement de certaines situations ou personnes (école, parent, enseignant, etc.) (Massé, Desbiens et Lanaris, 2006, p. 184). De plus, la punition ne constitue pas une approche éducative, car elle ne permet pas à l’enfant d’acquérir « des attitudes et des comportements positifs » (Massé, Desbiens et Lanaris, 2006, p. 184).

D’ailleurs, les enseignants compétents n’utilisent les punitions qu’en dernier recours (Reynolds, 1992), notamment lorsque les autres méthodes ont échoué (Gordon, Ginott et Redl et Wattenberg, cités par Charles, p. 27-28), car premièrement, les punitions génèrent effectivement des effets négatifs indésirables et durables chez les élèves (Charles, 1997 ; Debarbieux et Montoya, 2007 ; Doyle, 1990 ; Ginott, 1971 ; Gordon, 1979, 1989 ; Redl et Wattenberg, 1951), deuxièmement, parce que leur utilisation laisse penser que « pour arrêter la violence, on fait preuve de violence puisque les punitions et l’exclusion, notamment, relèvent de cette nature » (Ramognino et al., 2001, p. 134) et troisièmement, « pire encore, la punition montre à l’élève que la force prime le droit, un principe auquel les éducateurs s’opposent vivement » (Charles, 1997, p. 41).

2.7.1.2.6 Conditions d’utilisation des réprimandes et des punitions

Pour ce qui concerne les remontrances, il semble que celles-ci s’avèrent efficaces à condition qu’elles soient accompagnées de contacts oculaires, d’un contact physique (main sur l’épaule), émises par un enseignant qui n’est pas éloigné de l’élève et si leur contenu comprend des informations utiles pour l’élève (Abramowitz, O’Leary et Futtersack, 1988). Ces auteurs montrent que les réprimandes de courtes durées sont plus efficaces pour éviter l’apparition de comportements indisciplinés que les réprimandes de longues durées.

Pour ce qui concerne la mise à l’écart du groupe ou l’exclusion de la classe, il est conseillé de « pas mettre l’élève dans l’embarras ni l’humilier ; on peut l’envoyer dans une autre classe, lui demander de s’asseoir au fond de la salle et lui interdire de participer aux activités » (Charles, 1997, p. 237). Toutefois, renvoyer tout simplement un élève chez lui est une mesure corrective qui ne présente aucun intérêt éducatif. En effet, « il est préférable d’obliger l’élève à venir à l’école, il devra se présenter dans la salle désignée et faire les travaux assignés.

Il pourra réintégrer la classe lorsqu’il sera capable d’indiquer comment il compte s’y prendre pour travailler » (Charles, 1997, p. 237).

Pour ce qui concerne les punitions, le recours à celles-ci est conseillé à la suite de comportements agressifs et violents (Walker, Colvin, et Ramsey, 1995).

En effet, « utilisée avec parcimonie, la punition peut être bénéfique, surtout lorsqu’elle est intégrée dans un programme d’intervention plus large basé principalement sur le renforcement positif (Kazdin, 1989) » (Massé, Desbiens et Lanaris, 2006, p. 184).

Toutefois, l’enseignant qui a recours à la punition doit s’assurer que l’élève comprenne que la punition qu’il reçoit est « une conséquence morale et compréhensible d’un comportement inacceptable » (Charles, 1997, p. 27) et qu’elle vise à l’aider à adopter un comportement approprié (Charles, 1997). Par conséquent, si l’élève « se rend compte que l’enseignant est bien intentionné, il

s’en voudra au moins un peu d’avoir perdu la maîtrise de lui-même et ne dirigera pas sa colère ou son hostilité vers l’enseignant » (Charles, 1997, p. 27).

De plus, afin qu’une sanction soit réellement éducative, elle « doit permettre […] au prix d’un investissement particulier, une restauration de son image et un accueil dans le groupe sur de nouvelles bases » (Meirieu, 2015, p. 189). De plus, il est nécessaire que la punition donnée paraisse utile à l’élève et qu’elle lui semble acceptable (Meirieu, 2015). Il est important également que l’élève « puisse en espérer des gains [et] que la classe soit perçue pour lui comme un lieu de réussite possible. Sans ce préalable, toute sanction apparaîtra comme une peine inutile » (Meirieu, 2015, p. 189).

Cependant, « l’existence et l’application, même systématique, de sanctions, n’ont jamais ni jugulé la récidive ni empêché des actes interdits de se commettre » (Cyprien, 2007, p. 52 cité par Ayral, 2009). De plus, les mesures coercitives ne sont pas les seules à la disposition des enseignants lorsque les élèves manifestent des comportements inappropriés en classe. En effet, la revue de la documentation scientifique effectuée dans le cadre de cette recherche a permis de mettre en exergue de nombreux autres moyens d’action plus efficaces et ayant des effets positifs à la fois sur l’apprentissage et sur le comportement des élèves.

2.7.2 Interventions préventives des comportements non désirés en classe

Cette section vise à présenter les habiletés et les pratiques constitutives de la deuxième composante majeure du MGDEC.

Bien que placées dans la catégorie des mesures préventives, certaines des interventions suivantes, comme les habiletés de vigilance, de supervision active et de chevauchement sont, en raison de leur nature complexe, chargées intrinsèquement d’autres fonctions, notamment des fonctions de correction. En effet, mises en œuvre lorsqu’aucun comportement déviant ne se manifeste, ces

techniques agissent comme des mesures préventives. Toutefois, mises en œuvre lorsqu’un élève commence à manifester ou est en train de manifester un comportement non souhaité, ces mesures permettent à la fois la correction du comportement déviant, le rappel et la révision de la règle enfreinte pour cet élève et pour les autres élèves de la classe. Mises en œuvre lorsque le comportement déviant s’est déjà manifesté, ces techniques permettent également la prévention à la fois de la répétition de ce comportement par l’élève déviant et la prévention de la contagion de ce comportement au reste des élèves du groupe.

2.7.2.1 Habiletés à diriger et à organiser la classe

Cette section a pour objet de présenter les six aptitudes dont l’enseignant efficace fait preuve dans le cadre de la direction et de l’organisation de sa classe.

2.7.2.1.1 Vigilance (withiness)

Les enseignants efficaces dans le contrôle de leur classe, c’est-à-dire ceux qui mènent à bien les deux fonctions fondamentales de leur métier, c’est-à-dire la transmission des matières scolaires et la transmission des règles sociales, semblent « avoir des yeux derrière la tête » et « savent à tout moment ce qui se passe en tout point de la classe » (Charles, 1997, p. 61). Cette capacité de gestion dont font preuve certains enseignants est appelée la « vigilance ». Selon Charles (1997), « [Kounin (1977)] l’a classé parmi les facteurs qui permettent de reconnaître les enseignants efficaces de ceux qui ne le sont pas » (Charles, 1997, p. 61). En effet, « selon Kounin, cette caractéristique contribue grandement à réduire la fréquence du mauvais comportement » (Charles, 1997, p. 57) et est associée positivement à la réussite des élèves (Cruickshank, 1990 ; Doyle, 1986).

Cependant, comme « la vigilance ne produit des effets que si les élèves sont convaincus que l’enseignant sait réellement ce qui se passe partout dans la classe », ce dernier « doit donc leur faire savoir qu’il a conscience de tout soit par son comportement soit verbalement » (Charles, 1997, p. 61).

Selon Kounin, cette vigilance est d’autant plus efficace si : 1- l’enseignant

Selon Kounin, cette vigilance est d’autant plus efficace si : 1- l’enseignant