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D’une manière générale, le tissu prescriptif relatif au travail enseignant est composé d’un ensemble de textes de sources et de statuts divers.

Pour Reynaud, « les règles d’en bas », à savoir les règles que les travailleurs se donnent eux-mêmes font partie aussi du prescrit. Dans le cadre de cette recherche, nous ne retenons dans la définition du prescrit que ce que Reynaud appelle « les règles d’en haut », celles qui émanent de l’administration scolaire ou de services, d’instances ou de cadres auxquels elle délègue le pouvoir de prescrire.

Nous avons pu observer, dans le cadre de notre recherche, que les textes prescrivant le métier d’enseignant à Genève sont élaborés par des instances et institutions différentes :

Textes orientant la pratique enseignante (école primaire, Genève)

Instances qui élaborent les textes

Déclaration relative aux finalités et objectifs de

l’école publique. Conférence intercantonale de l’instruction

publique de la Suisse romande et du Tessin, 30 janvier 2003.

Déclaration politique « Vers un Espace romand de la formation ».

Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin, 15 avril 2005.

Convention scolaire romande. Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin, le 21 juin 2007.

Accord intercantonal sur l’harmonisation de la

scolarisation obligatoire. Signé au nom de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique

Harmos (Harmonisation de la scolarité obligatoire) entre en vigueur en 2011-2012.

(Isabelle Chassot-présidente et Hans Ambühl-secrétaire), 14 juin 2007.

Plan d’études romand (PER) – en cours

d’élaboration. Conférence intercantonale de l’instruction

publique de la Suisse romande et du Tessin, introduction prévue en 2010.

Le document romand « Objectifs et activités préscolaires » (1993)

Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin Le code de déontologie Elaboré par le Syndicat des Enseignants

Romand, 2004.

La constitution fédérale de la Confédération

suisse Parlement fédéral

La loi sur l’instruction publique C 1 10 (LIP) et

son article 4 . Arrêtée par le grand Conseil (Parlement) de la République et Canton de Genève, 1977.

Règlement fixant le statut des membres du corps

enseignant: B5 10.04. Arrêté par le Conseil d’Etat de la République et canton de Genève (pouvoir exécutif), 2002.

Règlement de l’enseignement primaire C 1 10.21.

Arrêté par le Conseil d’Etat de la République et canton de Genève (pouvoir exécutif), 1993.

Règlement relatif à la construction, à la rénovation et à la transformation des locaux scolaires de l’enseignement primaire, C 1 10.11.

Arrêté par le Conseil d’Etat de la République et canton de Genève (pouvoir exécutif) 28 juin 1989.

Règlement sur les Conseils d’établissement, C1

10.19. Arrêté par le Conseil d’Etat de la République et

canton de Genève (pouvoir exécutif), 17 décembre 2007.

Les 13 priorités pour l’instruction publique genevoise (document cité ici mais pas encore paru lors de la recherche proprement dite).

Editées par le chef du département de l’instruction publique Charles Beer à Genève, 2005.

Les directives internes adressées au corps enseignant de l’école primaire genevoise.

Actuellement, les directives sont accessibles publiquement sur le site Etidep.

Editées par la Direction de l’enseignement primaire, Département de l’instruction publique, République et Canton de Genève, 2008 - remises à jour chaque année.

Les objectifs d’apprentissage de l’école primaire

genevoise. Edités par la Direction de l’enseignement

primaire, Département de l’instruction publique, République et Canton de Genève, 2000.

Les propositions pour une planification de l’enseignement. (français, ouverture aux langues, écriture-graphisme, mathématiques, expression plastique et artistique, éducation musicale, éducation physique, sciences de la nature, espace-géographie, temps-histoire-cycle élémentaire et moyen).

Edités par le Service de l’enseignement, Direction de l’Enseignement Primaire, 2003- 2004.

Le Plan d’études de l’enseignement primaire

L’encadrement et l’évaluation des maître-sse-s spécialistes en période probatoire - MS en PP.

Guide méthodologique.

Edité par la Direction générale de l’enseignement primaire, Enseignement primaire genevois, Département de l’instruction publique, et Stéphane Jacquemet conseiller externe pour le compte de Phronesis Consulting et la collaboration de formateurs, des responsables des maîtres spécialistes et des inspecteurs, Service des ressources humaines, Carmen Perrenoud Aeby, mars 2005.

Certaines prescriptions ont force de loi au sens strict du terme. D’autres ne sont ni des lois ni des règlements au sens juridique de ces concepts, mais des règles édictées par une autorité à laquelle la loi et le règlement donne ce pouvoir explicitement ou implicitement.

Il y a des textes généraux qui présentent les principes et d’autres textes qui complètent ces derniers. Pour saisir ce qui est prescrit, il faut donc descendre ou remonter dans une hiérarchie de textes. On remontera lorsque, partant d’un prescrit détaillé, on cherche les principes qui le fondent.

On descendra lorsqu’on cherchera à comprendre comme des principes généraux sont déclinés en règles plus détaillées et concrètes.

Les textes prescriptifs sont parfois très ambigus quant à leur caractère contraignant. Il en va ainsi, par exemple, de la Charte et du cahier des charges de l’enseignant primaire (Foehr, FPSE, 2007).

Selon les juristes:

La charte est un écrit solennel où l'on consigne les droits, où l'on règle les intérêts, où l'on s'engage sur des valeurs. Les chartes étaient à l'origine des textes politiques (...).

Pratiquement, le mot en lui-même ne signifie rien : la présentation médiatique où l'intitulé juridique n'exprime rien : et plus encore les procédés de fabrication ne révèlent rien (Koubi, 1988, p. 162) ».

On l’utilise dans la modernisation des administrations publiques :

(…) au renouveau du service public et surtout, à la réforme de l’Etat. (...) L'insertion du terme dans les modalités de gestion des services du personnel dans les administrations et dans les centrales en avaient préparé le mouvement. (Ibid., p.178) ».

En conséquence, comme le mot charte concerne un ensemble de documents et d'activités diversifiées, il ne peut acquérir une signification globale et cohérente utile au développement des doctrines juridiques. En tout état de cause, il consiste à rassembler, dans un même intitulé brumeux, un fatras de documents et de textes, plus ou moins bien rédigés, qui entremêlent des données et des finalités trop diverses pour constituer une catégorie juridique formelle, rationnelle et incontestable (Ibid., p.168).

En synthèse :

(…) les chartes ne disposent en elles-mêmes ni de valeur normative, ni de validité juridique (…). Elaborer une charte revient, en général, à proposer ou présenter des modes de comportements ou des modalités de régulation des conduites ou activités à côté du Droit, en dehors d’une fonction de réglementation officielle (Ibid., p.174) . Quand au cahier des charges, Cornu (1987) le présente ainsi:

(…) au sens général, il s'agit d'une mission officielle comportant pouvoir et devoir d'agir (...). C’est une expression générique désignant des documents par lesquels l'administration détermine unilatéralement les conditions ou certaines des conditions auxquelles sont subordonnées soit la jouissance d'une autorisation ou d'une permission (ex : cahier des charges d'une concession de mines), soit l'exécution d'un contrat (ex : cahier des charges d'une concession de service public ou d'un marché public) (p.140)

Le simple fait d’intituler un document « Charte et cahier des charges » entretient le doute et la confusion. Le document intitulé Charte et cahier des charges de l’enseignant primaire est-il indicatif ou impératif ? Dans son entier ou pour certaines parties ? Pour le déterminer, peut-être faudrait que se développe une jurisprudence à partir de cas litigieux, de sorte à savoir si quelqu’un qui ne respecte pas ces textes commet une faute professionnelle et en paie le prix ou s’il s’écarte simplement d’une doxa, ce qui ne justifie pas une sanction formelle.

Nous devrons faire avec de telles ambiguïtés. Elles ne tiennent pas à la source du prescrit – c’est toujours l’autorité scolaire –, mais aux modalités d’énonciation. Cette ambiguïté, si elle n’est pas délibérée, présente pour l’autorité l’avantage de normaliser les conduites en se défendant contre toute accusation d’autoritarisme ou de contrôle tatillon. Nous examinerons à ce propos la question des méthodes et moyens d’enseignement, formellement non imposés, mais parfois tellement recommandés que la différence devient minime pour les destinataires du prescrit.