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6. La prise en charge de la théorie de l’esprit

6.3. Des propositions développementales et fonctionnelles

Il est à noter que les études portant sur les prises en charge avec la technique des « bulles de pensée » ont eu des résultats plus positifs avec une meilleure généralisation que les études portant sur l’entraînement aux tâches de théorie de l’esprit (Nader-Grosbois. N, 2011). Ainsi, nous pouvons suggérer le fait qu’une prise en charge plus fonctionnelle aurait un effet positif sur le développement de la théorie de l’esprit chez des enfants avec TSA.

6.3. Des propositions développementales et fonctionnelles

6.3.1. La proposition de Howlin et al

Howlin et al ont mis en place une méthode d’apprentissage permettant de contourner les biais de généralisation rencontrés par leurs prédécesseurs et qui ne se focalise pas sur une seule tâche en théorie de l’esprit. Elle prend en charge l’ensemble des compétences mentalistes. Elles ont été divisées en trois sous-groupes : la compréhension des émotions, la compréhension des états informationnels et la compréhension du jeu de faire semblant. Pour chaque sous-groupe de compétences, les auteurs ont mis en place cinq niveaux qui se basent sur le développement typique de la théorie de l’esprit.

Pour le module « compréhension des émotions », le niveau 1 consiste en la reconnaissance d’une expression faciale sur une photo, le niveau 2 en la reconnaissance d’une expression faciale sur un visage schématique, le niveau 3 sur les émotions dans une situation (retrouver une émotion à partir d’une petite histoire), le niveau 4 sur la reconnaissance des émotions basées sur les désirs et le niveau 5 sur les émotions basées sur les croyances (retrouver une émotion en prenant en compte les désirs ou les croyances à partir d’une histoire soutenue par une image).

Le module « compréhension des états informationnels » permet de travailler la prise de perspective puis la compréhension des croyances et des fausses croyances à partir de petites mises en situation. Par exemple, pour aborder la prise de perspective visuelle, les auteurs présentent une carte à deux facettes à l’enfant. Elle est posée entre les deux participants, chaque participant ne voyant qu’une seule face de la carte. Après avoir montré la carte à l’enfant, nous lui demandons ce que chacun voit. Un autre exemple sur la fausse croyance consiste à créer des petits scénarios avec des personnages où une fausse croyance sera mise en place (sur le principe de Sally et Anne).

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Enfin, dans la section « compréhension du jeu de faire semblant », les auteurs apprennent aux enfants le jeu sensori-moteur, fonctionnel, puis le jeu de faire semblant à travers différentes situations de jeu spontané dans lesquelles nous pourrons aiguiller les enfants dans la construction des scénarios.

Par ailleurs, les auteurs afin d’éviter le biais de l’absence de généralisation préconisent de présenter des activités courtes et adaptées au niveau de l’enfant. Pour cela, ils proposent de s’appuyer sur le développement typique de la théorie de l’esprit. Enfin, pour eux, l’apprentissage dans des situations naturelles est plus efficace qu’un entraînement analytique d’une tâche précise de la théorie de l’esprit. C’est pourquoi, ils proposent de travailler à partir de mises en situation, de scénarios sociaux et de jeux (Howlin. P et al, 2010).

6.3.2. La proposition de Monfort

Monfort a mis en place un modèle interactif de la prise en charge des troubles pragmatiques chez l’enfant qui peut s’appliquer à la prise en charge de la théorie de l’esprit et qui répond au souci de la généralisation des acquis. Les enfants avec TSA apprenant peu par imprégnation, il est essentiel de leur enseigner les techniques mises en jeu dans l’utilisation de la théorie de l’esprit pour les aider à mieux comprendre leur environnement et à être plus adaptés dans les situations. Dans cet apprentissage explicite, plusieurs types d’activités sont proposés afin de permettre une généralisation :

Des activités formelles dans lesquelles l’adulte enseigne explicitement les notions de théorie de l’esprit,

Des activités fonctionnelles qui se caractérisent comme des situations cadrées mais plus ouvertes que les activités formelles et qui permettent à l’enfant de mettre en application des notions apprises un peu plus tôt,

Des situations naturelles et d’échange pour contrôler la bonne utilisation des acquis. Dans le niveau des « activités formelles », Monfort propose de travailler la théorie de l’esprit à partir de situations de manipulation, expliquant directement l’état mental. Par exemple, pour travailler la notion de fausse croyance, nous pouvons présenter à l’enfant une boîte d’allumettes dans laquelle nous aurons au préalable inséré un objet quelconque. Nous demandons ensuite à l’enfant s’il sait ce qu’il y a dedans et comment il le sait. Par la suite, nous lui montrons le contenu de la boîte et nous lui reposons la même question. D’autres

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activités du même type peuvent être proposées pour les différents niveaux de la théorie de l’esprit comme la prise de point de vue, ou encore la compréhension des désirs.

Dans le niveau des « activités fonctionnelles », Monfort propose de travailler à partir d’analyse pragmatique de scénarios interactifs avec des personnages. Nous pouvons créer avec l’enfant des petits scénarios au cours desquels nous interrogeons l’enfant sur les désirs, croyances, émotions et intentions des personnages en fonction de ce que nous voulons travailler. Nous pouvons, par la suite, travailler sur des analyses de situations sociales, sur des dessins, des histoires en image ou encore de courts textes écrits (Monfort. M et al, 2005). Carole Gray avec son ouvrage « Comic Strip Conversations » est l’instigatrice des scénarios sociaux. Elle a créé un certain nombre d’histoires sociales en images sur lesquelles un adulte demande à l’enfant d’identifier ce qu’une personne fait, dit et pense. Cette technique permet de travailler la théorie de l’esprit en même temps que d’autres habiletés sociales.

Nous pouvons, enfin, selon Monfort, proposer à l’enfant des jeux dans lesquels les compétences mentalistes sont nécessaires. Ce sont des jeux du type devinettes, cache-cache, etc. L’enfant pourra alors faire appel aux compétences mentalistes qu’il aura travaillées auparavant.

Selon Monfort, cette démarche demande de savoir à tout instant où l’enfant en est dans cette rééducation afin qu’il puisse bien acquérir et généraliser ces compétences. Ainsi, Monfort préconise de se baser sur la zone proximale de développement de la théorie de Vygotsky. Ceci nous permet de savoir ce que l’enfant peut faire seul et les domaines pour lesquels il a encore besoin d’aide (Monfort. M et al, 2005) :

Finalement, il semblerait que ce soit la fusion entre les activités formelles et fonctionnelles qui favorise le développement de la théorie de l’esprit chez les enfants avec TSA. Par ailleurs, il sera nécessaire de varier les activités pour les aider à généraliser (Nader-Grosbois. N, 2011).

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Problématique et

hypothèses

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