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Cette section a notamment pour objet de tenter d’apporter des éléments de réponse à la question de départ suivante : Comment l’école peut-elle s’y prendre pour réduire le phénomène d’indiscipline des élèves en classe et pour mener à bien la mission fondamentale qui lui incombe ? À cet effet, nous tenterons de définir et de décrire en détail le concept de gestion de classe.

2.2.1 Nécessité de la gestion de classe

Au regard des éléments évoqués supra, les concepts de discipline scolaire, d’indiscipline scolaire et d’éducation s’avèrent étroitement liés entre eux.

En effet, « la classe est […] précisément ce lieu où l’on s’instruit en se socialisant et où l’on se socialise en s’instruisant » (Prairat, 2013, p. 83). Toutefois, enseigner relève parfois d’un réel défi pour les enseignants, notamment à cause des comportements indisciplinés des élèves et de leur non-engagement dans les activités scolaires (Desbiens134; Dubet et al., 1999 ; Estrella, 1992 ; 1996 ; Legault, 2001 ; Prairat, 2013).

En effet, « les classes deviennent […] parfois des “ cocottes-minutes ” où la pression affective monte très vite, où la surenchère dans les propos compromet toute possibilité de travail, où rien ne vient lester les relations et leur permettent de se structurer autour d’un travail commun » (Meirieu, 2015, p. 165).

Souvent, « l’enseignant, ébranlé par les diverses remises en cause de son rôle et de ses modes d’action pédagogique, n’a plus de modèle stable » (Postic, 2014, p. 295). Même si il « opte, par conviction, pour des principes généreux, tels que le respect de la liberté de l’enfant, le développement de son autonomie, il ne sait plus quelles structures mettre en place, parce qu’il se rend compte que la solution pédagogique est insuffisante à elle seule, et qu’elle doit se relier à une transformation de l’ensemble du système éducatif » (Postic, 2014, p. 295).

En effet, selon certains, « la vie de classe peut être appréhendée comme un jeu d’interactions complexes de sorte que la discipline se joue aussi dans la qualité des interventions et la justesse des échanges, dans ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler la conduite de classe » (Prairat, 2013, p. 72-73). Cette conduite de classe ou tenue de classe selon le MEN, communément appelée gestion de classe ou classroom management dans la littérature scientifique internationale anglo-saxonne, notamment nord-américaine, réfère globalement aux actions mises en place par l’enseignant pour créer ou pour maintenir un environnement propice aux apprentissages (Brophy, 2006). Ce « registre », décrit par Prairat

134 Nadia Desbiens, Bulletin du CRIFPE, vol.18, n°3, déc. 2011. Dossier: L’éducation des élèves présentant des difficultés de comportement, p. 4 : www.crifpe.ca/download/verify/1259

(2013) en termes d’ « habileté interactive, mélange d’à-propos et de technique », ne doit selon l’auteur « ni être oublié ni minoré » (Prairat, 2013, p. 73). En effet, dans un milieu aussi complexe qu’une classe (Doyle, 2006), le recours à une gestion éducative des comportements d’indiscipline des élèves en classe, nécessite pour l’enseignant de posséder non seulement des connaissances, mais aussi des compétences solides en matière de gestion de classe efficace (Chouinard, 1999, 2001 ; Doyle, 2006 ; Evertson et Weinstein, 2006 ; Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999 ; Weber, 1986), notamment parce que le simple maintien de l’ordre n’est ni suffisant ni pertinent dans une perspective éducative scolaire. En effet, même si « l’ordre est nécessaire à l’apprentissage et à la réussite scolaire […] il n’en constitue pas pour autant la garantie absolue » Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999, p. 475). En effet, bien qu’une classe soit en apparence ordonnée, il est possible que certains élèves qui s’y trouvent ne soient pas entièrement engagés dans la tâche scolaire du moment sans pour autant qu’ils ne perturbent le bon déroulement du cours (Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999). Ce type de « non-engagement passif ne pose aucun problème au maintien de l’ordre, mais il faut s’interroger quant à ses répercussions sur l’apprentissage des élèves » (Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999, p. 475).

Par conséquent, si l’enseignant souhaite mener à bien la mission qui lui incombe dans les meilleures conditions possibles, il est crucial qu’il développe des compétences spécifiques en gestion de classe efficace (Léveillé et Dufour, 1999 ; Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999 ; Nault et Fijalkow, 1999 ; Prairat, 2013 ; Stoughton, 2007). Toutefois, qu’entend-on concrètement par gesion de classe ?

2.2.2 Définition préliminaire de l’expression gestion de classe

Selon la littérature, l’expression gestion de classe « renvoie chez les chercheurs à des définitions quelque peu différentes les unes des autres » (Fijalkow et Nault, 2002, p. 233). Cela est également le cas « dans les institutions scolaires aussi bien que dans les établissements de formation des maîtres »

(Fijalkow et Nault, 2002, p. 233). Ainsi, le fait que l’expression gestion de classe couvre « un vaste répertoire de comportements professionnels de l’enseignant […]

invite à la prudence afin que cette compétence, considérée comme une compétence de base pour exercer la profession enseignante, ne soit pas un fourre-tout » (Fijalkow et Nault, 2002, p. 233).

Pour certains auteurs, « savoir gérer une classe fait partie des compétences indispensables à l’exercice du métier d’enseignant » (Fijalkow et Nault, 2002, p. 41-42). Toutefois, « si ce fait est couramment admis, ce que cette compétence recouvre ne manque pas de poser problème » (Weil-Barais et Dumas Carré, dans Fijalkow et Nault, 2002, p. 41-42).

Pourtant, « un certain nombre d’auteurs s’accordent pour considérer que la gestion de classe comprend la mise en place des conditions de base propices à l’apprentissage : elle en serait un préalable. Elle ne serait pas l’approche didactique des contenus, elle en serait l’enveloppe, celle-ci comprenant l’organisation matérielle, sociale et interactive de la salle de classe » (Fijalkow et Nault, 2002, p. 234).

Par conséquent, il est possible de « considérer la gestion de classe comme une compétence préalable aux autres compétences attendues des enseignants et déclarées essentielles pour devenir enseignant » (Fijalkow et Nault, 2002, p. 234).

Ainsi, tous s’accordent pour dire que la gestion de classe constitue un préalable essentiel à l’enseignement, car « en effet comment un enseignant pourrait-il arriver à produire un apprentissage, même si les contenus sont bien hiérarchisés, s’il n’a pas le contrôle des comportements des élèves en classe ? Les meilleurs manuels scolaires ne font pas nécessairement les bons enseignants » (Fijalkow et Nault, 2002, p. 235).

Dans les faits, le « contrôle des comportements en classe » a suscité l’intérêt de nombreux chercheurs de la communauté scientifique internationale

depuis près de soixante-cinq années maintenant. Les recherches, menées au primaire comme au secondaire, ont alimenté de nombreuses publications sur la gestion de classe (Archambault et Chouinard, 1996 ; Burden, 1995 ; Charles, 1997 ; Chouinard, 1999 ; Curwin et Mendler, 1988; Doyle, 1986 ; Dreikurs, 1972 ; Emmer et Stough, 2001 ; Glasser, 1992 ; Jones et Jones, 1995 ; Kounin, 1971 ; Legault, 2001 ; Léveillé et Dufour, 1999 ; Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999 ; Massé, Desbiens et Lanaris, 2006 ; Nault, 1994, 1998 ; Nault et Fijalkow, 1999 ; Redl et Wattenberg, 1951 ; etc.).

Cette abondante documentation scientifique illustre bien la somme des connaissances disponibles permettant notamment aux enseignants débutants ou expérimentés, de s’appuyer sur des bases scientifiques solides pour faire face de manière éducative aux problèmes de discipline dans leur classe et transmettre sereinement leur(s) matière(s) à leurs élèves. Cependant, la multitude d’approches, de modèles et de techniques de gestion de classe disponibles complexifie l’appréhension de ce domaine par les enseignants (Randhawa et Michayluk, 1985), d’autant plus que les résultats des recherches sont dispersés dans la documentation scientifique (Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999).

2.2.3 Compétence complexe difficile à acquérir

Au regard des enjeux et des conséquences dramatiques liés aux comportements indisciplinés des élèves, il ne fait aucun doute que la gestion de classe revêt un caractère crucial, d’autant plus que la plupart des comportements inappropriés qui apparaissent en classe peuvent être réglés en classe même (Slavin, 1988), notamment par une gestion de classe efficace. Toutefois, régler ces comportements de manière éducative, en prévenant leur apparition, en évitant leur développement ou leur persistance tout en favorisant un climat de classe propice aux apprentissages et à la réussite scolaire des élèves est une tâche difficile à plus d’un titre.

En effet, elle englobe un ensemble d’habiletés et de pratiques pédagogiques à mettre en œuvre par l’enseignant dans un environnement complexe. Selon Kounin (1977) la gestion de classe « est un art complexe qui nécessite l’application de techniques particulières, au moment opportun et de la façon appropriée, de manière à procurer aux élèves des expériences d’apprentissage qui ne les mènent pas à la saturation » (Charles, 1997, p. 70).

Cette tâche nécessite notamment pour l’enseignant de répondre à la fois aux besoins individuels des élèves ainsi qu’à ceux du groupe dans son ensemble, y compris les siens (Chouinard, 2001 ; Redl et Wattenberg, 1951 ; Weber, 1986 ; etc.).

De plus, cette tâche est complexifiée par le caractère multidimensionnel de la classe, à savoir la multiplicité d’évènements et d’activités qui s’y produisent (parfois simultanément), l’imprévisibilité des évènements qui se produisent, l’aspect public des comportements dérangeants, l’installation d’habitudes et d’interactions routinières entre les élèves et l’enseignant, mais aussi la nécessité pour l’enseignant d’intervenir avec rapidité et efficacité en réaction à ce qui se produit en classe (Doyle, 2006).

À ce titre, selon la littérature scientifique, la gestion de classe au secondaire se complexifie à la fois en raison de l’obligation scolaire pour tous jusqu’à seize ans et en raison du rassemblement dans les salles de classe d’élèves issus de milieux sociaux, culturels et économiques très différents (Léveillé et Dufour, 1999). La gestion de classe est également complexifiée par

« l’intégration scolaire des jeunes en difficulté d’apprentissage et de comportement […] sans compter une quantité importante de jeunes victimes de mauvais traitements ou ayant des problèmes d’ordre affectif et familial (Léveillé et Dufour, 1999, p. 519). Par conséquent, « toute cette disparité implique des styles et des rythmes d’apprentissage différents ; elle force l’enseignant à se doter d’un éventail de stratégies d’enseignement et d’apprentissage fort imposant afin de répondre à ces divers besoins » (Léveillé et Dufour, 1999, p. 519).

Toutefois, même si enseigner aux élèves perturbateurs est une tâche des plus ardues (Avramidis et al., 2000 a, 2000 b ; Charles, 1997 ; Melby, 1995), et que la gestion efficace d’une classe est un exercice d’une grande complexité (Doyle, 2006), certains enseignants y parviennent mieux que d’autres (Archambault et Chouinard, 2009 ; Charles, 1997 ; Chouinard, 1999 ; Evertson et Weinstein, 2006 ; Martineau, Gauthier et Desbiens, 1999).

La suite de ce chapitre vise précisément à documenter les pratiques de ces enseignants qui parviennent, mieux que d’autres, à gérer efficacement leur classe. Toutefois, avant de passer en revue ces pratiques et ces techniques, nous allons premièrement présenter succinctement les fondements théoriques qui ont servi de soubassement au concept de gestion de classe. Deuxièmement, nous donnerons une définition plus précise de ce que l’on entend aujourd’hui par gestion de classe et nous décrirons les fonctions qui se rattachent à ce concept.

Enfin, nous présenterons brièvement les recherches préliminaires en gestion de classe ainsi que les principaux modèles scientifiques théoriques et pratiques de gestion de la discipline en classe.

2.2.4 Fondements théoriques de la gestion de classe

Au cours de la seconde moitié du XXe siècle, de nombreuses recherches en psychologie et en sciences de l’éducation, principalement menées aux États-Unis, ont mis en avant des stratégies ou des techniques éducatives autres que les pratiques coercitives pour prévenir ou gérer les comportements perturbateurs des élèves en classe. Le concept de gestion de classe a considérablement évolué au cours des quarante dernières années, notamment en fonction de trois principaux courants théoriques : le courant humaniste, le courant béhavioriste et le courant cognitiviste (Doyle, 1986 ; Jones, 1996 ; Larrivée, 1999 ; Legault, 2001 ; Lusignan, 2001 ; Nault et Fijalkow, 1999), laissant alors apparaître « de nouveaux mouvements et par conséquent de nouveaux modèles » (Legault, 2001, p. 31).

Toutefois, ces différentes conceptions de la gestion de classe « ne se sont pas

succédées ni remplacées, mais elles se sont chevauchées en exerçant mutuellement leur influence » (Archambault et Chouinard, 2003, p. 10).

Selon Legault (2001), les spécialistes de la gestion de la discipline à l’école s’accordent pour penser que la classification des principaux modèles de gestion de classe des dernières décennies s’articule autour de trois tendances disciplinaires établies en fonction du contrôle accordé à l’enseignant et du degré d’autonomie consenti à l’élève : la tendance non interventionniste (humaniste), la tendance interventionniste (béhavioriste) et la tendance interventionaliste (mixte).

Ainsi, tout modèle de gestion de classe s’inspire d’une conception particulière de l’éducation, de l’élève et de son apprentissage (Legault, 2001).

2.2.4.1 Approche non interventionniste (humaniste)

Sous l’influence des courants de pensée de la psychologie humaniste, l’accent a été mis sur les réactions des enseignants face aux comportements d’indiscipline des élèves. L’objectif est d’aider ceux qui manifestent des comportements inappropriés à travers l’augmentation de leur estime de soi, la construction de leur identité, le développement de leur autonomie et de leur capacité de décision.

Pour y parvenir, l’adulte, centré sur l’élève, établit avec celui-ci une relation interpersonnelle chaleureuse de qualité et lui fournit ainsi un milieu caractérisé par la compréhension, l’ouverture et l’empathie favorisant son développement. L’enseignant aide à l’établissement de rapports harmonieux entre tous les individus qui forment le groupe et favorise la mise en place de conditions propices au succès, comme l’établissement de règles claires et la responsabilisation des élèves à l’endroit de celles-ci (Lusignan, 2001). Il évite de porter des jugements sur l’élève et l’encourage à se rendre socialement responsable, à entretenir des perceptions de soi positives, à exprimer librement ses émotions, ses problèmes et ses valeurs.

L’attitude adoptée par l’enseignant, qui ne joue qu’un rôle d’animateur et de facilitateur dans la résolution du problème de discipline, peut être qualifiée de non interventionniste à l’égard de l’élève. Carl Rogers (1972) et Thomas Gordon (1979), sont les auteurs les plus représentatifs de ce courant humaniste ayant influencé la gestion de classe à cette époque (Archambault et Chouinard, 2003 ; Legault, 2001), et cette approche se retrouve dans les modèles de Ginott (1972), de Glasser (1986, 1990), de Curwin et Mendler (1988, 1992) et celui de Dreikurs, 1972.

2.2.4.2 Approche interventionniste (béhavioriste)

Selon Legault (2001), parallèlement à l’essor des conceptions issues du courant humaniste, une autre approche de la gestion de classe s’est imposée : l’approche comportementale. Les tenants de cette approche postulent que le comportement est influencé par les antécédents (stimuli) et par les conséquences et que le comportement déviant est une réponse aux conditions de l’environnement. D’ailleurs, selon cette approche « tout comportement, qu’il soit normal (adapté, positif, sociable) ou “anormal” (inadapté, négatif, perturbateur, déviant), est appris et déterminé par ses conséquences » (Massé, Lanaris, Desbiens, 2006, p. 178).

Par conséquent, un comportement suivi immédiatement d’une récompense sera reproduit plus fréquemment ; un comportement disparaît quand il ne fait plus l’objet d’un renforcement ; et un comportement suivi de près par une conséquence risque de moins réapparaître. L’objectif de cette approche est de modifier le comportement de l’élève, de diminuer les comportements inappropriés, de favoriser la manifestation des comportements souhaitables (Massé, Lanaris, Desbiens, 2006, p. 178) afin notamment de favoriser l’apprentissage scolaire de l’élève.

Pour y parvenir, l’enseignant utilisera soit le conditionnement opérant (contrôle par les conséquences), soit par le conditionnement répondant (contrôle par les stimuli), en mettant en œuvre les quatre principes d’apprentissage dégagés par les béhavioristes : le renforcement positif, le renforcement négatif, la punition positive et la punition négative. Cette approche peut être qualifiée d’interventionniste car l’organisation et la gestion matérielle et pédagogique relèvent de la responsabilité de l’enseignant, lequel détient seul l’autorité dans la classe (Lusignan, 2001), ainsi que le pouvoir de punir ou de récompenser l’élève.

La tâche de l’enseignant consiste à déterminer les règles du jeu, les règlements et les conséquences, à planifier, organiser et contrôler l’environnement de l’élève dans le but de contrôler entièrement son comportement.

Cette approche, dont Skinner (1953 ; 1971) peut être considéré comme l’un des pionniers, se retrouve notamment dans de nombreux modèles (Axelrod, 1977 ; Canter et Canter, 1976 ; Jones, 1996 ; Kazdin, 1989 ; Meichenbaum, 1977). Au fil du temps, ce mouvement est passé d’un béhaviorisme orienté vers le renforcement des comportements externes et visibles à une forme de béhaviorisme plus axé sur l’apprentissage des compétences sociales et le développement de l’autocontrôle (Archambault et Chouinard, 2009 ; Legault, 2001). En effet, à partir des années 90, le courant sociocognitif a, à son tour, influé sur les approches de la gestion de classe. Les travaux sur les stratégies d’apprentissage et la métacognition, ainsi que ceux portant sur l’apprentissage social et la motivation scolaire, ont contribué à l’émergence d’une définition plus large du concept de gestion de classe.

Ces travaux (Jones et Jones, 1995) ont en effet permis de jeter un éclairage nouveau sur le processus de prise en charge par l’élève du développement de ses compétences et sur les conditions facilitant ce processus (Archambault et Chouinard, 2009). Ce néo-béhaviorisme considère la classe comme un environnement particulier. Les tenants de cette approche s’intéressent alors non seulement à la façon dont les enseignants organisent cet

environnement, établissent les règles, instaurent les procédures, mais aussi à la gestion des activités de la classe ainsi qu’au contexte d’apprentissage (Evertson, Emmer, Clements et Worsham, 1994 ; Jones et Jones, 1995).

2.2.4.3 Fusion des approches : la tendance interventionaliste

Selon Legault (2001), l’approche interventionaliste se situe au centre d’un continuum entre les pôles interventionniste (béhavioriste) et non-interventionniste (humaniste). L’objectif est de résoudre de manière éducative, dans le respect et la bienveillance, les problèmes de discipline, de développer le sens des responsabilités de l’élève au regard de ses actes ainsi que l’engagement de ce dernier dans les activités scolaires, et d’arriver à un consensus lors de la résolution d’un problème, une solution commune juste et acceptable pour tous.

Pour y parvenir, l’enseignant devra être présent, vigilant, consistant, bienveillant, ferme et persévérant. Ses interventions visent l’équilibre dans ses relations avec l’élève, tout en délimitant la liberté d’actions et de comportements de celui-ci. Si la limite est dépassée, l’élève est confronté par l’enseignant, qui assume alors l’orientation de la résolution du problème. Plus la situation deviendra difficile, plus l’enseignant prendra le contrôle de la démarche en aidant l’élève à répondre à son problème. Glasser (1965 ; 1977 ; 1986) et Dreikurs (1968 ; 1972) ont produit des modèles favorisant cette approche qui se veut démocratique et axée sur le développement de l’enfant ainsi que sur l’autodiscipline (Legault, 2001.

p. 40).

En somme, le concept de gestion de classe n’a cessé d’évoluer et de s’élargir au fil du temps, passant de la simple réaction aux comportements d’indiscipline à une visée de prévention et de réduction des comportements inadaptés (Nault et Fijalkow, 1999). Au fur et à mesure, on en est venu à considérer la gestion de classe comme un environnement social et à s’intéresser au groupe plutôt qu’aux individus qui le composent (Doyle, 1986). Par ailleurs, la

perturbation de la classe est opérationnalisée sous l’angle d’engagement à la tâche que l’élève est censé exécuter (Estrela, 1994), et le concept de gestion de classe regroupe un vaste ensemble de pratiques pédagogiques, allant de l’animation et du questionnement des élèves à la mise en place des règles de la classe, en passant par la supervision du groupe, ainsi que le choix et la conduite des activités pédagogiques, etc. (Archambault et Chouinard, 2009). Ce changement de cap met ainsi en évidence de nouvelles techniques et habiletés démontrées par les enseignants jugées efficaces pour transiger avec les groupes et prévenir les problèmes de discipline.

2.2.5 Définitions actuelles du concept de gestion de classe

Si le concept de gestion de classe était « limité à l’origine aux problèmes de discipline et d’ordre, [il] inclut maintenant une foule d’actes préalables à l’instauration d’un climat propice à l’apprentissage » (Nault et Fijalkow, 1999, p. 462). Selon les mêmes auteurs, « si elle n’est pas maîtrisée, cette compétence de base, sur laquelle se greffent la plupart des autres compétences d’un enseignant, conduit à des frustrations, voire à l’abandon, celui qui veut faire carrière dans l’enseignement » (Nault et Fijalkow, 1999, p. 462). Aujourd’hui, pour la plupart des auteurs consultés, le concept de gestion de classe dépasse largement la discipline et l’exercice de l’autorité (Legault, 1999) et les principales définitions actuelles du concept de gestion de classe sont très proches les unes des autres.

En effet, pour Doyle (1986), la gestion de classe regroupe l’ensemble des pratiques éducatives mises en œuvre par l’enseignant afin de créer et de conserver des conditions propices à l’apprentissage et à l’enseignement dans sa classe. Selon Archambault et Chouinard (2003), il s’agit de l’ensemble des mesures prises par l’enseignant afin d’établir, de maintenir et, au besoin, de restaurer dans la classe des conditions propices au développement des compétences des élèves. Pour Evertson et Randolph (1995), la gestion de classe